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08/07/2022 | FRANCE | N°21/00251

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 08 juillet 2022, 21/00251


08/07/2022



ARRÊT N°2022/324



N° RG 21/00251 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N5OE

AB/AR



Décision déférée du 08 Décembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/01881)

CHAPUIS

















[N] [J]





C/



S.A.S.U. MIN TOULOUSE OCCITANIE













































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le 8/7/22



à Me Cyrille PERIGAULT



Me Daniel MINGAUD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [N] [J]

11 rue du Cimetière Sain...

08/07/2022

ARRÊT N°2022/324

N° RG 21/00251 - N° Portalis DBVI-V-B7F-N5OE

AB/AR

Décision déférée du 08 Décembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE ( 18/01881)

CHAPUIS

[N] [J]

C/

S.A.S.U. MIN TOULOUSE OCCITANIE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 8/7/22

à Me Cyrille PERIGAULT

Me Daniel MINGAUD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [N] [J]

11 rue du Cimetière Saint Cyprien

31300 TOULOUSE

Représenté par Me Cyrille PERIGAULT, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

S.A.S.U. MIN TOULOUSE OCCITANIE

146 avenue des Etats-Unis

31200 TOULOUSE

Représentée par Me Daniel MINGAUD de la SELARL MINGAUD AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffier, lors des débats : C. DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre

EXPOSE DU LITIGE :

M. [J] a été embauché à compter du 30 avril 1999 par la SASU Marché d'Intérêt National Toulouse Occitanie (ci-après le MIN) en qualité de percepteur, suivant contrat de travail à durée indéterminée.

Il a ensuite évolué au travers de plusieurs postes pour occuper à compter du 1er janvier 2009 celui de chef de service client / usager du service réglementation.

Sa rémunération s'élevait en dernier lieu à 3190,11 € bruts.

Par courrier du 4 août 2015, l'une des collègues de M. [J], Mme [B], a signalé qu'elle était victime de sa part de harcèlements sexuel et moral.

Une enquête interne a été menée en août 2015 et clôturée le 16 février 2016, après réunion du comité d'entreprise, sans qu'aucune suite ne soit donnée.

Le 26 février 2016, Mme [B] a été victime d'un malaise sur son lieu de travail et a été placée en arrêt de travail.

M. [J] a été placé en arrêt maladie à compter dès le 19 octobre 2015, jusqu'au 3 mai 2016.

Le 17 mars 2016 une nouvelle alerte était lancée par un délégué syndical, M. [Z], pour le compte de Mme [B], toujours pour les mêmes agissements.

Une nouvelle enquête interne a eu lieu à compter du mois de juin 2016 , puis a été confiée à un cabinet externe à compter du 30 août 2016.

Les conclusions de cette enquête le 4 novembre 2016 ont mis hors de cause M. [J] en qui concerne les accusations de harcèlement moral et sexuel, tout en révélant un comportement excessivement 'tactile' de M. [J] vis-à-vis de ses interlocuteurs mais sans connotation sexuelle, un conflit important et ancien entre M. [J] et M. [Z], ainsi qu'une dégradation des conditions de travail pour M. [J] et Mme [B].

M. [J] a repris son poste à mi-temps thérapeutique à compter du 3 mai 2016 puis à plein temps à compter du 3 juillet 2016.

Par courrier en date du 18 Juillet 2016, le MIN a proposé au salarié une affectation définitive au service développement commercial, plus précisément au poste de gestionnaire locatif espaces ouverts, auquel il avait déjà été affecté avec son accord pour une période probatoire de trois mois.

M. [J] a refusé et, dans un courrier du 21 septembre 2016, s'est plaint d'être injustement accusé de harcèlement.

Le salarié a de nouveau été placé en arrêt maladie à compter 28 novembre 2016 jusqu'au 25 septembre 2017, date à laquelle il a été déclaré apte à la reprise par le médecin du travail.

L'employeur a proposé à M. [J] par avenant à son contrat de travail le poste de chargé de réglementation et vie du site, avenant signé entre les parties le 25 septembre 2017.

M. [J] a de nouveau été placé en arrêt maladie à compter du 15 janvier 2018, pour état dépressif.

Lors de la visite de reprise du 2 mai 2018, le médecin du travail a déclaré M. [J] définitivement inapte, avec la mention que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

M. [J] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par courrier du 5 juin 2018.

Par requête du 20 novembre 2018, M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse d'une demande de nullité de son licenciement, de demandes de dommages-d'intérêts pour licenciement nul et d'indemnités de rupture, et de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité.

Par jugement du 8 décembre 2020, le conseil de prud'hommes de Toulouse a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, débouté M. [J] de l'ensemble de ses demandes y compris celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et l'a condamné aux dépens.

