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12/09/2022 | FRANCE | N°19/05448

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 12 septembre 2022, 19/05448


12/09/2022





ARRÊT N°



N° RG 19/05448

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLTE

MD/RC



Décision déférée du 15 Octobre 2019

Tribunal de première instance d'ALBI

17/00252

M. [O]

















[H] [J]





C/



Compagnie d'assurances M.A.F.















































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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



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à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [H] [J]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Myriam KHOUINI-VIE, avocat au barreau de TOULOUS...

12/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/05448

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLTE

MD/RC

Décision déférée du 15 Octobre 2019

Tribunal de première instance d'ALBI

17/00252

M. [O]

[H] [J]

C/

Compagnie d'assurances M.A.F.

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [H] [J]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Myriam KHOUINI-VIE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Compagnie d'assurances M.A.F.

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Olivier MASSOL de la SELARL MASSOL AVOCATS, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 04 Avril 2022, en audience publique, devant M. DEFIX et Mme LECLERCQ, magistrats chargés de rapporter l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La Sci Résidence Isatis a fait édifier un ensemble immobilier situé [Adresse 1] (81) et a souscrit une assurance dommages-ouvrage auprès de la Mutuelle des Architectes Français (Maf).

Suivant contrat du 14 novembre 2001, elle en a confié la maîtrise d'oeuvre à M. [B], architecte, également assuré auprès de la Maf.

Les travaux ont été confiés à diverses entreprises, et notamment le lot carrelage des terrasses et faïences à M. [H] [J], exerçant sous l'enseigne CLC, assuré auprès d'Axa France Iard.

Le chantier a été ouvert le 18 novembre 2002 et s'est achevé le 26 avril 2007, date de la réception des travaux.

La Sci a vendu des appartements en l'état futur d'achèvement.

Suite à la constatation de désordres par les copropriétaires, M. [T] a été désigné pour réaliser une expertise, par ordonnances de référé des 14 décembre 2007, étendue à divers intervenants à l'acte de construire les 28 novembre 2008, 6 mars 2009 et 8 juillet 2009. Le rapport d'expertise a été déposé le 13 mai 2011.

Plusieurs procédures au fond ont été engagées. Deux jugements ont été par la suite rendus les 17 juin 2015 (entre la Sci Résidence Isatis, les constructeurs et leurs assureurs) et 4 février 2016 (entre le syndicat des copropriétaires de la résidence Isatis, les copropriétaires, M. [B] et la Maf).

En exécution de ces décisions, la Maf a réglé au syndicat des copropriétaires et aux propriétaires pris individuellement les sommes de 675 385,72 euros TTC sur le volet décennal et 152 902,37 euros TTC au titre de la responsabilité contractuelle.

Par acte d'huissier en date du 20 janvier 2017, la Maf, dans le cadre des recours qu'elle a entendu exercer contre les différents constructeurs, a notamment fait assigner M. [J].

Par conclusions d'incident transmises le 24 juillet 2018, M. [J] a sollicité la nullité de ladite assignation et la condamnation de la Maf au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance en date du 23 novembre 2018, le juge de la mise en état a :

- déclaré l'assignation délivrée à M. [J] le 20 janvier 2017 'recevable',

- débouté M. [J] de sa demande de nullité de l'assignation,

- condamné M. [J] au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure pénale,

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état physique du 14 décembre 2018 et dit que M. [J] doit conclure sur le fond,

- condamé M. [J] aux entiers dépens de l'incident, dont 'distraction' au profit de Me Van Driel Lise.

