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20/06/2022 | FRANCE | N°19/03444

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 20 juin 2022, 19/03444


20/06/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/03444

N° Portalis DBVI-V-B7D-NDNA

CR / RC



Décision déférée du 25 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN 18/00728

M. [L]

















[X] [P]

SELARL [X] [P] ET GHALIANE CROUZET





C/



[E] [K] veuve [M]

[R] [S]

[F] [A] épouse [S]
































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CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANTS



Maître [X] [P]

[Adresse 4]

[Localité 20]

Représenté par Me...

20/06/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/03444

N° Portalis DBVI-V-B7D-NDNA

CR / RC

Décision déférée du 25 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN 18/00728

M. [L]

[X] [P]

SELARL [X] [P] ET GHALIANE CROUZET

C/

[E] [K] veuve [M]

[R] [S]

[F] [A] épouse [S]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTS

Maître [X] [P]

[Adresse 4]

[Localité 20]

Représenté par Me Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocat au barreau de TOULOUSE

SELARL [X] [P] ET GHALIANE CROUZET

Société titulaire d'un Office Notarial, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social de la société.

106 a

venue [C] [G]

[Localité 20]

Représentée par Me Nicolas LARRAT de la SCP LARRAT, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Madame [E] [K] veuve [M]

[Adresse 17]

[Localité 20]

Représentée par Me Thierry DALBIN, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

Monsieur [R] [S]

[Adresse 18]

[Localité 19]

Représenté par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE

Madame [F] [A] épouse [S]

[Adresse 18]

[Localité 19]

Représentée par Me Jérôme HORTAL, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 18 Octobre 2021 en audience publique, devant la Cour composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : N.DIABY

Lors du prononcé : R. CHRISTINE, faisant fonction de Greffier.

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par R. CHRISTINE, faisant fonction de greffier, ayant prêté serment le 11 avril 2022.

******

EXPOSE DU LITIGE

Par acte authentique en date du 13 juin 2003, reçu par Me [X] [P], notaire à [Localité 20], les consorts [W] ' [N] ' [Y] ont vendu à M. [S] et Mme [A] épouse [S] une maison d 'habitation de plain-pied composée d'un séjour avec cheminée, cuisine, quatre chambres, une pièce, salle de bains, Wc, salle d'eau ainsi qu'un garage indépendant et une dépendance, ensemble immobilier sis à [Adresse 21], le tout situé en zone NC du plan d'occupation des sols et cadastré section F n°s [Cadastre 1], [Cadastre 2] et [Cadastre 3] pour une superficie totale de 1ha 13 a 33 ca moyennant le prix de 152.449 €.

En octobre 2005 les époux [S] ont fait procéder à une division cadastrale. La parcelle [Cadastre 3] est devenue [Cadastre 7] et [Cadastre 9] ; la parcelle [Cadastre 2] est devenue [Cadastre 5] et [Cadastre 6].

Suite à proposition d'achat pour un pavillon de 225 m² sur environ 4000 à 5000 m² du 7 avril 2007 un compromis de vente était signé entre les époux [S] et M. [H] [M] et Mme [E] [K] son épouse le 19 avril 2007 concernant l'acquisition d'une maison d'habitation de plain pied à détacher d'un plus grand bien pour une contenance de 4.500 m² environ, comprenant 4 chambres, un séjour, deux salles de bains, un bureau et un garage cadastrée à [Adresse 21] section F sous les n°s [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] pour le prix de 280.000 €.

En juillet 2007 une nouvelle division cadastrale a été réalisée :

- la parcelle F [Cadastre 7] d'une contenance de 24a54 ca est devenue F [Cadastre 11] (0 a 61ca) et F [Cadastre 10] (23a93ca)

- la parcelle F[Cadastre 6] pour une contenance de 10a41 ca est devenue F[Cadastre 13] (8 a 55) et F [Cadastre 12] (1a 86ca)

- la parcelle F[Cadastre 9] pour une contenance de 36a 67ca est devenue F [Cadastre 15] (36a 01ca) et F[Cadastre 14] (66ca).

Par acte authentique du 13 juillet 2007 passé par devant Me [X] [P], notaire à Caussade, les époux [S] ont vendu aux époux [M] une maison d'habitation sise à [Adresse 21] comprenant 4 chambres, un séjour, deux salles de bains, un bureau et un garage, le tout cadastré section F sous les n°s [Cadastre 11], [Cadastre 13] et [Cadastre 15] pour 45a17 ca moyennant le prix de 280.000 €, précision étant faite que la mutation n'entrait pas dans le champ d'application de la Tva, l'immeuble vendu étant spécifié achevé depuis plus de cinq ans, que le plan local d'urbanisme approuvé le 15/03/1983 situait la parcelle en zone NC et en zone « retrait gonflement des argiles » du plan de prévention des risques naturels prévisibles majeurs, que l'immeuble avait fait l'objet d'un permis de construire délivré avant le 1er juillet 1997, les vendeurs déclarant n'avoir réalisé depuis son acquisition et au cours des 10 années précédentes aucun travaux entrant dans le champ d'application des dispositions de la loi 78-12 du 4 janvier 1978.