M. [J] a relevé appel de cette décision le 13 janvier 2021, énonçant à l'acte d'appel les chefs critiqués du jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 mai 2022, auxquelles il est expressément fait référence, M. [J] demande à la cour de :

-ordonner le rabat de la clôture des débats au jour des plaidoiries,

-infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

en conséquence,

-juger que l'employeur a commis un manquement grave à son obligation de sécurité,

-juger que le licenciement de M. [J] pour inaptitude est nul, l'inaptitude de M. [J] étant directement liée aux agissements fautifs de l'employeur,

-juger que M. [J] a subi un préjudice conséquent,

-en conséquence, condamner le MIN à payer à M. [J] les sommes suivantes :

* 60 000 nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,

* 60 000 nets de CSG-CRDS à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul, compte tenu de l'inaptitude consécutive à des faits de harcèlement moral,

* 9570, 33 € nets de CSG-CRDS à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 957,03 € au titre des congés payés y afférents,

* 3000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamner l'employeur aux dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 juillet 2021, auxquelles il est expressément fait référence, la SASU MIN Toulouse Occitanie sollicite la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions, et à titre subsidiaire, demande à la cour de constater l'absence d'effet dévolutif du chef de demande de qualification de faits de harcèlement, en tout état de cause, débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, et le condamner à lui payer la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

MOTIFS :

A titre liminaire il est rappelé que la clôture de la procédure de mise en état a été prononcée le 24 mai 2022 après admission des dernières écritures de l'appelant, de sorte la demande de révocation de l'ordonnance de clôture de M. [J] est devenue sans objet et n'a pas été sollicitée avant ouverture des débats à l'audience du 9 juin 2022.

Sur l'effet dévolutif :

Le MIN s'oppose à l'argumentation de M. [J] soutenue devant la cour au titre du harcèlement moral en faisant observer que sa requête initiale ne mentionnait pas le harcèlement moral, qu'il l'a rajouté dans ses conclusions n°1 devant la juridiction prud'homale alors qu'il s'agissait une demande nouvelle irrecevable, et qu'en tout état de cause M. [J] a toujours sollicité des dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et non pour harcèlement, de sorte que l'effet dévolutif ne peut intervenir pour le harcèlement.

Cette prétendue absence d'effet dévolutif sur le harcèlement moral est soutenue à titre subsidiaire par le MIN mais la cour se doit de l'examiner avant toute autre question puisque le harcèlement moral est soutenu à titre principal par M. [J].

A ce titre, la cour relève que la prétendue irrecevabilité de la demande nouvelle n'a pas été soutenue devant le conseil de prud'hommes, que M. [J] a formulé, depuis le début de l'instance devant cette juridiction, une demande indemnitaire pour licenciement nul, et que le harcèlement moral soutenu depuis ses conclusions n°1 n'est qu'un moyen au soutien de cette demande et non une prétention, et peu importe que M. [J] mêle dans ses écritures, y compris devant la cour, les notions de harcèlement moral et de manquement à l'obligation de sécurité.

Ainsi, contrairement à ce que soutient le MIN, l'effet dévolutif a pleinement joué en ce qui concerne les prétentions de M. [J], notamment la nullité de son licenciement, et celui-ci est recevable à soutenir devant cette cour, à l'appui de ses prétentions, le moyen tiré du harcèlement moral.

Sur le manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité et le harcèlement moral :

Dans le cadre de l'obligation de sécurité pesant sur l'employeur destinée notamment à prévenir les risques pour la santé et la sécurité des salariés,

la loi lui fait obligation de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Et l'article L.4121-1 du code du travail lui fait obligation de mettre en place :

- des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,

- des actions d'information et de formation,

- une organisation et des moyens adaptés,

et de veiller à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

Aux termes de l'article L 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Aux termes de l'article L 1152-2, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L 1152-3 dispose que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance de ces textes est nulle.

En application de l'article L 1154-1, il appartient au salarié qui se prétend victime d'agissements répétés de harcèlement moral d'établir des faits permettant de présumer l'existence d'un tel harcèlement (version antérieure à la loi du 8 août 2016) ou de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un tel harcèlement (version issue de la loi du 8 août 2016). Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, M. [J] soutient que son inaptitude résulte du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité car il aurait été accusé à tort de harcèlement sexuel et harcèlement moral de la part d'une salariée et que l'employeur n'aurait pris aucune mesure pour éviter la dégradation de ses conditions de travail et de son état de santé jusqu'à son inaptitude. Il ajoute que son licenciement prononcé dans un contexte de harcèlement moral à son encontre est nul.

Il indique en effet que, dès la première alerte de Mme [B], et sans en vérifier le bien fondé, l'employeur l'a changé de bureau pour le déplacer au 3ème étage, ce qui laissait apparaître une volonté de le sanctionner.

