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05/09/2022 | FRANCE | N°20/01728

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 05 septembre 2022, 20/01728


05/09/2022



ARRÊT N°



N° RG 20/01728

N° Portalis DBVI-V-B7E-NUAX



JCG/ND



Décision déférée du 11 Juin 2020

TJ de TOULOUSE



( 18/01517)



Mme BERRUT

















[X] LATRECHE HELMY REZK [B]





C/



S.A.S. CLINIQUE [J]

Organisme CPAM HAUTE GARONNE




































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



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à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



Madame [X] LATRECHE HELMY REZK HANNA

[Adresse 1]

[Localité 5] FRANCE

Représentée par Me V...

05/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 20/01728

N° Portalis DBVI-V-B7E-NUAX

JCG/ND

Décision déférée du 11 Juin 2020

TJ de TOULOUSE

( 18/01517)

Mme BERRUT

[X] LATRECHE HELMY REZK [B]

C/

S.A.S. CLINIQUE [J]

Organisme CPAM HAUTE GARONNE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [X] LATRECHE HELMY REZK HANNA

[Adresse 1]

[Localité 5] FRANCE

Représentée par Me Valérie PECH-CARIOU, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555.2020.010685 du 29/06/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIMES

S.A.S. CLINIQUE [J]

Propriété [J]

[Localité 4]

Représentée par Me Georges DAUMAS de la SCP DAUMAS GEORGES, avocat au barreau de TOULOUSE

Organisme CPAM HAUTE GARONNE

[Adresse 2]

[Localité 3] FRANCE

Pas d'avocat constitué

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant, J.C. GARRIGUES chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : L. SAINT LOUIS AUGUSTIN

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par N.DIABY, greffier de chambre

EXPOSE DU LITIGE

Mme [X] [A], qui séjournait au sein de la clinique [J] à la suite d'une dépression grave, a chuté dans le parc de l'établissement le 1er octobre 2016, alors qu'elle s'y promenait avec ses enfants.

Atteinte d'une fracture du coude gauche, soignée dans un premier temps par une immobilisation et des soins de kinésithérapie, son état s'est aggravé et a nécessité une intervention chirurgicale.

Par ordonnance de référé du 20 juin 2017, une expertise a été ordonnée et le docteur [Y] a été commis.

Ce dernier a déposé son rapport le 20 février 2018.

Par actes d'huissier du 3 mai 2018, Mme [X] [A], divorcée [H] [P] [B], a assigné la Sas Clinique [J] et appelé en cause la Cpam de la Haute-Garonne aux fins qu'il soit jugé que la clinique a commis une négligence, imprudence et faute et soit déclarée responsable des dommages qu'elle a subis avec indemnisation de ses préjudices et des divers frais qui ont été mis à sa charge.

Par ordonnance du 15 novembre 2018, le juge de la mise en état a rejeté la demande de provision déposée par Mme [A].

Par jugement contradictoire du 11 juin 2020, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- jugé que Mme [A], divorcée [H] [P] [B] est défaillante dans l'administration de la preuve d'un manquement de la clinique à ses obligations contractuelles ;

- débouté Mme [A], divorcée [H] [P] [B] de l'intégralité de ses demandes ;

- débouté la Cpam de la Haute-Garonne de ses demandes ;

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire ;

- condamné Mme [A], divorcée [H] [P] [B] aux entiers dépens ;

- constaté que Mme [A], divorcée [H] [P] [B], est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale ;

- autorisé la distraction des dépens en conformité avec l'article 699 du code de procédure civile et des règles de l'aide juridictionnelle.

Pour statuer ainsi, le tribunal a constaté que Mme [A] agissait en responsabilité contractuelle contre la clinique en invoquant deux moyens:

- un manquement à son obligation contractuelle relative à l'hébergement offert au motif qu'entrait dans le champ contractuel un hébergement dans une chambre de type 'prestige', alors qu'il lui a été attribué une chambre dépourvue de tout confort, ce qui a entraîné son départ précipité ;

- un manquement de la clinique à son obligation de prudence, et plus précisément un défaut d'information de l'établissement sur l'existence d'un terrain extérieur accidenté.

