La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2022 | FRANCE | N°19/04290

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 11 juillet 2022, 19/04290


11/07/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/04290 - N° Portalis DBVI-V-B7D-NHAI

A-M.R/NB



Décision déférée du 07 Août 2019 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 17/01650

(Mme. [D])

















SAMCV MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEUR MUTUALISTE (MATMUT)





C/



[S] [M]

[Z] [X] épouse [M]

[Y] [P]

[E] [W] épouse [P]

AGENCE DE FONSORBES

GROUPAMA D'OC





























































INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT...

11/07/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/04290 - N° Portalis DBVI-V-B7D-NHAI

A-M.R/NB

Décision déférée du 07 Août 2019 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 17/01650

(Mme. [D])

SAMCV MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEUR MUTUALISTE (MATMUT)

C/

[S] [M]

[Z] [X] épouse [M]

[Y] [P]

[E] [W] épouse [P]

AGENCE DE FONSORBES

GROUPAMA D'OC

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

SAMCV MUTUELLE ASSURANCE TRAVAILLEUR MUTUALISTE (MATMUT)

[Adresse 6]

[Localité 7]

Représentée par Me Nicolas JAMES-FOUCHER de la SCP JEAY - MARTIN DE LA MOUTTE - JAMES-FOUCHER, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [S] [M]

[Adresse 11]

[Localité 5]

Représenté par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [Z] [X] épouse [M]

[Adresse 11]

[Localité 5]

Représentée par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [Y] [P]

Le Bourg

[Localité 8]

sans avocat constitué

Madame [E] [W] épouse [P]

Le Bourg

[Localité 8]

sans avocat constitué

Société NOVILIS IMMOBILIER, venant aux droits de l' AGENCE DE FONSORBES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Vincent PARERA de la SELARL ARCANTHE, avocat au barreau de TOULOUSE

Société GROUPAMA D'OC

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Catherine HOULL de la SELARL CATHERINE HOULL & ASSOCIES, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 08 Novembre 2021 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

ARRET :

- PAR DEFAUT

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par R. CHRISTINE, faisant fonction de greffier.

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 20 juin 2014, M. [M] et Mme [X] épouse [M] ont acquis de M. [P] et Mme [W] épouse [P] une maison d'habitation située à [Adresse 11], pour un montant de 270.000 €.

Cette vente a été réalisée par l'intermédiaire de la Sarl L'Agence de Fonsorbes.

Par la suite, M. et Mme [M] ont découvert sur les murs extérieurs de nombreuses micro-fissures en escalier, symptomatiques selon eux d'une dégradation due à la sécheresse du sol et un défaut de planimétrie du sol, fissures jusque là dissimulées sous du lierre et des ronces.

Après s'être vainement rapprochés de leur assurance multirisque habitation, la Sa Groupama d'Oc, laquelle a refusé sa garantie en raison de l'antériorité de ces désordres à leur acquisition, ils ont mis en demeure M. et Mme [Y] et [E] [P] par courrier simple de début juillet 2014, puis recommandé des 04 octobre et 23 décembre 2014, de leur communiquer la déclaration de sinistre faite auprès de leur assureur au titre de la sécheresse.

En réponse à leur courrier recommandé en date du 22 mars 2015 tendant aux mêmes fins, la Sarl L'Agence de Fonsorbes les a informés de l'absence de toute déclaration de sinistre au titre de la sécheresse de la part des vendeurs.

Par ordonnance de référé du tribunal de grande instance de Toulouse en date du 29 mai 2015, une expertise a été ordonnée désignant M. [J] qui a déposé son rapport définitif le 13 juillet 2016.

De nouveaux désordres sont apparus en cours d'expertise, désordres pour lesquels M. et Mme [M] ont fait une déclaration de sinistre auprès de la Sa Groupama d'Oc.

