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13/06/2022 | FRANCE | N°20/00494

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 13 juin 2022, 20/00494


13/06/2022



ARRÊT N°



N° RG 20/00494

N° Portalis DBVI-V-B7E-NOIB

MD / RC



Décision déférée du 20 Décembre 2019

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (18/01293)

Mme [M]

















SA GAN ASSURANCES





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Grosse délivrée



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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1



***

ARRÊT DU TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***





APPELANTE



SA GAN ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, ...

13/06/2022

ARRÊT N°

N° RG 20/00494

N° Portalis DBVI-V-B7E-NOIB

MD / RC

Décision déférée du 20 Décembre 2019

Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (18/01293)

Mme [M]

SA GAN ASSURANCES

C/

[O] [R]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

SA GAN ASSURANCES

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Corine CABALET de la SELARL SELARL TERRACOL-CABALET AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

Madame [O] [R]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Nicolas DALMAYRAC de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. DEFIX, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. ROUGER, conseiller

A.M. ROBERT, conseiller

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par C. GIRAUD, directrice des services de greffe

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS

Suivant devis du 12 avril 2015, Mme [O] [R] a confié à la société par actions simplifiée (Sas) Néo artisan couverture la réalisation de travaux de restauration de la toiture de sa maison d'habitation sise [Adresse 1] (31).

Ces travaux ont été facturés le 13 novembre 2015 pour un montant de 15 504,42 euros toutes taxes comprises et réglés par Mme [R].

Suivant devis du 29 décembre 2015, Mme [R] a confié à la même société des travaux de reprise du réseau d'évacuation de la fosse septique.

Ces travaux ont été facturés le 31 mars 2016 pour un montant de 1 315,28 euros toutes taxes comprises et réglés par Mme [R].

Suivant devis du 2 janvier 2016, Mme [R] a confié à la même société la réalisation d'une terrasse en bois pour un montant de 13 000 euros.

La Sas Néo artisan couverture a facturé deux acomptes les 31 mars 2016 (4 550 euros) et 14 juin 2016 (4 225 euros).

Constatant la survenance d'infiltrations par la toiture, ainsi que divers désordres au niveau de la terrasse et du réseau d'évacuation de la fosse septique, Mme [R] a saisi la société à responsabilité limitée (Sarl) Amo concept aux fins d'expertise amiable, laquelle a, dans son rapport rendu le 26 octobre 2016 conclu à l'urgente nécessité de l'intervention de la Sas Néo artisan couverture ou d'une autre entreprise afin de mettre la maison hors d'eau et à la nécessaire réalisation de divers travaux s'agissant de la terrasse et du réseau d'évacuation.

Mme [R] a alors saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse en faisant assigner l'entreprise et de son assureur, la société anonyme (Sa) Gan assurances.

Par ordonnance rendue le 18 mai 2017, une expertise a été ordonnée et M. [S] [H], commis pour y procéder, a déposé son rapport le 13 novembre 2017.

-:-:-:-:-

Suivant exploit d'huissier du 11 avril 2018, Mme [R] a fait assigner la Sa Gan assurances devant le tribunal de grande instance de Toulouse, aux fins de la voir condamner notamment au paiement de la somme de 21 350,01 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise des désordres affectant la couverture, les descentes d'eau pluviales et des dommages consécutifs, ainsi que d'une indemnité de 200 euros par mois au titre du préjudice de jouissance consécutif aux infiltrations.

Par jugement contradictoire du 20 décembre 2019, le tribunal de grande instance de

Toulouse a :

- condamné la Sa Gan Assurances à payer à Mme [R] la somme de 21 350,01 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise des désordres affectant la couverture, les descentes d'eaux pluviales et des dommages consécutifs, avec indexation sur l'indice BT01 à compter du 13 novembre 2017 et jusqu'à la date du présent jugement,

- dit que la franchise contractuelle est opposable à la seule assurée au titre de l'indemnisation des dommages matériels,

- condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

- dit que la Sa Gan assurances est fondée à opposer sa franchise contractuelle à Mme [R] au titre du préjudice immatériel,

- condamné la Sa Gan assurances aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire,

- condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

Le tribunal a considéré que les conclusions de l'expert judiciaire permettaient de retenir un désordre de nature décennale en ce qui concerne les infiltrations puisqu'elles rendent la maison impropre à son usage d'habitation et qu'il n'est pas démontré que les défauts d'étanchéité présentés antérieurement par la toiture portaient atteinte à cet usage, qu'en outre, la franchise contractuelle concernant les dommages matériels, objet d'une garantie obligatoire n'est opposable qu'au seul assuré.

