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18/07/2022 | FRANCE | N°22/00117

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Referes 1° president, 18 juillet 2022, 22/00117


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E





DU 18 Juillet 2022





ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



136/22



N° RG 22/00117 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O3HD

Décision déférée du 10 Mai 2022

- TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulouse -





DEMANDERESSES



S.C. [Z]

[Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Aurélien DUCAP de la SELARL DUCAP, avocat au barreau de TOULOUSE







DEFENDEURS



PÔLE DE RECOUVREMENT SPÉCIALISÉ DE LA HAUTE GARONNE (PRS)

[Adresse 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par Me Frederic SIMONIN de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barrea...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E

DU 18 Juillet 2022

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

136/22

N° RG 22/00117 - N° Portalis DBVI-V-B7G-O3HD

Décision déférée du 10 Mai 2022

- TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Toulouse -

DEMANDERESSES

S.C. [Z]

[Adresse 7]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Aurélien DUCAP de la SELARL DUCAP, avocat au barreau de TOULOUSE

DEFENDEURS

PÔLE DE RECOUVREMENT SPÉCIALISÉ DE LA HAUTE GARONNE (PRS)

[Adresse 8]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Frederic SIMONIN de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. BDR & ASSOCIES

pris en la personne de Maitre [P] [T] [K]

en qualité de mandataire liquidateur de la société SCCV ESTIVAL 2

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée à l'audience par Me Victor THOMAS du cabinet substituant Me Sébastien BRUNET-ALAYRAC de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

DÉBATS : A l'audience publique du 11 Juillet 2022 devant Christine ROUGER, assistée de M.[F]

MINISTERE PUBLIC :

Représenté par M. JARDIN, substitut général, absent lors des débats, qui a fait connaître son avis par écrit

Nous, Christine ROUGER, conseiller déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président en date du 06 juillet 2022, en présence de notre greffier et après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications :

- avons mis l'affaire en délibéré au 18 Juillet 2022

- avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, l'ordonnance suivante :

FAITS ' PROCÉDURE ' PRÉTENTIONS :

Par acte du 1er octobre 2019, le comptable du Pôle de recouvrement spécialisé (PRS) de la Haute-Garonne a fait assigner la Sccv [Z] en ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire devant le tribunal de grande instance de Toulouse pour l'audience du 12 novembre 2019, invoquant une créance de 928.031,12 € au titre de l'impôt sur la Tva pour une période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017, d'une amende fiscale pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2017, et de la cotisation foncière des entreprises de l'exercice 2018, outre pénalités.

Après un premier renvoi au 14/01/2020, l'affaire faisait l'objet de renvois successifs en raison tant de la grève des avocats que des périodes de confinement dues à l'épidémie de Covid 19.

Le 7/09/2020 la Sccv [Z] indiquait que par requête avec effet suspensif déposée devant le tribunal administratif le 21 août 2020, un nouveau renvoi était sollicité dans l'attente de la décision de cette juridiction.

Par jugement du 11 janvier 2022 le PRS était invité à préciser pour quelles créances la demande d'ouverture de procédure collective était sollicitée compte tenu du recours devant le tribunal administratif , invitant les parties à développer tout moyen, fin de non recevoir, irrecevabilité et prétentions avant le 8 mars 2022 date à laquelle l'affaire était renvoyée.

Par courrier du 7/01/2022 le PRS avait précisé que les créances exigibles s'élevaient à 6.049,80 € et celles contestées devant la juridiction administrative à 699.593,12 €.

L'affaire a été retenue à l'audience du 8 mars 2022, les parties étant néanmoins autorisées à déposer une note en délibéré.

Le 11 avril 2022, la Sas Loris Développement procédait au règlement de la créance exigible par virement bancaire pour le compte de la Sccv [Z], règlement enregistré le 13 avril .

Le 13 avril 2022 la Sccv [Z] par note en délibéré soulevait la péremption de l'instance, et contestait sur le fond l'action en liquidation.