Par ordonnances en date des 1er octobre 2015 et 6 janvier 2016, les opérations d'expertise ont été rendues communes d'une part à la Sa Groupama, assureur multi-risques-habitation des époux [M], et d'autre part à la Matmut, assureur habitation de M. et Mme [P].

C'est dans ces conditions que par actes d'huissier de justice en date des 20 et 21 avril 2017, M. et Mme [M] ont fait assigner M. et Mme [P], la Sarl L'Agence de Fonsorbes, la Matmut et Groupama d'Oc aux fins d'indemnisation de leurs préjudices.

Par jugement réputé contradictoire du 7 août 2019, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- mis hors de cause la compagnie d'assurances Groupama d'Oc,

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par la Matmut,

- dit que les désordres constatés sur l'immeuble de M. et Mme [M] dans le cadre de l'expertise réalisée par M. [J] sont la conséquence de l'épisode de sécheresse survenu sur la commune de [Localité 10] entre le 1er avril 2011 et le 30 juin 2011, ayant donné lieu à un arrêté de catastrophe naturelle le 2 août 2012,

- constaté que sur cette période du 1er avril 2011 au 30 juin 2011, M. et Mme [P] étaient propriétaires de ce bien et étaient assurés auprès de la Matmut,

- débouté la Matmut, assureur de M. et Mme [P], de sa demande de suspension de garantie à leur encontre, pour la période du 9 juin au 21 juin 2011 pour ce bien,

- condamné la Matmut à garantir ses assurés, M. et Mme [P],

- dit que le préjudice de M. et Mme [M] occasionné par les désordres relatifs à l'épisode de sécheresse du printemps 2011 s'élève à la somme de 84.300 € TTC,

- condamné la Matmut à payer à M. et Mme [M] au titre de la réparation de ces désordres la somme de 84.300 € TTC,

- dit que les sommes précitées seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 13 juillet 2016 jusqu'à la date du jugement,

- débouté M. et Mme [M] de leurs demandes au titre des frais de déménagement et garde-meubles, ainsi qu'au titre des dommages-intérêts pour préjudice moral et de jouissance,

- condamné la Matmut à payer les dépens, comprenant les frais d'expertise et autorisé Me Destruel à recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision,

- condamné la Matmut à payer à M. et Mme [M] la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Pour statuer ainsi le tribunal a estimé que le délai de prescription de l'action en indemnisation diligentée contre l'assureur du bien au titre des catastrophes naturelles, transmise à M. et Mme [M] lors de la vente de l'immeuble, trouvait son point de départ dans la découverte des vices consécutifs à la catastrophe naturelle et que les acquéreurs ayant assigné aux fins d'expertise le 27 avril 2015 puis, ensuite du rapport déposé le 13 juillet 2016, au fond suivant exploit des 20 et 21 avril 2017, leur action n'était pas prescrite.

Il a considéré qu'au regard des dispositions de l'article L 125-1 du code des assurances et des données de l'expertise les désordres constatés par les époux [M] étaient consécutifs à l'épisode de sécheresse ayant fait l'objet d'un arrêté de catastrophe naturelle le 2 août 2012 pour la période d'avril à juin 2011, période au cours de laquelle M. et Mme [P] étaient propriétaires non occupants de ce bien, et que ces désordres affectaient ainsi l'immeuble au moment de la vente.

Il a jugé que la demande des époux [M] au titre des frais de déménagement et de garde-meuble devait être rejetée en l'absence de prise en compte par l'expert de ce poste de préjudice et les travaux devant être réalisés à l'extérieur et au sous-sol.

Il a estimé que l'assureur multi-risques habitation qui doit assurer l'indemnisation des dommages entrant dans le cadre de la garantie catastrophe naturelle est celui dont la police était en vigueur au moment de la réalisation du risque, soit sur la période de sécheresse concernée à l'origine du sinistre telle que définie par l'arrêté interministériel, soit en l'espèce la Matmut, laquelle, en l'absence de justification de la suspension de garantie opposée pour la période du 09 au 21 juin 2011 ainsi que de l'exclusion du préjudice relatif à l'assurance dommage-ouvrage, devait sa garantie, Groupama d'Oc devant être mis hors de cause.