Le tribunal a estimé que le préjudice de jouissance allégué par Mme [R], qui a souffert d'infiltrations dans plusieurs pièces de vie, entrait dans la définition du préjudice immatériel donnée par la police d'assurance, qui peut être pécuniaire ou non, mais que l'assureur est fondé à opposer sa franchise contractuelle s'agissant d'une garantie facultative.

-:-:-:-:-

Par déclaration en date du 6 février 2020, la Sa Gan assurances a relevé appel de ce

jugement en ce qu'il a :

- condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 21 350,01 euros TTC au titre des travaux de reprise des désordres affectant la couverture, les descentes d'eau pluviales et des dommages consécutifs, avec indexation sur l'indice BT01 à compter du 13 novembre 2017 et jusqu'à la date du présent jugement,

- dit que la franchise contractuelle est opposable à la seule assurée au titre de l'indemnisation des dommages matériels,

- condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice de jouissance,

- condamné la Sa Gan assurances aux dépens de l'instance, en ce compris les frais de la procédure en référé et ceux de l'expertise judiciaire,

- condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

-:-:-:-:-

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 14 avril 2020, la Sa Gan assurances, appelante, demande à la cour, au visa de l'article 1792 du code civil, de :

À titre principal,

- réformer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :

- débouter Mme [R] de sa demande de condamnation au titre des travaux de reprise de la couverture et du préjudice de jouissance,

- condamner Mme [R] à restituer l'intégralité des sommes qu'elle a pu percevoir en exécution du jugement dont appel,

À titre subsidiaire, dire qu'elle est fondée à opposer sa franchise contractuelle à son assuré pour les dommages matériels et à Mme [R] pour les dommages immatériels,

En tout état de cause, condamner tout succombant au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, en ceux compris les frais d'expertise judiciaire.

À l'appui de ses prétentions, l'appelante soutient que :

- Mme [R] a fait intervenir la société Néo artisan couverture pour réaliser une rénovation de la toiture qui subissait d'importantes infiltrations, tel que cela ressort du rapport d'expertise judiciaire,

- Mme [R] ne conteste pas que les infiltrations vécues sont les mêmes qu'avant les travaux de sorte que les travaux, inefficaces, n'ont pas entraîné d'aggravation, or, la garantie décennale couvre le résultat du travail de l'entrepreneur et non l'état antérieur de l'immeuble,

- il n'existe pas de lien entre les travaux de réparation et les désordres de sorte que l'assurance garantie décennale n'est pas mobilisable,

- Mme [R] sollicite une indemnisation forfaitaire de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance mais cette demande forfaitaire est irrecevable et doit être rejetée car elle n'est pas fondée dès lors que la cliente subissait des infiltrations avant les travaux,

- Mme [R] n'a pas été privée de la jouissance de son habitation et continuait à l'habiter,

- le dommage matériel n'étant pas garanti, aucun dommage immatériel ne peut l'être,

- le préjudice de jouissance ne constitue pas un dommage immatériel puisqu'il ne constitue pas une perte pécuniaire consécutive au désordre,

- l'assureur est fondé à opposer sa franchise contractuelle à son assuré pour les dommages matériels et à Mme [R] pour les dommages immatériels.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 13 juillet 2020, Mme [O] [R], intimée, demande à la cour, au visa des articles 1792 et suivants du code civil et L.241-1 et L.243-7 du code des assurances, de :

Rejetant toutes conclusions contraires comme étant non justes et mal fondées,

- confirmer le jugement dont appel,

- débouter dès lors la Sa Gan assurances de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- débouter la Sa Gan assurances des fins de son appel,

Y ajoutant,

- condamner la Sa Gan assurances à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Sa Gan assurances au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [I], avocat.

