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13/06/2022 | FRANCE | N°19/05292

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 13 juin 2022, 19/05292


13/06/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/05292 - N° Portalis DBVI-V-B7D-NLAH

A-M.R/NB



Décision déférée du 08 Novembre 2019 - Tribunal d'Instance de TOULOUSE ( 1119001418)

(M. [B])

















[V] [J]





C/



[R] [U]


























































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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [V] [J]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Emmanuelle LECLERC, avocat au barreau de TOULOUSE

Représenté par Me Va...

13/06/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/05292 - N° Portalis DBVI-V-B7D-NLAH

A-M.R/NB

Décision déférée du 08 Novembre 2019 - Tribunal d'Instance de TOULOUSE ( 1119001418)

(M. [B])

[V] [J]

C/

[R] [U]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [V] [J]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Emmanuelle LECLERC, avocat au barreau de TOULOUSE

Représenté par Me Valérie COLIN, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [R] [U]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Michel DARNET de la SELAS ATCM, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Février 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant A.M. ROBERT, Conseiller, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

A.M. ROBERT, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : I. ANGER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par C. GIRAUD, directrice des services de greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [V] [J] est propriétaire d'un appartement au 4eme étage d'un immeuble en copropriété situé [Adresse 5] à [Localité 3].

Se plaignant d'infiltrations en plafond au droit de la porte-fenêtre du séjour qu'il pensait provenir de la façade de l'immeuble et après en avoir informé le syndic de copropriété par courrier du 27 juin 2015, M. [J] a fait assigner le syndicat des copropriétaires en référé expertise.

Par ordonnance en date du 13 octobre 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de [Localité 3] a désigné M. [R] [U].

L'expert judiciaire a établi un pré rapport le 29 juin 2017 après avoir organisé une réunion sur site le 7 décembre 2016 et mis en observation l'appartement durant plusieurs mois afin de vérifier l'existence des infiltrations actives dénoncées mais non constatées au jour de l'accédit. Son rapport définitif a été déposé le 27 juillet 2017.

De nouvelles infiltrations étant apparues en septembre 2017, M. [J] a saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de [Localité 3] qui, par ordonnance en date du 14 décembre 2017, a désigné M. [O], lequel a déposé son rapport le 12 février 2019.

Par acte du 12 mars 2019, M. [J] a fait assigner M. [U] en responsabilité et dédommagement de son préjudice devant le tribunal d'instance de [Localité 3].

Par jugement contradictoire du 8 novembre 2019, ce tribunal a rejeté les demandes formées par M. [J], l'a condamné à payer à M. [U] la somme de 600 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens et a rejeté toutes demandes autres, plus amples ou contraires.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que l'expert était soumis à une obligation de moyen, qu'il n'était pas démontré un manquement de l'expert à ses obligations, ce dernier ayant procédé à des investigations pour déterminer la cause des désordres et ayant conclu qu'ils provenaient notamment d'un défaut d'entretien du joint d'étanchéité au pourtour de l'habillage extérieur du coffre du volet roulant. Il a estimé que le demandeur, sur qui repose la charge de la preuve, ne démontrait pas que les sommes dont il sollicite le remboursement (frais d'expertise, d'huissier et d'avocat) seront définitivement à sa charge, l'instance au fond l'opposant au syndicat des copropriétaires étant toujours en cours.

Par déclaration en date du 10 décembre 2019, M. [J] a relevé appel de ce jugement en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

DEMANDE DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 17 janvier 2022, M. [V] [J], appelant, demande à la cour, au visa de l'article 1240 du code civil, de :

- surseoir à statuer dans l'attente d'une décision définitive dans la procédure l'opposant au syndicat des copropriétaires du [Adresse 4] à [Localité 3],

- en tout état de cause, le dire et juger recevable et bien fondé en son appel,

- infirmer le jugement dont appel dans toutes ses dispositions,

- dire et juger que M. [U] a commis une faute dans l'exécution de sa mission d'expert judiciaire,

- condamner M. [U] à lui verser la somme de 5 236,74 € en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation,

