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27/06/2022 | FRANCE | N°19/05514

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 27 juin 2022, 19/05514


27/06/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/05514

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLYU

CR / RC



Décision déférée du 05 Novembre 2019

Tribunal de Grande Instance d'ALBI ( 18/00389)

Mme [R]

















[S], [I], [G] [J]





C/



[Z] [U]

[O] [K]

SA MAAF ASSURANCES





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [S], [I], [G] [J]

[Adresse 3]. La Mouline

[Localité 4]

Représenté par Me Claire...

27/06/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/05514

N° Portalis DBVI-V-B7D-NLYU

CR / RC

Décision déférée du 05 Novembre 2019

Tribunal de Grande Instance d'ALBI ( 18/00389)

Mme [R]

[S], [I], [G] [J]

C/

[Z] [U]

[O] [K]

SA MAAF ASSURANCES

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [S], [I], [G] [J]

[Adresse 3]. La Mouline

[Localité 4]

Représenté par Me Claire GIMENEZ, avocat au barreau D'ALBI

INTIMES

Monsieur [Z] [U]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Ingrid CANTALOUBE-FERRIEU, avocat au barreau de TOULOUSE

Représenté par Me Zuzana ROCHEFEUILLE, avocat au barreau de ALBI

Madame [O] [K]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Ingrid CANTALOUBE-FERRIEU, avocat au barreau de TOULOUSE

Représenté par Me Zuzana ROCHEFEUILLE, avocat au barreau de ALBI

SA MAAF ASSURANCES

Chauray

[Localité 2]

Représentée par Me Angéline BINEL de la SCP ALBAREDE ET ASSOCIES, avocat au barreau de CASTRES

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Décembre 2021, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. ROUGER, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. ROUGER, président

A.M. ROBERT, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. ROUGER, président, et par C. DELVER, greffier de chambre.

***

EXPOSE DU LITIGE

M. [U] et Mme [K] ont confié à M. [J], exerçant sous l'enseigne Ovalie Services, la réalisation de travaux de construction d'un mur de clôture pour un montant de 3 152, 38 €, selon un devis en date du 15 septembre 2011.

Le 17 juillet 2012, M. [J] a émis une facture d'un montant de 2 324,16 € correspondant aux travaux réalisés.

Les maîtres d'ouvrage se sont opposés au paiement au motif qu'ils avaient relevé plusieurs malfaçons et ont mis en demeure M. [J] d'avoir à reprendre les désordres avant le 17 août 2012.

En réponse, M. [J] a mis en demeure ses clients d'avoir à régler la facture.

Les 30 septembre, 5 octobre et 11 décembre, les consorts [U] [K] ont déposé trois plaintes pour violences à l'encontre de M. [J].

Le 6 septembre 2012, les consorts [K]-[U] ont fait appel à l'entreprise Sarl Barraux-Pelissier, laquelle a présenté un devis de reprise des travaux pour un montant de 8 773, 60 €. Les consorts [U] [K] ont également procédé à un constat d'huissier le 30 octobre 2012 afin de constater les malfaçons.

La Maaf a émis une proposition de prise en charge partielle dudit devis avec déduction de la facture de son assuré, sans reconnaissance de responsabilité, proposition non acceptée.

Aucun accord amiable n'ayant été trouvé, M. [U] et Mme [K] ont assigné M. [J] et son assureur, la compagnie Maaf, par acte d'huissier en date du 20 mars 2013, devant le juge des référés aux fins de voir prononcer une mesure d'expertise, laquelle a été ordonnée le 27 septembre 2013, M.[Y] étant désigné.

