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08/07/2022 | FRANCE | N°18/01927

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 2, 08 juillet 2022, 18/01927


08/07/2022



ARRÊT N°2022/329



N° RG 18/01927 - N° Portalis DBVI-V-B7C-MIDI

AB/AR



Décision déférée du 06 Mars 2018 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE ( F 14/01862)

[O]

















[H] [P]





C/



Association AGS CGEA TOULOUSE

Société LE CARRELET

S.E.L.A.R.L. [S]

































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CONFIRMATION







Grosse délivrée



le 8 07 22



à Me Ludovic SEREE DE ROCH

Me Pascal SAINT GENIEST



REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

...

08/07/2022

ARRÊT N°2022/329

N° RG 18/01927 - N° Portalis DBVI-V-B7C-MIDI

AB/AR

Décision déférée du 06 Mars 2018 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de TOULOUSE ( F 14/01862)

[O]

[H] [P]

C/

Association AGS CGEA TOULOUSE

Société LE CARRELET

S.E.L.A.R.L. [S]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 8 07 22

à Me Ludovic SEREE DE ROCH

Me Pascal SAINT GENIEST

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU HUIT JUILLET DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

Madame [H] [P]

Résidence Les Lilas - appt 26 - 2ème étage - 12 rue Julien Forgues

31000 TOULOUSE

Représentée par Me Ludovic SEREE DE ROCH, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555/2018/010358 du 07/05/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

INTIMEE

Société LE CARRELET (en liquidation depuis le 19 09 2019)

PARTIES INTERVENANTES

S.E.L.A.R.L. [S] es qualité de liquidateur judiciaire de la Société LE CARRELET

35 boulevard Lascrosses 31000 TOULOUSE

Non représentée

AGS CGEA TOULOUSE UNEDIC Délégation de Toulouse, représentée par sa Directrice Nationale, Madame [W] [D]

1 rue des Pénitents Blancs - CS 81510

31015 TOULOUSE

Représentée par Me Pascal SAINT GENIEST de l'AARPI QUATORZE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Juin 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A. PIERRE-BLANCHARD,conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseilère

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- REPUTE CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre

Mme [N] a été embauchée selon contrat à durée indéterminée à compter du 14 novembre 2011 par la SARL le Carrelet en qualité d'aide cuisine/plongeuse.

La société le Carrelet employait moins de 11 salariés à la date du litige.

Selon lettre du 27 mars 2012 (contenant mise à pied à titre conservatoire à compter du 28 mars 2012) Mme [P] a été convoquée à un entretien préalable au licenciement fixé initialement au 6 avril 2012, puis au 18 avril 2012.

La salariée a été licenciée pour faute grave selon lettre du 25 avril 2012.

Le 1er août 2014, Mme [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse aux fins de contestation de son licenciement.

Par jugement de départition du 6 mars 2018, le conseil de prud'hommes de Toulouse a :

-dit que le licenciement pour faute grave est justifié et régulier,

-débouté Mme [N] de toutes ses demandes,

-dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-condamné Mme [N] aux dépens.

Mme [P] a relevé appel de la décision le 24 avril 2018, énonçant à l'acte d'appel les chefs critiqués du jugement.

La société le Carrelet a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Toulouse le 19 septembre 2019, la SELARL [S] étant désignée liquidateur judiciaire.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 novembre 2019, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [N] sollicite l'infirmation du jugement entrepris et demande à la cour de :

- dire et juger que le licenciement de Mme [N] est sans cause réelle et sérieuse, et irrégulier,

- condamner la société le Carrelet au paiement des sommes suivantes :

* 1559,99 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1559,99 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 155,99 € au titre des congés payés y afférents,

* 930,94 € à titre de rappel de salaire sur la mise à pied,

* 2000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier,

* 4000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 janvier 2022, auxquelles il est expressément fait référence, le CGEA de Toulouse conclut à la confirmation du jugement déféré, demande à tout le moins à la cour de réduire les demandes de Mme [P], et rappelle les conditions de sa garantie et de son intervention.

La SELARL [S], ès qualités de liquidateur de la société le Carrelet, régulièrement assignée par acte du 30 janvier 2020 remis à personne habilitée à le recevoir, n'a pas constitué avocat.