M. [M] est décédé le [Date décès 16] 2015, sa veuve Mme [E] [K], successible et donataire, est devenue propriétaire de l'immeuble acquis le 18 septembre 2015 après avoir accepté la succession.

Puis, par acte authentique du 24 avril 2012, reçu par Me [X] [P], les époux [S] ont vendu à M. [J] et Mme [V] épouse [J] une maison à usage d'habitation ancienne rénovée sur en partie deux niveaux comprenant au rez-de-chaussée cuisine, séjour, couloir, dégagement, deux chambres, une salle de bains, un Wc, une buanderie, dans la pièce annexe une piscine intérieure, garage atelier, à l'étage une suite parentale avec salle d'eau, deux chambres, un bureau cadastrée [Adresse 21] section F [Cadastre 1], [Cadastre 5], [Cadastre 8], [Cadastre 10], [Cadastre 12] et [Cadastre 14] pour une surface de 68a 20 ca moyennant le prix de 400.000 €., dont 24.809 € s'appliquant aux biens mobiliers compris dans la vente.

Souhaitant vendre leur immeuble, en 2018, les époux [J] ont été informés par l'agence Orpi Immobilier de Caussade par courrier du 3/08/2018 d'une incohérence entre le bien tel décrit et le cadastre, leur conseillant de prendre rendez-vous avec leur notaire pour vérifier la régularité administrative du bien. Courant juin 2018 il était confirmé aux époux [J] que la maison acquise en 2012 avait en réalité fait l'objet de travaux conséquents d'agrandissement, sans permis de construire et en zone A. Ils ont alors mis en demeure leurs vendeurs de procéder à une régularisation de la situation.

Informée de la situation, Mme [E] [K] veuve [M] souhaitant elle-même vendre son immeuble, a contacté les services de l'urbanisme lui révélant que son immeuble se trouvait dans la même situation d'illicéité pour des travaux d'extension réalisés sans permis de construire.

Par acte d'huissier en date du 10 septembre 2018, M. et Mme [J] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Montauban M. et Mme [S] aux fins d'engager leur responsabilité au titre d'un dol et Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet en manquement au devoir de conseil, sollicitant des dommages et intérêts affaire enrôlée sous le n° RG 18-727.

Par acte d'huissier du 10 septembre 2018 Mme [E] [K] Veuve [M] a aussi assigné devant le tribunal de grande instance de Montauban M. et Mme [S] aux fins d'engager leur responsabilité au titre d'un dol et Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet en manquement au devoir de conseil sollicitant des dommages et intérêts, affaire enrôlée sous le n° RG 18-728 .

Les deux instances ont suivi un circuit parallèle et deux jugements distincts sont intervenus le 25 juin 2019.

Par jugement contradictoire du 25 juin 2019, dans l'instance 18-728 ([M]), le tribunal de grande instance de Montauban a :

- dit irrecevable l'exception de nullité de l'assignation,

- déclaré recevable l'action en justice formée par Mme [K] veuve [M] pour n'être pas soumise aux dispositions de l'article 28, 4° c de la loi du 4 janvier 1955 et pour n'être pas prescrite,

- dit que M. et Mme [S] ont commis un dol à l'égard de Mme [K] veuve [M] engageant leur responsabilité quasi-délictuelle,

- dit que M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet ont manqué à leur devoir d'information et de conseil à l'égard de Mme [K] veuve [M],

- condamné in solidum M. et Mme [S] d'une part et M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet d'autre part à payer à Mme [K] veuve [M] la somme de 56.000 € en réparation de son préjudice matériel,

- condamné in solidum M. et Mme [S] d'une part et M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet d'autre part à payer à Mme [K] veuve [M] la somme de 3.000 € en réparation du préjudice moral,

- dit que M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet relèveront et garantiront M. et Mme [S] à concurrence de 50% des condamnations ci-dessus de même que celles dues au titre des frais irrépétibles et dépens,

- dit que M. et Mme [S] relèveront et garantiront M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à concurrence de 50% des condamnations ci-dessus de même que celles dues au titre des frais irrépétibles et dépens,

- condamné in solidum M. et Mme [S] d'une part et M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet d'autre part à payer à Mme [K] veuve [M] la somme de 3.000 € en application de l'article 700, 1° du Code de procédure civile,

- condamné in solidum M. et Mme [S] d'une part et M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet d'autre part aux entiers dépens en application de l'article 696 du Code de procédure civile,

- accordé à Me Cherel le droit de recouvrer directement les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Pour statuer ainsi le premier juge a retenu que l'exception de nullité de l'assignation aurait dû être soulevée devant le juge de la mise en état et que l'action tendant uniquement à l'indemnisation d'un préjudice sur le fondement de la responsabilité des époux [S] pour dol, l'assignation n'avait pas à être publiée en application du décret 55-22 du 4 janvier 1955. Il a aussi retenu qu'au regard des dispositions de l'article 2224 du code civil le délai de prescription de l'action en indemnisation pour dol courait à compter de la découverte du dol par le cocontractant, découverte faite par l'acquéreur en l'espèce en juin 2018 de sorte que l'action engagée par assignation de septembre 2018 n'était pas prescrite.