L'expert a déposé son rapport le 30 janvier 2015, concluant :

- à des désordres et non conformités (absence de justification de la liaison seuil du portail et des piliers, absence de ceinture béton sur le mur, différences de hauteur des deux parties du mur et des piliers supports du portail, défaut d'aplomb), conséquences de défauts de conception,

- à des malfaçons dans la mise en oeuvre des éléments constitutifs du mur de clôture (semelle de fondation non adaptée pour assurer au mur de clôture jouxtant le domaine public la stabilité exigible, absence de justification des aciers pour armature, défauts hors tolérance des ouvrages de maçonnerie en petits éléments) constitutifs de vices graves susceptibles de manière certaine et prévisible de compromettre la solidité du mur,

- ainsi qu'à un défaut d'implantation de l'ouvrage réalisé pour 9 cm sur le fonds voisin

préconisant la démolition du mur et sa reconstruction pour un coût estimé à 9.954,59€ TTC Tva à 10%, le délai d'exécution étant estimé à deux semaines.

Par acte d'huissier en date du 8 mars 2018, les consorts [K]-[U] ont fait assigner M. [J] et son assureur, la Maaf, devant le tribunal de grande instance d'Albi.

Par jugement contradictoire du 5 novembre 2019, le tribunal de grande instance d'Albi a :

- mis hors de cause la compagnie Maaf Assurances,

- condamné M. [J] sur le fondement de sa responsabilité contractuelle à payer à M. [U] et à Mme [K] les sommes suivantes :

* 12 692.88 € au titre de la reprise des désordres et non conformités de l'ouvrage litigieux,

* 2 270 € en réparation du préjudice matériel,

* 6 080 € en réparation du préjudice de jouissance,

* 5 000 € en réparation du préjudice moral.

- dit que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du présent jugement et que les intérêts dus pour une année entière seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal,

- condamné M. [J] à payer à M. [U] et à Mme [K] la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- prononcé l'exécution provisoire,

- rejeté toutes plus amples demandes.

Pour statuer ainsi le premier juge a retenu qu'il n'y avait pas eu réception de l'ouvrage de sorte que seule la responsabilité de l'entrepreneur pouvait être engagée sur le fondement de l'article 1147 du code civil applicable au litige et que le rapport d'expertise établissait que M.[J] n'avait pas rempli son obligation de résultat de réalisation d'un mur dans les règles de l'art. Ecartant la demande de résolution du contrat dont l'avait saisis les demandeurs, il a condamné M.[J] à payer des dommages et intérêts, soit la somme de 12.692,88 € représentant le coût de la démolition et de reconstruction réactualisé au 4 octobre 2017, outre diverses indemnités au titre du préjudice matériel résultant des coûts exposés par les maîtres d'ouvrage pour la location d'une pelle, la réalisation des fondations et l'achat d'un mécanisme d'automatisation du portail, du préjudice de jouissance et du préjudice moral.

Il a retenu que la garantie effondrement avant réception assurée par la Maaf ne pouvait être mobilisée en l'absence de caractère imminent de l'effondrement, le mur étant toujours en place depuis 2012.

Par déclaration en date du 20 décembre 2019, M. [J] a relevé appel de ce jugement, critiquant l'ensemble de ses dispositions.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 3/12/2021, M. [J], appelant, demande à la cour, au visa des articles 1224, 1228 et 1231-6 du code civil, de :

- dire recevable l'appel qu'il a interjeté le 20 décembre 2020 à l'encontre du jugement rendu parle tribunal de grande instance d'Albi le 5 novembre 2019,

- réformer ledit jugement en toutes ses dispositions,

En conséquence, la Cour rejugeant entièrement l'affaire :

A titre principal,

- dire que 'l'entreprise Ovalie Services' n'a pas engagé sa responsabilité contractuelle,

- prononcer sa mise hors de cause,

A titre subsidiaire,

- dire ne pas y avoir lieu à résolution du contrat de louage d'ouvrage conclu entre lui-même pour ' l'entreprise Ovalie Services' et les consorts [U] [K],

- condamner les consorts [U] [K] au paiement de la facture n°FC0055 du 17 juillet 2002 établie par lui pour ' l'entreprise Ovalie Services' pour un montant de 2 324,16 €, avec intérêts au taux légal depuis le 25 juillet 2012, date de la mise en demeure,

En tout état de cause,

- condamner les consorts [U] [K] à payer la somme de 2 000 € au terme de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les consorts [U] [K] aux entiers dépens, avec droit au profit de Me Gimenez de les recouvrer directement en application de l'article 699 du Code de procédure civile.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 1er décembre 2021, M. [U] et Mme [K], intimés, appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 1103, 1143, 1710, 1224, 1231-1 et suivants du code civil, 515, 548 et 700 du code de procédure civile, de :