Ce n'est qu'après une deuxième alerte que l'employeur a jugé utile de le confronter à Mme [B], laquelle a refusé.

Après la clôture de l'enquête, il n'a pas été réintégré à son poste initial.

Il a été isolé, et M. [Z] a créé une ambiance délétère à son encontre, amplifiant la rumeur.

M. [Z] a lancé une seconde alerte alors même que le salarié était en arrêt de travail.

Il reproche à son employeur de :

-n'avoir pas pris de mesures préventives (absence de document unique d'évaluation des risques, un document n'a été établi que postérieurement à l'alerte),

-n'avoir pas pris de mesure de protection pour faire cesser une situation anormale pour le salarié, alors qu'il l'a alerté sur la dégradation de ses conditions de travail, notamment par un courrier du 21 septembre 2016, et avoir exercé des pressions pour qu'il reprenne un poste au sein du MIN alors que celui-ci était en contact avec Mme [B] et M. [Z],

-n'avoir pris aucune sanction à l'égard de Mme [B] malgré ses alertes infondées,

-l'avoir remplacé définitivement dans ses fonctions de chef de service opérationnel quelques jours après son arrêt maladie,

-lui avoir proposé un poste le rétrogradant.

Il justifie effectivement de la dégradation progressive de son état de santé par la production d'un certificat médical d'un psychiatre en date du 30 janvier 2018, du rapport d'enquête du médecin du travail le Dr [F], et de ses arrêts de travail, étant précisé qu'il a été hospitalisé du 27 août 2019 au 2 septembre 2019.

La cour relève que parmi ces faits allégués, sont établis par les pièces produites : les accusations de harcèlement moral et sexuel à l'encontre de M. [J], n'ayant pas été déclarées fondées après deux enquêtes, le changement de bureau de M. [J], l'absence de réintégration à son poste initial, la mésentente avec le délégué du personnel M. [Z], le changement de poste par la signature d'un avenant, et la dégradation de l'état de santé concomitante.

Ces faits, pris dans leur ensemble, font présumer et laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral à l'encontre du salarié.

Toutefois, la cour estime que l'employeur les justifie par des circonstances objectives, étrangères à tout harcèlement.

En effet, le MIN a été confronté à deux reprises à une demande d'enquête sur des faits dénoncés de harcèlements sexuel et moral perpétrés par M. [J] à l'égard d'une collègue Mme [B], et a dû prendre immédiatement les mesures conservatoires s'imposant en pareilles circonstances, notamment l'éloignement physique des deux salariés concernés le temps de l'enquête.

Il est rappelé que le premier courrier de Mme [B] du 4 août 2015 décrivait sur plusieurs pages des événements précis au cours desquels elle s'était sentie harcelée en raison de l'attitude de M. [J] consistant à lui prendre le bras, lui toucher les épaules en l'appelant 'ma belle', à se coller contre elle ou à approcher son visage trop près d'elle pour lui parler, à lui chuchoter des mots à l'oreille alors qu'elle travaillait.

Saisi de ces faits, l'employeur a légitimement pris des mesures d'éloignement de nature à permettre la continuité du travail dans une relative sérénité pour les deux protagonistes, et M. [J] ne peut lui reprocher une intention de le sanctionner.

Dans la mesure où Mme [B] travaillait à l'accueil et que son poste ne pouvait être déplacé, il a été décidé par l'employeur de déplacer le poste de M. [J] au troisième étage du bâtiment, ses fonctions demeurant inchangées.

S'agissant de la méthodologie d'enquête adoptée par l'employeur, il est constaté au vu des pièces que celui-ci a, dès la première enquête interne, entendu séparément les deux salariés en cause puis tenté de les confronter, ce qu'a refusé Mme [B]. M. [J] ne saurait reprocher au MIN ce refus, et en tout état de cause la salariée se disant harcelée était légitime à refuser une confrontation avec celui qu'elle accusait d'être son harceleur.

A la clôture de la première enquête, M. [J] a réintégré son bureau près de l'accueil et de Mme [B], ce qui démontre le caractère strictement conservatoire de son déplacement au 3ème étage.

C'est à la suite de la seconde enquête qui, certes, ne permettait pas de caractériser le harcèlement moral ou sexuel à l'égard de Mme [B], mais démontrait un comportement tactile inapproprié de M. [J] et mal vécu par Mme [B], que M. [J] s'est vu proposer à titre temporaire puis définitif un poste de 'gestionnaire locatif espaces ouverts' ; non seulement ce poste a été proposé par avenant à M. [J] et accepté par lui, sans que l'existence de pressions pour l'accepter ne soit démontrée, pas plus que le caractère rétrogradant de ce changement de poste, mais encore, ce changement s'imposait au regard des conclusions du rapport d'enquête décelant l'existence de risques psycho sociaux au regard de la situation, et préconisant de maintenir l'éloignement entre les deux salariés.

