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11/07/2022 | FRANCE | N°19/03506

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 11 juillet 2022, 19/03506


11/07/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/03506

N° Portalis DBVI-V-B7D-NDSI

CR / RC



Décision déférée du 11 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance d'ALBI ( 17/01683)

Mme RAINSART

















[L] [N]





C/



SCI ARC EN CIEL





















































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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [L] [N]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Christophe EYCHENNE, avocat au barreau de TOULOUSE







INTI...

11/07/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/03506

N° Portalis DBVI-V-B7D-NDSI

CR / RC

Décision déférée du 11 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance d'ALBI ( 17/01683)

Mme RAINSART

[L] [N]

C/

SCI ARC EN CIEL

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [L] [N]

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représenté par Me Christophe EYCHENNE, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SCI ARC EN CIEL

Prise en la personne de son représentant légal

La Vaurelle

[Localité 2]

Représentée par Me Emilie TCHIZIMBILA VIODHO, avocat au barreau D'ALBI

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. ROUGER, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. ROUGER, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. ROUGER, président, et par R. CHRISTINE faisant fonction de greffier, ayant prêté serment le 11 avril 2022.

EXPOSE DU LITIGE

Suivant contrat de maîtrise d'oeuvre en date du 18 mars 2014, la société Arc En Ciel a confié la maîtrise d'oeuvre d'un projet de construction à M. [N], architecte. Le montant prévisionnel du chantier a été fixé à 360.000 € HT.

Un désaccord est survenu entre les parties concernant les honoraires de l'architecte et le budget du chantier.

Par acte d'huissier en date du 9 octobre 2017, la Sci Arc En Ciel a assigné M. [N] devant le tribunal de grande instance d'Albi aux fins d'obtenir le remboursement de 39.834,88 € d'honoraires et l'indemnisation de ses préjudices.

Par jugement contradictoire du 11 juin 2019, le tribunal de grande instance d'Albi a :

- condamné M. [N] au remboursement de la somme de 39.834,88 € avec intérêt au taux légal à compter de la présente décision,

- rejeté le surplus des demandes,

- condamné M. [N] à payer à la Sci Arc En Ciel la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamné M. [N] aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Tchizimbila Viodho,

-prononcé l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi le premier juge a considéré que la Sci Arc En Ciel étant une société familiale dont le seul objet social était la construction de la maison d'habitation de la famille, le contrat de maîtrise d'oeuvre signé le 18 mars 2014 avec M. [N] entrait dans le champ d'application des dispositions du code de la consommation relatives au prêt immobilier notamment l'article L 312-17 dudit code et qu'en l'absence de mention dans le contrat selon laquelle les honoraires n'avaient pas vocation à être financés à l'aide d'un prêt, compte tenu du rejet de la demande de prêt, l'architecte, qui ne pouvait utilement soutenir que le contrat de maîtrise d'oeuvre n'avait pour vocation qu'une simple conception sans début d'exécution, devait être tenu au remboursement des sommes perçues. Ecartant toute résistance abusive, il a retenu au vu des trois projets envisagés que s'il y avait eu sous-estimation, le caractère fautif était discutable et qu'en tout état de cause, la Sci ne justifiait d'aucun préjudice.

Par déclaration en date du 24 juillet 2019, M. [N] a relevé appel de ce jugement en ses dispositions ayant prononcé des condamnations à son encontre.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 31 janvier 2020, M. [N], appelant, demande à la cour, au visa des articles préliminaire et L.312-3 du Code de la consommation, 1240 du Code civil et 32-1 du Code de procédure civile ainsi que des articles 696 et 700 du Code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement dont appel en tant qu'il a débouté la Sci Arc En ciel de ses demandes de dommages et intérêts fondées sur l'article 1147 du Code civil et pour résistance abusive, - le réformer pour le surplus et statuer à nouveau,

- débouter la Sci Arc En Ciel de sa demande de remboursement d'honoraires,

- dire que l'obligation de restitution de plein droit des sommes payées au titre de l'exécution provisoire donnera lieu à intérêts au taux légal à compter de leur paiement par lui-même,

- condamner la Sci Arc En Ciel à lui payer la somme de 5.000 € pour procédure abusive,