Sur le fond, au visa de l'article 1116 ancien du code civil applicable à l'espèce, il a estimé qu'au regard de la lecture comparée des actes du 13 juin 2003, des compromis et acte de vente des 19 avril et 13 juillet 2007 la désignation du bien variait, qu'il était donc certain qu'au moment de l'achat des époux [M] le garage n'était plus indépendant de la maison principale, que le document d'arpentage provisoire du 20 octobre 2005 permettait de constater l'existence de trois bâtis sans aucune jonction alors que le plan de bornage établi pour l'acte authentique de vente mentionnait deux modifications les 13 avril et 6 juillet 2007, présentant le garage et la maison comme reliés outre l'adjonction d'un autre bâtiment longeant le garage et deux petits bâtiments au nord et au sud de la maison d'habitation ; que le diagnostic de performance énergétique du 7 avril 2007 joint au compromis de vente et à l'acte authentique décrivait l'immeuble comme une maison d'une superficie de 207 m², avec un croquis de repérage établissant deux blocs reliés susceptibles de correspondre à la maison d'habitation et au garage ; que même si une lecture attentive des différents documents permettait aux acquéreurs de comprendre qu'il y avait eu modification de la configuration des pièces au sein de la maison principale, la réalisation d'une extension avec création d'une chambre supplémentaire et le positionnement différent du garage depuis l'achat par les époux [S] en 2003, en affirmant n'avoir procédé à aucun travaux pouvant engager leur responsabilité de constructeur, les époux [S] ont tu une information importante sur la nature et la date des travaux qu'ils reconnaissent désormais avoir fait réaliser mais qu'ils limitent à de la rénovation avec jonction de la maison d'habitation au garage ; que la consultation du permis de construire de la maison principale sollicité en 1975 par les auteurs des époux [S] établissait que la superficie de l'immeuble était de 106,68 m² alors qu'elle est chiffrée à 207 m² par le diagnostic de performance énergétique du 7 avril 2007 et à 225 m² environ par la proposition d'achat du même jour. Il a déduit du tout que les époux [S] avaient ainsi empêché les époux [M] de pouvoir solliciter les documents administratifs justifiant la nature exacte des travaux réalisés et de s'assurer de la régularité de cette opération alors que la nature des travaux effectués était déterminante dans la mesure où l'immeuble vendu se situait en zone NC, concernant des terrains faisant l'objet d'une protection particulière en raison de la valeur agronomique des sols, strictement réservée aux constructions directement liées et nécessaires aux besoins de l'exploitation agricole dont les extensions et reconstructions sont soumises à des prescriptions très spécifiques, et où, en raison de l'exposition de la parcelle à des mouvements différentiels liés au phénomène de retrait-gonflement des argiles exposant l'immeuble à des désordres, la garantie et la reprise pouvait être conditionnées par la légalité de la construction. Il a estimé que le bref délai entre l'acquisition de l'immeuble et sa revente excluait que les vendeurs aient pu méconnaître le principe et la nature des travaux « ordonnés », la qualité de professionnel de l'immobilier de M.[S] induisant la connaissance des conséquences de la non-délivrance de ce type d'information. Il a retenu que l'information relative aux travaux effectués était d'autant plus essentielle que l'acte authentique mentionnait un certificat d'urbanisme du 5 juin 2007 définissant comme sans objet les surfaces hors occupation nette, celles susceptibles d'être édifiées, celle des bâtiments existants et celle maximale en cas de destruction des bâtiments existants, et retenu qu'en acquérant une maison de 12 pièces au prix de 280.000 € les époux [M] pouvaient légitimement croire à la légalité de la construction de l'immeuble.

Il a déduit de tout la privation par les vendeurs, du fait de leur silence, d'informations déterminantes sur la valeur de l'immeuble pour les acquéreurs qui n'ont pu imaginer que le bien avait fait l'objet de travaux sans autorisation administrative, caractérisant un dol générateur de responsabilité, estimant la perte de chance pour les acquéreurs d'acquérir l'immeuble à un prix moindre résultant de sa situation administrative à 20 % du prix d'achat.