Par jugement contradictoire du 15 octobre 2019, le tribunal de grande instance d'Albi a :

- rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut de fondement juridique, de l'autorité de la chose jugée, du défaut d'intérêt à agir et de la prescription,

- déclaré irrecevable la demande formée contre la Sa Sma,

- condamné, au titre de la responsabilité délictuelle, les parties suivantes à payer les sommes suivantes à la Maf :

* in solidum la Sarl Baita et son assureur la Sa Axa Entreprises Iard, les sommes de 1 935,01 euros au titre des travaux de reprise et 193,50 euros au titre de la maîtrise d'oeuvre pour les désordres liés aux bruits d'écoulement sous réserve de la franchise contractuelle qu'Axa Entreprises Iard est en droit d'opposer à la Sarl Baita,

* M. [J] exerçant sous l'enseigne CLC, la somme de 59 725,85 euros au titre des désordres liés aux coulures, mousses et infiltrations en sous-face des balcons,

* M. [N], la somme de 430,56 euros au titre des désordres des carrelages et plinthes intérieurs,

* la Sas Albert & Fils, la somme de 2 909,86 euros au titre des finitions gros oeuvre et zinguerie,

- condamné la société Mma à garantir la Sas Albert & Fils de la condamnation prononcée, sous réserve d'une franchise de 1 306 euros,

- fixé la créance de la Maf, au titre de la responsabilité délictuelle pour les désordres liés au défaut de vieillissement des garde-corps des balcons, au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Mmi, à la somme de 15.500,10 euros, sous réserve d'une déclaration de créance ; condamne Groupama d'Oc à garantir cette somme au profit de la Maf,

- condamné in solidum aux dépens :

* la Sarl Baita et son assureur Axa Entreprises Iard,

* la Sarl Mmi prise en la personne de son liquidateur judiciaire, et son assureur Groupama d'Oc,

* M. [J] exerçant sous l'enseigne CLC,

* M. [N],

* la Sas Albert & Fils et son assureur Mma,

et accordé à Maître Van Driel, avocat de la Maf, et à Maître Clamens, avocat de la Sas JP Fauche, de la Sarl Pistre et Fils et de son assureur la Sa Axa Entreprises Iard, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- débouté l'ensemble des parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- rejeté toute autre demande.

-:-:-:-:-:-

Par déclaration en date du 19 décembre 2019, M. [H] [J] a relevé appel du jugement rendu par le tribunal de grande instance d'Albi du 15 octobre 2019, en ce qu'il a :

- rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut de fondement juridique, de l'autorité de la chose jugée, du défaut d'intérêt à agir et de la prescription,

- condamné, au titre de la responsabilité délictuelle, M. [J], exerçant sous l'enseigne CLC, à payer à la Maf la somme de 59 725,85 euros au titre des désordres liés aux coulures, mousses et infiltrations en sous-face des balcons,

- condamné M. [J], exerçant sous l'enseigne CLC, in solidum avec les autres parties à l'instance, aux dépens,

- accordé à Maître Van Driel, avocat de la Maf, et à Maître Clamens, avocat de la Sas JP Fauche, de la Sarl Pistre et Fils et de son assureur la Sa Axa Entreprises Iard, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- débouté l'ensemble des parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande.

Il a également relevé appel, par ce même acte, de l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état d'Albi du 23 novembre 2018, en ce qu'elle a :

- déclaré l'assignation délivrée à M. [J] le 20 janvier 2017 recevable,

- débouté M. [J] de sa demande de nullité de l'assignation,

- condamné M. [J] au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure pénale,

- condamné M. [J] aux entiers dépens de l'incident, dont distraction au profit de Maître Van Driel Lise.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 17 mars 2020, M. [J], appelant, demande à la cour, au visa des articles 480 du code de procédure civile et 1240 du code civil, de :

- infirmer la décision rendue par le tribunal de grande Instance d'Albi le 19 décembre 2018 en ce qu'il :

* a rejeté les fins de non-recevoir tirées du défaut de fondement juridique, de l'autorité de la chose jugée, du défaut d'intérêt à agir et de la prescription,

* l'a condamné au paiement de la somme de 59.725,85 euros au titre des désordres liés aux coulures, mousses et infiltrations en sous-face des balcons,

* l'a condamné in solidum avec les autres défendeurs aux dépens et accordé à Maître Lise Van Driel, avocat de la Maf, et à Maître Clamens, avocat de la Sas JP Fauche, de la Sarl Pistre et Fils et de son assureur la Sa Axa Entreprises Iard, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

* a débouté l'ensemble des parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

* a rejeté toute autre demande,

Statuant à nouveau,

À titre principal,

- constater que les demandes de la Maf se heurtent à l'autorité de la chose jugée, et déclarer son action irrecevable,