Il a estimé que, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les moyens invoqués par les demandeurs au titre de la garantie des vices cachés ou de l'inexécution de leurs obligations par les vendeurs, ces derniers ne pouvaient être tenus au paiement de dommages, frais de déménagement et garde-meubles, exclus de la prise en charge par l'assurance au titre d'un sinistre catastrophe naturelle. Il a jugé en outre qu'en l'absence de justification rapportée d'une volonté consciente des vendeurs de cacher la problématique, les aléas procéduraux invoqués par M. et Mme [M] s'inscrivaient dans un contexte délicat et non dilatoire et que les fissures affectant les façades n'avaient pas généré un trouble de jouissance depuis leur apparition dès lors qu'elles n'ont eu aucune incidence sur le caractère habitable de la maison.

Il a estimé enfin qu'en l'absence de toute déclaration de sinistre de la part des époux [P] et de travaux confortatifs, qui ne pouvait que conforter l'hypothèse d'un bien n'ayant subi aucun impact à la suite de cette sécheresse, et les fissures alors apparues étant dissimulées par la végétation, les époux [M] ne rapportaient pas la preuve d'une faute de l'agence immobilière, eux-mêmes ayant disposé, au moment des visites du bien et dans le temps des négociations, de l'ensemble des informations qui auraient pu justifier de leur part des investigations plus poussées.

Par déclaration en date du 1er octobre 2019, la Samcv Matmut a relevé appel de toutes les dispositions de ce jugement la concernant en intimant toutes les parties.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 1er juillet 2020, la Samcv Mutuelle Assurance Travailleur Mutualiste (Matmut), appelante, demande à la cour, au visa des articles 246 du Code de procédure civile, L.114-1 et L.125-1 du Code des assurances, 1353 et suivants du Code civil, de :

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription qu'elle a invoquée,

- dire que les recours exercés par les époux [M] et les consorts [P] à son encontre sont irrecevables car prescrits,

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a dit que sa garantie était acquise,

- dire qu'il n'est pas démontré que la sécheresse de l'année 2011 constitue la cause déterminante et exclusive des dommages causés à l'immeuble des époux [M],

En conséquence,

- prononcer sa mise hors de cause,

- débouter les époux [M] et les autres parties de l'ensemble des demandes qu'elles présentent à son encontre,

A titre subsidiaire,

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle a prononcé la mise hors de cause de la compagnie Groupama d'Oc et condamner cette dernière à la relever et garantir de l'ensemble des condamnations mises à sa charge,

A défaut,

- dire que la prise en charge des désordres et des préjudices réclamés par les époux [M] sera partagée de moitié entre les deux assureurs, Groupama d'Oc et elle-même,

A titre infiniment subsidiaire,

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle l'a condamnée à verser au profit des époux [M] une indemnité de 84.300 € au titre de la réparation des désordres,

- dire que sa condamnation au titre de ce poste ne saurait excéder 76,6% de la somme de 81.000 € TTC,

En tout état de cause,

- débouter les époux [M] de leur appel incident ainsi que de l'ensemble de leurs fins et moyens,

- débouter Groupama d'Oc de ses fins et moyens,

- infirmer la décision dont appel en ce qu'elle l'a condamnée à verser aux époux [M] une indemnité de 5.000 € au titre de leurs frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'au paiement des entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- condamner in solidum les parties qui succombent à lui payer la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 d u Code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens tant de première instance que de l'appel, dont la distraction sera ordonnée au profit de Me James-Foucher conformément à l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 4 mars 2021, M. et Mme [M], intimés et sur appel incident, demandent à la cour, au visa des articles L.125-1 du Code des assurances et 1103, 1104, 1582 et 1644 du Code civil, de :

- rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et en tout cas mal fondées,

- débouter la Matmut, la compagnie Groupama ainsi que l'Agence de [Localité 9] de l'intégralité de leurs demandes reconventionnelles,

A titre principal,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a jugé leur action non prescrite,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la Matmut en sa qualité d'assureur MRH des époux [P], au titre de la réalisation des travaux à leur payer la somme de 84.300 € TTC, outre les travaux de consolidation supplémentaires, étant précisé que ce montant est à réactualiser en fonction de l'indice de la construction en vigueur à la date de l'arrêt à intervenir,

- infirmer le jugement dont appel en condamnant la Matmut à leur payer la somme de 5.000 € au titre du préjudice moral et du préjudice de jouissance,

- à défaut, et dans l'hypothèse d'une répartition de la prise en charge du sinistre entre les assurances Matmut et Groupama, condamner la Matmut et Groupama à réparer l'entier préjudice qu'ils ont subi, à hauteur de 84.300 € TTC, montant réactualisé en fonction de l'indice de la construction en vigueur à la date du jugement à intervenir, outre les travaux de consolidation supplémentaires,

A titre subsidiaire,

- dire que le bien est affecté de vices cachés le rendant impropre à son usage,

- condamner les époux [P] à prendre solidairement en charge l'intégralité des travaux confortatifs à hauteur de 84.300 € TTC, montant à réévaluer en fonction de l'indice de la construction en vigueur à la date du jugement à intervenir,

- dans l'hypothèse où la prescription biennale était retenue, dire que l'inexécution fautive des époux [P] concernant l'appel en cause de leur assureur constitue une faute et les condamner à réparer l'intégralité du préjudice qu'ils ont subi,

- dans l'hypothèse où la suspension du contrat d'assurance des époux [P] était retenue, les condamner à leur payer le restant dû au titre des travaux, à hauteur de 23,40%,

En toutes hypothèses,

- infirmer le jugement dont appel en y ajoutant :

- condamner M. et Mme [P] à prendre en charge leurs frais de déménagement et garde-meuble à hauteur de 1.080 € TTC, en application des articles 1582, 1103 et 1104 du Code civil,

- condamner M. et Mme [P], en raison de leur résistance abusive et leur silence fautif refusant de communiquer les coordonnées de leur assurance MRH et ayant provoqué l'allongement des délais de procédure, à leur payer la somme de 5.000 € à titre de réparation de leur préjudice moral, en application des articles 1582, 1103 et 1104 du Code civil,

- condamner la société Novilis Immobilier venant aux droits de l'Agence de Fonsorbes, prise en la personne de son représentant légal, en raison d'un manquement à son devoir de conseil envers eux, à leur payer la somme de 5.000 € à titre de réparation de leur préjudice moral, en application de l'ancien article 1382 du Code civil,

- condamner tout succombant à leur payer solidairement la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner tout succombant solidairement aux entiers dépens en ce compris les dépens de la procédure de référé expertise, les frais d'expertise judiciaire, les frais d'établissement du constat d'huissier ainsi que les dépens de la présente instance, dont distraction au profit de

Me Destruel, avocat, sur son affirmation de droit.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 31 mars 2020, la société Novilis Immobilier venant aux droits et obligations de la société Agence de Fonsorbes, intimée, demande à la cour, au visa des articles 1240 et suivants du Code civil, de :

- constater qu'aucun manquement à une obligation d'information et de conseil n'est

rapporté par les époux [M] à son encontre,

Par conséquent,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté les époux [M] de leurs

demandes formulées à son encontre,

Y ajoutant,

- condamner tout succombant à lui verser la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner le même aux entiers dépens, dont distraction au profit de l'avocat

soussigné.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 27 mars 2020, la compagnie Groupama d'Oc, intimée, demande à la cour, au visa des articles L.125-1 et suivants du Code des assurances, de :

- confirmer purement et simplement le jugement dont appel la mettant hors de cause,

- condamner tous succombant et notamment la Matmut au versement de la somme de

5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de Me Houll, avocat de la Selas Atcm.