S'agissant de la responsabilité du notaire il a retenu que Me [P] ayant été le rédacteur des actes successifs avait une bonne connaissance de la situation et des caractéristiques du bien cédé et qu'il lui était particulièrement aisé de remarquer les modifications subies par le bien selon les informations et documents communiqués par les vendeurs successifs ; que la discordance entre la description du bien déterminée par les parties, les documents établis par le géomètre-expert, les diagnostics immobiliers et l'affirmation des époux [S] selon laquelle ils n'avaient procédé à aucun travaux relevant de la loi du 4 janvier 1978 aurait dû inciter le notaire rédacteur à questionner davantage les vendeurs pour obtenir des éléments plus précis sur les conditions dans lesquelles des transformations de l'immeuble étaient intervenues justifiant un prix de vente 1,2 fois supérieur à celui auquel ils l'avaient eux-mêmes acquis dans un secteur où une telle plus-value en quatre ans ne pouvait s'expliquer par le dynamisme du marché immobilier.

Il a retenu que l'information plus complète par le notaire aurait simplement pu permettre aux acquéreurs d'être informés du changement de destination du garage et de solliciter des justificatifs du cadre de la réalisation des travaux ayant permis la jonction des deux bâtiments d'origine, de sorte que le préjudice résultant du manquement à l'obligation d'information et de conseil du notaire ne pouvait s'analyser qu'en une perte de chance d'acquérir l'immeuble à un moindre prix appréciée dans les mêmes proportions que celle résultant du dol des vendeurs.

Il a enfin estimé que dans les rapports entre les vendeurs et le notaire, au regard de leurs obligations et fautes respectives, la charge de la réparation prononcée in solidum devait être supportée à hauteur de 50 % chacun.

Par déclaration en date du 23 juillet 2019, Me [X]  [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet ont relevé appel de l'intégralité des dispositions de ce jugement les concernant.

DEMANDES DES PARTIES

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 23 juin 2020, M. [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet, appelants, demandent à la cour, au visa de l'article 1240 du Code civil, de :

- réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- dire qu'ils n'ont pu commettre envers Mme [K] veuve [M], sinon envers M. et Mme [S], aucun manquement à leur devoir de conseil de nature à engager leur responsabilité civile professionnelle,

- débouter en conséquence Mme [K] veuve [M] de l'ensemble de ses demandes telles que dirigées à leur encontre,

- débouter M. et Mme [S] de toute action récursoire qu'ils pourraient engager à leur encontre,

- condamner Mme [K] veuve [M], au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

A titre subsidiaire,

- constater l'absence de lien causalité entre les manquements reprochés à Me [P] et le préjudice dont Mme [K] veuve [M] sollicite l'indemnisation,

- débouter en conséquence Mme [K] veuve [M] de l'ensemble de ses demandes telles que dirigées à leur encontre,

- débouter M. et Mme [S] de toute action récursoire qu'ils pourraient engager à leur encontre,

- condamner Mme [K] veuve [M], au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel,

A titre très subsidiaire,

- dire que Mme [K] veuve [M] ne justifie d'aucun préjudice certain et donc indemnisable,

- à tout le moins, dire que l'éventuelle chance perdue d'obtenir un moindre prix ne saurait excéder 10% du prix de vente payé, soit la somme de 28.000 €,

- débouter pour le surplus Mme [K] veuve [M], de ses demandes,

- débouter M. et Mme [S] de toute action récursoire qu'ils pourraient engager à leur encontre,

En tout état de cause,

- condamner in solidum M. et Mme [S] à les relever et garantir indemne de l'ensemble des condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre au profit de Mme [K] veuve [M],

- les débouter de l'ensemble de leurs demandes telles qu'ils pourraient les présenter à leur encontre,

- les condamner au paiement de la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 20 mars 2020, Mme [K] veuve [M], intimée, appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles 1137 et 1240 du Code civil, de :

- confirmer partiellement le jugement dont appel,

- dire que l'action n'est pas prescrite,

- dire que les époux [S] ont commis un dol,

- dire que Me [P] a manqué à son devoir de conseil,

- par voie de conséquence, condamner in solidum M. et Mme [S], Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à la somme de 150.000 € au titre du préjudice matériel,

- condamner in solidum M. et Mme [S], Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à la somme de 10.000 € au titre du préjudice moral,

- condamner in solidum M. et Mme [S], Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner in solidum M. et Mme [S], Me [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 19 janvier 2020, M. et Mme [S], intimés, appelants incidents, demandent à la cour, au visa des articles 1304 et 1382 (anciens) du Code civil, de réformer le jugement dont appel, et, statuant à nouveau :

In limine litis,

- dire irrecevable l'action introduite par Mme [K] veuve [M] pour cause de prescription,

A titre subsidiaire,

- débouter Mme [K] veuve [M] de l'ensemble de ses demandes et rejeter son appel,

- débouter Me [P] et la Selarl [X] [P] et Ghaliane Crouzet de l'ensemble de leurs demandes et rejeter leur appel dirigé à leur encontre,

A titre infiniment subsidiaire,

- condamner Me [P] et la Selarl [X] [P] - Ghaliane Crouzet, notaires à [Localité 20], à les relever et garantir intégralement de toutes éventuelles condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre,

En toutes hypothèses,

- condamner tout succombant à leur verser la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

- condamner tout succombant aux entiers dépens avec distraction au profit de Me Hortal, avocat au Barreau de Toulouse, sur son affirmation de droit, et ce, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 octobre 2021.

