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12/09/2022 | FRANCE | N°19/04341

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 12 septembre 2022, 19/04341


12/09/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/04341

N° Portalis DBVI-V-B7D-NHFS

A.M R / RC



Décision déférée du 03 Septembre 2019

Tribunal d'Instance de TOULOUSE

(11-18-1623)

M. [H]

















SARL [S] [X] ARCHITECTE





C/



[W] [N]

[I] [N]





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



SARL [S] [X] ARCHITECTE

Agissant poursuites et diligences de son gérant, Monsieur [S] [X], demeurant ...

12/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/04341

N° Portalis DBVI-V-B7D-NHFS

A.M R / RC

Décision déférée du 03 Septembre 2019

Tribunal d'Instance de TOULOUSE

(11-18-1623)

M. [H]

SARL [S] [X] ARCHITECTE

C/

[W] [N]

[I] [N]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DOUZE SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

SARL [S] [X] ARCHITECTE

Agissant poursuites et diligences de son gérant, Monsieur [S] [X], demeurant en cette qualité audit siège,

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier LERIDON de la SCP LERIDON LACAMP, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [W] [N]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [I] [N]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Octobre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A.M. ROBERT, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N. DIABY, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

M. [W] [N] et Mme [I] [I] [N] sont propriétaires d'une maison d'habitation située [Adresse 3].

Par contrat de maîtrise d''uvre édité en juin 2015 et signé le 29 juillet 2016, M. [N] a commandé à la société à responsabilité limitée (Sarl) [S] [X] Architecte l'aménagement du jardin de leur maison et la construction d'un abri ainsi que la rénovation d'une chambre pour un coût estimatif toutes taxes comprises de 90 036,10 euros pour les travaux et 11 409,33 euros d'honoraires pour la maîtrise d''uvre.

Les travaux ont débuté le 29 août 2016.

Par courrier du 22 octobre 2016, M. et Mme [N] se sont plaints auprès de l'architecte de ce que les comptes-rendus de chantier1 à 9 ne leur avaient pas été fournis.

Par courriel du 27 octobre 2016, M. [X] a envoyé les comptes-rendus litigieux après avoir rectifié l'adresse figurant sur la première page.

Par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 4 novembre 2016, M. et Mme [N] ont soulevé des malfaçons, retards et anomalies dans le cadre de la réalisation de la mission de maîtrise d''uvre incombant à l'architecte.

Par lettre recommandée du 5 décembre 2016, ils ont résilié le contrat d'architecte en raison des fautes qu'ils imputent à la Sarl [S] [X] Architecte.

Par lettre recommandée du 8 février 2017, M. [X] a mis en demeure M. et Mme [N] de payer la somme de 2 603,77 euros toutes taxes comprises au titre des honoraires restant dus.

Par lettre recommandée du 28 février 2017, M. et Mme [N] ont contesté leur obligation et sollicité le remboursement d'un « trop-perçu ».

Par lettre du 25 avril 2017, M. [X] a saisi le Conseil de l'ordre des architectes de Midi-Pyrénées.

Le 12 juillet 2017, la commission des litiges et des pratiques professionnelles du Conseil de l'ordre a rendu son avis en considérant que les honoraires étaient dus, de même que les pénalités de retard par M. [N], qui a résilié le contrat sans mise en demeure préalable et compte tenu du travail effectué par le maître d''uvre et des stipulations contractuelles relatives au calcul des honoraires de l'architecte.

-:-:-:-:-

Par acte d'huissier enrôlé le 7 mai 2018, la Sarl [S] [X] Architecte a fait assigner M. et Mme [N] devant le tribunal d'instance de Toulouse aux fins que soit constatée la résiliation unilatérale du contrat par les maîtres d'ouvrage et que soit reconnu son droit au paiement du solde de ses honoraires et de l'indemnité de rupture.

Par jugement contradictoire du 3 septembre 2019, le tribunal d'instance de Toulouse a :

- dit que la faute grave commise par l'architecte justifie la résiliation unilatérale du contrat par le maître d'ouvrage,

- dit que l'architecte a néanmoins droit aux honoraires correspondant aux missions exécutées à la date de la résiliation et aux intérêts moratoires de ses factures impayées,

Avant dire droit,

- ordonné une expertise,

- commis pour y procéder, M. [U] et à défaut M. [P],

- ordonné l'exécution provisoire,

- réservé les dépens et les indemnités de procédure.

