La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2022 | FRANCE | N°19/03081

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 30 mai 2022, 19/03081


30/05/2022



ARRÊT N°



N° RG 19/03081

N° Portalis DBVI-V-B7D-NCEL

J.C G / RC



Décision déférée du 18 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN

(18/00723)

Mme [T]

















[H] [S]





C/



[B] [J]





























































CONFIRMATION







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***



APPELANT



Monsieur [H] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Alexandre DELORD, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE







INTIME



Monsi...

30/05/2022

ARRÊT N°

N° RG 19/03081

N° Portalis DBVI-V-B7D-NCEL

J.C G / RC

Décision déférée du 18 Juin 2019

Tribunal de Grande Instance de MONTAUBAN

(18/00723)

Mme [T]

[H] [S]

C/

[B] [J]

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TRENTE MAI DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANT

Monsieur [H] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Alexandre DELORD, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

INTIME

Monsieur [B] [J]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean claude DELRIEU de la SCP DELRIEU, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant J.C. GARRIGUES, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

J.C. GARRIGUES, conseiller

S. LECLERCQ, conseiller

Greffier, lors des débats : N. DIABY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par C. GIRAUD, Directrice des services de greffe.

EXPOSE DU LITIGE

Le 14 mars 2017, M. [J] a été appelé en cause dans une affaire civile pendante devant le tribunal d'instance de Castelsarrasin, opposant la Compagnie d'aménagement des coteaux de Gascogne et M. [S].

Dans le cadre de cette instance, M. [J] a formé une demande reconventionnelle devant le tribunal d'instance de Castelsarrasin afin de demander la condamnation de M. [S] au paiement des deux factures suivantes :

- une facture du 26 décembre 2015 pour des travaux de mise en culture pour l'année 2015 s'élevant à 28 970 € TTC,

- une facture du 22 mai 2016 pour des travaux d'implantation de blé en novembre 2015 d'un montant de 2 695,76 € TTC.

Par jugement du 23 août 2018, le tribunal d'instance s'est déclaré incompétent sur ces demandes au profit du tribunal de grande instance de Montauban, au regard du taux de compétence.

Par jugement contradictoire en date du 18 juin 2019, le tribunal de grande instance de Montauban a :

- condamné M. [S] à payer à M. [J] la somme de 31 665,76 € au titre du paiement des deux factures datées du 26 décembre 2015 et 22 mai 2016,

- condamné M. [S] à verser à M. [J] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700, 1° du code de procédure civile,

- condamné M. [S] aux dépens,

- prononcé l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré, au visa des articles 1315, 1341 et 1348 du code civil et au regard de l'ancienneté de la relation d'affaire entre M.[J] et M.[S] remontant à 1994 et du fait que cette relation intervenait en matière agricole, qu'il pouvait être admis qu'il existait un usage plaçant M.[J] dans l'impossibilité morale de se procurer une preuve écrite.

Le tribunal a ensuite constaté qu'alors même que M.[S] admettait non seulement qu'il avait été en relation d'affaires avec M.[J] jusqu'en 2015 mais encore que les travaux agricoles avaient été réalisés sur ses terres par M.[J] jusqu'à la récolte 2016, il ne justifiait du règlement d'aucune facture relative à ce travail. Il a ajouté que M.[S] ne pouvait justifier de l'extinction de son obligation à l'égard de M.[J] en produisant les seules 'observations' de Mme [N], expert agricole, qui concluaient à l'existence de doutes sur la qualité du travail de M. [J] mais ne remettaient pas en cause son existence.

Il en a conclu qu'il était établi que M.[J] avait travaillé les terres de M.[S] jusqu'à la récolte 2016, que ce travail était, selon l'usage instauré entre les parties, rémunéré, et que M. [S] ne justifiait pas qu'il s'était acquitté du paiement de ce travail auprès de M. [J], ni qu'il avait existé une cause justifiant l'extinction de son obligation à son égard.

Par une déclaration en date du 2 juillet 2019, M. [S] a relevé appel de ce jugement en critiquant l'ensemble de ses dispositions.

DEMANDES DES PARTIES

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 8 mars 2021, M. [S], appelant, demande à la cour, au visa des articles 1315, 1341 et 1348 du code civil, de :

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* condamné M. [S] à payer à M. [J] la somme de 31 665,76 € au titre du paiement des deux factures datées du 26 décembre 2015 et 22 mai 2016,

* condamné M. [S] à verser à M. [J] une somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Par conséquent,

- débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions visant à ce qu'il soit condamné à lui payer la somme de 31 665,76 € au titre du paiement de deux factures du 26 décembre 2015 et 22 mai 2016, la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de l'instance.