- condamner M. [U] à lui verser une somme de 4 380 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [U] aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 14 mai 2020, M. [R] [U], intimé et sur appel incident, demande à la cour, au visa des articles 237,282 et 284 du code de procédure civile et 1240 du code civil, de :

- confirmer le jugement rendu sur le débouté des prétentions de M. [J],

- débouter M. [J] de l'intégralité de ses demandes, en l'absence de toute faute de sa part dans l'accomplissement de la mission qui lui a été confiée en tant qu'expert judiciaire,

Y ajoutant,

- condamner M. [J] à lui régler la somme de 1 500 € à titre de dommages intérêts et celle de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [J] aux entiers dépens de l'instance.

MOTIFS DE LA DECISION

La demande de sursis à statuer

M. [J] ne démontre pas en quoi la solution du présent litige serait dépendante de l'issue de la procédure au fond l'opposant au syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 5] à [Localité 3] dans la mesure où l'assignation qu'il a fait délivrer au fond à l'encontre du syndicat des copropriétaires réserve expressément les frais et dépens inhérents à la première procédure de référé-expertise, et dans la mesure où il produit l'ordonnance de référé du 13 octobre 2016 mettant à sa charge les frais d'expertise et les dépens de cette procédure.

Il n'y a pas lieu en conséquence de surseoir à statuer.

La responsabilité de l'expert

M. [J] recherche la responsabilité de M. [U] sur le fondement de l'article 1240 du code civil.

L'expert judiciaire est tenu d'une obligation de moyens qui s'apprécie en référence aux comportement exigé d'un expert normalement prudent, diligent, compétent et soucieux d'apporter son concours à la recherche de la vérité compte tenu des règles propres à sa profession et du temps et des moyens techniques qu'il a pu consacrer à l'accomplissement de sa mission.

En l'espèce M. [U] a été commis en qualité d'expert pour déterminer notamment la réalité et l'origine des infiltrations dénoncées par M. [J] et préconiser les remèdes à y apporter.

Il n'a procédé qu'à une seule réunion d'expertise qui lui a permis cependant de constater la réalité des désordres dénoncés par M. [J]. Il mentionne dans son rapport qu'il a constaté le même type de désordres dans l'appartement se situant au-dessus de celui de M. [J].

Constatant l'absence « d'infiltrations actives » et ayant pris connaissance de l'intervention, à la demande du syndic, de la société Acrobat Services en mai 2016 qui avait repris le joint périphérique au pourtour de l'habillage du volet roulant de M. [J], il en a déduit que l'origine du désordre avait été réglée et a seulement préconisé de laisser passer quelques mois pour vérifier l'absence de nouvelles infiltrations.

En l'absence de constat par M. [J] de nouvelles infiltrations au terme de ce délai il a, sans revenir sur site, rendu son rapport en attribuant la cause des infiltrations à un défaut d'entretien des joints périphériques d'étanchéité au pourtour de l'habillage extérieur du coffre de volet roulant.

Suite aux nouvelles infiltrations survenues moins de deux mois après le dépôt du rapport de M. [U], le nouvel expert commis a constaté les infiltrations dans l'appartement de

M. [J] mais aussi dans l'appartement se trouvant au-dessus ainsi qu'à tous les étages dans les parties communes. Ces constatations l'ont conduit à faire procéder à l'arrosage des murs au-dessus de l'appartement de M. [J], ce qui a permis de révéler que les défauts d'étanchéité des châssis des menuiseries métalliques étaient généralisés et que les nouvelles infiltrations subies dans l'appartement de M. [J] provenaient des étages supérieurs.

Il apparaît ainsi que les désordres constatés par M. [O], identiques à ceux constatés par M. [U] tant dans l'appartement de M. [J] que dans celui se trouvant au-dessus, sont la conséquence directe des pénétrations d'eau résultant d'une défaillance généralisée des châssis métalliques des menuiseries de l'immeuble.