Par note du 19/04/2022 le PRS actualisait sa créance exigible concernant 9 sociétés civiles dites « du groupe » à savoir les sociétés Netwiller, Estival, Lalande, Mourlas, La Terrasse, Renoir, Estival 2, [Z] et Sept Deniers, intégrant les règlements encaissés le 13/04/2022 de la part d'une Sas Loris Développement, faisant ressortir sur un montant global exigible de 46.764,41 € un total de règlements au 13/04/2022 de 44.960,39 €, soit un solde dû de 1.804,02 €, et identifiant les sommes dues au titre de la contribution foncière 2021 outre majoration de 5 % pour un total de 16.053 €, dont 3.000 € pour la Sccv [Z], contestant toute péremption d'instance et maintenant la demande de liquidation judiciaire en relevant que la totalité des créances exigibles à l'égard des diverses sociétés ressortait à 15.335,02€, que les sociétés n'avaient plus d'activité, qu'elles ne disposaient pour sept d'entre elles d'aucun compte bancaire, les règlements effectués le 13 avril 2022 émanant d'une société tierce et qu'elles étaient défaillantes fiscalement au regard de leurs obligations déclaratives notamment en matière de résultats, relevant en outre que les autres créances objets des assignations faisaient de manière dilatoire l'objet d'une instance devant le tribunal administratif de Toulouse.

Par jugement du 10 mai 2022 exécutoire de droit par provision, le tribunal judiciaire de Toulouse a :

- rejeté l'exception de péremption d'instance de la Sccv [Z],

- constaté que la Sccv [Z] ne peut pas faire face à son passif exigible avec son actif disponible,

- ouvert une procédure de liquidation judiciaire,

- fixé la date de cession des paiements au 17 octobre 2019,

- dit qu'il sera fait application de la liquidation simplifiée, conformément aux articles L644-1 et suivants du Code du commerce,

- désigné en qualité de liquidateur Maître [P] [T] [K] de la Sas BDR & Associés,

- désigné Mme [M], juge commissaire, et Mme Tavernier, juge commissaire suppléant,

- commis Maître [K] [I], commissaire priseur, pour faire l'inventaire et la prisée s'il y a lieu, en application de l'article L622-6 du code de commerce,

- ordonné la publication du jugement conformément à la loi,

- rappelé que les créanciers disposent d'un délai de deux mois à compter de la publication du jugement au BODACC pour effectuer la déclaration de leurs créances,

- dit qu'en application des dispositions de l'article L644-3 du code de commerce le liquidateur procédera à la vérification des seules créances susceptibles de venir en rang utile dans les répartitions et des créances résultant d'un contrat de travail,

- dit qu'en application de l'article L644-5 du code de commerce, la question de la clôture et de la procédure sera examinée au terme du délai de six mois,

- ordonné la communication du jugement aux autorités citées à l'article R621-7 du code de commerce et sa mention aux registres et répertoires prévus à l'articl R621-8 du Cpde,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

La Sccv [Z] a interjeté appel de cette décision le 25 mai 2022.

Par acte du 20 juin 2022, elle a fait assigner le Pôle de recouvrement spécialisé de la Haute Garonne et la Sas BDR & Associés prise en la personne de Me [P] [T] [K] en qualité de liquidateur, en référé devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse, sur le fondement de l'article R.661-1 du code de commerce, pour voir :

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de plein droit attachée au jugement du tribunal judiciaire du 10 mai 2022,

- condamner le Pôle de recouvrement spécialisé de la Haute-Garonne à lui payer la somme de 1 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle a déposé des conclusions enregistrées au greffe le 11 juillet 2022.

Au visa de l'article R 661-1 du code de commerce, elle soutient justifier de moyens sérieux de réformation.

Elle conteste toute irrecevabilité de son appel alors que le jugement entrepris n'est pas une décision sur l'application à la procédure des règles de la liquidation judiciaire simplifiée telle que prévue par l'article R 644-1 du code de commerce mais bien un jugement d'ouverture de la procédure collective, en l'espèce la liquidation judiciaire dont elle a relevé appel du prononcé.

Elle soutient au visa des articles 386, 387 et 388 du code de procédure civile, que l'instance était périmée au plus tôt le 1er octobre 2021. Elle considère que le délai de deux ans ne pouvait pas être suspendu par les périodes de confinement ; qu'en effet si l'article 2 de l'ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 s'applique bien au délai de péremption, c'est uniquement sous la réserve expresse que ce délai soit arrivé à échéance pendant la période juridiquement protégée qui a pris fin le 23 juin 2020, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque la péremption d'instance n'était pas acquise durant la période juridiquement protégée. Elle relève qu'une demande de renvoi fut-elle conjointe n'est pas une diligence caractérisant la volonté de voir aboutir l'instance interruptive de la péremption et qu'il n'existe en l'espèce aucun lien de dépendance entre l'instance pendante devant le tribunal administratif saisi d'une demande de décharge des rappels de Tva contestés et l'instance pendante devant la juridiction civile, dès lors qu'elle a été mise en liquidation pour une somme non contestée de 3.000 € au titre de la contribution foncière entreprise, qu'au surplus les parties ne sont pas identiques dans les deux instances. Elle relève que la présentation d'un pouvoir par Mme [Y] devant le Tribunal pour représenter le PRS pour soutenir une audience de renvoi n'a aucune incidence sur le délai de péremption, ne pouvant être assimilé à une constitution interruptive de péremption.