Sur le premier grief, il a constaté que Mme [A] ne donnait aucun élément de nature à établir le choix exact qu'elle avait fait et quelle était la cause réelle de son départ. Il a en outre relevé que Mme [A] ne précisait pas quel préjudice elle aurait subi à ce titre.

Sur le second grief, il a estimé que Mme [A] ne rapportait pas suffisamment la preuve des circonstances de sa chute et du fait que le parc présentait une configuration dangereuse ou anormale rendant nécessaire une information particulière.

Par déclaration en date du 10 juillet 2020, Mme [A], divorcée [H] [P] [B] a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a :

- jugé que Mme [A], divorcée [H] [P] [B] est défaillante dans l'administration de la preuve d'un manquement de la clinique à ses obligations contractuelles,

- débouté Mme [A], divorcée [H] [P] [B] de l'intégralité de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à prononcer l'exécution provisoire,

- condamné Mme [A], divorcée [H] [P] [B] aux entiers dépens,

- constaté que Mme [A], divorcée [H] [P] [B] bénéficiera de l'aide juridictionnelle totale,

- autorisé la distraction des dépens en conformité avec l'article 699 du code de procédure civile et des règles de l'aide juridictionnelle.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 29 septembre 2020, Mme [A] divorcée [H] [P] [B], appelante, demande à la cour, au visa des articles 1134, 1147 et suivants du code civil (anciens) nouveaux articles 1103, 1104, 1194, 1199, 1217, 1231-1 et suivants du code civil, des articles L. 1142-1 et suivants du code de la santé publique, et de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978, ainsi que des articles L1110-4 dernier alinéa, L1111-7, R1111-1, R1111-2 et L1142-4 du code de la santé publique, de :

- annuler,

- subsidiairement infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau,

- déclarer que la clinique [J] a manqué à ses obligations contractuelles d'hébergement;

- déclarer les manquements constitutifs de faute dans son hébergement;

- décider que la clinique [J] est responsable des dommages qu'elle a subis ;

- statuer ce que de droit sur les créances qui seront présentées par la Cpam de la Haute-Garonne;

- condamner la clinique [J] à indemniser les préjudices subis ainsi qu'il suit:

S'agissant des préjudices extra-patrimoniaux :

- Avant consolidation :

* au titre du déficit fonctionnel temporaire, lui allouer en capital la somme de 6 000 €,

* au titre des souffrances endurées, lui allouer en capital la somme de 12 000 €,

* au titre du préjudice esthétique temporaire, lui allouer la somme de 2 000 €,

- Après consolidation :

* au titre du déficit fonctionnel permanent de 1%, lui allouer en capital la somme d'un montant de 1 400 €,

* au titre du préjudice esthétique, lui allouer en capital la somme d'un montant de 2 000 €,

S'agissant des préjudices patrimoniaux :

- Avant consolidation :

* au titre du séjour hospitalier, lui allouer en capital la somme de 378 €,

* au titre de l'assistance tierce personne, lui allouer en capital la somme de 4 046 € ;,

En tout état de cause,

- assortir le montant des condamnations au montant de l'intérêt au taux légal à compter de l'introduction de la demande de première instance en date du 3 mai 2018 ;

- condamner la clinique [J] au remboursement des frais exposés par elle, soit la somme de 1 800 € pour les frais de médecin conseil et la somme de 2 000 € au titre de l'assistance à l'expertise par un conseil, assortie des intérêts de retard à compter de l'introduction de la demande;

- la condamner au visa des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, au paiement de la somme de 4 000 € au profit de Me Pech-Cariou sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat prévue en la matière ;

- condamner la clinique [J] aux entiers frais et dépens.

Mme [A] expose dans quelles circonstances elle a été hospitalisée à la Clinique [J] et les mauvaises conditions dans lesquelles s'est déroulé son séjour, ce qui a entraîné sa sortie prématurée.