À l'appui de ses prétentions, l'intimée soutient que :

- l'article 1792 du code civil institue une responsabilité objective de plein droit, oblige l'entrepreneur à réaliser un ouvrage exempt de vice et n'implique pas de déterminer la cause des désordres,

- l'article 1792 du code civil s'applique aux travaux de réfection d'une toiture qui supposent l'apport d'éléments nouveaux,

- si la toiture présentait incontestablement des désordres qui ont justifié l'intervention de la société Néo artisan, l'expert judiciaire n'a pas pu déterminer avec certitude les points d'infiltration préexistants et leur importance, de sorte que l'assureur est défaillant dans l'administration de la preuve,

- au regard des prestations facturées, il est établi que la société Néo artisan a posé des éléments nouveaux sur la toiture, assimilables à la construction d'un ouvrage, et ces travaux comme le relève l'expert, compromettent l'étanchéité de la couverture de la maison, rendant ainsi l'ouvrage impropre à sa destination et portant atteinte à la solidité de l'immeuble compte tenu du caractère évolutif du désordre,

- les travaux ont fait l'objet d'une réception tacite lors du paiement de la facture du 13 novembre 2015,

- le préjudice de jouissance est un préjudice garanti au titre de la garantie dommages immatériels stipulée dans la police d'assurance, en vertu de l'adverbe 'notamment' qui permet d'inclure les préjudices pécuniaires et autres que pécuniaires dont la perte provisoire du service rendu par un bien immeuble, qui génère nécessairement un préjudice pécuniaire.

-:-:-:-:-

L'ordonnance de clôture est intervenue le 9 mars 2022 et l'affaire a été examinée à l'audience du 22 mars 2022.

MOTIVATION

- Sur l'application de la garantie décennale :

1. L'article 1792 du code civil énonce que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

La mise en oeuvre de cette responsabilité de plein droit suppose l'existence d'un ouvrage, une réception de l'ouvrage et l'existence d'un dommage, non apparent à la réception, présentant une gravité décennale.

S'agissant de la qualification des travaux :

2. Pour relever de la catégorie d'ouvrage, les travaux en cause doivent être accomplis en exécution d'un contrat de louage d'ouvrage, avoir une nature immobilière et relever de la construction.

La demande de Mme [R] ne concerne que les travaux de couverture et zinguerie. À leur égard, la Sas Néo artisan couverture était tenue d'effectuer un travail spécifique répondant aux besoins particuliers de la cliente, de sorte que le contrat conclu entre les parties doit être qualifié de contrat d'entreprise.

La nature immobilière de l'ouvrage est caractérisée par l'attache à perpétuelle demeure. Toutefois, peuvent avoir un caractère immobilier les ouvrages importants, dont le déplacement implique des moyens considérables. En outre, les travaux doivent constituer une construction par leur conception, leur ampleur et le recours aux techniques du bâtiment. En outre, s'agissant de travaux de rénovation, l'application des articles 1792 et suivants du code civil suppose une modification substantielle de l'immeuble, notamment d'importants travaux de réhabilitation de l'ensemble de l'immeuble. Ainsi, des travaux de rénovation d'une toiture ne relèvent de la garantie décennale que s'ils comportent l'apport à la toiture et à la charpente d'éléments nouveaux.

Les travaux confiés par Mme [R] à la Sas Néo artisan couverture consistaient, selon la facture établie le 13 novembre 2015, en la dépose des ouvrages de bâtis, la dépose de l'entourage de cheminée, la dépose de main courante existante, les fournitures, façonnage et pose d'entourage d'étanchéité de cheminée en zinc naturel posé sur support volige, de contre solin en zinc naturel y compris son étanchéité, la reprise des étanchéités de velux, le traitement de surfaces de la couverture en tuiles, la reprise des soudures de chenaux périphérique, la reprise de planche de rive existante, la fourniture, façonnage et pose d'habillage de planche de rive en aluminium, de main courante, de baguette murale et de lambris sous face pvc,d'une bavette plomb étanchéité jonction terrasse, d'une boîte à eau, de tuyanx de descente en zinc naturel, d'écharpes de dévoiement, mais également, selon le rapport d'expertise du remplacement de tuiles et de la confection d'une nouvelle descente d'eau pluviale. Ces travaux importants, avec apport d'éléments nouveaux, constituent un ouvrage,

Les travaux relèvent donc des articles 1792 du code civil.