Elle déduit du tout que le premier juge ayant rejeté à tort la demande de péremption, il existe des chances importantes d'annulation du jugement de première instance.

Par ailleurs elle relève qu'afin d'assigner en redressement ou liquidation judiciaire le créancier doit prouver l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible à l'encontre du débiteur puisque seul le passif de cette nature est constitutif de la cessation des paiements ; qu'en l'espèce le caractère certain et exigible d'une créance à son encontre fait défaut, la créance exigible ayant été réglée le 11 avril 2022 avant que le premier juge ne statue, le PRS ayant invoqué en cours de délibéré une nouvelle créance qui n'était pas identifiable et individualisée dans ses écritures et qui n'a fait l'objet d'aucun débat contradictoire avant que le juge ne statue, lequel a pourtant prononcé la liquidation judiciaire au vu de cette nouvelle créance invoquée en cours de délibéré et dont il ne pouvait pas tenir compte.

Elle soutient qu'en application de l'article R 631-2 du code de commerce l'assignation du créancier précise la nature et le montant de la créance et contient tout élément de preuve de nature à caractériser l'état de cessation des paiements ; que dans ses écritures du 19 avril 2022 le PRS indique qu'il resterait une nouvelle créance exigible globale de 15.335,02 € pour toutes les Sccv, sans identifier celle imputable à la Sccv [Z] ; que le premier juge a fait référence à une créance de 3.000 € alors que ce montant ne serait nullement précisé dans la note en délibéré du 19 avril 2022, seul figurant le montant global pour toutes les Sccv.

Elle soutient en outre que la cessation ou l'absence d'activité n'est pas une cause d'ouverture de la liquidation judiciaire immédiate au regard des dispositions de l'article L 640-1 du code de commerce, que l'ouverture de la liquidation judiciaire suppose que soit démontrée l'absence d'actif disponible suffisant pour faire face au passif exigible, l'absence d'activité ou de compte bancaire n'étant pas suffisant pour caractériser l'état de cessation de paiement en l'absence de preuve d'une créance exigible impayée et d'un actif insuffisant ; que surtout il n'existe aucun acte de poursuite ou de saisie concernant cette nouvelle créance de 3.000 € de sorte que le PRS n'apporte aucun élément de preuve de nature à caractériser la cessation des paiements du débiteur. Elle estime que les procédures ou voies d'exécution engagées pour le recouvrement de la créance sont trop anciennes pour permettre d'apprécier un état de cessation de paiement sur la seule base de la nouvelle créance de 3.000 € dans la mesure où venait d'être réglée une somme de 6.049,80€. S'agissant du passif invoqué par le mandataire liquidateur, elle explique que ces sommes sont devenues exigibles du fait de l'ouverture de la liquidation judiciaire, ces créances ayant dû être payées à leur terme du fait des livraisons et ventes d'appartements si précisément elle n'avait pas été mise en liquidation.

Elle relève que le premier juge a prononcé d'office une liquidation judiciaire simplifiée alors que celle-ci n'est applicable que s'il apparaît que l'actif du débiteur ne comprend pas de bien immobilier ce qui n'est pas son cas, étant propriétaire du foncier sur lequel elle construit des immeubles pour les revendre, notamment du foncier situé au [Adresse 1] ; que surtout il a ordonné cette mesure en statuant ultra petita puisqu'elle n'était pas demandée par les parties, et qu'il a visé des articles du code de commerce erronés ou inapplicables.

Par conclusions enregistrées au greffe du Premier président le 11 juillet 2022 le comptable du PRS conclut au rejet de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire en l'absence de moyens sérieux de réformation du jugement de première instance.