M. [Y] [P], qui a été assigné le 16 décembre 2019 à personne et auquel les conclusions d'appelant ont été signifiées le 13 janvier 2020 à personne et le 14 octobre 2021 à étude, n'a pas constitué avocat.

Mme [E] [W] épouse [P], qui a été assignée le 16 décembre 2019 à domicile et à laquelle les conclusions d'appelant ont été signifiées le 13 janvier 2020 à domicile et le 14 octobre 2021 à étude, n'a pas constitué avocat.

L'arrêt sera rendu par défaut conformément à l'alinéa 2 de l'article 474 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l'article 954 alinéa 5 du code de procédure civile la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

En vertu de l'article 472 du code de procédure civile la cour doit statuer sur le fond et ne peut faire droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés.

1- Les données de l'expertise

L'expert M. [J] décrit les désordres constatés, confirmant ainsi ceux relevés par maître [C], huissier de justice, le 9 octobre 2014.

ll précise ainsi s'agissant des fissurations : 'La fissuration est constatée dans toute la partie de la maison côté pignon droit, donc dans le sens de la pente naturelle du terrain. L'inclinaison des fissures montre bien ce tassement vers l'angle pignon droit façade arrière. Les fissurations sont importantes : elles sont même traversantes en sous-sol.

Si l'habitabilité de la maison n'est pas compromise, la solidité de la structure est par contre compromise du fait de ces fissures ('). L'absence de désordres côté gauche peut être rattachée à la présence d'une grande épaisseur de la terre, protégeant des effets des sécheresses, mais aussi à l'infiltration d'eau venant humidifier le sol'.

Ensuite des études réalisées sur les réseaux d'évacuation des eaux et sur le sol, l'expert relève que la sécheresse est à l'origine de ces désordres, précisant que les fissures constatées ont progressé lentement, compte tenu de la bonne qualité de la construction et ont été dissimulées à la vue, en raison de la végétation recouvrant ces murs.

Il conclut ainsi son rapport : «Les investigations des réseaux et géotechniques et les analyses du sinistre permettent de dire que la sécheresse de 2011 est à l'origine exclusive des désordres portant atteinte à la solidité de la construction. Cet épisode de sécheresse du 1er avril au 30 juin 2011 est le dernier qu'a connu la commune. ll a été reconnu catastrophe naturelle par l'arrêté du 27 juillet 2012".

Ces constatations et conclusions ne sont pas contestées par les parties.

2- La prescription soulevée par la Matmut

En vertu des dispositions de l'article L 114-1 du code des assurances toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; toutefois, ce délai ne court :

1° En cas de réticence, omission, déclaration fausse ou inexacte sur le risque couru, que du jour où l'assureur en a eu connaissance ;

2° En cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils prouvent qu'ils l'ont ignoré jusque-là.

En l'espèce, s'agissant d'un sinistre dû à une catastrophe naturelle, le point de départ de la prescription est la date de publication de l'arrêté reconnaissant à la commune de Plaisance du Touch l'état de catastrophe naturelle pour la sécheresse et la déshydratation des sols du 1er avril au 30 juin 2011, soit le 2 août 2012.

Tant l'assignation en référé de la Matmut par M. [P] le 19 novembre 2015 que l'assignation au fond par M. et Mme [M] le 21 avril 2017 ont été délivrées plus de deux ans après le 2 août 2012, de sorte que l'action de M. et Mme [M] à l'encontre de la Matmut doit être déclarée irrecevable, le jugement étant infirmé sur ce point.

3- Les demandes dirigées à l'encontre de Groupama d'Oc

La garantie de Groupama d'Oc, assureur multi-risques Habitation de M. et Mme [M], ne concerne que la période postérieure à la vente de l'immeuble intervenue le 20 juin 2014.