Elle explique que, de plus, durant son séjour à la clinique, elle a effectué une courte promenade de détente en compagnie de ses deux enfants dans le jardin privé de l'établissement ouvert sans restriction, ni surveillance ou conditions aux patients, et qu'au cours de cette promenade, elle a fait une chute en raison de trous dissimulés par l'herbe haute et totalement insoupçonnables, chute qui lui a occasionné une fracture du coude gauche.

Elle recherche en premier lieu la responsabilité contractuelle fautive de la clinique dans la brièveté de son séjour. Elle reproche sur ce point au premier juge une insuffisance de motivation.

Elle soutient que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, elle a subi un préjudice moral, le défaut d'hébergement de qualité ayant eu une incidence directe sur le bénéfice des soins psychologiques pour soigner sa dépression.

Elle recherche en second lieu la responsabilité pour faute de la clinique sur le défaut d'information et sur l'existence d'un terrain extérieur accidenté.

Elle précise que contrairement à ce qu'a retenu le jugement entrepris, elle était bien accompagnée de ses deux enfants au moment de la chute. Elle fait valoir par ailleurs qu'il n'y avait pas de panneau invitant à la prudence ou un dégagement de responsabilité en cas d'accident en jardin extérieur privatif, que l'entretien du jardin devait être réalisé régulièrement afin d'assurer la sécurité des patients, qu'aucun panneau ne signalait au moment des faits l'existence d'une partie du parc qui serait accidentée ou non entretenue. Elle ajoute que le rapport d'expertise du 20 février 2018 apporte des précisions substantielles sur l'origine du dommage et son étendue.

Enfin, elle fournit des explications complètes sur les divers préjudices dont elle sollicite l'indemnisation.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 27 octobre 2020, la SasClinique [J], intimée, demande à la cour, au visa des articles L.1110-1 du code de la santé publique, 1231-1, 1242 alinéa 1er et 1353 du code civil, de :

Rejetant toutes conclusions contraires,

- dire que Mme [A] ne rapporte pas la preuve d'une faute susceptible d'avoir été commise par elle, à fortiori en relation de causalité directe, certaine et exclusive avec son état actuel ;

- dire qu'elle ne rapporte pas davantage la preuve du fait que le sol du parc de la clinique [J], chose inerte, aurait eu un rôle causal dans la chute invoquée ;

- la démettre, en conséquence, des fins de son injustifié appel ;

- confirmer, en conséquence, le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

- à titre infiniment subsidiaire, ramener l'éventuelle indemnisation susceptible d'être allouée à Mme [A] à de plus justes proportions, au titre des seuls postes susceptibles d'avoir été justifiés ;

- la débouter, en toute hypothèse de ses infondées demandes formées au titre des frais d'hospitalisation, des honoraires de médecin-conseil et d'avocat ;

- débouter également la Cpam de la Haute-Garonne de ses injustifiées demandes, étant, en toute hypothèse précisé que seules les prestations exclusivement imputables aux conséquences d'une chute, à supposer prouvée, seraient susceptibles d'être mises à la charge du responsable d'un dommage ;

- condamner Mme [A] à lui payer une indemnité d'un montant de 2 000 €, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

La Clinique [J] fait tout d'abord valoir que le jugement entrepris n'est pas susceptible d'encourir l'annulation.

Sur le défaut d'attribution d'une chambre 'prestige', elle estime que, contrairement aux allégations de Mme [A], aucun élément concret n'est produit à l'appui d'inexistantes demandes pour justifier de l'existence d'une quelconque faute de la clinique à son égard.

Sur la chute, elle conteste tout manquement fautif à l'origine de la chute de Mme [A] et de son état actuel. Elle estime que l'allégation de Mme [A] selon laquelle elle serait tombée dans un trou dissimulé 'sous de l'herbe' dans le parc de la clinique n'est étayée par aucun élément de preuve.

