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05/09/2022 | FRANCE | N°19/05061

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 05 septembre 2022, 19/05061


05/09/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/05061

N° Portalis DBVI-V-B7D-NKC2

CR/RC



Décision déférée du 08 Octobre 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN

19/00058

M. [G]

















SARL A.C.P (AMENAGEMENT CREATION PISCINE) sous l'enseigne DIFFAZUR





C/



[A] [K] [X]

[Z] [B] épouse [K] [X]






























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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTE



SARL A.C.P (Aménagement Création Piscine) ...

05/09/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/05061

N° Portalis DBVI-V-B7D-NKC2

CR/RC

Décision déférée du 08 Octobre 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN

19/00058

M. [G]

SARL A.C.P (AMENAGEMENT CREATION PISCINE) sous l'enseigne DIFFAZUR

C/

[A] [K] [X]

[Z] [B] épouse [K] [X]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU CINQ SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

SARL A.C.P (Aménagement Création Piscine) sous l'enseigne Diffazur

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Pascal GORRIAS de la SCP BOYER & GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [A] [K] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Philippe DUPUY de la SELARL DUPUY-PEENE, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [Z] [B] épouse [K] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Philippe DUPUY de la SELARL DUPUY-PEENE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. ROUGER, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. ROUGER, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. ROUGER, président, et par N. DIABY, greffier de chambre

EXPOSE DU LITIGE

Selon devis du 2 octobre 20l4, les époux [K] [X] ont confié à la société ACP (Aménagement Création Piscine) Diffazur la réalisation d'une piscine.

Les maîtres d'ouvrage s'étant plaints de divers désordres tenant notamment à un défaut d'équerrage, des fuites d'eau et la dégradation du revêtement du bassin, un expert judiciaire, M. [N], a été désigné par ordonnance de référé en date du 14 avril 2016.

Ce dernier a déposé son rapport le 20 septembre 2018.

Par acte d'huissier de justice en date du 3 janvier 2019, M. et Mme [K] [X] ont fait assigner la société ACP Diffazur devant le tribunal de grande instance de Montauban aux fins d'indemnisation.

Par jugement contradictoire du 8 octobre 2019, le tribunal de grande instance de Montauban a :

- fixé au 20 septembre 2018 la date de réception judiciaire de l'ouvrage,

- condamné la société ACP Diffazur à payer aux époux [K] [X] les sommes de 7.896 €, 630 € et 159,60 € en réparation des préjudices relevant de sa responsabilité contractuelle,

- rejeté leurs autres demandes indemnitaires,

- condamné les époux [K] [X] à payer à la société ACP Diffazur la somme de 2.412 € au titre du solde du marché,

- dit sans objet la demande reconventionnelle en paiement de la somme de 2.551 €,

- après compensation entre ces dettes et créances, condamné en définitive la société ACP Diffazur à payer aux époux [K] [X] la somme de 6.273,60 €, avec intérêts à compter du jugement,

- condamné en outre la société ACP Diffazur à payer aux époux [K] [X] la somme de 2.000 € en application de l'article 700, 1° du Code de procédure civile,

- condamné la société ACP Diffazur aux dépens, en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire,

- ordonné l'exécution judiciaire.

Pour statuer ainsi le premier juge a retenu que la dégradation du revêtement de la piscine provenait d'un revêtement proposé et installé par l'entreprise non adapté aux conditions d'utilisation de l'ouvrage connues du constructeur ni à la qualité de l'eau publique de remplissage qu'il devait vérifier, retenant un manquement au devoir de conseil générateur de responsabilité contractuelle et une réparation intégrale assurée uniquement par un changement de revêtement adapté à la qualité de l'eau et à l'usage de résidence secondaire ; il a retenu que les fuites et pertes d'eau provenant d'un défaut dans la mise en 'uvre des tuyauteries des skimmers, réparé en cours d'expertise, avait généré une surconsommation d'eau de 70 m3 liée à la vidange de la piscine, justifiant indemnisation et que devait être indemnisé le coût de réfection de la dalle de plage détruite par l'entreprise lors de la réparation de la fuite. Il a estimé que le défaut d'équerrage de 14cm en largeur, sans autre conséquence que l'impossibilité d'une hypothétique installation d'une couverture immergée non prévue au marché avait été amiablement indemnisée par la fourniture et la pose gratuite d'une bâche hivernale, et écarté tout préjudice de jouissance faute de justification d'une réelle privation d'usage de la piscine.