Il ressort des conclusions de l'expert que les désordres constatés trouvent leur origine avant la vente du 20 juin 2014 puis qu'il en attribue la cause exclusive à la sécheresse de 2011 qui a été reconnue catastrophe naturelle par l'arrêté du 27 juillet 2012 publié le 2 août 2012, de sorte que Groupama d'Oc ne peut être tenu à garantie.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a mis hors de cause Groupama d'Oc.

4- L'action en garantie des vices cachés

Selon les dispositions de l'article 1641 du code civil le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminue tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix s'il les avait connus.

Selon les dispositions de l'article 1642 du même code, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

Il appartient à l'acquéreur qui recherche la garantie de son vendeur d'établir l'existence d'un vice, caché lors de la vente, et antérieur à celle-ci.

En présence d'une clause exonératoire de garantie insérée dans l'acte, comme autorisé par l'article 1643 du même code, il appartient en outre à l'acquéreur de démontrer que les vendeurs sont de mauvaise foi en ce qu'ils connaissaient l'existence du vice et ne l'en ont pas informé volontairement.

En l'espèce il ressort des conclusions de l'expert judiciaire, non contestées, que les fissures constatées ont progressé lentement, compte tenu de la bonne qualité de la construction et ont été dissimulées à la vue, en raison de la végétation recouvrant ces murs.

Il résulte de ces éléments que les vices existaient, au moins partiellement, avant la vente et que leur manifestation, les fissures, n'était pas visible au moment de la vente.

L'acte de vente du 20 juin 2014 en sa page 7 stipule que «l'acquéreur prend le bien dans son état au jour de l'entrée en jouissance, tel qu'il a été vu et visité, sans recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit et notamment pour mauvais état de la ou des constructions, du sol ou du sous-sol, vices mêmes cachés (').».

Les vendeurs ont attesté ne pas avoir fait de déclaration de sinistre.

Il est en outre stipulé en page 13 de cet acte que «le bien n'a jamais connu de sinistres résultant de catastrophes naturelles.».

Enfin est annexé à l'acte (page 36/39) la liste des arrêtés de catastrophe naturelle pris pour la commune où se situe le bien vendu dans laquelle figure l'arrêté pris le 27 juillet 2012 publié le 2 août 2012 pour « mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols » pour la période du 1er avril au 30 juin 2011.

Il en ressort que les acquéreurs ont été informés de l'épisode de sécheresse de 2011.

L'expert a précisé que la seule fissure visible lors de la vente et qui a fait l'objet de plusieurs courriers adressés par M. et Mme [M] aux vendeurs était « classique » et sans rapport avec la sécheresse.

Pour ce qui concerne les autres fissures les conclusions de l'expert sont claires, elles n'étaient pas visibles. Aucun élément ne permet d'établir que les vendeurs, propriétaires non occupants, auraient eu connaissance des fissures litigieuses et les auraient volontairement cachées aux acquéreurs, de sorte que M. et Mme [M] doivent être déboutés de leur demande au titre des vices cachés.

5- La responsabilité contractuelle des vendeurs pour inexécution contractuelle et silence fautif

Au regard des développements qui précèdent, il ne peut être reproché à M. et Mme [P] de ne pas s'être « prémunis de la prescription biennale » en s'abstenant d'alerter leur assureur dans les délais impartis et la demande visant à les condamner à réparer l'entier préjudice de M. et Mme [M] doit être rejetée.

De même, il ne peut être fait droit à la demande de M. et Mme [M] de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 € en réparation de leur préjudice moral pour « silence fautif » des époux [P] qui aurait retardé l'issue de la procédure alors qu'ils sont dans l'attente de l'indemnisation afin de procéder aux travaux de réparation.