- confirmer la décision déférée en ce qu'elle a :

* condamné M. [J] sur le fondement de sa responsabilité contractuelle,

* condamné M. [J] à l'indemnisation intégrale de tous les postes de préjudices à leur égard,

* condamné M. [J] à leur payer les sommes suivantes :

- 12 692.88 € au titre de la reprise des désordres et non conformités de l'ouvrage litigieux,

- 2 270 € en réparation du préjudice matériel,

- 6 080 € en réparation du préjudice de jouissance,

- 5 000 € en réparation du préjudice moral,

* dit que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du présent jugement et que les intérêts dus pour une année entière seront eux-mêmes productifs d'intérêts au taux légal,

* condamné M. [J] aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

* condamné M. [J] à leur payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajoutant,

- parfaire la somme correspondant à leur préjudice de jouissance au jour de la décision et qui ne saurait être inférieure à la somme de 8 320 € et condamner en conséquence M. [J] au paiement d'une somme supplémentaire de 2 240 €,

- parfaire la somme correspondant au montant de la reprise des désordres et non conformités de leur ouvrage litigieux à la somme de 14 214 € et condamner en conséquence M. [J] au paiement d'une somme supplémentaire de 1 521,12 €,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a mis hors de cause la société d'assurance Maaf Assurances,

- condamner in solidum M. [J] et la société Maaf Assurances au paiement de :

* 14 214 € au titre de la reprise des désordres et non conformités de l'ouvrage litigieux,

* 2 270 € en réparation du préjudice matériel,

* 8 320 € en réparation du préjudice de jouissance,

* 5 000 € en réparation du préjudice moral,

- condamner in solidum M. [J] et la société Maaf Assurances à payer la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 11 juin 2020, la Sa Maaf Assurances, intimée, demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- en conséquence, dire que l'ouvrage n'est pas réceptionné,

- dire que ni la garantie décennale ni la garantie effondrement ne sont engagées,

- ordonner sa mise hors de cause,

- condamner tout succombant au paiement de la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 6 décembre 2021.

SUR CE, LA COUR,

Nonobstant la portée de l'appel formalisé par M.[J], au regard du dispositif des dernières écritures respectives des parties, la disposition du jugement entrepris par laquelle le premier juge a rejeté la demande des consorts [U]-[K] tendant à la résolution du contrat ne fait l'objet d'aucune contestation. En application des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile cette disposition ne peut qu'être confirmée.

1°/ Sur l'action en responsabilité diligentée à l'encontre de M.[J] et le compte entre les parties

Selon les dispositions de l'article 1315 du code civil devenu 1353, celui qui se prétend créancier d'une obligation doit la prouver. Corrélativement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, les parties sont liées par un contrat d'entreprise ou louage d'ouvrage au sens de l'article 1787 du code civil, M.[J] ayant été chargé par M. [U] et Mme [K], selon devis accepté du 15/09/2011, de la réalisation sur leur propriété, en limite notamment avec la voie publique, d'un mur de clôture avec poteaux marquant l'ouverture d'accès à leur propriété comportant semelle filante, chaînage et coulage de béton en ceinture des poteaux pour un coût total de 3.152,38 €. Ces travaux n'ont pas été réceptionnés, les maîtres d'ouvrage ayant refusé l'ouvrage réalisé et s'étant opposés au règlement du solde du marché tel que facturé par M.[J] le 17/07/2012 pour un montant de 2.324,16 €, lui reprochant divers désordres et/ou non conformités aux règles de l'art selon courrier recommandé du 26 juillet 2012, à savoir :

- absence de liaison (acier et béton) pour le seuil du portail et des piliers

- absence de ceinture béton sur le mur

- différence de hauteur entre les piliers droit et gauche et les murs droit et gauche

- aplomb du pignon hors tolérance

- travail sale et bâclé.