SUR CE, LA COUR :

Au regard de la déclaration d'appel et des dernières écritures respectives des parties la cour n'est pas saisie de la disposition du jugement de première instance ayant dit irrecevable l'exception de nullité de l'assignation.

1°/ Sur l'action en responsabilité pour dol à l'égard des vendeurs

Selon les dispositions de l'article 2224 du code civil les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les fais lui permettant de l'exercer. S'agissant d'une action en responsabilité pour dol, le point de départ de la prescription quinquennale ne peut qu'être le jour de la révélation du fait allégué comme dolosif.

L'action en responsabilité pour dol engagée par Mme [M] à l'encontre de ses vendeurs les époux [S] est fondée sur le fait que ces derniers auraient dissimulé sciemment lors de l'acquisition intervenue en 2007 avoir réalisé des travaux de modification de la configuration et de la destination des lieux vendus ainsi que des extensions sans aucune autorisation d'urbanisme et alors qu'ils avaient déclaré tant dans le compromis de vente du 19 avril 2007 que dans l'acte authentique qu'ils n'avaient réalisé aucun travaux entrant dans le champ d'application des dispositions de la loi n° 78-12 relative à la responsabilité et aux dommages de la construction. Elle soutient n'avoir découvert l'illicéité de la construction de partie de l'immeuble acquis le 13 juillet 2007 que le 26 juin 2018, date à laquelle l'adjoint au maire de la commune de [Localité 20] aurait constaté des extensions de sa maison réalisées sans aucune autorisation administrative.

En l'espèce, l'acte d'acquisition du 13 juillet 2007 précise que l'immeuble objet de la vente a fait l'objet d'un permis de construire délivré avant le 1er juillet 1997. Les époux [M] étaient donc informés au jour de la réalisation de la vente que les époux [S], qui avaient eux-mêmes acquis ce bien en 2003, n'avaient sollicité pour leur part aucun permis de construire entre la date de leur acquisition et la date de la revente.

Mme [M] produit des photographies datées de 2003 dont elle indique qu'elles lui ont été fournies en 2012, au moment de la vente des autres parcelles aux époux [J], par M.[S], établissant la nature et l'étendue des travaux de construction réalisés par ses vendeurs. On y voit non seulement la réalisation de travaux intérieurs conséquents, dont des étaiements de support de dalle supérieure, des édifications de cloisons, des agrandissements d'ouvertures, mais aussi la réalisation de travaux de gros 'uvre (coulage de dalle, fermeture en brique de l'ancienne entrée du garage, coulage de fondations, édification d'une nouvelle construction en appui sur l'immeuble existant avec couverture en voliges et tuiles) et surtout l'édification progressive d'une construction entre la partie d'immeuble ayant abrité l'ancien garage construit en 1980, initialement indépendant, et le bâtiment ayant abrité l'ancienne maison construite en 1969 jusqu'à leur jonction complète formant une seule unité de bâtiment.

En conséquence, à réception de ces photographies sans ambiguïté sur la date, la nature et l'étendue des travaux réalisés en 2003 par les époux [S] qui apparaissent eux-mêmes sur les photos, soit au plus tard en 2012, Mme [M] était parfaitement informée que les époux [S], contrairement à ce qu'ils avaient déclaré lors de la vente de 2003, avaient réalisé d'importants travaux de modification, extension et jonction des bâtiments existants à l'époque de leur propre acquisition et que ces travaux n'avaient donné lieu à aucun permis de construire ou autorisation de travaux, puisque son propre acte de vente mentionnait que le permis de construire avait été délivré avant le 1er juillet 1997. A compter de 2012, Mme [M] ne pouvait donc ignorer les faits de nature à fonder une action en responsabilité pour dol à l'encontre de ses vendeurs, telle qu'elle l'a engagée en septembre 2018, à savoir la réalisation par ses vendeurs, contrairement à leurs déclarations lors de la vente de 2007, depuis leur propre acquisition, de travaux de construction lourds relevant de la garantie légale des constructeurs ayant modifié et étendu l'assise et modifié la configuration intérieure et extérieure des constructions telles qu'ils les avaient acquises en 2003 et ce en l'absence de tout permis de construire et, consécutivement, nécessairement, leur illicéité.