Par ailleurs, elle critique les divers chefs de préjudice dont Mme [A] sollicite l'indemnisation.

La déclaration d'appel a été dénoncée à la Cpam de la haute-Garonne par acte du 17 septembre 2020. Les conclusions et pièces de Mme [A] lui ont été signifiées par acte du 25 septembre 2020.

La Cpam de la Haute-Garonne n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 1er février 2022.

L'affaire a été examinée à l'audience du 8 février 2022.

MOTIFS

Sur la demande d'annulation du jugement

L'annulation d'un jugement peut avoir pour fondement un vice inhérent à la décision elle-même, ou une irrégularité commise au cours de la procédure de première instance, telle que la méconnaissance d'un principe fondamental de procédure affectant la régularité intrinsèque du jugement ou une contrariété totale entre les motifs et le dispositif.

En l'espèce, le jugement entrepris n'est pas susceptible d'annulation. Il apparaît en effet que le tribunal a pleinement respecté les dispositions des articles 7 et 12 du code de procédure civile et que la motivation du jugement est suffisante, tant en droit qu'en fait.

Sur le fond

Selon l'article L.1142-1 du code de la santé publique, hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Par ailleurs, l'établissement de santé privé est lié avec le patient par un contrat d'hospitalisation et de soins et débiteur d'une obligation de moyens de lui dispenser des soins qualifiés et d'assurer sa sécurité. Il est également tenu d'une obligation d'information sur les prestations qu'il est en mesure d'assurer. Il est civilement responsable des fautes commises par ses salariés et préposés.

Enfin, le contrat qui le lie à la patiente au titre de l'hébergement met à sa charge une obligation contractuelle de sécurité pour ce qui concerne les locaux utilisés, qui est une obligation de moyen. Cette obligation de sécurité ne va pas jusqu'à garantir à l'usager une immunité physique telle que celui-ci puisse se dispenser de veiller à sa propre sauvegarde et de prendre les précautions élémentaires eu égard à la nature et à la destination du local où il se trouve. Par suite, la responsabilité de l'établissement ne peut être engagée, en cas d'accident, que si la victime rapporte la preuve d'une défectuosité dans l'installation, le matériel, l'organisation ou le fonctionnement de l'établissement et plus généralement d'un fait constitutif d'une faute à la charge de l'hébergeant. Il incombe à la victime qui a fait une chute dans l'établissement de faire la preuve d'une faute et de démontrer le lien de causalité entre le dommage et le manquement contractuel.

Mme [A] soutient en premier lieu que la clinique a manqué à son obligation contractuelle relative à l'hébergement offert au motif qu'entrait dans le champ contractuel un hébergement dans une chambre de type 'prestige', alors que les chambres n° 112 et 226 qui lui ont été successivement attribuées avaient un confort médiocre, la première subissant des remontées d'égouts nauséabondes et insupportables et la seconde étant trop exiguë, ce qui a entraîné son départ précipité alors qu'elle pensait rester plusieurs semaines à la clinique pour soigner sa dépression.

Elle se fonde sur des documents commerciaux mentionnant l'existence de 'chambres Grand Confort' (106 € ) et de 'chambres Prestige' (158 € ), mais elle ne produit pas de documents contractuels justifiant qu'elle avait fait le choix d'une chambre 'Prestige', une telle chambre ne lui ayant au demeurant pas été facturée.

Les attestations de M. [U] [O] et de Mme [Z] [D], amis de Mme [A], reprennent les déclarations de cette dernière qui s'est plainte, après sa chute, d'une chambre malodorante et d'un personnel qui ne faisait pas attention à ses problèmes.