Il a retenu que le solde du marché était dû par le maître de l'ouvrage à compenser avec les indemnisations allouées.

Par déclaration d'appel en date du 22 novembre 2019, la Sarl ACP a relevé appel de ce jugement en ce qu'il a fixé au 20 septembre 2018 la date de réception judiciaire de l'ouvrage, l'a condamné à diverses indemnisations au titre de sa responsabilité contractuelle après compensation, déclaré sans objet la demande en paiement de la bâche d'hivernage, l'a condamnée aux dépens et au paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de ses demandes à ce titre.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 23 juillet 2020, la Sarl Acp (Aménagement Création Piscine Sarl), appelante, demande à la cour, au visa des articles 1134 et 1147 du Code civil, de :

- réformer ou annuler le jugement dont appel,

- prononcer l'irrecevabilité des demandes des époux [K] [X] au motif qu'il est demandé cumulativement l'application des articles 1231-1 et 1792 du Code civil,

- fixer la réception de l'ouvrage au 20 octobre 2015,

- débouter les époux [K] [X] de leur demande relative au défaut d'équerrage qui ne constitue pas une faute contractuelle de sa part et qui ne donne lieu à aucun préjudice réel et indemnisable et à défaut que le désordre était apparent à la réception,

- débouter les époux [K] [X] de leur demande relative à l'indemnisation du fait de la rugosité du revêtement qui relève d'un défaut d'entretien et de gestion de l'eau qui leur est exclusivement imputable,

- débouter les époux [K] [X] de leur demande relative à la fuite du skimmer alors qu'elle a été réparée par elle et qu'il ne subsiste aucun préjudice indemnisable dont l'estimation aurait été établie contradictoirement,

- débouter les époux [K] [X] de leur demande relative au paiement de l'intégralité des frais d'expertise, des dépens et de la condamnation à la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- débouter les époux [K] [X] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, et subsidiairement, les réduire à de plus justes proportions,

- condamner les époux [K] [X] à la somme de 2.551 € au titre de la bâche,

- confirmer le jugement dont appel qui :

* a condamné les époux [K] [X] à la somme de 2.412 € au titre du paiement du solde du marché,

* a débouté les époux [K] [X] de leur demande au titre de préjudice de jouissance,

En tout état de cause,

- rejeter l'appel incident des époux [K] [X] ainsi que l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,

- condamner solidairement et indéfiniment M. et Mme [K] [X] au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile outre les entiers dépens,

- condamner solidairement et indéfiniment M. et Mme [K] [X] aux entiers dépens.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 18 mai 2020, M. et Mme [K] [X], intimés, appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 1112-1, 1231-1 et 1602 du Code civil, de :

Sur l'appel de la société Diffazur :

1 - Sur la recevabilité

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé recevable l'action des époux [X],

2 - Sur la date de réception de l'ouvrage,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé au 20 septembre 2018 la date de réception judiciaire de l'ouvrage,

3 - Sur les responsabilités et le préjudice sur le défaut d'équerrage :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Diffazur de la demande en paiement de la somme de 2.551 € au titre de la bâche,

- Sur appel incident : condamner la société Diffazur au paiement de la somme de 1.683 € TTC,

Sur la rugosité du revêtement et les taches blanches :

- confirmer le jugement dont appel,

- condamner la Sarl Acp Diffazur à leur verser la somme de 7.896 € correspondant aux travaux requis pour poncer le revêtement et refaire un enduit,

Sur la fuite du skimmer :

- confirmer le jugement déféré

- condamner la Sarl Acp Diffazur à leur verser la somme de 159,60 € correspondant à la surconsommation d'eau,