Le tribunal a considéré que la résiliation notifiée par le maître de l'ouvrage sans mise en demeure préalable était justifiée par le défaut de communication de certains marchés, des avenants non signés par le maître de l'ouvrage, de comptes rendus de chantier erronés ou incomplets, de l'absence de coordination du chantier et de l'insuffisance habituelle de l'architecte à fournir des plans exploitables, violant ainsi gravement sa mission de conception.

Il a estimé qu'une mesure d'instruction était nécessaire pour définir l'état d'avancement du chantier à la date de résiliation du contrat pour déterminer le droit à honoraires de l'architecte.

-:-:-:-:-

 

Par déclaration du 3 octobre 2019, la Sarl [S] [X] Architecte a relevé appel de de ce jugement en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

-:-:-:-:-

 

DEMANDE DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 16 septembre 2021, la Sarl [S] [X] Architecte, appelante, demande à la cour au visa des articles 1134, 1147 et 1184 anciens et 1794 du code civil de :

- réformer, en intégralité, le jugement dont appel,

Et statuant à nouveau,

- juger que M. [N] a résilié unilatéralement la convention du 29 juillet 2016, sans faute de l'architecte,

- juger qu'il s'agit d'une résiliation fautive d'un contrat à durée déterminée, aux torts exclusifs du maître d'ouvrage,

- juger, dans ces conditions, qu'elle a droit au paiement du solde de ses honoraires majorés de l'indemnité de rupture de l'article G9.2.2 du contrat,

- condamner Mme et M. [N] à lui payer les sommes suivantes :

* honoraires et indemnités de résiliation : 2 603,77 euros toutes taxes comprises majorés des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure au 22 décembre 2016,

* pénalités de retard mentionnées parles factures de l'architecte : 15% par mois du solde dû, soit 390,56 euros par mois depuis la mise en demeure du 22 décembre 2016 soit 6 244,16 euros au 22 avril 2018 à parfaire à la date de l'arrêt,

* frais de recouvrement : 40 euros,

* 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* les entiers dépens de l'instance qui pourront être recouvrés directement par Maître Leridon, avocat conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- débouter M. et Mme [N] de leur demande subsidiaire en paiement des sommes de

3 740,45 euros toutes taxes comprises et 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de ses prétentions, l'appelant soutient que :

- compte tenu de la résiliation unilatérale du contrat par le maître de l'ouvrage sans faute de sa part, il a droit au paiement du solde de ses honoraires majorés de l'indemnité de rupture prévue par le contrat, et des intérêts moratoires,

- le jugement rendu en première instance n'a pas statué sur le comportement fautif de M. [N],

- le contrat régissait la faculté de résiliation unilatérale par le maître de l'ouvrage,

- M. [N] a évincé, avec violences, M. [X] lors de la réunion de chantier du 30 novembre 2016, et sans mise en demeure préalable,

- M. et Mme [N] ne prouvent pas les défaillances dont ils l'accusent, ou celles-ci sont insuffisantes pour justifier la résiliation du contrat pour faute de l'architecte,

- une expertise judiciaire n'est pas nécessaire, M. [X] ayant précisément établi le décompte de ses honoraires et des pénalités de retard et les époux [N] n'ayant pas critiqué leur mode de calcul,

- aucun trop-perçu ne peut être imputé au maître d''uvre.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 février 2020, M. [W] et Mme [I] [N], intimés, demandent à la cour au visa des articles 1103 et suivants du code civil de :

- rejetant toutes conclusions contraires comme injustes et mal fondées,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- débouter M. [X] de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions,

À titre subsidiaire,

- condamner M. [X] au paiement de la somme de 3 740,45 euros toutes taxes comprises au titre du trop-perçu d'honoraires ainsi qu'au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de leurs prétentions, les intimés soutiennent que :

- M. [X] ne prouve pas la réalité du comportement brutal qu'il impute à M. [N],

- M. [X] a commis des erreurs sur les documents contractuels,

- M. [X] ne les a pas informé de l'existence d'un mur mitoyen alors qu'ils le voulaient privatif,