- condamner la Sci Arc En Ciel à lui payer la somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et celle de 3.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- condamner la Sci Arc En ciel aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de commandement de payé délivré au titre de l'exécution provisoire et les frais d'exécution forcée éventuelle de l'arrêt à intervenir.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 31 octobre 2019, la Sci Arc En Ciel, intimée, appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 1231-1 du Code civil, L.312-2 (ancien) et suivants du Code de la consommation, de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [N] au remboursement de la somme de 39.834.88 €,

- y ajouter la condamnation aux intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 mars 2017,

- y ajouter la condamnation de M. [N] au paiement d'une indemnité de 1.000 € au titre de la résistance abusive,

- infirmer le jugement ayant rejeté les demandes au titre de la responsabilité contractuelle de M. [N],

- statuant à nouveau, dire que M. [N] a engagé sa responsabilité contractuelle,

- le condamner au paiement d'une indemnité de 10.000 € au titre du préjudice qu'elle a subi,

- en toutes hypothèses, le condamner au paiement d'une indemnité de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de Me Tchizimbila Viodho sur son offre de droit,

- débouter M. [N] de l'intégralité de ses demandes.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 26 octobre 2021.

SUR CE, LA COUR :

1°/ Sur la demande de remboursement des honoraires de l'architecte

Selon les dispositions de l'article L 312-15 du code de la consommation dans sa version en vigueur à l'époque du contrat d'architecte litigieux, l'acte écrit, y compris la promesse unilatérale de vente acceptée et le contrat préliminaire prévu à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation, ayant pour objet de constater l'une des opérations mentionnées à l'article L. 312-2, doit indiquer si le prix sera payé directement ou indirectement, même en partie, avec ou sans l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les sections 1 à 3 du présent chapitre.

Selon celles de l'article L 312-17 du même code, dans sa version en vigueur à la mêle époque, lorsque l'acte mentionné à l'article L. 312-15 indique que le prix sera payé sans l'aide d'un ou plusieurs prêts, cet acte doit porter, de la main de l'acquéreur, une mention par laquelle celui-ci reconnaît avoir été informé que s'il recourt néanmoins à un prêt il ne peut se prévaloir du présent chapitre.
En l'absence de l'indication prescrite à l'article L. 312-15 ou si la mention exigée au premier alinéa du présent article manque ou n'est pas de la main de l'acquéreur et si un prêt est néanmoins demandé, le contrat est considéré comme conclu sous la condition suspensive prévue à l'article L. 312-16.

Enfin selon celles de l'article L 312-16 lorsque l'acte mentionné à l'article L. 312-15 indique que le prix est payé, directement ou indirectement, même partiellement, à l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les sections 1 à 3 et la section 5 du présent chapitre, cet acte est conclu sous la condition suspensive de l'obtention du ou des prêts qui en assument le financement. La durée de validité de cette condition suspensive ne pourra être inférieure à un mois à compter de la date de la signature de l'acte ou, s'il s'agit d'un acte sous seing privé soumis à peine de nullité à la formalité de l'enregistrement, à compter de la date de l'enregistrement.
Lorsque la condition suspensive prévue au premier alinéa du présent article n'est pas réalisée, toute somme versée d'avance par l'acquéreur à l'autre partie ou pour le compte de cette dernière est immédiatement et intégralement remboursable sans retenue ni indemnité à quelque titre que ce soit. A compter du quinzième jour suivant la demande de remboursement, cette somme est productive d'intérêts au taux légal majoré de moitié.

Aux termes de l'article L 312-2 ces dispositions s'appliquent aux prêts qui, quelle que soit leur qualification ou leur technique, sont consentis de manière habituelle par toute personne physique ou morale en vue de financer les opérations suivantes :

1° Pour les immeubles à usage d'habitation ou à usage professionnel et d'habitation :

a) Leur acquisition en propriété ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en propriété, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi acquis ;
b) Leur acquisition en jouissance ou la souscription ou l'achat de parts ou actions de sociétés donnant vocation à leur attribution en jouissance, y compris lorsque ces opérations visent également à permettre la réalisation de travaux de réparation, d'amélioration ou d'entretien de l'immeuble ainsi acquis ;
c) Les dépenses relatives à leur réparation, leur amélioration ou leur entretien lorsque le montant du crédit est supérieur à 75 000 € ;
d) Les dépenses relatives à leur construction ;

2° L'achat de terrains destinés à la construction des immeubles mentionnés au 1° ci-dessus.