S'agissant de la réception de l'ouvrage :

3. La garantie décennale ne s'applique que s'il y a eu réception.

Mme [R] soutient que les travaux de rénovation de la toiture ont fait l'objet d'une réception tacite lors du réglement de la facture du 13 novembre 2015. La Sa Gan assurances ne conteste pas la réception alléguée par Mme [R].

Selon l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente soit à l'amiable soit à défaut judiciairement.

La réception tacite résulte du paiement intégral du prix et l'utilisation des lieux sans formuler de grief de telle sorte qu'en se comportant ainsi Mme [R] a entendu réceptionner les travaux.

S'agissant de la gravité des désordres :

4. L'expert judiciaire a, dans son rapport déposé le 18 mai 2017 conclu que malgré les travaux de rénovation de la toiture, des infiltrations d'eau sont persistantes dans le bureau de l'étage, la salle de bain, le garage, que la reprise d'étanchéité autour des fenêtres de toit n'est pas conforme, que l'entourage zinc de cheminée n'est pas conforme, ni la reprise des jonctions de chéneau, et relevé que ces désordres compromettaient l'étanchéité de la couverture de la maison.

Les désordres affectant l'étanchéité de la toiture et provoquant des infiltrations dans les pièces inférieures présentent un caractère décennal dès lors que les travaux n'ont pas atteint leur objectif de mise hors d'eau de la maison. De sorte que l'ouvrage entrepris pour ce faire, par la réfection de la toiture est donc affecté de désordres et porte atteinte à la destination de l'immeuble, sans qu'il soit besoin de vérifier l'étendue des infiltrations avant travaux ni leur aggravation.

La responsabilité de plein droit de la Sas Néo artisan couverture se trouve engagée au visa des dispositions de l'article 1792 du code civil.

- Sur la demande d'indemnisation des dommages matériels dirigée contre la Sa Gan assurances :

5. Il ressort du contrat d'assurance n°141225494 souscrit par la Sas Néo artisan couverture auprès de la Sa Gan assurances que l'assuré est couvert pour les marchés d'entreprise relevant du métier de charpentier bois hors traitement curatif des bois et couvreur, s'agissant de la garantie obligatoire de responsabilité décennale, de sorte que la Sa Gan assurances doit sa garantie en l'espèce.

La Sa Gan assurances, assureur responsabilité civile décennale est donc tenue d'indemniser Mme [R] pour les travaux de reprise de la couverture générés par ces désordres.

En l'absence de discussion des parties sur le montant retenu par le premier juge dont l'appréciation, conforme aux éléments clairs et objectifs de l'expertise, doit être validée, il convient de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 20 décembre 2019 en ce qu'il a condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 21 350,01 euros toutes taxes comprises au titre des travaux de reprise des désordres affectant la couverture, les descentes d'eau pluviales et des dommages consécutifs, avec indexation sur l'indice BT01 à compter du 13 novembre 2017, date du dépôt du rapport de l'expert et jusqu'à la date du jugement du 20 décembre 2019.

- Sur la demande d'indemnisation des dommages immatériels dirigée contre la Sa Gan assurances :

6. Le contrat d'assurance n°141225494 souscrit par la Sas Néo artisan couverture auprès de la Sa Gan assurances couvre la responsabilité civile décennale non soumise à l'obligation d'assurance, en ce qui concerne les dommages immatériels consécutifs avec application d'une franchise de 10%, minimum 0,91 BT01 et maximum 3,04 BT01.

Les dommages immatériels sont définis par l'article 2 des 'Conventions spéciales' comme 'tout dommage autre que corporel ou matériel et notamment pécuniaire résultant de la privation de jouissance d'un droit, de l'interruption d'un service rendu par une personne ou par un bien meuble ou immeuble ou de la perte d'un bénéfice'. 'il faut entendre par dommages immatériels 'consécutifs' : les dommages matériels directement entraînés par les dommages corporels ou matériels garantis'.