- condamner la Sarl Diffazur à leur verser la somme de 630,00 € correspondant à la réfection de la plage, frais avancés par les requérants,

- dire que les frais supportés par la Sarl Acp Diffazur concernant la réparation de la tuyauterie, à hauteur de 1.106,00 € TTC, resteront à la charge de celles-ci,

Sur leur appel incident relativement au préjudice de jouissance :

- condamner la société Acp Diffazur au paiement de la somme de 5.000 € au titre du préjudice de jouissance,

Sur leur appel incident relativement au solde du marché :

- débouter la société Acp Diffazur de sa demande de paiement de la somme de 2.412 € au titre du solde du marché,

En tout état de cause :

- condamner la Sarl Acp Diffazur à leur payer la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner la Sarl Acp Diffazur aux e2 ntiers dépens, ceux de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 12 octobre 2021.

SUR CE, LA COUR :

1°/ Sur l'action en responsabilité

a) Sur la recevabilité de l'action

Selon devis accepté le 2/10/2014 les époux [K] [X] sont liés à la société Acp Diffazur par contrat d'entreprise, ayant chargé ladite société de la réalisation pour leur résidence secondaire d'une piscine de forme rectangulaire de 14 m de long et 5 m de large, de type bassin de jeux (pente composée), avec ferraillage, béton projeté, un escalier trois marches avec banquette, revêtement dit « Crystalroc » couleur pleine masse sable, filtre à sable, pompe avec pré-filtre, 2 skimmers, trois refoulements avec jet orientable, une bonde fond, une prise balai, raccordements en tuyauterie Pvc, armoire électrique, accessoires, margelles en travertin, 2 projecteurs, et abri technique, électrolyseur au sel, pour un coût total de 48.240 € TTC, le démarrage des travaux étant prévu pour fin octobre 2014.

Se plaignant de désordres, malfaçons et/ou non conformités affectant les travaux réalisés par la société Acp Diffazur en exécution de ce marché de travaux, ils sont recevables à agir à l'encontre de leur cocontractant pour rechercher sa responsabilité contractuelle, qu'il s'agisse de la garantie légale du constructeur sur le fondement de l'article 1792 du code civil à supposer que les conditions en soient remplies, ou, à défaut de la responsabilité contractuelle sur le fondement du droit commun de l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil, le bien ou mal fondé des demandes au regard du régime juridique applicable relevant de l'examen au fond mais non d'une fin de non recevoir au sens des articles 122 à 126 du code de procédure civile. La fin de non recevoir opposée par l'appelante doit en conséquence être rejetée.

b) Sur la réception des travaux

Le 18/05/2015 les maîtres d'ouvrage ont signé un document intitulé « Procès-verbal de réception du revêtement et notice technique », concernant exclusivement le revêtement « Crystalroc » de la piscine mis en 'uvre par le locateur d'ouvrage, procès-verbal intervenu sans réserves. Les pièces produites au débat établissent néanmoins que la piscine n'a été totalement mise en eau que le 20 mai 2015 et que dès le 20 juin 2015, date de la mise en service, les maîtres d'ouvrage ont alerté le pisciniste sur l'apparition d'un phénomène de tâches blanches, notifié de nouveau par e-mail du 3 juillet 2015 en réponse à la demande de Acp Diffazur de fixer une date de réception de l'entier bassin. Par e-mail du 10 juillet 2015 le pisciniste a confirmé avoir constaté ce phénomène le 3 juillet 2015 et avoir saisi son bureau de recherche pour résoudre le problème avec analyse de l'eau de remplissage et de celle du bassin.