- constater que l'action de la Maf contre lui est prescrite,

Subsidiairement,

- dire que le rapport [T] est inopposable à l'appelant,

- débouter purement et simplement la Maf de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Plus subsidiairement encore,

Vu les fautes commises par M. [B],

- dire que sa responsabilité sera limitée à une part résiduelle, compte tenu des fautes de M. [B],

En tout état de cause,

- condamner la Mutuelle des Architectes Français au paiement de la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

M. [J] soutient que les demandes formulées à son encontre ont déjà été déclarées irrecevables par le tribunal de grande instance d'Albi le 17 juin 2015 dès lors que cette juridiction a déclaré l'action du maître de l'ouvrage prescrite à l'égard de l'assureur de M. [J] de sorte que l'assureur dommages-ouvrage ne saurait engager une pareille action contre l'entepreneur assuré.

Il prétend que les faits sur lesquels l'action est présentée ont été qualifiés par l'expert de non conformité contractuelle et d'une mauvaise mise en oeuvre de la part de l'entreprise CLC de sorte que les désordres déjà apparents au jour de la réception l'étaient au jour du rapport de l'expert déposé le 13 mai 2011, date du point de départ de l'action, prescrite à date de l'assignation initiant la présente procédure.

Il considère ensuite que le rapport d'expertise lui est inopposable pour n'avoir jamais participé à ses opérations auxquelles il affirme n'avoir jamais été appelé cela d'autant qu'il a été hospitalisé. Sur le fond, il oppose le fait que l'architecte, en sa qualité de responsable du chantier et de ce fait, chargé de surveiller la bonne exécution des travaux, ne lui a fait aucun reproche, le procès-verbal de réception ayant été signé sans réserve.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 22 juillet 2020, la Mutuelle des architectes de France (Maf), intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a été débouté M. [J] de ses fins de non-recevoir tirées de l'autorité de la chose jugée et de la prescription,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a déclaré le rapport d'expertise judiciaire opposable à M. [J],

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné M. [J] à l'indemniser au titre des coulures, mousses et infiltrations en sous-face des balcons,

- confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a condamné in solidum M. [J] aux entiers dépens,

- le réformant pour le surplus,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 99 543,08 euros,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- le condamner aux entiers dépens.

La Maf rappelle qu'elle a été condamnée à indemniser le maître de l'ouvrage du fait de défauts d'exécution imputables à diverses entreprises dont celle de M. [J] et soutient qu'elle est parfaitement fondée à exercer un recours en garantie à leur encontre, l'appelant ne démontrant pas que la Maf aurait précédemment exercé un recours en garantie à son encontre peu important qu'elle ait été tenue d'indemniser le maître de l'ouvrage sur le fondement de la garantie décennale ou de la responsabilité contractuelle et la qualification des désordres retenus.

Elle rappelle ensuite au soutien de la recevabilité de son action que celle-ci, de nature délictuelle, a été engagée dans le délai applicable de cinq ans dont le point de départ doit être fixé au jour de l'assignation en paiement délivrée à la Maf comme l'a décidé le premier juge, soit en décembre 2012 de sorte que, l'assignation à l'endroit de M. [J] ayant été formalisée le 20 janvier 2017, l'action n'est pas prescrite cela d'autant qu'il a été jugé par la cour d'appel de Montpellier le 4 juillet 2013 que le délai de forclusion décennal s'applique à toutes les actions récursoires contre les locateurs d'ouvrage, qu'elles soient de nature délictuelle ou contractuelle.

Elle considère que l'inopposabilité de l'expertise ne peut être invoquée par M. [J], convoqué aux opérations d'expertise à sa bonne adresse déclarée et défaillant, l'intéressé ne justifiant d'aucun motif valable d'empêchement à la date de ces convocations et pouvant toujours discuter en cours d'instance les fautes retenues par l'expert.