N'ayant engagé son action en responsabilité pour dol à l'encontre des vendeurs que par acte du 10 septembre 2018, soit plus de cinq ans après la connaissance de l'ensemble des faits révélant le comportement dolosif qu'elle leur reproche, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge dont la décision doit être infirmée sur ce point, l'action de Mme [M] se trouvait d'ores et déjà prescrite à la date de l'acte introductif d'instance et doit être déclarée irrecevable à l'encontre des époux [S].

2°/ Sur l'action en responsabilité à l'encontre du notaire instrumentaire

Mme [M] reproche à Me [X] [P] de ne pas avoir attiré l'attention des acquéreurs lors de la préparation et de la réalisation de l'acte authentique de vente de 2007 sur les discordances existant entre la description du bien telle que déterminée par les parties à l'acte, les documents établis par géomètre-expert en 2005 et 2007 établissant que le garage et la maison d'habitation étaient reliés ainsi que l'adjonction d'un autre bâtiment longeant le garage et de deux petits bâtiments au nord et au sud de la maison d'habitation, les diagnostics techniques décrivant précisément la configuration de l'immeuble, et l'affirmation des époux [S] selon laquelle ils n'avaient procédé à aucun travaux relevant de la loi du 4 janvier 1978, ainsi que de ne pas avoir procédé à des investigations complémentaires, par interrogation des vendeurs plus poussée, pour clarifier les conditions dans lesquelles l'immeuble avait été transformé et subi des d'extensions, manquements dont elle soutient qu'ils l'ont privée de la possibilité de négocier avec les vendeurs l'achat à moindre prix d'un immeuble qui peut seulement bénéficier de travaux de préservation ou de respect des normes, sans possibilité de permis de construire pour des travaux d'aménagement, de modification du bâti, d'extension ou de reconstruction notamment en cas de sinistre total ou partiel.

En droit le notaire qui prête son concours à l'établissement d'actes authentiques doit veiller à leur efficacité. Il doit, préalablement, procéder à la vérification des faits et conditions nécessaires pour assurer leur utilité et leur efficacité, sans toutefois être dans l'obligation de vérifier les informations d'ordre factuel fournies par les parties en l'absence d'éléments de nature à faire douter de la véracité ou de l'exactitude des renseignements donnés. Il est en outre tenu, envers ceux qui sollicitent son ministère d'un devoir de conseil et, le cas échéant de mise en garde, notamment en ce qui concerne les conséquences et risques des stipulations convenues.

En l'espèce, les époux [M] qui avaient visité l'immeuble avant acquisition, signé le document d'arpentage dit « provisoire » tel qu'établi en 2005 par M.[D], géomètre-expert, en vue de la première division des parcelles [Cadastre 2] et [Cadastre 3], établissant l'existence d'origine de trois bâtis distincts, eu connaissance des diagnostics techniques prenant en compte la réelle configuration de l'immeuble objet de la vente, ne pouvaient qu'avoir conscience que l'immeuble qu'ils entendaient acquérir ne présentait pas la même configuration que celui tel que décrit à l'acte d'acquisition des époux [S] de 2003, le garage et maison d'habitation initialement séparés étant désormais reliés et deux extensions au nord et au sud de la maison d'habitation initiale ayant été réalisées. Ils ne disposaient néanmoins d'aucune information sur l'époque effective de réalisation de ces modifications et leur incidence potentielle quant au statut du bien au regard des règles d'urbanisme, tant le compromis du 19/04/2007 établi en l'étude de Me [P] que l'acte authentique du 13 juillet 2007 préparé par ce dernier mentionnant que l'immeuble avait fait l'objet d'un permis de construire délivré avant le 1er juillet 1997 et transcrivaient la déclaration des vendeurs selon laquelle ils n'avaient réalisé depuis leur acquisition et au cours des dix années précédentes aucuns travaux entrant dans le champ d'application des dispositions de la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et aux dommages dans le domaine de la construction. Les photographies ayant permis aux acquéreurs d'identifier de manière certaine que les époux [S] avaient eux-mêmes réalisés des travaux constructifs conséquents nonobstant leurs déclarations contraires n'ont été remises, ainsi qu'admis par Mme [M], qu'en 2012, sans que cette affirmation soit combattue par une preuve contraire.