M. [U], qui avait constaté la dégradation de l'étanchéité de la menuiserie métallique équipant le studio de M. [J] attribuée à un défaut d'entretien, s'est borné à attendre de nouvelles infiltrations durant 6 mois, sans pousser plus avant ses investigations, notamment en procédant à des tests d'arrosage de la façade concernée, technique au demeurant assez courante de recherche de défaut d'étanchéité, et ce, alors même qu'il avait pu constater lui-même des désordres similaires affectant l'appartement du dessus.

M. [U], architecte et expert en la matière, qui ne conteste pas les conclusions du deuxième expert, ne peut s'exonérer de sa responsabilité en relevant que M. [J] et son conseil, profanes en la matière, ont indiqué ne pas contester son rapport dans leur dire du 7 juillet 2013, et ce d'autant qu'ils soulignent à deux reprises dans ce dire que les mêmes désordres ont été constatés dans l'appartement du dessus. Il ne peut non plus, pour les mêmes motifs, s'exonérer de sa responsabilité en relevant que M. [J] a réglé les frais d'expertise sans contestation postérieurement aux nouvelles infiltrations.

Force est de constater qu'il appartenait à M. [U] de proposer aux parties des investigations plus poussées et au demeurant couramment pratiquées par les experts s'agissant d'infiltrations, ce qu'il n'a pas fait.

En ne procédant pas à des investigations supplémentaires, notamment à l'arrosage de la façade concernée par les désordres, alors même qu'il avait pu constater que les infiltrations étaient présentes dans au moins deux appartements, M. [U] a commis une faute dans l'accomplissement de sa mission d'expert judiciaire (2e Civ., 20 juillet 1993, pourvoi n° 92-11.209), faute qui a causé à M. [J] un préjudice en lien direct de causalité puisqu'il s'est vu contraint d'initier une nouvelle procédure de référé-expertise et donc d'exposer de nouveaux frais de justice suite à la nouvelle mesure d'instruction ordonnée par cette juridiction en raison des premières conclusions incomplètes de M . [U]..

M. [J] justifie avoir réglé la somme de 3 292,28 € au titre des honoraires de

M. [U], celle de 144,46 € au titre des frais d'huissier pour la délivrance de la première assignation en référé-expertise ainsi que celle de 1 800 € Ttc au titre des honoraires d'avocat réglés lors de la première procédure de référé et de la première expertise, soit au total la somme de 5 236,74 € à laquelle il convient de fixer son préjudice.

Infirmant le jugement, il convient de déclarer M. [U] responsable du préjudice subi par M. [J] et de le condamner à lui payer la somme de 5 236, 74 € outre les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 8 novembre 2019, date du jugement, conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil.

La demande reconventionnelle de M. [U]

M. [U] qui succombe dans ses prétentions ne peut prétendre à l'allocation de dommages et intérêts au titre du préjudice subi pour procédure attentatoire à sa réputation.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Les demandes annexes

M. [U] sera tenu des dépens de première instance et d'appel.

M. [J] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'il a été contraint d'exposer à l'occasion de cette procédure.

M. [U] sera condamné à lui régler la somme de 2 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens de première instance et d'appel.

M. [U], tenu aux dépens, ne saurait pour sa part bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Dit n'y avoir lieu à sursis à statuer ;

- Infirme le jugement rendu le 8 novembre 2019 par le tribunal d'instance de [Localité 3] sauf sa disposition déboutant M. [R] [U] de sa demande de dommages et intérêts ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

- Dit que M. [R] [U] a commis une faute dans l'exécution de sa mission engageant sa responsabilité délictuelle ;

- Condamne M. [R] [U] à payer à M. [V] [J] la somme de 5 236, 74 € à titre de dommages et intérêts, outre intérêts au taux légal à compter du 8 novembre 2019 ;

- Condamne M. [R] [U] aux dépens de première instance et d'appel ;

- Condamne M. [R] [U] à payer à M. [V] [J] la somme de 2 500 € au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en cause d'appel ;

- Déboute M. [R] [U] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

La directrice des services de greffeLe Président

C. GIRAUDM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/05292
Date de la décision : 13/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-13;19.05292 ?
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