La Maf soutient que c'est à tort que le premier juge a fixé à 60 % la part de responsabilité de M. [J] alors que ce dernier ne peut invoquer aucune faute de l'architecte pour s'exonérer d'une partie de sa responsabilité, l'intimée précisant que la jurisprudence a jugé que l'architete chargé d'une mission de direction des travaux n'était pas tenu d'une obligation de veiller à la bonne exécution des travaux et de vérifier le respect par chaque entreprise des éléments figurant au permis de construire ni d'être présent et d'effectuer un contrôle permanent du chantier.

-:-:-:-:-

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 mars 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 4 avril 2022.

MOTIVATION :

1. Il sera constaté à titre liminaire que la cour n'est, aux termes des dernières conclusions de l'appelant, saisie d'aucun chef de l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal de grande instance d'Albi, rendue le 23 novembre 2018.

2. Il sera ensuite rappelé que la Maf prise en sa qualité d'assureur décennal et responsabilité contractuelle de l'architecte (M. [B]) a fait assigner par acte d'huissier des 20, 23, 25 26 janvier et 3 février 2017 divers entrepreneurs et leurs assureurs aux fins de les voir condamner à garantir les condamnations prononcées in solidum contre elle-même et son assuré par le tribunal de grande instance d'Albi ayant rendu deux décisions, l'une le 17 juin 2015 entre la Sci Résidence Isatis, les constructeurs et leurs assureurs et l'autre le 4 février 2016 entre le syndicat des copropriétaires de la résidence Isatis, les copropriétaires, M. [B] et la Maf.

S'agissant du recours exercé contre 'la société CLC' qui est en réalité M. [H] [J], artisan exerçant en nom personnel, qui a constitué avocat et conclu en son propre nom, la Maf et M. [B] ont été condamnés, par jugement du 4 février 2016, in solidum à payer au Syndicat des copropriétaires la somme de 99 543,08 euros au titre de 'coulures, mousses, infiltrations en surface des balcons' au sujet desquelles l'expert judiciaire avait considéré qu'il s'agissait d'une non-conformité contractuelle et d'une mauvaise mise en oeuvre imputable à l'enteprise CLC. La Maf en sa qualité d'assureur responsabilité civile de M. [B] a ainsi sollicité la condamnation de M. [J] à lui rembourser cette somme qu'elle a réglée au syndicat.

Le jugement du 17 juin 2015 avait par ailleurs débouté la Sci Résidence Isatis de ses demandes présentées contre la Maf prise en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage.

2.1 En application de l'article L. 121-12 du code des assurances, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance, fût-ce en exécution d'une décision de justice, est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.

En l'espèce, l'action engagée par la Maf en sa qualité d'assureur contractuel de M. [B] est fondée sur une condamnation prononcée par le tribunal de grande instance d'Albi le 4 février 2016 à l'égard du syndicat en réparation des désordres imputés à l'intervention de M. [J] et a ainsi qualité à agir à l'endroit de ce dernier en vertu de son recours subrogatoire.

2.2 Selon l'article 1355 du code civil 'L'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité'.

Les conditions de l'autorité de la chose jugée invoquée par M. [J] ne sont pas en l'espèce réunies dès lors que la décision du 17 juin 2015 ayant déclaré prescrite l'action engagée par la Sci Résidence Isatis à l'endroit notamment de la 'société CLC' concerne un litige entre des parties différentes de celles à l'instance ayant donné lieu à la décision du 4 février 2016, le tribunal s'étant alors prononcé en raison de l'absence de désordres de caractère décennal invoqué par la Sci Résidence Isatis à l'endroit de cet entrepreneur et par voie de conséquence pour avoir agi de manière tardive selon une motivation propre à l'action engagée par cette société.

Cette circonstance est à elle seule suffisante pour écarter le moyen tiré de l'autorité de la chose jugée. Le jugement entrepris ayant à juste titre rejeté ce moyen d'irrecevabilité sera confirmé.

3. L'action engagée par la Maf à l'endroit de M. [J] par acte d'huissier du 20 janvier 2017 est formée sur le fondement de la responsabilité délictuelle

Le recours d'un intervenant à l'acte de construire ou, par subrogation, son assureur contre un autre constructeur est de nature contractuelle si ces constructeurs sont contractuellement liés, et de nature quasi délictuelle s'ils ne le sont pas.