Le caractère fautif et volontaire de ce silence n'est pas démontré alors que M. et Mme [P] ont participé aux opérations d'expertise et qu'aucune mauvaise foi n'est retenue à leur encontre s'agissant de l'absence de déclaration de sinistre à leur assureur.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

6- La responsabilité de l'agence immobilière

L'agent immobilier peut engager sa responsabilité délictuelle pour manquement à son obligation de conseil et d'information, notamment quant à la situation de l'immeuble vendu.

Il appartient à M. et Mme [M] d'apporter la preuve d'une faute de la Sarl Agence de Fonsorbes aux droits de laquelle vient la Sas Novilis Immobilier et d'un préjudice en lien de causalité direct et certain avec cette faute.

Ils font valoir que l'agent immobilier aurait dû les informer du risque d'impact de la sécheresse sur le bien vendu, ce que ne pouvait ignorer Mme [G], gérante de la Sarl Agence de Fonsorbes, pour vivre elle-même dans le quartier et avoir dû procéder à des travaux de confortatifs, ainsi que de l'absence de déclaration de sinistre des époux [M].

M. et Mme [M] produisent le courrier de réponse de l'agence immobilière à leur réclamation en date du 16 mars 2015 ainsi qu'un mail du 1er décembre 2014, un courrier du 16 décembre 2015 et une attestation du 10 juin 2016 émanant tous trois de la mairie de [Localité 10].

Il en ressort que lors de la sécheresse de 2012 45 personnes sur les 17 000 habitants de la commune s'étaient inscrites auprès de la commune de Plaisance du Touch et que Mme [G] soutient leur avoir signalé que plusieurs maisons dans le lotissement avaient souffert des mouvements de terrains liés à la sécheresse et précisé que celle de M. et Mme [P] n'avait pas été touchée.

Ces seuls éléments, au regard des conclusions de l'expert concernant l'invisibilité des fissures litigieuses lors de la vente et des mentions à l'acte de vente concernant l'absence de déclaration de sinistre par les vendeurs et l'existence de l'arrêté préfectoral du 27 juillet 2012, sont insuffisants à établir l'existence d'une faute de l'agent immobilier.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. et Mme [M] de ce chef de demande.

7- Les demandes annexes

M. et Mme [M] qui succombent dans leurs prétentions, doivent être condamnés aux dépens de première instance en en ce compris ceux de la procédure de référé et les frais d'expertise, et aux dépens d'appel.

Il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de la Samcv Matmut, de Groupama d'Oc et de la Sas Novilis Immobilier venant aux droits de la Sarl Agence de Fonsorbes les frais non compris dans les dépens qu'ils ont pu exposer. Ils seront déboutés de leur demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [M], tenus aux dépens, ne sauraient pour leur part bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Infirme le jugement rendu le 7 août 2019 par le tribunal de grande instance de Toulouse sauf ses dispositions mettant hors de cause Groupama d'Oc et déboutant M. et Mme [M] de leurs demandes au titre des frais de déménagement et garde-meubles ainsi qu'au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et de jouissance ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

- Déclare irrecevable comme prescrite l'action de M. [S] [M] et Mme [Z] [X] épouse [M] à l'encontre de la Samcv Matmut ;

- Déboute M. [S] [M] et Mme [Z] [X] épouse [M] de leur action en garantie des vices cachés et pour responsabilité contractuelle à l'encontre de M. [Y] [P] et Mme [E] [W] épouse [P] ;

- Condamne M. [S] [M] et Mme [Z] [X] épouse [M] aux dépens de première instance, en ce compris les dépens de la procédure de référé et les frais d'expertise judiciaire, et aux dépens d'appel, avec autorisation de recouvrement direct au profit de la Selas Atcm, de maître James-Foucher et de la Selarl Arcanthe conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

- Déboute toutes les parties de leur demande au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel.

Le GreffierLe Président

R. CHRISTINEM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/04290
Date de la décision : 11/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-11;19.04290 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award