L'article L 312-3 du même code dans sa version applicable à la date du contrat d'architecte exclut de l'application des dispositions susvisées, les prêts consentis à des personnes morales de droit public, ainsi que ceux destinés sous quelque forme que ce soit à financer une activité professionnelle, notamment celle des personnes physiques ou morales qui, à titre habituel, même accessoire à une autre activité, ou en vertu de leur objet social, procurent, sous quelque forme que ce soit, des immeubles ou fractions d'immeubles bâtis ou non, achevés ou non, collectifs ou individuels, en propriété ou en jouissance.

En l'espèce , un contrat d'architecte a été signé le 18 mars 2014 entre la Sci Arc en ciel, représentée par ses deux co-gérants, M.[X] [W] et Mme [F] [B] (dite Mme [X]) et M.[N] pour confier à ce dernier notamment les études et esquisses (ESQ), les plans d'architecture (APS et APD, projet sommaire et dossier de dépôt du permis de construire), le descriptif, la nomenclature des travaux (PRO projet-dossier de consultation) et le suivi des démolitions dans le cadre des travaux de construction d'une maison individuelle avec trois chambres d'hôtes pour un coût estimé, avant études définitives, de 360.000 € HT, dit ne liant pas la maîtrise d'oeuvre et ne constituant pas un engagement de sa part sur ce prix, moyennant des honoraires de base de 6,16% du montant HT prévisionnel pour une mission s'achevant au dossier de consultation des entreprises, soit 22.161,60 € HT.

Aux termes de ses statuts du 14/02/2014 la Sci Arc en Ciel a pour objet l'acquisition, la propriété, l'administration et l'exploitation par bail, location ou autrement de tous immeubles bâtis ou non bâtis dont elle pourrait devenir propriétaire ultérieurement, l'achat, la vente, la prise à bail, la gérance, la participation directe ou indirecte par tous moyens ou sous quelque forme que ce soit, à toutes entreprises et à toutes sociétés créées ou à créer, ayant le même objet ou un objet similaire ou connexe ; et plus généralement toutes opérations industrielles, commerciales, financières, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou indirectement à l'objet social tel que spécifié ou à tout autre objet similaire ou connexe. Elle a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés d'Albi le 25/02/2014 avec pour activités principales déclarées l'acquisition par voie d'achat ou d'apport, la propriété, la mise en valeur, la transformation, l'aménagement, l'administration, la gestion et l'exploitation par bail d'un bien immobilier.

Contrairement à ce qu'a retenu le premier juge, au regard de son objet social qui prévoit expressément l'exploitation par bail, location ou autrement de tous immeubles bâtis ou non bâtis dont elle pourrait devenir propriétaire, tel que ci-dessus énoncé, le projet litigieux étant au demeurant conforme à cet objet social puisque consistant notamment en la réalisation de chambres d'hôtes, et des dispositions de l'article L 312-3 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, la Sci Arc en Ciel ne peut prétendre au bénéfice des dispositions du code de la consommation relatives à la condition suspensive d'obtention d'un prêt.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris, la Sci Arc en ciel doit être déboutée de sa demande tendant au remboursement des honoraires réglés au maître d'oeuvre au motif qu'elle n'aurait pu obtenir le financement nécessaire à la réalisation de son projet immobilier.

Le présent arrêt infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement de première instance assorti de l'exécution provisoire, les sommes devant être restituées portant intérêt à compter de la signification valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution. En conséquence, M.[N] doit être débouté de sa demande tendant à ce que les sommes à restituer en exécution du présent arrêt portent intérêt au taux légal à compter du paiement qu'il a effectué.

2°/ Sur l'action en responsabilité diligentée par la Sci à l'encontre de M.[N]

La Sci Arc en Ciel recherche la responsabilité du maître d'oeuvre, lui reprochant une faute dans la réalisation du dossier PRO pour avoir sous estimé d'environ 300.000 € l'enveloppe des travaux arrêtée le 3 octobre 2014 à 539.475 € HT alors que lorsqu'elle a été amenée à consulter les entreprises il serait apparu que le budget à prévoir s'élevait à 791.827 € HT, projet dépassant totalement sa capacité de financement, ce qui a entraîné un refus de la banque. Elle soutient avoir été trompée sur la réalité du coût de son projet, et avoir subi corrélativement un préjudice financier pour avoir acquis un terrain en vue de la construction qui n'a pas pu être revendu au prix d'achat, outre un préjudice moral alors que ses gérants qui devaient se loger avec leur famille dans la maison à édifier ont dû revoir totalement leur projet de vie et subir l'angoisse de la fin du litige.