- par la faute de M. [X], ils ont dû financer des travaux supplémentaires,

- M. [X] n'a pas correctement analysé les prestations à accomplir,

- ils ont rencontré des difficultés pour récupérer les marchés des entreprises auprès de l'architecte,

- plusieurs avenants avec des entreprises n'ont pas été signés par eux,

- M. [X] n'a pas coordonné le chantier et s'est contenté de rédiger des comptes-rendus erronés et est à l'origine de la mauvaise pose d'un radiateur,

- des entreprises ayant suivi le chantier attestent des défaillances de l'architecte,

- M. [X] ne peut prétendre au paiement que de 12% des travaux effectués, de sorte que compte tenu de l'état d'avancement du chantier, ils sont en droit de demander le remboursement d'un trop-perçu,

- cette demande reconventionnelle justifie une vérification par un expert judiciaire.

-:-:-:-:-

L'ordonnance de clôture est intervenue le 21 septembre 2021 et l'affaire a été entendue à l'audience du 5 octobre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La résiliation unilatérale du contrat de maîtrise d''uvre :

L'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu'elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel et, enfin, qu'elles doivent être exécutées de bonne foi.

L'ancien article 1184 du même code dispose également que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement. Dans ce cas, le contrat n'est pas résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou d'en demander la résolution judiciaire avec dommages et intérêts. Elle peut toutefois, à ses risques et périls, résilier unilatéralement le contrat en cas de manquement grave du débiteur à ses obligations contractuelles. Il revient alors au juge d'apprécier si cette inexécution constitue un manquement suffisamment grave pour justifier le prononcé de sa résolution.

En principe, et sauf urgence ou inexécution définitive, le créancier doit mettre le débiteur en demeure de s'exécuter dans un certain délai à défaut de quoi le créancier sera en droit de résilier le contrat.

En l'espèce, M. [W] [N] et la Sarl [S] [X] Architecte ont conclu le 29 juillet 2016 un contrat de maîtrise d''uvre ayant pour objet l'aménagement, la construction d'un abri ainsi que la rénovation d'une chambre.

Par courrier du 5 décembre 2016, M. et Mme [N] ont mis fin, avant terme, au contrat de maîtrise d''uvre ainsi conclu, de façon unilatérale, et donc à leurs risques et périls.

Dans ce courrier, ils soutiennent que l'architecte a commis plusieurs fautes :

- non-communication de certains marchés signés avec des entreprises au cours du chantier, - avenants non signés par les maîtres de l'ouvrage, et non inclus dans le marché initial des entreprises,

- non-respect des attentes des maîtres de l'ouvrage,

- non-relevé des existants qui a généré des travaux supplémentaires,

- incomplétude et erreurs dans les compte-rendus de chantier,

- non-accomplissement de la fonction de coordination.

Selon l'article G.9.2 du cahier des clauses générales  : « en cas de faute de l'architecte, c'est-à-dire d'inexécution ou d'infraction aux stipulations du présent contrat, le maître de l'ouvrage peut décider de résilier le présent contrat.

Le maître de l'ouvrage adresse une mise en demeure à l'architecte de se conformer à ses obligations et de mettre immédiatement fin à la situation de manquement, dans un délai qui ne saurait être inférieur à 15 jours, sauf en cas d'urgence.

Si, dans le délai imparti par la mise en demeure, à compter de la date de réception de celle-ci, l'architecte ne s'est pas conformé à celle-ci le maître de l'ouvrage peut alors prononcer la résiliation du contrat.

Dans ce cas, l'architecte a droit au paiement :

- des honoraires correspondant aux missions exécutées et frais liquidés au jour de cette résiliation, conformément à l'article G.5.1 du présent contrat et à l'annexe financière,

- des intérêts moratoires visés à l'article G.5.5.2,

En revanche, l'architecte ne peut prétendre à aucune indemnité de résiliation compensant en tout ou partie les honoraires qui lui auraient été versés si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue ».

Selon l'article G.9.2.2 : « le maître d'ouvrage peut mettre fin au contrat avant son terme normal pour un motif autre qu'une faute de l'architecte.

Dans ce cas, l'architecte a droit au paiement :

- des honoraires correspondant aux missions effectuées et frais liquidés au jour de cette résiliation, conformément à l'article G.5.1 du présent contrat et à l'annexe financière,

- des intérêts moratoires visés à l'article G.5.5.2,

- d'une indemnité de résiliation égale à 20% de la partie des honoraires qui lui aurait été versée si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue ».