Le notaire instrumentaire ne pouvait quant à lui que s'apercevoir, au vu des documents dont il disposait de la discordance entre d'une part, la désignation de l'immeuble vendu telle que portée à l'acte à instrumenter (maison d'habitation de plain pied comprenant quatre chambres, un séjour, deux salles de bain, un bureau et un garage) et le document d'arpentage signé le 6 juillet 2007 par les parties portant division des parcelles [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8] et [Cadastre 9] faisant ressortir deux bâtiments distincts sur la parcelle devenue [Cadastre 15], et d'autre part, la réalité de la consistance et de l'agencement de l'immeuble vendu tel que reproduits au croquis du dossier de diagnostic technique réalisé le 7 avril 2007 représentant un bâtiment principal d'un seul tenant comprenant séjour, salle à manger cuisine, cinq chambres, dégagement, salle d'eau, Wc, cellier, buanderie, débarras, chaufferie et garage attenant, le diagnostic de performance énergétique faisant ressortir une surface habitable de 203 m2. Il ne pouvait en outre que s'apercevoir de la discordance existant entre cette configuration effective des lieux et la description des biens acquis par les époux [S] des consorts [W]-[N]-[Y] par acte du 13 juin 2003, ne comportant sur les parcelles en cause, qu'une maison d'habitation de plain pied composée d'un séjour avec cheminée, cuisine, 4 chambre, une pièce, salle de bain Wc, salle d'eau et garage indépendant, acte qu'il avait lui-même instrumenté, ce qui devait nécessairement le conduire à des interrogations sur la nature des travaux ayant pu être réalisés par les époux [S] depuis leur acquisition de 2003 pour expliquer cette discordance au regard de l'absence de permis de construire postérieur à 1997 et de la déclaration des vendeurs selon laquelle ils n'avaient réalisé depuis leur propre acquisition aucuns travaux entrant dans le champ d'application des dispositions de la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et aux dommages dans le domaine de la construction. Tenu en sa qualité d'officier ministériel, professionnel du droit, d'une obligation d'information, de conseil et de mise en garde à l'égard des acquéreurs, non professionnels de la construction ou du droit, quant aux risques liés à l'opération d'acquisition envisagée, il devait à tout le moins interroger les vendeurs sur l'origine des modifications et discordances ainsi constatables de nature à remettre en cause leurs déclarations, et, au regard de ces discordances constatables, alerter et mettre en garde les époux [M] sur leurs conséquences juridiques potentiellement préjudiciables dans l'hypothèse où des modifications constructives soumises à autorisation ou permis de construire préalable s'avéreraient avoir été réalisées sans ces autorisations dans une zone classée Nc. Il ne justifie pas avoir rempli cette obligation, se contentant, contrairement aux règles professionnelles inhérentes à sa charge, de soutenir qu'il aurait appartenu aux acquéreurs eux-mêmes d'attirer son attention sur la situation nécessairement douteuse qu'ils ne pouvaient ignorer.

En ne remplissant pas son obligation de conseil, d'information et de mise en garde, Me [X] [P] a en conséquence commis une faute professionnelle de nature à engager sa responsabilité à l'égard de Mme [M].

Selon le procès-verbal d'infractions au code de l'urbanisme établi par le maire de la commune de [Localité 20] le 5 novembre 2018 à l'encontre de Mme [M], M.[S] [R] a effectué une extension de près de 90% d'une maison d'habitation qui présentait une surface initiale de 106,68 m2 avec une annexe (garage) de 49 m2 (permis de construire accordés au premier propriétaire le 04/07/1969 pour la maison et le 21/04/1980 pour le garage) ; une régularisation a posteriori ne peut pas être effectuée car le bien se situe en zone A du Plu dont l'article A2 point 2.6 du règlement stipule que « les extensions sont limitées à 30% en plus de la surface de plancher des bâtiments existants à la date d'approbation du Plu, dans la limite totale de 300 m2 ». Cette absence de régularisation possible a été confirmée par le maire de la commune par courrier du 14 janvier 2020 dans la mesure où elle imposerait une révision générale du Plu, procédure non programmée et à l'issue favorable fort peu probable pour aller à l'encontre des directives gouvernementales concernant la consommation économe de l'espace agricole et la densification de l'habitat centre-bourg.

Cette situation porte nécessairement atteinte à la valeur vénale du bien dans la mesure où lorsque une construction a fait l'objet de transformations sans les autorisations d'urbanisme requises, en application des dispositions de l'article L 111-12 du code de l'urbanisme, seuls peuvent être éventuellement autorisés les travaux nécessaires à la préservation de la construction et au respect des normes.

De surcroît, les dispositions de l'article L 111-13 du code de l'urbanisme font obstacle, ainsi que relevé par le premier juge, à toute possibilité de reconstruction à l'identique si le bâtiment devait être détruit ou démoli suite à un sinistre catastrophe naturelle compte tenu de l'édification irrégulière initiale de partie du bâtiment et du plan local d'urbanisme en vigueur, situation d'autant plus préjudiciable que précisément le bien immobilier en cause est situé dans une zone faisant l'objet d'un plan de prévention des risques naturels « retrait gonflement des argiles ».

Il en résulte que le manquement ci-dessus retenu à l'encontre du notaire instrumentaire au titre de son obligation d'information, de conseil et de mise en garde, a privé les époux [M] au jour de la signature de l'acte d'acquisition d'une chance, si ce n'est de renoncer à l'acquisition projetée, à tout le moins, compte tenu de sa situation effectivement partiellement illicite au regard des règles d'urbanisme applicables, de négocier à la baisse le prix d'acquisition pour ne s'engager qu'à des conditions moins onéreuses.