Les pièces produites au débat établissent qu'en décembre 2013, M.[W] [X] a contacté M.[N] lui indiquant, qu'exerçant avec sa compagne depuis 15 ans dans le tourisme, ils envisageaient la création d'une maison d'hôtes permettant d'allier vie professionnelle et familiale et souhaitaient réaliser une habitation avec trois chambres d'hôtes de bon standing avec évolution pour 5 chambres d'hôtes à terme. Il précisait souhaiter pour la partie habitation une suite parentale (salle de bains, dressing), un bureau pouvant être transformé en chambre et une chambre d'ami (une salle de bains commune aux deux chambres étant envisageable), et pour la partie chambre d'hôtes, pour rentrer dans les critères des labels, à savoir un classement cinq étoiles, il précisait que les chambres devraient répondre au cahier des charges (surface minimum, équipement), piscine, indiquant joindre ce cahier des charges. Il évoquait l'idée de mettre en place un volume central dédié à la vie de famille et à la réception, c'ur de la maison, et d'articuler des volumes indépendants de part et d'autre du noyau central pour y développer la vie privée de chacun. Il indiquait que dans l'optimum, l'utilisation des énergies renouvelables chauffage de type aérothermie, solaire ou équivalent serait un plus et s'agissant de la construction il précisait qu'une maison à ossature métallique pourrait s'adapter, sans exclure d'autres propositions, souhaitant une construction contemporaine répondant à des critères d'isolation phonique et thermiques importants, mettant en valeur l'environnement immédiat et proposant à la fois un cadre confortable, et que le projet devrait prendre en compte l'évolution vers cinq chambres d'hôtes à moyen terme. Il indiquait être en train d'acquérir un terrain viabilisé sauf à prévoir une fosse septique d'une surface de 3.000 m2 bénéficiant d'un certificat d'urbanisme pour une Shon de 300 m2, et indiquait que la principale contrainte était financière (budget très serré) et temporelle, souhaitant une ouverture au printemps 2015, sans préciser d'enveloppe budgétaire.

C'est dans ces conditions qu'est intervenu après constitution de la Sci Arc en Ciel, le contrat de maîtrise d'oeuvre objet du litige, le 18 mars 2014 pour la construction d'une maison individuelle avec 3 chambres d'hôtes avec estimation prévisionnelle des travaux avant études définitives ne liant pas le maître d'oeuvre et ne constituant pas un engagement de sa part sur le prix d'un montant de 360.000 € HT, la mission du maître d'oeuvre s'arrêtant au stade de la consultation des entreprises dont le maître d'ouvrage se réservait la charge. Les messages électroniques de M.[X] du 31 mars et 28 avril 2014 confirment la volonté de réalisation de chambres d'hôtes pouvant obtenir un classement 5 épis et le souhait en conséquence de la réalisation d'une pièce dite « jardin d'hiver », et de faire monter les chambres de l'étage en gamme (surface plus grande, terrasse privative).

Il ressort du courrier de la Sci Arc en Ciel du 24 août 2016 que l'estimation initiale correspondait à la première phase du projet, qu'en fonction de leurs envies et besoins il a été nécessaire d'effectuer un certain nombre de modifications et d'augmenter la surface initiale de 22 m2 et de réactualiser l'estimation à 398.000 €, puisque en raison des contraintes imposées par l'architecte des bâtiments de France imposant de ne plus phaser le projet mais de le réaliser en une seule fois, l'estimation avait dû être actualisée à 539.475 €. Il en ressort aussi que le permis de construire a été obtenu le 16 février 2015 et que le dossier de consultation des entreprises a été transmis au maître d'ouvrage par le maître d'oeuvre le 15 juillet 2015.