Il résulte des éléments versés aux débats qu'aucune mise en demeure n'a été adressée par le maître de l'ouvrage à l'architecte pour exécuter ses obligations contractuelles. Aucune mise en demeure ne figure au courrier du 4 novembre 2016 et dans celui du 5 décembre 2016 M. et Mme [N] mettent seulement en demeure l'architecte de leur restituer une partie des honoraires qu'ils ont versés compte tenu de la résiliation du contrat de maîtrise d''uvre.

La mise en demeure a pour objet de permettre au débiteur de s'exécuter et d'être prévenu de la conséquence grave qu'est la résiliation du contrat susceptible d'être engendrée par l'inexécution de ses obligations contractuelles, et ne présente d'utilité qu'à la condition que l'inexécution ne soit pas définitivement consommée.

Le contrat de maîtrise d''uvre du 29 juillet 2016 stipule les missions suivantes : des missions de base selon les tableaux F, G et H annexés au contrat  : esquisse (ouverture administrative du dossier et études préliminaires) et avant projet sommaire ; avant-projet définitif et dossier de demande de permis de construire ou de démolir ; projet de conception générale + dossier de consultation des entreprise et mise au point des marchés de travaux ; direction de l'exécution des contrats de travaux ; assistance aux opérations de réception. Ainsi que des missions complémentaires : relevé des existants et ordonnancement ' pilotage et coordination.

Le cahier des clauses générales décrit :

- la mission d'esquisse : proposer une solution d'ensemble répondant aux attentes du maître de l'ouvrage, établir les plans des différents niveaux,

- la mission d'avant projet sommaire : préciser la conception générale en plan et en volume, les dispositions techniques les plus adaptées au programme, établir une estimation provisoire du coût prévisionnel des travaux et estime le délai global de réalisation de l'opération ,

- la mission d'avant-projet définitif : vérifier la réglementation, arrêter les dimensions de l'ouvrage, déterminer les éléments du programme, fournir l'estimation définitive du coût prévisionnel des travaux,

- la mission de dossier de permis de construire et démolir : assister le maître d'ouvrage pour constituer le dossier administratif,

- la mission de projet de conception générale : préciser les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux, déterminer l'implantation et l'encombrement des éléments de structures et équipements techniques, décrire les ouvrages et établir les plans de repérage, établir un cahier des clauses techniques particulières, établir le coût prévisionnel des marchés de travaux par corps d'état et le calendrier prévisible de l'opération,

- la mission direction de l'exécution des contrats de travaux  : rédiger et signer les ordres de services pour l'exécution des travaux, organiser et diriger les réunions de chantier et en rédiger les compte rendus, vérifier l'avancement des travaux et leur conformité aux pièces du marchés, sans être tenu à une présence constante sur le chantier mais, en moyenne, à une visite hebdomadaire.

- la mission d'ordonnancement, pilotage et coordination : analyser les tâches élémentaires portant sur les études d'exécution et les travaux, déterminer leurs enchaînements, harmoniser dans le temps et l'espace les actions des différents intervenants.

S'agissant du respect des attentes des maîtres de l'ouvrage :

M. et Mme [N] soutiennent qu'ils ont insisté auprès de l'architecte dès le début du chantier sur le fait que l'abri de jardin devait être privatif et non pas mitoyen avec le voisin, ce que l'architecte ne conteste pas. Or, ils ont découvert que l'un des murs de l'abri jardin était mitoyen.

Dans un courrier non daté adressé aux maîtres d'ouvrage par M. [S] [X] et qu'il produit lui-même (pièce no 8) ce dernier reconnaît que le mur du voisin permet de clore l'abri de jardin. La Sarl J. [X] soutient que les plans ont été dessinés et chiffrés ainsi.

En ne dotant pas, initialement, l'abri de jardin d'un mur indépendant du mur du voisin, l'architecte a manqué à son obligation contractuelle d'arrêter les dimensions de l'ouvrage et de déterminer les éléments du programme en fonction des besoins du client.

L'architecte ne saurait se fonder sur le fait que le mur n'a pas été prévu au plan ni chiffré, dès lors que l'absence de ce mur ne ressort pas avec évidence des devis, contrat et avenant de la société Tab, alors que par nature, un abri jardin doit comporter les murs lui permettant de servir son usage, sans dépendre de la propriété voisine.