À l'instar de ce qu'a relevé le juge de première instance, il convient de déduire de l'emploi de l'adverbe 'notamment' que les parties n'ont pas adopté une liste limitative des dommages immatériels couverts par la police d'assurance et ont simplement visé une nature possible : la nature pécuniaire, sans s'y limiter, de sorte que les dommages immatériels qui découlent directement des dommages matériels garantis correspondent tant aux dommages pécuniaires qu'aux dommages non pécuniaires, tel qu'un préjudice de jouissance qui s'analyse en la diminution de l'usage d'un bien immobilier en raison des désordres de nature décennale qui l'affectent.

Mme [R] prétend subir un préjudice de jouissance consistant dans le fait d'avoir perdu provisoirement le service rendu par son bien immobilier. Il ressort à ce titre du rapport d'expertise que Mme [R] a subi des infiltrations d'eau récurrentes dans plusieurs pièces de vie de sa maison, infiltrations qui constituent un dommage matériel garanti par la police d'assurance, et dont il découle une perte de l'usage normal de son bien, et dont il n'est pas nécessaire qu'il entraîne une perte totale de la jouissance de l'habitation comme l'allègue la Sa Gan assurances.

Aux termes de l'article 954 al. 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions émises dans le dispositif des conclusions des parties. En l'espèce, il n'y a pas lieu de statuer sur l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation du préjudice de jouissance soulevée par la Sa Gan assurances qui n'a pas fait figurer sa demande dans le dispositif de ses conclusions et en outre, n'invoque aucun motif d'irrecevabilité.

Compte tenu du fait que les infiltrations concernent plusieurs pièces de vie et que le préjudice de jouissance a duré plusieurs années à compter de la réalisation des travaux litigieux, il convient de confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 20 décembre 2019 qui a condamné la Sa Gan assurances à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros au titre du préjudice de jouissance.

- Sur la franchise contractuelle :

7. En vertu de l'article L. 112-6 du code des assurances : 'L'assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire'.

Cependant, en matière d'assurance obligatoire, les franchises sont inopposables à la victime pour les dommages relevant d'une garantie obligatoire

En vertu de l'article L. 241-1 du code des assurances : 'Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance'.

Il en résulte que l'assureur ne peut opposer à la victime aucune franchise s'agissant de l'assurance obligatoire de la responsabilité du constructeur qui garantit le paiement des travaux de réparation de l'ouvrage à la réalisation duquel l'assuré a contribué.

En revanche, l'assurance obligatoire de la responsabilité du constructeur ne s'étend pas aux dommages immatériels, c'est-à-dire consécutifs aux désordres de l'ouvrage, l'assureur est donc fondé à opposer la franchise contractuelle concernant le préjudice de jouissance.

Doit donc être confirmé le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 20 décembre 2019 en ce qu'il a statué sur l'opposabilité des franchises contractuelles.

- Sur les dépens et les frais irrépétibles :

8. Le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 20 décembre 2019 sera confirmé en ce qu'il a condamné la Sa Gan assurances aux dépens de première instance en ce compris les frais de la procédure de référé et ceux de l'expertise judiciaire et à verser à Mme [R] la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

La Sa Gan assurances, partie perdante, sera condamnée au paiement des dépens d'appel en faisant droit à la demande présentée par Maître [I] en lui accordant le bénéfice du droit de recouvrement direct des dépens.

9. La Sa Gan assurances, partie perdante, sera condamnée à verser à Mme [R] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant dans les limites de sa saisine publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulouse le 20 décembre 2019.

Et y ajoutant,

Condamne la Sa Gan assurances aux dépens d'appel.

Autorise Maître [I] à recouvrer directement contre la Sa Gan assurances les frais dont il a eu à faire l'avance sans avoir reçu provision.

Condamne la Sa Gan assurances à verser à Mme [O] [R] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

La Directrice des services de greffeLe Président

C. GIRAUDM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 20/00494
Date de la décision : 13/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-13;20.00494 ?
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