Les consorts [U]-[K] recherchent la responsabilité contractuelle de droit commun de M.[J], seul fondement admissible en l'absence de réception des travaux.

Au regard de la date du contrat d'entreprise et de celle de son exécution, soit du 15/09/2011 au mois de juillet 2012 date de la facturation contestée, les obligations en résultant doivent s'apprécier en application des articles 1134, 1146 et suivants du code civil dans leur version applicable antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 soit le 1er octobre 2016, les contrats conclus avant cette date demeurant soumis à la loi ancienne, y compris pour leurs effets légaux et pour les dispositions d'ordre public, en application de l'article 9 de ladite ordonnance.

En vertu de l'article 1147 ancien du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Lié aux maîtres d'ouvrage par un contrat d'entreprise, M.[J] était tenu non seulement d'achever l'ouvrage dont il était chargé de la réalisation conformément au marché, mais aussi tenu d'une obligation de résultat quant au respect des limites de propriété et des règles de l'art applicables à sa spécialité professionnelle, devant livrer un ouvrage exempt de vices et de défauts.

Il résulte du rapport d'expertise judiciaire de M.[Y], qu'indépendamment du fait que le mur édifié ne se soit effectivement pas effondré près de dix ans après sa réalisation, l'ouvrage a été réalisé sans plans d'exécution ni d'implantation et qu'il est affecté depuis sa réalisation de divers défauts et non conformités de réalisation aux règles de l'art :

- défaut d'aplomb,

- défaut d'implantation de l'un des deux pans de murs en partie édifié (9 cm) sur le fonds voisin,

- défauts d'alignement, les deux parties du mur et les piliers destinés à supporter un portail ayant des hauteurs différentes,

- réalisation de la semelle de fondation sans semelle filante armée mais en blocs béton non enrobés et sans armature suffisante pour apporter la stabilité exigée pour un mur jouxtant la voie publique, caractérisant un vice constructif grave de nature à compromettre la solidité du mur.

L'expert judiciaire en déduit que cet ouvrage doit être entièrement refait pour un coût total chiffré en janvier 2015, Tva à 10% incluse, à 9.954,59 € selon devis de la Sarl Barrau-Pelissier fourni à l'expert par les maîtres d'ouvrage.

Pour combattre ce rapport d'expertise M.[J] produit en cause d'appel un rapport dit de « constatation visuelle » qui aurait été réalisé, uniquement en sa présence en janvier 2020 par un architecte, M.[D] [V], document qui ne mentionne que des affirmations subjectives : « le seuil de béton me paraît en bon état, le mur me paraît en bon état, le mur me paraît d'aplomb, je pense que le mur est fondé au moins sur sa partie en bordure du fossé », préconisant néanmoins pour obtenir une information plus précise sur la solidité du mur l'intervention d'un bureau d'étude béton.

Ce document produit en pièce 6 par l'appelant n'est pas signé. Il ne porte pas le tampon humide de l'architecte qui en serait l'auteur. Sa sincérité n'est pas établie. Au demeurant il ne peut être de nature à remettre utilement en cause les constatations réalisées sur site et contradictoirement par l'expert judiciaire, alors que de surcroît ce dernier a pris acte suite au dire de l'avocat de M.[J] du 3/03/2014 de ce que le Bet structure consulté par M. [J] avait indiqué qu'il n'interviendrait pas pour valider l'ouvrage.

La justification de l'acquisition par M.[J] de divers matériaux nécessaires à la réalisation de semelles de fondations, de chaînages, de ciment et de parpaings, tous matériaux nécessaires à son activité habituelle de maçon, est insuffisante à justifier de la réalisation de fondations et d'une armature du mur objet du litige conforme aux règles de l'art. La facture de fourniture établie par la Sarl Cunnac le 31 août 2011 établit effectivement que M.[J], exerçant à l'enseigne Ovalie Services a acquis divers matériaux destinés à son activité. Elle ne peut nullement établir la manière dont il a pu employer ou non ces matériaux sur le chantier des consorts [U]-[K], lesquels ne se sont engagés que sur devis du 15 septembre 2011, les travaux sur ce chantier n'ayant débuté, sans que cette date soit contestée, que le 5 octobre 2011, pour être finalement facturés par M.[J] le 17 juillet 2012.