Pour autant, au jour de la résiliation du contrat, il n'y avait plus de faute, puisque dans le courrier des époux [N] du 25 octobre 2016 (pièce 12 de l'appelant), il est indiqué que la société Tab a proposé de prendre en charge le projet de séparation de l'abri jardin à titre gracieux, ce qui est confirmé par le compte rendu de la réunion de chantier n° 11 du 24 et 25 octobre 2016 et par le courriel du 27 octobre 2016, l'architecte ayant indiqué aux maîtres de l'ouvrage qu'un mur avait été monté en limite de propriété comme ils l'avaient demandé.

S'agissant du relevé des existants :

Les époux [N] soutiennent que l'architecte n'a pas correctement réalisé le relevé des existants, ce qui a généré des travaux supplémentaires, dont les travaux de déblaiement et remblaiement des massifs pour implantation des luminaires extérieurs.

Il ressort du document établi par l'architecte intitulé « analyse des offres » (pièce 2 des intimés), qui reprend les travaux prévisionnels dans un tableau, qu'aucun travaux de déblaiement et remblaiement des massifs n'a été prévu et chiffré.

Dans sa réponse au courrier de résiliation (pièce 15 de la Sarl [S] [X] Architecte) il est indiqué que le déblaiement relevait partiellement de l'entreprise Tab et de l'entreprise E2V et était donc inclus dans leurs marchés.

Le devis établi le 21 juillet 2016 par l'entreprise E2V prévoir un poste « apport et mise en place de terre végétale » sur 40 cm.

Cependant, dans le compte rendu de chantier n°14 du 21 novembre 2016, il est indiqué en p. 14 que s'agissant du lot E2V, « un décaissé de 50 cm sera nécessaire pour la recharge de terre, non prévus au présent lot. Devis avec modifications à fournir ».

M. et Mme [N] soutiennent de leur côté que le déblaiement/remblaiement a été chiffré par l'entreprise titulaire du lot relatif à la réalisation de la terrasse en béton lavé mais ne produisent aucun devis.

Il résulte du tout que la réalité de ce poste de travaux supplémentaires n'est pas établie, ni son coût, ni le fait qu'il ait pesé sur les maîtres d'ouvrage n'étant démontré.

S'agissant de l'accomplissement de la fonction de coordination des travaux :

Les époux [N] soutiennent que la coordination des travaux a été mal accomplie par l'architecte et prennent pour exemple la mauvaise installation du radiateur dans leur chambre.

Il ressort des pièces produites aux débats qu'un radiateur devait y être installé et que les maîtres d'ouvrage ont estimé qu'il avait été placé trop haut. Ils ont demandé au maître d''uvre de le déplacer, ce qui a généré des travaux de reprise de peinture pour les trous de fixation précédemment réalisés.

Il ressort de la pièce 15 de l'appelant (point 8) que l'architecte a accepté de prendre en charge la remise en peinture du mur suite au déplacement du radiateur qui n'avait pas été présenté au maître d'ouvrage pour validation esthétique.

Il apparaît donc, comme l'architecte le reconnaît, que le positionnement du radiateur n'a pas été validé par le maître d'ouvrage alors que sa validation était requise mais que l'architecte avait, à la date de la résiliation du contrat, corrigé cette mauvaise exécution contractuelle. De sorte que cette faute alléguée par les époux [N] ne saurait justifier la résiliation du contrat.

S'agissant de la non-communication de certains marchés signés avec des entreprises au cours du chantier, les maîtres de l'ouvrage reconnaissent qu'ils leur ont été communiqués lors de la réunion de chantier du 30 novembre 2016, sauf celui conclu avec l'entreprise Denelec, mais dont le devis a été signé par eux en juillet 2016, de sorte que cette faute ne saurait justifier la résiliation du contrat.

S'agissant de la non-signature d'avenants par les maîtres de l'ouvrage, et non inclus dans le marché initial des entreprises, tels que des avenants concernant le lot plomberie et électricité, mais aussi, tel que visé dans la lettre de résiliation, l'élévation d'un mur de clôture par l'entreprise Tab, l'article G.3.2.4.2 du cahier des clauses générales stipule que « le maître d'ouvrage et l'entrepreneur retenu par lui signent les pièces du marché et les éventuels avenants ».