La pièce 2 produite par la Sci Arc en Ciel confirme que trois ratio de projet ont été établis par M.[N], celui de départ pour 360.000 € pour une superficie habitable de 210 m2, consistant en la réalisation d'une maison basique contemporaine par l'ajout d'appareillage de petites structures métal rapportées, puis un ratio projet 2 pour une surface de rez-de-chaussée de 232 m2 portant le coût de base à 398.000 € HT, soit honoraires d'architecte et Tva inclus un coût total de 507.020, 16 € Ttc, enfin un ratio projet 3 du 3 octobre 2014 consistant en un projet extensible à plus deux chambres d'hôtes en étage superposé aux deux chambres du rez-de-chaussée, outre une structure métal en façade Nord, piscine déplacée devant la maison pour conserver l'intimité des chambres du rez-de-chaussée, et coût d'une terrasse supplémentaire, portant le coût à 539.475 € HT soit honoraires d'architecte et Tva incluse un coût total de 687.247, 99 € Ttc . Le maître d'oeuvre précisait que pour diminuer les coûts le maître d'ouvrage souhaitait une auto-construction, l'invitant à identifier les postes concernés pour arriver à un coût objectif. Il joignait un avenant au contrat de maîtrise d'oeuvre sur la base de ce projet 3, avenant non produit et dont la signature n'est pas établie.

Le projet de consultation des entreprises transmis au maître d'ouvrage mi-juillet 2015 a été élaboré par le maître d'oeuvre pour la construction d'une maison individuelle comportant 5 chambres d'hôtes.

La Sci Arc en Ciel s'est quant à elle chargée seule de la consultation des entreprises sans manifestement de mise en concurrence et sans que ne soient chiffrables les prestations qu'elle entendait quant à elle réaliser depuis l'origine en auto-construction.

Au demeurant , elle ne justifie avoir sollicité en janvier 2016 qu'un prêt de 440.000 € qui aurait juste permis de financer, s'il avait été obtenu, la réalisation de 3 chambres d'hôtes et ce pour la seule construction d'une maison d'habitation , financement qui lui a été refusé en mars 2017, sans que ne soient produits les documents fournis à l'appui de cette demande de prêt en terme de capacité d'apport personnel et de prévisionnel d'exploitation, la banque ne faisant aucune référence à la construction de chambres d'hôtes.

Dans ces conditions, en l'absence de tout budget prévisionnel contractuellement défini, au regard des évolutions multiples du projet destiné à la réalisation finale de 5 chambres d'hôtes devant correspondre à un label 5 épis répondant à un cahier des charges précis quant à la qualité des prestations, et d'une consultation d'entreprises réalisée par le seul maître d'ouvrage sans mise en concurrence, il ne peut être considéré que M. [N] ait commis une faute dans la réalisation de sa mission s'arrêtant à l'établissement du seul projet de consultation des entreprises de nature à avoir privé la Sci de la possibilité de réaliser son projet.

Le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce que le premier juge a débouté la Sci Arc en Ciel de son action en responsabilité et dommages et intérêts à l'encontre de M. [N].

3°/ Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

la Sci Arc en Ciel ayant obtenu gain de cause partiel en première instance, l'action qu'elle a engagée ne peut caractériser un abus du droit d'agir en justice. La demande en dommages et intérêts formée par M. [N] à ce titre doit être rejetée.

4°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Partie succombante la Sci Arc en Ciel supportera les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais du commandement de payer délivré à M.[N] en vertu de l'exécution provisoire. Elle se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première instance que de celle d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt sans pouvoir elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

Les articles A 444-32, R 444-55 et R 444-3 du code de commerce qui régissent désormais le tarif des huissiers de justice se suffisent à eux-mêmes sans avoir à en fixer quelque modalité s'agissant de frais d'exécution à venir du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce que le premier juge a débouté la Sci Arc en Ciel de son action en responsabilité et dommages et intérêts à l'encontre de M.[L] [N]

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute la Sci Arc en Ciel de sa demande en remboursement des honoraires d'architecte réglés à M.[L] [N]

Dit que le présent arrêt constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire

Déboute M.[L] [N] de sa demande tendant aux intérêts légaux sur la somme versée au titre de l'exécution provisoire à compter de ce paiement

Déboute M.[L] [N] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

Condamne la Sci Arc en Ciel aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais du commandement de payer délivré à M.[N] en vertu de l'exécution provisoire

Dit n'y avoir lieu de fixer les modalités des frais d'huissier à intervenir au titre de l'exécution forcée du présent arrêt

Condamne la Sci Arc en Ciel à payer à M.[L] [N] une indemnité de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel

Déboute la Sci Arc en Ciel de sa demande d'indemnité sur ce même fondement.

Le GreffierLe Président

R. CHRISTINEC. ROUGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/03506
Date de la décision : 11/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-11;19.03506 ?
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