Sur la péremption il estime que la Sccv ayant elle-même sollicité le renvoi, elle est mal fondée à invoquer la péremption ; que le renvoi qui résulte des diligences d'une partie a précisément pour effet d'interrompre la péremption d'instance et que la saisine du tribunal administratif a elle-même interrompu la péremption dès lors qu'il existe entre les deux instances un lien de dépendance direct et nécessaire ce qui est le cas en l'espèce. Il déduit du fait que Mme [Y] ait été mandatée pour le représenter à l'audience du 9 mars 2021 qu'il s'agit d'une diligence de sa part manifestant la volonté de continuer l'instance ayant pour effet d'interrompre la péremption et estime qu'il ressort du tout qu'il n'existe aucune chance sérieuse de réformation du jugement de première instance s'agissant du rejet de la péremption d'instance.

Il soutient que la décision de prononcer la liquidation judiciaire simplifiée au lieu d'une liquidation judiciaire est une mesure d'administration judiciaire non susceptible de recours et que si le jugement prononce la liquidation judiciaire et simultanément décide de faire application des règles de la liquidation judiciaire simplifiée, le recours ne pourra porter sur la partie du dispositif de la décision décidant l'application des règles de la liquidation judiciaire simplifiée ; qu'ainsi aucun moyen sérieux de réformation n'est caractérisé de ce chef.

Il maintient que la Sccv est en état de cessation des paiements au-delà de la créance de Tva contestée, puisque l'administration fiscale détiendrait sur la société diverses créances au titre de la taxe foncière pour les années 2018 et 2021 d'un montant de 23.249 € et de la cotisation foncière des entreprises 2021 pour 2.857 €, de telle sorte que le passif fiscal à ce jour exigible s'élèverait à 26.106 € alors que les différentes mesures d'exécution mises en 'uvre se sont toutes avérées vaines, que la Sccv ne dispose d'aucun compte bancaire ouvert à son nom, que la Sas JD Promotion, associée à 99,66 % de la Sccv [Z] a été placée sous protection du tribunal dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire depuis le 22/06/2022 sur assignation du PRS et que la Sccv n'a pas une activité propre à lui permettre de désintéresser les créanciers ni de perspective de redressement, les déclarations de Tva déposées démontrant un niveau d'opérations quasi-inexistant depuis le début de l'année 2020. Il relève que la Sccv ne justifie pas de son absence d'état de cessation des paiements ainsi que de possibilités de redressement en l'absence d'actif disponible et alors qu'elle a été l'objet de plusieurs instances de la part d'autres créanciers ayant donné lieu à des titres exécutoires, créanciers qui ont déclaré leurs créances à la procédure, démontrant ainsi que le passif exigible non recouvré au moment de l'ouverture de la procédure est largement supérieur à la créance revendiquée par l'administration fiscale.

La Sas BDR & Associés prise en la personne de [P] [T] [K], mandataire liquidateur de la Sccv [Z] par conclusions enregistrées le 11 juillet 2022 sollicite le débouté de la demande d'arrêt de l'exécution provisoire en l'absence de moyens sérieux de réformation du jugement de première instance.

Elle soutient l'irrecevabilité du moyen tiré du prononcé de la liquidation judiciaire simplifiée, simple mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours. Elle estime que les moyens développés par la Sccv pour contester l'état de cessation des paiements sont dépourvus de tout caractère sérieux alors qu'elle ne dispose d'aucun compte bancaire ouvert dans les livres de la Banque Populaire, qu'elle n'a plus d'activité depuis le début de la procédure, qu'elle est redevable à tout le moins d'une somme exigible de 3.000 € dont les différentes mesures de recouvrement par voie d'exécution forcée se seraient avérées vaines, qu'une mise en demeure de payer et une nouvelle saisie diligentées à l'encontre de la Sas Jd Promotion, associée à 99,90% de la Sccv [Z] se seraient avérées inopérantes, les comptes bancaires de la Sas Jd Promotion étant également clos et cette dernière faisant l'objet d'une procédure de redressement judiciaire. Il estime que le premier juge a justement retenu que les dernières déclarations déposées au titre des exercices clos en 2016 montraient qu'à cette date son passif exigible était supérieur à son actif disponible avec un déficit fiscal de 158.330 €, un report à nouveau négatif de 261.866 €, des dettes fournisseurs et des dettes sociales de 4.500.000 €. Il précise qu'il a pour l'heure été déclaré au passif de la liquidation la somme de 7.529,31 € par la Sas Smf Services en vertu d'une ordonnance d'injonction de payer exécutoire signifiée le 26/12/2019, ainsi qu'une somme de 161.377,33 € par le Crédit Foncier de France en vertu d'un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Toulouse le 12 mai 2022, assorti de l'exécution provisoire ; qu'en toute hypothèse la Sccv ne justifie pas de son absence d'état de cessation des paiements, ne produisant aucun compte, le bien immobilier dont elle semble être propriétaire ne pouvant être assimilé à de l'actif disponible.