Il ressort du courrier de Acp Diffazur du 23 octobre 2015 que les traces blanches sont apparues essentiellement sur le revêtement en eau et non au-dessus de la ligne d'eau, que l'analyse de l'eau de remplissage opérée début juillet 2015 avait révélé un taux de TAC (teneur en carbonates) de l'eau de remplissage provenant de l'eau de ville très élevé (21° au lieu d'une norme entre 9 et 14 °), caractéristique d'une eau entartrante entraînant le dépôt de calcaire sur le revêtement, que le 31 août 2015 les analyses de l'eau révélaient un TAC à 27,5° et un TH (taux de dureté de l'eau) à 15 °, hors normes, et qu'un traitement du bassin à l'acide pour éliminer le calcaire et abaisser le TAC a été réalisé ; que néanmoins, après s'être estompé au bout d'une semaine, le voile blanc est réapparu 15 jours après, la Sarl Acp Diffazur mettant en exergue une teneur en TAC très élevée ayant entraîné secondairement la transformation des bicarbonates en carbonate de calcium élevant le TH et faisant apparaître le voile blanc et expliquant que les particules de calcaires soulevées par l'acide s'étaient redéposées sur le revêtement, le rendant rugueux. Le 20 octobre 2015, date à laquelle devait intervenir la réception de l'entier bassin, et où a été mandatée Me [H] [D], huissier de justice, pour l'établissement d'un constat contradictoire du bassin en présence de Mme [S], responsable de l'agence Diffazur Toulouse, de M. [F], conducteur de travaux, et des époux [K] [X], le TAC était à 20°, le Ph au-dessus de 8.4 et le sulfate dans la piscine élevé à 142mg/l, dont 49 mg/l dans l'eau de remplissage, de nouvelles analyses devant être réalisées sous un mois. L'huissier a constaté que si la partie du revêtement hors d'eau était relativement lisse, en revanche les parois et le fond de la piscine étaient rugueux au toucher, avec dépôt de calcaire plus ou moins blanc et granuleux à certains endroits, y compris sur les marches, nez de marches, robot, et une incrustation dans le support. Il a été procédé à cette date à un brossage ainsi qu'à l'apport d'anti-calcaire et d'acide chlorhydrique.

Si les époux [K] [X] ont entendu émettre des réserves à la réception des travaux prévue pour être contradictoirement formalisée le 20 octobre 2015, réserves portant tant sur le revêtement de la piscine que sur un problème d'équerrage du bassin, le procès-verbal de réception proposé à la signature de la Sarl Acp Diffazur avec réserves n'a pas été signé par cette dernière qui refusait les réserves mentionnées par les maîtres d'ouvrage. Aucun procès-verbal de réception de l'ensemble des travaux n'a été signé contradictoirement entre les maîtres d'ouvrage et l'entreprise. Au surplus les maîtres d'ouvrages n'ont jamais réglé le solde de la facturation adressée le 18/09/2015, d'un montant de 2.412 €, persistant ainsi dans leur non acceptation de l'ouvrage livré.

Dans ces conditions il ne peut être considéré que l'ensemble des travaux confiés à la Sarl Acp Diffazur par les époux [K] [X] a fait l'objet d'une réception au 20 octobre 2015 comme le soutient aujourd'hui l'entreprise.

L'expertise judiciaire, dont le rapport a été déposé le 20 septembre 2018, révèle que le problème de calcaire et de rugosité consécutive du revêtement intérieur du bassin de baignade était toujours patent lors de la première réunion du 30 juin 2016, que de surcroît des fuites s'étaient manifestées début décembre 2015 qui n'ont été réglées par la Sarl Acp Diffazur que début janvier 2018, le solde du marché restant toujours impayé.

Les deux parties souhaitant la détermination d'une date de réception de nature à constituer le point de départ de la garantie décennale du constructeur, le premier juge a justement fixé la date de réception judiciaire à la date du dépôt du rapport d'expertise, soit au 20 septembre 2018, disposition dont les intimés, maîtres d'ouvrage, sollicitent la confirmation nonobstant le non paiement du solde du marché à ladite date.

Tous les désordres invoqués étant apparus avant cette réception judiciaire, la responsabilité de la Sarl Acp Diffazur ne peut être recherchée que sur le fondement contractuel de droit commun.

c) Sur les désordres ou non conformités imputables à la Sarl Acp Diffazur

* Sur le défaut d'équerrage du bassin

Le marché de travaux liant les parties prévoyait, plan à l'appui, la réalisation d'un bassin rectangulaire de 14 ml de longueur totale (escalier inclus) sur 5 ml de largeur.