L'architecte produit aux débats des avenants non signés par les maîtres de l'ouvrage (pièces 5a : avenants 1 et 2 avec l'entreprise Tab) mais les devis correspondants ont en revanche été signés par M. et Mme [N]. L'allégation relative aux travaux supplémentaires accomplis par l'entreprise Tab est donc infondée.

S'agissant du lot plomberie et du lot électricité, les devis et avenants ne sont pas produits. Il n'est donc pas possible de vérifier l'existence de travaux supplémentaires, approuvés ou non par les maîtres d'ouvrage.

Dès lors, aucune faute ne saurait être imputée à l'architecte à ce titre.

S'agissant de l'incomplétude et des erreurs contenues dans les compte-rendus de chantier, l'architecte a reconnu, dans un courriel du 27 octobre 2016, qu'ils étaient affectés d'une erreur concernant l'adresse du chantier et les avoir réédités en corrigeant cette erreur, fait non contesté par les maîtres de l'ouvrage, de sorte qu'au jour de la résiliation unilatérale du contrat, l'architecte s'était conformé à son obligation contractuelle de direction de l'exécution des contrats de travaux en ce qui concerne l'établissement des comptes rendus de réunions de chantier.

Dès lors, M. et Mme [N] ne prouvent pas qu'au jour de la résiliation unilatérale du contrat le 5 décembre 2016, la Sarl [S] [X] Architecte avait manqué à ses obligations contractuelles et que ces manquements étaient toujours d'actualité à cette date et la résiliation du contrat ne peut être prononcée aux torts de l'architecte.

Il convient donc d'infirmer le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Toulouse en ce qu'il a dit que la faute grave commise par l'architecte justifiait la résiliation unilatérale du contrat par le maître d'ouvrage.

La demande en paiement formée par la Sarl [S] [X] Architecte :

La résiliation unilatérale avant terme par M. et Mme [N] n'étant pas justifiée par une faute de l'architecte, il y a lieu d'appliquer l'article G.9.2.2 du cahier des clauses générales du contrat de maîtrise d''uvre qui stipule que : « le maître d'ouvrage peut mettre fin au contrat avant son terme normal pour un motif autre qu'une faute de l'architecte.

Dans ce cas, l'architecte a droit au paiement :

- des honoraires correspondant aux missions effectuées et frais liquidés au jour de cette résiliation, conformément à l'article G.5.1 du présent contrat et à l'annexe financière,

- des intérêts moratoires visés à l'article G.5.5.2,

- d'une indemnité de résiliation égale à 20% de la partie des honoraires qui lui aurait été versée si sa mission n'avait pas été prématurément interrompue ».

Il est donc essentiel de déterminer l'état d'avancement du chantier au 5 décembre 2016, date de la résiliation du contrat de maîtrise d''uvre, pour établir le montant des honoraires dus à l'architecte, ce que ne permettent pas les pièces produites aux débats.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Toulouse en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise.

Les frais irrépétibles et les dépens

Il convient de confirmer le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Toulouse en ce qu'il a réservé les dépens et les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

La Sarl [S] [X], qui succombe partiellement dans sa voie de recours, sera condamnée aux dépens d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de M. [W] [N] et Mme [I] [N] les frais non compris dans les dépens qu'ils ont pu exposer en cause d'appel. Ils seront déboutés de leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La Sarl [S] [X], tenue aux dépens, ne saurait pour sa part bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

 PAR CES MOTIFS

La Cour,  

- Confirme le jugement rendu le 3 septembre 2019 par le tribunal d'instance de Toulouse sauf en ce qu'il a dit que la faute grave commise par l'architecte justifiait la résiliation unilatérale du contrat par le maître d'ouvrage ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

- Dit que la résiliation unilatérale du contrat par les maîtres d'ouvrage est injustifiée et qu'il doit être fait application de l'article G. 9.2.2 du cahier des clauses générales du contrat de maîtrise d''uvre liant les parties ;

-Condamne la Sarl [S] [X] aux dépens d'appel ;

-Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Le Greffier Le Président

N. DIABY M. DEFIX.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/04341
Date de la décision : 12/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-12;19.04341 ?
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