La décision sera réputée contradictoire par application des dispositions de l'article 473 du code de procédure civile.

MOTIFS :

Sur le licenciement pour faute grave :

Il appartient à la société le Carrelet qui a procédé au licenciement pour faute grave de Mme [P] de rapporter la preuve de la faute grave qu'elle a invoquée à l'encontre de sa salariée, étant rappelé que la faute grave se définit comme un manquement ou un ensemble de manquements qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; la cour examinera les motifs du licenciement énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige.

En l'espèce, Mme [P] a été licenciée pour faute grave par courrier du 25 avril 2012, aux motifs suivants :

« Nous avons été alertés par le personnel de notre restaurant d'une situation difficile et d'un comportement inadéquat de votre part à leur égard.

Ainsi, notre Chef de cuisine, M. [G], nous a indiqué, que malgré des demandes répétées, vous refusez de suivre ses directives.

Pire, ces demandes entraînent des hurlement et énervements de votre part, lesquels sont totalement injustifiés, puisque ce dernier se contente de vous demander d'exercer vos missions de « plongeuse + aide-cuisine », comme le prévoit votre contrat de travail.

Mais surtout, ce dernier a attiré notre attention sur les propos méprisants portés à son égard à savoir « amateur », et « sale paysan qui doit retourner traire les vaches ». De tels propos sont inacceptables.

Monsieur [J] nous a également alerté sur votre attitude, identique, à son encontre. Vous l'avez ainsi et à maintes reprises interpellé en ces termes « chinois », tout en précisant que c'était « toujours la faute des chinois ».

Monsieur [F] [R], témoigne également de votre attitude agressive à son encontre. Vous l'avez, à de nombreuses reprises, traité de « petit noir » et de «mangeur de bananes ». Vous vous êtes également permise de critiquer son travail et vous l'avez interpellé en ces termes : « petit jeune merdique ».

Ces derniers nous indiquent tous trois vous avoir, à de nombreuses reprises, demander de cesser ce comportement, sans que rien ne change.

Compte tenu de la gravité des faits relatés, nous nous sommes entretenus avec vous afin de recueillir vos explications.

Loin de nous fournir la moindre explication, ce 24 mars 2012, vous vous êtes emportés contre mon épouse, en l'invitant d'ailleurs à aller consulter un psychiatre !

De surcroît, vous adoptez le même comportement à l'égard de l'ensemble de nos salariés devant notre clientèle, ces derniers, pouvant entendre vos hurlements. Cette attitude nuit considérablement à notre image alors que nous venons d'ouvrir notre restaurant.

Lors de l'entretien préalable, loin de nier les faits, vous avez tenté d'en minimiser la gravité, ou bien d'en rejeter toute responsabilité.

Un tel comportement n'est pas acceptable. Outre le déficit en termes d'image engendré par votre comportement, il nous appartient, en notre qualité d'employeur, d'assurer la santé physique et mentale de nos salariés, de sorte que nous ne pouvons tolérer votre attitude, et nous ne pouvons accepter que vous teniez de tels propos à l'encontre de nos salariés.

Votre comportement nous interdit d'envisager la poursuite de votre contrat de travail.

Pour l'ensemble de ces motifs, nous sommes contraintes de nous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave. »

L'employeur, défaillant à la procédure, ne produit en conséquence aucune pièce au soutien du licenciement.

En revanche, le CGEA de Toulouse verse aux débats les courriers de plainte des trois salariés évoqués dans la lettre de licenciement, dénonçant les 14 et 20 mars 2012 le comportement irrespectueux, raciste et injurieux de Mme [N] à leur égard.

Leurs courriers sont parfaitement circonstanciés, précis, et concordants sur les faits reprochés à Mme [N], et font preuve des griefs ainsi retenus par l'employeur.

Mme [N] ne produit aucun élément de nature à démontrer le caractère mensonger de ces courriers. Les attestations émanant de proches ou d'anciens collègues, sur son prétendu bon comportement, sont inefficaces en ce qu'ils émanent de personnes non présentes sur le lieu de travail lors des faits reprochés.

Un tel comportement adopté de manière récurrente par une employée de restauration à l'égard de ses collègues constitue un manquement rendant impossible la poursuite du contrat de travail et justifiant le licenciement pour faute grave de Mme [P].