Il résulte du rapport d'expertise que le bassin réalisé présente un défaut de géométrie, une des largeurs étant plus courte que l'autre de 14 cm, défaut dont l'expert précise qu'il ne pouvait être décelé à l'oeil nu sans mesurage des dimensions du bassin.

Les conditions générales du contrat signé entre les parties prévoient en leur article 10 une tolérance contractuelle d'environ 5% dans chaque dimension, c'est à dire, celles prévues au contrat (longueur, largeur, profondeur), le plan annexé au devis ne faisant aucune référence aux diagonales. Il en résulte que la Sarl Acp Diffazur a réalisé un ouvrage avec une différence de mesurage entre les deux largeurs hors tolérance contractuelle ce qui constitue une faute de nature à engager sa responsabilité.

Soutenant subir un préjudice des suites de ce défaut d'équerrage résultant de l'impossibilité pour eux d'installer dans le futur une couverture automatique immergée, les intimés, appelants incident sur ce point, sollicitent la condamnation de la Sarl Acp Diffazur à leur payer la somme de 1.683 € retenue par l'expert au vu de l'e-mail adressé par cette dernière le 20 avril 2015.

Il doit être observé que la nature exacte des travaux à réaliser pour reprendre le bassin, chiffrée par l'entreprise sans autre précision, n'est pas identifiée.

Au demeurant, en compensation, la Sarl Acp Diffazur a proposé dès le 20 avril 2015 de fournir gracieusement une bâche d'hivernage « grilibre » d'un coût de 2.511 € Ttc ainsi qu'une mise en place avec prestation d'hivernage gratuite.

Cette bâche a effectivement été fournie aux époux [K] [X], mentionnée comme offerte dans la facture du 18 septembre 2015.

Il a en outre été justifié lors de l'expertise judiciaire de la possibilité future d'envisager la pose d'un volet roulant hors sol.

L'impossibilité d'une pose future d'une couverture automatique immergée, prestation non prévue ni envisagée lors de la signature du contrat, en conséquence purement hypothétique, ne peut en conséquence caractériser un préjudice indemnisable alors que les époux [K] [X] se sont vu offrir gracieusement pour assurer la protection de leur piscine une couverture d'hivernage dont ils ont accepté la livraison et qu'ils n'offrent ni de rendre ni de régler, d'un coût bien supérieur au prix de la reprise du bassin, au demeurant non explicité dans ses modalités, tel que retenu par l'expert judiciaire, et que la possibilité future de l'installation d'une fermeture automatique hors sol n'est pas exclue.

En conséquence, les époux [K] [X] ne justifiant pas d'un préjudice subsistant indemnisable résultant du défaut d'équerrage du bassin de la piscine doivent être déboutés, ainsi que retenu par le premier juge, de leur demande tendant au paiement d'une somme de 1.683 €.

La Sarl Acp Diffazur qui a offert gracieusement la bâche en compensation du défaut d'équerrage qui lui était imputable ne peut quant à elle prétendre au paiement de cette bâche. Ajoutant au jugement entrepris dès lors qu'elle ne formule plus cette demande à titre subsidiaire, il convient en conséquence de l'en débouter.

*Sur le revêtement du bassin

L'expert judiciaire a constaté la rugosité du revêtement du bassin de la piscine sur sa surface immergée et son agressivité pour la peau des baigneurs potentiels. Cette situation résulte de l'agressivité particulière de l'eau de ville alimentant le bassin, révélée de manière réitérée par les différentes analyses réalisées depuis le mois de juin 2015 et qu'aucun des traitements effectués par la Sarl Acp Diffazur depuis la manifestation du phénomène à peine un mois après la première mise en eau n'a été en mesure de palier. L'agressivité de l'eau entraîne un déséquilibre calco-carbonique générant par réaction chimique la dissolution des composés du liant (ciment) du revêtement à base de calcium.