S'agissant de l'implantation du mur M.[J] explique qu'elle était déjà matérialisée par la présence d'un grillage mais qu'il s'est inquiété du mauvais positionnement d'une borne, le maître d'ouvrage n'ayant selon lui pas souhaité faire vérifier les limites séparatives. L'expert judiciaire a relevé, photographie et relevé dit annexé en pièce 10 à son rapport à l'appui, fait non remis en cause par les parties, un débord de 9 cm du mur édifié par M.[J] sur la propriété voisine. M.[J] s'est contenté de déclarer qu'il avait suivi le grillage en place, qu'il avait vu la borne qui était inclinée, qu'il avait demandé la justification de cette implantation mais qu'il n'avait pas obtenu de justification de l'implantation de la clôture. Il est donc acquis qu'il a implanté le mur sans justification de la limite de propriété alors qu'il avait un élément objectif faisant douter de la matérialisation de cette limite. Maître de son art, il appartenait au maçon avant son intervention de s'assurer des limites effectives de propriété, et, en cas de difficulté relevée sur site telle qu'en l'espèce, à défaut par les maîtres d'ouvrages de justifier ou de faire procéder à une vérification préalable, de refuser d'implanter son ouvrage dans ces conditions.

En conséquence, il ressort de l'ensemble de ces éléments que M.[J] n'a pas satisfait aux obligations lui incombant au titre du marché de travaux dont il a été chargé, ayant réalisé un mur en partie implanté sur la propriété voisine et de surcroît affecté de vices constructifs résultant d'un non respect des règles de l'art de nature à porter atteinte à plus ou moins long terme à sa pérennité. En application des dispositions de l'article 1147 susvisé, il engage à ces titres, sa responsabilité contractuelle à l'égard des consorts [U]-[K], aucune cause étrangère de nature à l'en exonérer n'étant caractérisée.

Des suites des manquements contractuels de M.[J] les consorts [U]-[K] sont fondés à solliciter, à défaut par l'entrepreneur d'avoir lui-même repris le mur de manière à satisfaire à ses obligations, à titre de dommages et intérêts, la somme nécessaire à l'édification d'un mur dans les règles de l'art et correctement implanté.

Les travaux de démolition et reconstruction du mur ont été chiffrés par l'expert dans son rapport du 30 janvier 2015 au vu du devis de la Sarl Barrau-Pelissier à la somme de 9.954,59 € Ttc, soit 9.049,63 ht outre Tva à 10%.Les consorts [U]-[K] ont produit en première instance un devis actualisé établi par la Sarl Acs.Bat le 4/10/2017 portant le coût de démolition et reconstruction avec ferraillage des fouilles et des poteaux, raidisseurs et réalisation d'une ceinture béton à la somme de 12.692,88 € Ttc, soit 10.577,40 € Ht outre Tva à 20%, montant retenu par le premier juge. Ils produisent devant le cour un nouveau devis, établi par une troisième entreprise, la Sarl Ove Tp, datant du 11/06/2020, pour un coût de 14.214 € Ttc, soit 11.845 € Ht outre Tva à 20%. En tenant compte d'une actualisation à la date du présent arrêt du montant Ht retenu par l'expert dans son rapport, basé sur un devis du deuxième semestre 2014, soit 9.049,63 €, et de l'évolution de l'indice BT 01 dont la base a été modifiée fin 2014, entre janvier 2015 date du dépôt du rapport d'expertise, soit 104,10 (nouvelle base) et l'indice d'avril 2022 (124,9), dernier publié à la date du présent arrêt au journal officiel du 17/06/2022, le montant actualisé du devis retenu par l'expert judiciaire ressort à 10.857,81 € Ht, soit un coût total actualisé, Tva à 20% incluse de 13.029,37 €.