La cour confirmera donc le jugement entrepris, ayant rejeté les demandes d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse présentées par Mme [P].

Sur l'irrégularité du licenciement :

Mme [P] invoque une première irrégularité lors d'une tentative d'entretien préalable avortée le 6 avril 2012, dans la mesure où le gérant se trouvait représenté par son épouse qui n'en avait pas reçu le pouvoir, et où l'accès aux locaux avait été refusé au conseiller de la salariée.

Cet entretien n'a finalement pas eu lieu et la salariée a été reconvoquée pour le 18 avril 2012, de sorte qu'elle ne peut prétendre à indemnisation pour licenciement irrégulier de ce chef.

Le 18 avril 2012, Mme [P] a été reçue en entretien préalable à 15h30, après la fin du service, par le gérant de la société le Carrelet.

Mme [N] soutient que cet entretien est irrégulier car il s'est tenu dans la grande salle de restaurant et que le conseiller de la salariée a noté sur son compte-rendu que des employés étaient présents à proximité.

Or, il n'est pas établi que certains salariés, dont l'identité n'est pas précisée, aient pu entendre les propos tenus lors de l'entretien alors que leur service était terminé, ni que Mme [P] ait subi un quelconque préjudice.

Mme [P] évoque également un enregistrement de l'entretien qui aurait eu lieu à son insu par le gérant ; là encore il n'est fait la démonstration d'aucun préjudice dans la mesure où cet enregistrement, dont la matérialité est incertaine puisqu'elle résulte des seuls propos du gérant repris unilatéralement par le conseiller du salarié dans son compte-rendu non signé de l'employeur, n'a en tout état de cause pas été utilisé dans le cadre de l'instance.

En conséquence, c'est à bon droit que le juge départiteur a débouté Mme [P] de sa demande indemnitaire pour irrégularité de la procédure de licenciement.

Sur le caractère vexatoire du licenciement :

Mme [P] invoque le caractère vexatoire du licenciement au motif qu'elle aurait été privée de l'assistance du conseiller du salarié lors de l'entretien du 6 avril 2012, or cet entretien n'a finalement pas eu lieu, et elle a bien été assistée du conseiller du salarié lors de l'entretien préalable du 18 avril 2012, de sorte qu'il n'existe aucune irrégularité ni, encore moins, de circonstance vexatoire entourant le licenciement de ce chef.

Par ailleurs Mme [P] soutient avoir été licenciée pour faute sans avertissement préalable, or aucune règle n'imposait en l'espèce à l'employeur d'utiliser avant tout licenciement une sanction moindre, et la gravité des fautes reprochées justifiait ce licenciement ainsi qu'il l'a été vu précédemment.

Enfin, Mme [P] indique avoir été licenciée alors qu'elle était en arrêt maladie depuis le 27 mars 2012'en raison des 'pressions constantes qu'elle subissait par son employeur et ses collègues' ; or elle ne démontre ni même ne décrit ces prétendues pressions au sujet desquelles aucun élément probant n'est produit ; elle ne verse aux débat aucune pièce permettant de faire un quelconque lien entre son arrêt de travail et sa situation professionnelle, et l'employeur était fondé, nonobstant l'arrêt pour maladie non professionnelle, à licencier sa salariée pour des fautes graves commises avant l'arrêt de travail.

Le retard d'un mois et demi dans la perception de ses indemnités journalières, dû à un envoi tardif par l'employeur de l'attestation de salaire, ne permet pas davantage à la cour de retenir le caractère vexatoire du licenciement.

La demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire sera donc rejetée par confirmation du jugement déféré.

Sur le surplus des demandes :

La présente décision sera déclarée opposable à l'AGS- CGEA de Toulouse.

Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Mme [P], échouant en son appel, sera condamnée à en supporter les dépens étant précisé qu'elle est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Déclare la présente décision opposable à l'AGS-CGEA de Toulouse,

Condamne Mme [N] aux dépens d'appel, étant précisé qu'elle est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.

Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,

Arielle RAVEANECatherine BRISSET.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 2
Numéro d'arrêt : 18/01927
Date de la décision : 08/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-08;18.01927 ?
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