Entrée à la clinique le 22 septembre 2016, Mme [A] est sortie le 9 octobre 2016, sans que les motifs de son départ soient clairement établis. Elle a remis à la clinique et à son médecin référent un courrier en date du 11 octobre 2016 indiquant notamment : ' (...) J'ai donc refusé cette chambre. Suite à ça, la responsable m'a dit que si je n'acceptais pas cette chambre je pouvais quitter la clinique contre avis médical. A ce jour, je constate que j'ai intégré la Clinique [J] pour me soigner suite à un problème, et que j'en rencontre d'autres qui n'ont rien à voir. Cette responsable semble peu ouverte à rechercher d'autres solutions. J'ai l'impression qu'il s'agit d'un dialogue de sourds. Sachez que je suis ici pour mon psychiatre, le Dr [F] qui est à mon écoute et que je remercie fortement. Je remercie également les infirmiers, veilleurs de nuit, personnels de service, tous très professionnels'.

Le Dr [F] évoque quant à lui dans le compte-rendu d'hospitalisation du 9 octobre 2016 et dans un certificat médical du 21 novembre 2016 les circonstances dans lesquelles Mme [A] a été hospitalisée et a ensuite quitté la clinique, départ qu'il regrette au vu des résultats initiaux et qu'il relie à bien d'autres facteurs que le simple problème d'hébergement.

Il ressort pour l'essentiel de ces éléments d'appréciation un désaccord entre Mme [A] et la direction de la clinique quant à la qualité de l'hébergement, non conforme à ce qu'escomptait la patiente.

Il ne saurait pour autant être retenu un manquement fautif de la clinique à ses obligations contractuelles en sa qualité d'hébergeant.

Par ailleurs, Mme [A] ne rapporte pas la preuve d'un préjudice en relation de causalité avec le manquement reproché. Elle ne démontre notamment pas que ce défaut de qualité de l'hébergement a eu une incidence directe sur le bénéfice des soins psychologiques dont elle faisait l'objet pour traiter sa dépression. Elle ne forme d'ailleurs pas de demande distincte à ce titre et sollicite seulement une majoration du poste 'souffrances endurées' dans le cadre de l'indemnisation du préjudice corporel consécutif à sa chute.

En second lieu, Mme [A], qui ne met pas en cause une faute de la clinique dans les actes de prévention, de diagnostic ou de soins, impute la chute qu'elle a faite le 1er octobre 2016 dans le parc à un manquement de la clinique à son obligation de prudence. Elle se prévaut plus précisément non pas d'un défaut d'entretien mais d'un défaut d'information de l'établissement sur l'existence d'un terrain extérieur accidenté.

Les deux enfants de Mme [A] indiquent dasn des attestations en date du 21 novembre 2016 qu'ils se promenaient avec leur mère dans la parc de la clinique quand celle-ci a soudainement 'buté' dans un trou caché par l'herbe. Sa fille précise qu'elle s'est tordu la cheville et s'est rattrapée sur son bras gauche avant de tomber dans l'herbe. Son fils indique qu'elle a trébuché vers l'avant en se tordant la cheville dans un trou caché par l'herbe et qu'elle est tombée sur son bras gauche.

Les propos de Mme [A] et de ses enfants repris par l'infirmière de l'établissement ne font pas état de l'existence d'un terrain défaillant et d'une cheville tordue ('14h00, patiente ayant chuté dans le parc alors qu'elle s'y promenait avec sa fille venue lui rendre visite. Dit être tombée de sa hauteur, sur son bras gauche'). De même, le compte-rendu de consultation de la clinique de [6] indique : 'Anamnèse : 3 octobre 2016 chute de sa hauteur alors qu'elle était hospitalisée à la clinique [J] pour un burn-out ', sans préciser les causes de la chute.

Dans l'historique des faits, l'expert judiciaire indique : ' Mme [A] [X] précise avoir présenté le 1er octobre 2016 en début d'après-midi une chute en se promenant dans le jardin de la clinique [J] dans laquelle elle était hospitalisée depuis le 22 septembre 2016 pour la prise en charge d'une dépression. Mme [A] indique avoir présenté suite à la chute une douleur vive du coude gauche avec une déformation du coude et une impotence fonctionnelle (...). Le reproche principal exprimé lors de l'expertise par Mme [A] semble dirigé contre la clinique [J] et il est basé sur les conditions de vie hôtelière et notamment sur le confort des chambres d'hospitalisation. Il est également exprimé par Mme [A] un mécontentement vis-à-vis de la clinique de [6] et concernant son accueil aux urgences le 1er octobre 2016 'temps d'attente très long' et 'isolement dans une pièce'. Là encore, Mme [A] ne fait pas état de l'existence d'un terrain défaillant et d'une cheville tordue à l'origine de sa chute.