Au regard de l'importance de la partie édifiée au delà des autorisations de construire initiales, soit 47,32 m2 (203-155,68) représentant environ 23 % de l'ensemble de la construction, du prix d'acquisition de 2007 (280.000 €), et de la valeur de l'immeuble arrêtée en juin 2018 hors toute considération d'irrégularité au regard des règles d'urbanisme (259.433 €), la perte de valeur vénale inhérente à l'irrégularité de partie de la construction et la perte de chance consécutive d'acquérir à des conditions plus avantageuses si les acquéreurs en avaient été informés comme ils l'auraient dû a justement été appréciée par le premier juge à 20 % du prix d'achat, de sorte que le jugement entrepris doit être confirmé en ce que le premier juge a condamné M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à payer à Mme [M] la somme de 56.000 € en réparation de son préjudice matériel.

Mme [M] a par ailleurs subi un préjudice spécifique lié aux tracas et inquiétudes subis quant aux conséquences négatives sur le plan patrimonial de la situation administrative de son immeuble, préjudice à relativiser néanmoins dès lors qu'ayant eu connaissance des travaux effectivement effectués par ses vendeurs en 2012 elle ne s'est pas particulièrement inquiétée de la situation pendant six ans. Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce que le premier juge a condamné M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet à payer à Mme [M] la somme de 3.000 € en réparation de ce qu'il a qualifié de préjudice moral.

3°/ Sur l'appel en garantie du notaire instrumentaire à l'encontre des vendeurs

Disposant d'éléments objectifs de nature à justifier, avant d'instrumenter, qu'il exige des vendeurs des précisions quant à la consistance réelle de l'immeuble objet de l'acte à instrumenter et des explications sur les travaux effectivement réalisés depuis leur propre acquisition au regard des discordances manifestes entre la configuration des biens telle que décrite à l'acte d'acquisition de 2003, de celle résultant du dossier de diagnostic technique, de leur déclaration selon laquelle ils n'avaient réalisé depuis leur propre acquisition aucuns travaux entrant dans le champ d'application des dispositions de la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et aux dommages dans le domaine de la construction, et de l'absence de tout permis de construire postérieurement à 1997, le notaire instrumentaire, dont la responsabilité a été retenue à l'égard des acquéreurs pour manquement à son devoir professionnel de conseil, d'information et de mise en garde, ne peut inutilement rechercher la responsabilité des vendeurs à son égard pour ne pas lui avoir spontanément délivré l'ensemble des informations qu'ils détenaient ou d'avoir communiqué des renseignements inexacts alors qu'il a été personnellement en mesure d'en soupçonner l'inexactitude tout en s'abstenant de tenter toute vérification et d'alerter comme il y était tenu les acquéreurs ce qui aurait permis d'éviter la réalisation du dommage.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris quant à ses dispositions sur les recours en garantie, il convient de débouter M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet de leur appel en garantie à l'encontre des époux [S].

4°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Parties principalement succombantes, M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet supporteront les dépens de première instance ainsi que retenu par le premier juge et les dépens d'appel et se trouvent redevables d'une indemnité à l'égard de Mme [M] tant au titre de la procédure de première instance, telle que justement appréciée par le premier juge, qu'au titre de la procédure d'appel dans les conditions définies au dispositif de la présente décision, sans pouvoir eux-mêmes prétendre à l'application de ce texte à leur profit.

L'équité ne commande pas que soit allouée aux époux [S] une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile tant au titre de la procédure de première que de celle d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce que le premier juge a déclaré recevable l'action engagée par Mme [E] [K] veuve [M] à l'encontre de M.[R] [S] et [F] [A] épouse [S] et a prononcé des condamnations à l'encontre de ces derniers tant au profit de Mme [E] [K] veuve [M] qu'au profit de M.[X] [P] et de la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare irrecevable pour cause de prescription l'action en responsabilité pour dol engagée par Mme [E] [K] veuve [M] à l'encontre de M.[R] [S] et [F] [A] épouse [S]

Déboute M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet de leur appel en garantie à l'encontre de M.[R] [S] et [F] [A] épouse [S]

Condamne solidairement M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet aux dépens d'appel avec autorisation de recouvrement direct au profit de Me Hortal, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à Mme [E] [K] veuve [M] une indemnité de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

Déboute M.[X] [P] et la Selarl [X] [P] et Galhiane Crouzet et M.[R] [S] et [F] [A] épouse [S] de leurs demandes respectives d'indemnité sur ce même fondement.

Le présent arrêt a été signé par M. DEFIX, président et par R. CHRISTINE, faisant fonction de greffier, ayant prêté serment le 11 avril 2022.

Le GreffierLe Président

R. CHRISTINEM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/03444
Date de la décision : 20/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-20;19.03444 ?
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