Par conclusions écrites du 28 juin 2022 notifiées par Rpva, le représentant du Procureur Général a émis l'avis qu'il y avait lieu à suspension de l'exécution provisoire du jugement de première instance, retenant que l'état de cessation des paiement de la Sccv [Z] n'était pas démontré et que la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ne pouvait lui être applicable dès lors qu'elle était propriétaire d'un bien immobilier.

SUR CE,

Selon les dispositions de l'article R 661-1 du code de commerce, les jugements et ordonnances rendus en matière de mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire sont exécutoires de plein droit à titre provisoire. Par dérogation aux dispositions de l'article 514-3 du code de procédure civile, le premier président de la cour d'appel, statuant en référé, ne peut arrêter l'exécution provisoire desdites décisions que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux. L'exécution provisoire des décisions prises sur le fondement de l'article L 663-1-1 peut être arrêtée en outre, lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

En l'espèce, l'assignation en référé devant le Premier président de la cour d'appel tend à l'arrêt de l'exécution provisoire de la décision de première instance ayant prononcé la liquidation judiciaire de la Sccv [Z] au motif de moyens sérieux d'annulation ou de réformation dudit jugement.

Il sera relevé que la déclaration d'appel diligentée par la Sccv [Z] le 25 mai 2022 à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Toulouse du 10 mai 2022 porte sur l'intégralité des dispositions dudit jugement, dont le prononcé de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire pour état de cessation des paiements au 17 octobre 2019, appel ouvert à la société débitrice en application de l'article L 661-1 du code de commerce. L'irrecevabilité soulevée par les intimés, défendeurs à l'instance en référé, sur le fondement de l'article R 644-1 du même code ne peut tendre qu'à l'irrecevabilité du moyen tiré de la contestation du choix par le tribunal de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée pour écarter son caractère sérieux et non à l'irrecevabilité de la déclaration d'appel.

Le premier moyen de contestation du jugement objet de l'appel porte sur le rejet par le premier juge de la demande tendant au constat de la péremption de l'instance initiée par assignation du 1er octobre 2019.

Selon les dispositions de l'article 386 du code de procédure civile l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. Selon celles de l'article 387 la péremption peut être demandée par l'une quelconque des parties. Elle peut être opposée par voie d'exception à la partie qui accomplit un acte après l'expiration du délai de péremption. Et selon celles de l'article 388, la péremption doit, à peine d'irrecevabilité, être demandée ou opposée avant tout autre moyen ; elle est de droit. Le juge peut la constater d'office après avoir invité les parties à présenter leurs observations.

L'assignation introductive d'instance ayant été délivrée le 1er octobre 2019, la péremption d'instance pouvait intervenir au plus tôt, à défaut d'interruption, au 1er octobre 2021.

Selon l'article 1er de l'ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, les dispositions relatives à la prorogation des délais pendant la période d'état d'urgence sanitaire ne sont applicables qu'aux délais et mesures qui ont expiré ou qui expirent entre le 12 mars 2020 et le 23 juin 2020. Selon l'article 2, tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrit par la loi ou le règlement à peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d'office, application d'un régime particulier, non avenu ou déchéance d'un droit quelconque et qui aurait dû être accompli pendant la période mentionnée à l'article 1er sera réputé avoir été fait à temps s'il a été effectué dans un délai qui ne peut excéder, à compter de la fin de cette période, le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois.

Il en résulte qu'un délai de péremption à échoir postérieurement à la période d'urgence sanitaire, tel qu'en l'espèce, n'a pu être affecté d'aucune suspension ou prorogation.

En matière de procédure orale, la seule comparution à une audience au cours de laquelle l'examen de l'affaire est renvoyé ne constitue pas, par elle-même, une diligence de nature à interrompre le délai de péremption de l'instance. Le fait que le PRS ait été représenté par un fonctionnaire détenteur d'un pouvoir aux audiences successives ayant donné lieu à renvoi de l'affaire à une audience ultérieure est en conséquence sans incidence sur le délai de péremption.