A défaut d'exécution en nature, pour satisfaire aux obligations lui incombant en exécution du marché de travaux, à la date du présent arrêt, M. [J] se trouve donc redevable de ladite somme de 13.029,37 € à l'égard des maîtres d'ouvrage. Corrélativement, les consorts [U]-[K] sont redevables de celle de 2. 324,16€ correspondant au solde du marché de travaux resté impayé et ne peuvent prétendre au remboursement de la somme de 583 € réglée à titre d'acompte à M.[J], ces sommes étant contractuellement dues en contrepartie de l'exécution par l'entrepreneur de ses propres obligations.

Les consorts [U]-[K] ayant à juste titre opposé à M.[J] l'exception d'inexécution de son obligation de résultat à la date de la mise en demeure de payer le solde des travaux qu'il leur a adressée, il ne peut quant à lui prétendre à des intérêts légaux sur ce solde impayé à compter de cette mise en demeure.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris, après compensation avec le solde restant dû sur le marché de travaux, au titre des travaux de reprise du mur déficient qui lui incombent, il convient de condamner M.[J] à payer aux consorts [U]-[K] la somme de 10.705,21 € outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt en application des dispositions de l'article 1153-1 devenu 1231-7 du code civil.

Aucune revendication n'a été formalisée devant l'expert par les consorts [U]-[K] quant à l'impossibilité de procéder, même provisoirement, à l'installation du portail automatisé tel qu'ils l'avaient acquis auprès de la société Gs Confort fermetures sécurité selon facture du 14/11/2012. Infirmant le jugement entrepris, ils doivent être déboutés de leur demande d'indemnisation à hauteur de 1.440 € correspondant au coût de l'automatisme dont ils affirment, sans en justifier, qu'il ne pourrait plus être utilisé, le fait que le système acquis ne soit plus sous garantie ne présumant pas de son obsolescence.

En revanche, des suites de l'état non réceptionnable du mur depuis juillet 2012, la propriété des consorts [U]-[K] est restée en l'état d'un mur de clôture inesthétique ainsi que relevé par l'expert judiciaire et dont les finitions ne pouvaient être réalisées en l'état, générant un préjudice de jouissance. Au regard de la nature uniquement esthétique de ce préjudice, les consorts [U]-[K] ayant au demeurant attendu plus de trois ans pour assigner en réparation après le dépôt du rapport d'expertise judiciaire, ce préjudice sera

justement réparé, infirmant le jugement entrepris, par l'octroi d'une indemnité de l'ordre de 150 € par an représentant pour une période écoulée de près de 10 ans à la date du présent arrêt, la somme globale de 1.500 €.

Le litige les ayant opposé à M.[J] a par ailleurs généré pour les consorts [U]-[K] divers tracas, aggravés par le comportement agressif et menaçant de M.[J] des suites du non paiement de sa facture, à l'encontre duquel ils ont dû déposer plainte à la gendarmerie de [Localité 6] les 5 octobre et 11 décembre 2012 outre une déclaration du 30 septembre 2012 dont ils produisent les procès-verbaux au débat. En l'absence de tout lien de causalité direct et certain établi entre cette situation et les états d'anxiété, d'insomnie et dépressif attestés par certificats médicaux datant de février 2018, soit plus de 5 ans plus tard, sans aucune référence à la cause génératrice de ces troubles, il convient de condamner M.[J] à payer aux consorts [U]-[K], infirmant le jugement entrepris, une indemnité de 2.000 € en réparation de leur préjudice moral.

Quant aux frais d'huissier exposés par les consorts [U]-[K] pour préserver leurs droits ils relèvent des frais irrépétibles indemnisables sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les indemnités ci-dessus allouées au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral porteront intérêt au taux légal à compter du prononcé du jugement de première instance partiellement infirmé, en application des dispositions de l'article 1153-1 devenu 1231-7 du code civil.

Par ailleurs l'ensemble des intérêts légaux courus sur les sommes allouées produiront eux-mêmes intérêts au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière en application des dispositions de l'article 1154 devenu 1343-2 du code civil.