Lors de la première réunion d'expertise du 30 juin 2016 l'expert a fait prélever des échantillons. Les analyses réalisées ont révélées un TAC de l'eau de ville dans les normes(12,6) , de l'eau du bassin en dessous des normes (7,5), un pH régulé, mais une agressivité de l'eau certaine vis à vis du revêtement (taux Is). L'expert précise que pour l'obtention d'une eau de baignade confortable il est nécessaire de régler fréquemment le pH, surtout en présence d'un électrolyseur de sel comme en l'espèce, ce qui implique l'emploi de produits acides ayant tendance à rendre l'eau agressive, et que si les caractéristiques de l'eau analysée en juin 2016 prévenaient toute incrustation, leur maintien, s'agissant de l'agressivité de l'eau relevée, entraînait la dissolution du calcium contenu dans le liant du revêtement, la libération consécutive du granulat (sable) le composant, et la détérioration du revêtement.

Aucun défaut d'entretien de la part des maîtres d'ouvrage n'est caractérisé en l'espèce, alors que le phénomène a été signalé un mois après la mise en eau et qu'aucune des interventions réalisées par le professionnel lui-même n'a été à même de le régler.

S'il est exact que lors de la livraison du revêtement une notice technique a été remise aux maîtres d'ouvrage contenant diverses préconisations d'entretien et de maintenance, notamment le contrôle et le maintien dans les normes du pH, du TAC et du TH, nécessitant a minima des contrôles hebdomadaires voire davantage, il n'est pas justifié par le locateur d'ouvrage de la réalisation, avant le choix du revêtement par les maîtres d'ouvrage, d'une analyse de l'eau de ville devant alimenter le bassin pour vérifier sa dureté et son agressivité et sa compatibilité avec le revêtement à base de ciment compte tenu de la prévision d'un électrolyseur de sel impliquant l'emploi de produits acides renforçant l'agressivité de l'eau, ni d'une information donnée sur la charge renforcée des contrôles multiples en résultant à effectuer par les propriétaires dans ce contexte particulier alors que la piscine était à aménager dans une résidence secondaire, donc sans présence permanente, situation non ignorée du pisciniste. Or le vendeur-installateur, tenu d'une obligation d'information et de conseil, doit, afin que la vente soit conclue en connaissance de cause, s'informer des besoins de l'acheteur et l'informer consécutivement des contraintes techniques de la chose vendue et de son aptitude à atteindre l'objectif recherché tout comme de l'adéquation du bien objet de la vente avec l'utilisation que souhaite en faire le client.

La Sarl Acp Diffazur a donc manqué à ses obligations de vendeur professionnel à l'égard des époux [K] [X], leur fournissant un revêtement certes appréciable par ses qualités intrinsèques esthétiques et de douceur annoncée, mais très contraignant pour le maintien de sa pérennité compte tenu des qualités de l'eau de ville de remplissage et de la prévision d'un électrolyseur de sel impliquant l'emploi régulier de produits acides aggravant l'agressivité naturelle de l'eau, le tout impliquant un contrôle assidu des différents taux pour éviter un délitement du revêtement par réaction chimique difficilement compatible avec un usage de résidence secondaire sauf à préconiser comme indispensable une prestation complémentaire d'entretien et de maintenance par un professionnel, situation sur laquelle il n'est pas davantage justifié que les époux [K] [X] aient été dûment avisés avant de s'engager.

La Sarl Apc Diffazur a certes proposé à titre de solution réparatrice la réalisation à ses frais d'un ponçage du revêtement endommagé pour lui redonner son aspect d'origine. Mais cette proposition ne règle pas le problème de fond de l'équilibrage de l'eau compte tenu des qualités intrinsèques de cette dernière. Elle a aussi suggéré, l'installation d'une station de régulation du pH. Sur ce point, l'expert judiciaire précise qu'une telle installation ne doit pas être mise en service avant l'équilibrage de l'eau et le réglage du pH par intervention manuelle, et qu'en toute hypothèse elle ne dispense nullement du contrôle manuel hebdomadaire du TAC et du pH et si nécessaire du réglage du TAC.