Par ailleurs, aucune décision de sursis à statuer dans l'attente de l'issue des contestations pendantes devant le tribunal administratif quant aux créances invoquées par l'administration fiscale de nature à interrompre l'instance engagée devant le tribunal judiciaire de Toulouse n'est intervenue en l'espèce.

La saisine du tribunal administratif par réclamation contentieuse itérative (de celle « princeps » du 6 décembre 2019) par la Sccv [Z] le 20 août 2020 aux fins d'obtenir la décharge des rappels de Tva contestés et un sursis à paiement des impositions supplémentaires de Tva se rapportant aux exercices 2014 à 2017 inclus à concurrence de 821.392 € de droits simples outre 137.101 € , ne peut caractériser une diligence interruptive de la péremption dans l'instance civile distincte en liquidation judiciaire dont elle faisait l'objet par ailleurs à l'initiative du Pôle de recouvrement spécialisé de la Haute-Garonne .

De même, en procédure orale, la demande de renvoi, serait-elle sollicitée par les deux parties à l'instance ne caractérise pas une diligence de nature à faire progresser l'affaire au sens de l'article 386 susvisé. L'accord des parties et du juge sur les renvois de l'affaire dans le cadre d'une gestion administrative du dossier ne peut à lui seul caractériser une démarche processuelle de nature à interrompre le délai de péremption de l'instance alors qu'aucune date de fixation de l'affaire en plaidoirie n'a été convenue.

Il ressort en l'espèce de l'historique de la procédure tel que relaté au jugement de première instance, non démenti, que lors de l'audience du 9/03/2021 alors que le PRS était représenté, l'affaire a de nouveau été renvoyée au 14/12/2021 à la demande de la SCCV [Z] sans que le PRS n'allègue avoir sollicité une fixation impérative ou déposé des écritures. Il apparaît au contraire que c'est par un jugement non produit du 11 janvier 2022 que la juridiction a invité le PRS a préciser pour quelles créances la procédure collective était sollicitée compte tenu du recours devant le tribunal administratif et les parties à développer tout moyen, fin de non recevoir, irrecevabilité et prétentions avant le 8 mars 2022 date à laquelle l'affaire était fixée.

En conséquence le moyen tiré de la péremption de l'instance à compter du 19 octobre 2021 à défaut de diligences des parties de nature interruptive au soutien de la demande de nullité de la décision de première instance apparaît sérieux.

Au surplus, il ressort des termes du jugement de première instance intervenu le 10 mai 2022 que la liquidation judiciaire a été prononcée de manière immédiate avec fixation de la date de cessation des paiement au 17 octobre 2019, soit antérieure de plus de 18 mois, sur la base d'une seule créance certaine liquide et exigible du PRS de 3.000 € actualisée par note en délibéré du 19 avril 2022, des dernières déclarations déposées au titre des exercices clos en 2016, et d'une incapacité à faire face à ses obligations déclaratives en matière de résultat pour 2022, tous éléments apparaissant insuffisants à caractériser un passif exigible ne pouvant être apuré, et donc un état de cessation de paiement, tant au jour du prononcé du jugement qu'à la date du 17 octobre 2019. Que par ailleurs a été prononcée ab initio une liquidation judiciaire simplifiée nonobstant le fait que par sa nature de société de construction vente, la société débitrice était propriétaire d'un tènement immobilier.

En conséquence, au regard des moyen sérieux d'annulation ou d'infirmation du jugement de première instance tels qu'invoqués par la Sccv [Z], il convient faisant droit à la demande d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de droit dont bénéficie le jugement du tribunal judiciaire du 10 mai 2022.

Le Pôle de Recouvrement Spécialisé qui succombe supportera les dépens du présent référé. L'équité ne commande pas que soit mise à sa charge une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

Statuant en référé, publiquement et contradictoirement,

Ordonnons l'arrêt de l'exécution provisoire de droit bénéficiant au jugement de liquidation judiciaire prononcé par jugement du tribunal judiciaire de Toulouse le 10 mai 2022 à l'encontre de la Sccv [Z] dans l'instance enrôlée sous le n° RG 19/03225

Condamnons le Pôle de Recouvrement Spécialisé aux dépens du présent référé

Disons n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Disons que le greffier de la cour informera le greffier du tribunal du prononcé de la présente décision

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE

M.[F]. ROUGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Referes 1° president
Numéro d'arrêt : 22/00117
Date de la décision : 18/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-18;22.00117 ?
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