Le délai de la prescription de ce recours et son point de départ ne relèvent donc pas des dispositions de l'article 1792-4-3 du code civil et le point de départ du délai de l'action d'un constructeur contre un autre constructeur ne saurait être la date de réception de l'ouvrage. Il s'ensuit qu'un tel recours relève des dispositions de l'article 2224 du code civil et se prescrit donc par cinq ans à compter du jour où le premier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Le premier juge a considéré que le point de départ de l'action récursoire de la Maf était le jour où celle-ci a été assignée pour la première fois en paiement 'c'est à dire en décembre 2012". Il résulte des énonciations du jugement du 4 février 2016 que le syndicat des copropriétaires de la Résidence Isatis a fait assigner M. [B] et la Maf en qualité d'assureur de ce dernier le 18 avril 2014 aux fins de condamnation à la réparation des désordres étant précisé que ces parties avaient été attraites en référé-expertise par actes d'huissiers non produits à l'instance mais au plus tard le 8 juillet 2009 (cf; pages 6 du jugement précité) dans le cadre d'une procédure initiée par la Sci Résidence Isatis et que la Maf avait été également attraite en qualité d'assureur dommages-ouvrage.

Les dates des 4, 5, 6, 7 et 10 décembre 2012 correspondent aux dates d'appel en cause au fond par la Sci Résidence Isatis de 'l'ensemble des intervenants à l'acte de construire' étant relevé que le syndicat des coproprétaires et divers copropriétaires avaient déjà agi contre la Sci Résidence Isatis par assignation du 12 décembre 2008 (cf. page 7 du jugement précité), le juge de la mise en état ayant refusé de joindre les procédures.

Si l'assignation en référé-expertise délivrée à l'architecte est de nature à mettre en cause la responsabilité de ce dernier et constitue le point de départ du délai de son action récursoire ou celui de son assureur à l'encontre d'un autre intervenant à l'acte de construire, il convient de relever au regard des éléments concrets de la présente espèce qu'en raison de la multiplicité des mises en cause par des parties différentes de la Maf sous des qualités différentes (assureur dommages-ouvrage, assureur décennal ou assureur contractuel du maître d'oeuvre), la date du dépôt du rapport d'expertise restituant pour chaque désordre les faits susceptibles d'être retenus comme fondement d'une responsabilité imputable à certains des intervenants appelés en la cause et à l'égard de chaque créancier possible de la réparation, la date du dépôt du rapport d'expertise (le 13 mai 2011) constitue le point de départ objectivant la connaissance par l'architecte et son assureur des éléments propres à permettre notamment à ce dernier d'exercer son action récursoire.

L'action engagée par la Maf à l'endroit de M. [J] le 20 janvier 2017 est donc prescrite. Le jugement entrepris sera donc infirmé sur ce point et pour le surplus de ses dispositions relatives au seul M. [J].

4. La Maf, partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux dépens d'appel et M. [J] sera mis hors de cause de la condamnation aux dépens de première instance.

5. M. [J] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'il a été contraint d'exposer à l'occasion de cette procédure. La Maf sera condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

La Maf, tenue aux entiers dépens, ne peut solliciter à son profit de condamnation sur le même fondement. Elle en sera déboutée.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant, dans la limité de sa saisine, publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement du tribunal de grande instance d'Albi du du 15 octobre 2019 en toutes ses dispositions relativement aux demandes formées par la Mutuelle des Architectes Français contre M. [H] [J] à l'exception de celle rejetant la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare prescrites les demandes formées par Mutuelle des Architectes Français contre M. [H] [J].

Condamne la Mutuelle des Architectes Français aux dépens de première instance exposés par M. [H] [J] et aux entiers dépens d'appel.

Dit que M. [J] n'est pas tenu aux dépens de première instance.

Condamne la Mutuelle des Architectes Français à payer à M. [H] [J] la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

Déboute la Mutuelle des Architectes Français de sa demande sur le même fondement.

Le greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/05448
Date de la décision : 12/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-12;19.05448 ?
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