Il résulte du tout que le revêtement commandé et mis en place n'était pas adapté à l'usage d'une résidence secondaire dans laquelle les époux [K] [X] ne se rendaient qu'irrégulièrement et dont ils n'étaient pas en mesure d'assurer eux-mêmes les contrôles rigoureux de la qualité de l'eau compte tenu des contraintes inhérentes à ses spécificités et aux risques de dégradation aggravés par l'usage des produits acides découlant d'une électrolyse au sel. En l'absence de toute autre solution fiable et pérenne, les époux [K] [X] sont bien fondés à solliciter à titre de réparation l'enlèvement du revêtement litigieux et son remplacement par un produit non soumis à détérioration par réaction chimique tel que proposé par M.[I] selon devis du 21 novembre 2018 régulièrement produit au débat, pour un coût de 7.896 € tel que retenu par le premier juge dont la décision sur ce point doit être confirmée.

*Sur les fuites

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire qu'une perte d'eau anormale a été constatée fin novembre 2015, le technicien de Diffazur ayant alors diagnostiqué une fuite sur le réseau skimmer le plus proche de l'escalier qu'il n'a pu localiser précisément de sorte que le skimmer concerné a été condamné. Le 9 décembre 2015 la piscine a été vidée pour identifier les points de fuite : deux points de fuite ont été identifiés au niveau des presse-étoupe des projecteurs, qui ont fait l'objet d'une réparation, la fuite sur le réseau skimmer est restée non identifiée. A titre préventif une reprise d'étanchéité a été réalisée autour des pièces scellées (skimmers, projecteurs, bonde de fond).

Pour déterminer l'origine de la fuite sur le réseau skimmer, lors de la réunion d'expertise du 3 novembre 2017, afin de mettre à jour les tuyauteries, la dalle de plage de piscine a été partiellement démolie. Les fouilles du remblai, réalisées par la Sarl Acp Diffazur ont permis de constater que le défaut d'étanchéité affectait un emmanchement d'une portion de tuyau dans un coude, la tuyauterie étant, de manière inhabituelle, constituée d'une succession de coudes à 90°. La société Acp Diffazur a procédé à la réparation, mais dès le 4 novembre des fuites ont été constatées sous le skimmer puis sur le skimmer. Une visite technique d'expertise a été réalisée en urgence par l'expert le 21 novembre suivant, à l'occasion de laquelle l'examen du skimmer a révélé une fissure traversante de la sortie dans laquelle était vissée l'embout de la tuyauterie. La réparation, consistant en une modification de la tuyauterie permettant son raccordement à la deuxième sortie (inutilisée) du skimmer et la condamnation définitive de la sortie cassée, a été réalisée par la Sarl Acp Diffazur le 5 janvier 2018.

L'expert précise que s'agissant de la fuite originelle, elle provenait d'une réalisation incorrecte, non conforme aux règles de l'art, du raccordement du tuyau dans le coude et, s'agissant de la fissuration du skimmer constatée le 21 novembre 2015, qu'elle résultait de contraintes radiales excessives causées par une quantité trop importante de ruban d'étanchéité (Téflon) sur le filetage de l'embout avant son vissage lors de la réparation effectuée le 3 novembre.

La Sarl Acp Diffazur ne formulant aucune demande au titre des réparations des fuites qu'elle a assumées et qui lui incombaient, la demande des époux [K] [X] tendant à ce qu'il soit jugé que l'entreprise conserve à sa charge les frais de réparation de la tuyauterie se trouve sans objet.

Les fuites, signalées fin novembre 2015, imputables au constructeur et réparées efficacement le 8 janvier 2018 ont nécessité pour leur recherche et leur traitement en décembre 2015 la vidange complète de la piscine, générant consécutivement une surconsommation d'eau dont la Sarl Acp Diffazur doit assumer les conséquences financières dommageables et que le premier juge a justement évaluée au vu des pièces produites à 159,60 €.