Il est indéniable que la situation professionnelle délétère entre M. [J] et Mme [B], laquelle était épaulée par le délégué du personnel M. [Z], a perturbé M. [J] au point de dégrader son état de santé mentale, tout comme ce fut le cas pour Mme [B]. Les arrêts maladie se sont succédés pour ces deux salariés après les deux enquêtes, étant observé que M. [J] a été déclaré apte sans réserve à la reprise par le médecin du travail le 28 septembre 2017 soit bien après la fin de la deuxième enquête.

Toutefois, la cour estime que l'ensemble de ces éléments ne caractérise pas un harcèlement moral de l'employeur à l'égard de M. [J], et rappelle qu'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ne peut, en tout état de cause, entraîner la nullité du licenciement pour inaptitude, la demande de nullité du licenciement ainsi que les prétentions financières y afférentes seront donc rejetées, par confirmation du jugement déféré.

S'agissant du manquement à l'obligation de sécurité, celui-ci est également invoqué par M. [J] au soutien d'une demande indemnitaire distincte de celle pour licenciement nul, étant précisé que M. [J] ne formule pas de demande subsidiaire au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans le développement de ses conclusions, le MIN oppose à cette demande indemnitaire la prescription biennale, pour les faits invoqués entre le 4 août 2015 et le 4 novembre 2016, car M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes le 20 novembre 2018 soit plus de deux ans après ces faits ; toutefois la cour relève que la fin de non recevoir tirée de la prescription n'est pas reprise dans le dispositif des conclusions de l'employeur de sorte que la cour ne peut tenir compte de cette prescription.

Parmi les manquements invoqués, M. [J] reproche tout d'abord à l'employeur l'absence de mesures préventives, en particulier de document unique d'évaluation des risques ; or il est produit par le MIN un document unique répertoriant des mesures de prévention prises depuis 2008 et une dernière mise à jour en 2016, ce document existait donc au moins depuis 2008 ; il est exact que le DUERP a été mis à jour sur les risques psycho-sociaux à l'occasion des conclusions de l'enquête sur les faits dénoncés par Mme [B], et grâce à l'intervention du cabinet spécialisé en matière de RPS du docteur [F], mais aucun manquement ne peut être reproché à ce titre à l'employeur.

M. [J] se plaint également de l'absence de mesure de protection pour faire cesser une situation anormale pour lui, alors qu'il a alerté l'employeur sur la dégradation de ses conditions de travail par courrier du 21 septembre 2016.

Néanmoins, il résulte de l'examen des faits et de leur chronologie déjà rappelée ci-dessus que l'employeur a pris toutes les mesures utiles pour faire cesser la situation inquiétante qui lui était dénoncée par Mme [B] et a investigué sur ces faits aussi sérieusement que possible, en incluant les délégués du personnel, l'inspection du travail et le médecin du travail dans ses démarches, et sans manifester la partialité que lui reproche M. [J]. Au contraire, l'inspection du travail reprochait en cours d'enquête à l'employeur, plus précisément dans un courrier du 28 juin 2016, d'avoir fait une liste de personnes à auditionner dont la majorité était favorable à M. [J] et non à Mme [B].

De plus lors d'une réunion de la première enquête du 20 juillet 2016, le médecin du travail référent indiquait au MIN qu'il convenait soit de 'sanctionner symboliquement M. [J], par un avertissement par exemple' pour son comportement 'tactile' inapproprié, soit de confier l'enquête à un prestataire externe, et l'employeur a opté pour cette seconde solution.

Enfin, après ces événements, M. [J] a repris le travail le 25 septembre 2017 sur un poste qu'il a accepté par avenant, et sur lequel il a été déclaré apte sans réserve par le médecin du travail.

L'arrêt maladie ayant conduit à son inaptitude est un arrêt pour maladie non professionnelle ayant débuté le 15 janvier 2018, soit quatre mois après sa reprise, et M. [J] n'établit aucun manquement survenu entre sa déclaration d'aptitude du 25 septembre 2017 et cet arrêt.

Il s'évince de ces constatations qu'aucun manquement de l'employeur à son obligation de sécurité n'est caractérisé, de sorte que la demande indemnitaire de M. [J] sera rejetée par confirmation du jugement déféré.

Sur le surplus des demandes :

M. [J], échouant en son procès, sera condamné aux dépens de première instance par confirmation du jugement entrepris ainsi qu'aux dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, le jugement entrepris étant également confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Dit sans objet la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,

Dit n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne M. [J] aux dépens d'appel.

Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,

Arielle RAVEANECatherine BRISSET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 2
Numéro d'arrêt : 21/00251
Date de la décision : 08/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-08;21.00251 ?
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