Mme [A] s'appuie par ailleurs sur une attestation de M. [U] en date du 10 octobre 2017 et une attestation similaire de Mme [Z] : 'Le 6 octobre dans l'après-midi, j'ai visité [X], hospitalisée à la clinique [J]. Elle était dans un état déplorable : stressée, fatiguée, le bras abîmé. Je lui ai demandé pourquoi son état ne s'améliorait pas malgré son hospitalisation et pourquoi elle broyait du noir alors qu'habituellement c'est une femme forte. Elle m'a alors répondu qu'elle était initialement hospitalisée pour l'aider à se sentir mieux mais qu'au contraire tout s'était empiré : chambre malodorante, personnel qui ne faisait pas attention à ses problèmes... j'ai été alarmé par son état qui m'a beaucoup inquiété. J'ai dans les jours qui suivent pris des nouvelles et constaté que son état s'empiré. J'ai constaté avec effroi que sa situation était scandaleuse quand j'ai pris connaissance de sa blessure au coude gauche, je suis donc allé voir par moi-même le parc de la clinique et j'ai pu constater que les crevasses et autres trous au sol étaient bien dissimulés sous l'herbe et que le terrain était accidenté et dangereux'.

Cette description, qui n'est complétée par aucun constat ou photographies n'est pas de nature à établir une réelle anormalité du sol du parc utilisé pour la promenade des malades. Ce témoignage ne peut établir un lien de causalité entre le terrain décrit et la chute de Mme [A], aucun élément ne permettant de confirmer que la chute est bien intervenue sur le terrain décrit par M. [U].

D'autre part, les témoignages des deux enfants de Mme [A] qui mentionnent 'un trou dissimulé par des herbes', sont insuffisamment précis pour démontrer que le parc, constitué d'un terrain naturel pas forcément plat, dans lequel se promenait Mme [A], à l'instar de tous les autres patients de la clinique, présentait une configuration dangereuse ou anormale rendant nécessaire une information particulière et engageant ainsi la responsabilité de la clinique du fait d'un manquement à son obligation contractuelle de sécurité.

En définitive, il apparaît que les circonstances exactes de la chute restent mal déterminées, que l'emplacement exact de cette chute, où un trou aurait été masqué par de hautes herbes, n'a pas été localisé, et qu'il n'est en aucune manière justifié que le terrain comportait de multiples trous et crevasses et présentait un état général de dégradation justifiant la mise en place d'une signalisation spécifique.

Dans ces conditions, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a été jugé que Mme [A], défaillante dans l'administration de la preuve d'un manquement de la clinique à ses obligations contractuelles, devait être déboutée de l'intégralité de ses demandes.

La Sas Clinique [J] n'étant pas jugée responsable des dommages subis par Mme [A], le rejet des demandes de la Cpam de la Haute-Garonne doit également être confirmé.

Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Mme [A], partie principalement perdante, doit supporter les dépens de première instance, ainsi que décidé par le premier juge, et les dépens d'appel.

Maître Pech-Cariou, conseil de Mme [A], doit quant à elle être déboutée de sa demande formée au visa des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile.

Eu égard aux situations économiques respectives des parties, la Clinique [J] doit être déboutée de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Rejette la demande d'annulation du jugement dont appel ;

Confirme le jugement du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 11 juin 2020 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne Mme [A] aux dépens d'appel ;

Déboute la Sas Clinique [J] de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette la demande formée par Maître Pech-Cariou, conseil de Mme [A], au visa des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

N.DIABY M. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/01728
Date de la décision : 05/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-05;20.01728 ?
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