2°/ Sur la garantie de la Maaf

M.[J] était assuré au moment de la réalisation du chantier confié par les consorts [U]-[K] auprès de la société Maaf assurances par un contrat multirisque « Multipro » . Au terme des conditions particulières produites au débat, il avait souscrit la garantie assurance des bâtiments et de leur contenu, sur chantier, soit une garantie de son matériel, et la garantie responsabilité civile professionnelle ainsi qu'une individuelle accident. La garantie responsabilité professionnelle construction prévoyait au vu des conditions spéciales produites une garantie des dommages avant réception résultant de l'effondrement total ou partiel d'un ouvrage de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert soumis à obligation d'assurance et causés aux travaux neufs exécutés par l'entrepreneur dans le cadre de son activité déclarée de maçon, l'effondrement s'entendant de l'écroulement des ouvrages de fondation, d'ossature, de clos et de couvert nécessitant le remplacement ou la reconstruction de la partie endommagée. Cette garantie effondrement s'étendait aux cas de menaces imminentes ayant justifié les mesures d'urgence nécessaires pour éviter une aggravation du dommage ou pour prévenir les accidents pouvant atteindre des personnes.

En l'espèce, en l'absence de tout effondrement effectif du mur objet du litige et de toute mesure d'urgence prise pour éviter un dommage imminent ou son aggravation ou prévenir des accidents pouvant atteindre des personnes, cette garantie n'a pas vocation à jouer.

La garantie après réception des travaux relevant des dispositions des articles 1792 et suivants, n'a pas davantage vocation à jouer en l'espèce, en l'absence de toute réception des travaux.

Par ailleurs, la lettre adressée par la Maaf à l'avocat des consorts [U] [K] le 30 juillet 2013, par laquelle ledit assureur pour en finir, offrait à titre transactionnel et, expressément, sans reconnaissance de garantie ni de responsabilité, de prendre en charge le devis de la Sarl Barrau-Pelissier pour 8.773,60 € Ttc déduction faite du solde de la facture de 2.324,16 € dont les maîtres d'ouvrage restaient redevables, et en conséquence de verser une somme de 6.449,44 € Ttc sous réserve de l'accord des consorts [U]-[K], proposition transactionnelle que ces derniers n'ont pas acceptée, ne peut valoir, contrairement à ce que soutiennent les intimés, reconnaissance explicite de garantie au titre du contrat d'assurance construction souscrit par M.[J].

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce que le premier juge a mis la Maaf hors de cause et débouté consécutivement les consorts [U]-[K] de leur demande de condamnation à son égard.

3°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Partie principalement succombante M.[J] supportera les dépens de première instance en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi que retenu par le premier juge, et les dépens d'appel.

Il se trouve redevable d'indemnités sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile envers les consorts [U]-[K] tant au titre de la procédure de première instance, telle que justement appréciée par le premier juge, qu'au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir lui-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions dudit article au profit de la société Maaf assurances.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris sauf quant aux montants des dommages et intérêts mis à la charge de M.[S] [J]

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne M.[S] [J] à payer à M. [Z] [U] et Mme [O] [K] pris ensemble, à titre de dommages et intérêts :

1°/ Après compensation avec le solde de facturation lui restant dû, la somme de 10.705,21 € au titre des travaux nécessaires à la démolition et la reconstruction du mur de clôture, outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt

2°/ la somme de 1.500 € en réparation de leur préjudice de jouissance outre intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2019

3°/ la somme de 2.000 € en réparation de leur préjudice moral outre intérêts au taux légal à compter du 5 novembre 2019

Dit que les intérêts légaux ci-dessus alloués porteront eux-mêmes intérêt au taux légal dès lors qu'ils seront dus pour une année entière

Déboute M. [Z] [U] et Mme [O] [K] du surplus de leurs demandes d'indemnisation

Condamne M.[S] [J] aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [Z] [U] et Mme [O] [K] pris ensemble une indemnité de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

Déboute M.[S] [J] et la société Maaf assurances de leurs demandes respectives d'indemnité sur ce même fondement.

Le présent arrêt a été signé par C. ROUGER, président et par C. DELVER, Greffier.

Le Greffier Le Président

C. DELVERC. ROUGER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/05514
Date de la décision : 27/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-27;19.05514 ?
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