En outre, la recherche de l'origine des fuites a nécessité la démolition partielle de la dalle de plage dont la réparation a été assurée par M.[I], maçon, pour un coût facturé aux époux [K] [X] de 630 €. Cette prestation, conséquence dommageable des manquements aux règles de l'art de la Sarl Acp Diffazur dans la réalisation des raccordements, doit en conséquence être mise à la charge de cette dernière au titre de la réparation due aux maîtres d'ouvrage, la décision du premier juge devant être confirmée sur ce point.

d)Sur le préjudice de jouissance

Compte tenu du caractère devenu abrasif du revêtement aux regard des réactions chimiques dues à l'agressivité de l'eau telles que relevées ci-dessus, apparu très rapidement après la mise en eau, l'expert précisant que la dégradation de la surface du revêtement rendait ce dernier agressif pour les baigneurs et que le risque de blessure était de nature à remettre en cause la conformité de l'ouvrage à sa destination, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge et à ce que soutient la Sarl Acp Diffazur, les époux [K] [X] n'ont pas pu jouir pleinement et sereinement notamment en famille de leur piscine acquise pourtant pour un prix conséquent, et ce, pendant plus de deux ans. Cette situation justifie, infirmant le jugement entrepris, l'octroi d'une indemnisation complémentaire au titre du préjudice de jouissance imputable aux manquements contractuels de la Sarl Acp Diffazur qui doit être justement évaluée au regard de la durée des troubles à 2.500 €.

2°/ Sur le solde du marché et le compte entre les parties

La réception judiciaire étant prononcée et les époux [K] [X] obtenant réparation de l'intégralité des préjudices imputables aux manquements contractuels de la Sarl Acp Diffazur, ils se trouvent redevables du solde du marché de travaux resté impayé pour un montant de 2.412 € au paiement duquel le premier juge les a justement condamnés.

Compte tenu du montant de la créance indemnitaire des époux [K] [X] ressortant à 11.185,60 € (7.896+159, 60+630+2500), après compensation avec le solde de sa créance au titre du solde du marché de travaux, la Sarl Acp Diffazur se trouve redevable envers les époux [K] [X], infirmant le jugement entrepris, de la somme de 8.773,60 € au paiement de laquelle elle doit être condamnée outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2019, date du prononcé du jugement de première instance partiellement infirmé, en application des dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

3°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Confirmé pour l'essentiel de ses dispositions le jugement entrepris doit aussi être confirmé quant à ses dispositions relatives aux dépens de première instance et à l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance.

Succombant en appel la Sarl Acp Diffazur supportera les dépens d'appel. Elle se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Rejette la fin de non recevoir invoquée par la Sarl Acp Diffazur

Confirme le jugement entrepris sauf en ce que le premier juge a débouté les époux [K] [X] de leur demande d'indemnisation au titre du préjudice de jouissance et a condamné après compensation entre les créances respectives des parties la Sarl Acp Diffazur à payer aux époux [K] [X] la somme de 6.273,60 €

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la Sarl Acp Diffazur de sa demande en paiement de la somme de 2.551 € au titre de la bâche

Dit que la Sarl Acp Diffazur est redevable envers les époux [K] [X] d'une indemnité de 2.500 € en réparation de leur préjudice de jouissance

Après compensation entre les créances respectives des parties, condamne la Sarl Acp Diffazur à payer à M. [A] [K] [X] et Mme [Z] [K] [X] son épouse, pris ensemble, la somme de 8.773,60 € outre intérêts au taux légal à compter du 8 octobre 2019

Condamne la Sarl Acp Diffazur aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [A] [K] [X] et Mme [Z] [K] [X] son épouse, pris ensemble, une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

Déboute la Sarl Acp Diffazur de sa demande d'indemnité sur ce même fondement.

Le Greffier Le Président

N. DIABY C. ROUGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/05061
Date de la décision : 05/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-05;19.05061 ?
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