M.[S] expose que s'il a admis la relation d'affaires jusqu'en 2015, il a clairement fait valoir dans ses écritures de première instance que la relation d'affaires avait pris fin en 2015 justement par le fait que M.[J] ne justifiait d'aucune prestation effectuée sur sa propriété et qu'au surplus le tribunal a dénaturé les éléments soumis à son appréciation en considérant que les conclusions de Mme [N] ne remettaient pas en cause son existence.

Il estime que force est de constater la carence de M.[J] à établir tant la réalité des prestations faisant l'objet des factures que leur montant.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 23 octobre 2019, M. [J], intimé, demande à la cour de :

- confirmer en tout point la décision dont appel,

En y ajoutant,

- condamner l'appelant à la somme de 2 000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. [J] expose qu'il a demandé le paiement des deux factures par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 24 mai 2016 par M.[J], lequel n'a pas contesté la qualité des travaux ni leur exécution ; que le 14 mars 2017, il a été appelé en cause dans une affaire civile opposant la Compagnie d'aménagement des Côteaux de Gascogne et M. [S] et formé à cette occasion une demande reconventionnelle en paiement des deux factures.

Il explique qu'il a travaillé les terres de la famille [S] pendant plus de 20 ans selon un accord initialement passé avec M.[S] père, aujourd'hui décédé, qui a perduré avec son fils, [H] [S], qui a souhaité garder le même fonctionnement, au moins jusqu'en 2015.

Il considère que les conclusions de l'audit agricole de Mme [N] ne permettent pas de remettre en cause l'existence du travail qu'il a effectué sur l'exploitation de M.[S].

Il fait valoir que pour les années 2015 et début 2016, il a bien travaillé sur les terres de l'appelant puisque le tableau fourni par Mme [N] fait bien état d'une production pour ces deux années et que M.[S] lui-même indique avoir changé de prestataire depuis la récolte 2016, preuve que c'est bien lui qui a assuré la production de la propriété en 2015.

Enfin, il indique que suivant la décision du tribunal d'instance de Castelsarrasin, il doit payer l'eau qui a servi à irriguer les terres de M.[S] pour un montant de 5916,45 € qui ampute d'autant la rémunération qui lui est due.

MOTIFS

Sur la demande en paiement des factures

L'article 1315 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

L'article 1341 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit qu'il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret (soit actuellement 1500 € ), même pour dépôts volontaires, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre.

Il résulte de l'article 1348 du code civil, dans sa rédaction applicable à la présente procédure, qu'il est admis que cette règle reçoit exception lorsque l'obligation est née d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, ou lorsque l'une des parties, soit n'a pas eu la possibilité matérielle ou morale de se procurer une preuve littérale de l'acte juridique, soit a perdu le titre qui lui servait de preuve littérale, par suite d'un cas fortuit ou d'une force majeure.

En l'espèce, il apparaît que M.[J] et les consorts [S], père et fils, ont été en relation d'affaires depuis l'année 1994 et qu'il n'a jamais été établi d'écrits entre eux pendant toute cette période, les seuls écrits étant les factures établies manuscritement sur un facturier que M. [J] adressait régulièrement à M.[W] [S] puis à M.[H] [S], sans  que cela pose la moindre difficulté jusqu'en 2015 (pièces n° 1 de M.[J]). Les parties ont été manifestement liées par des rapports de confiance durant toute cette période.

Le premier juge a justement estimé qu'au regard de l'ancienneté de la relation d'affaires et du fait que celle-ci intervenait en matière agricole, il pouvait être admis qu'il existait un usage plaçant M.[J] dans l'impossibilité morale de se procurer une preuve écrite.

Cette analyse n'est au demeurant pas contestée par M.[S] qui rappelle toutefois qu'une telle impossibilité morale ne dispense pas le bénéficiaire de ces dispositions de rapporter la preuve de l'obligation dont il réclame l'exécution, dans son principe et dans son montant, par des moyens de preuve qui n'émanent pas exclusivement de lui.

Les deux factures litigieuses concernent des travaux réalisés au cours de l'année 2015 :

- facture du 26 décembre 2015 pour des travaux de mise en culture pour l'année 2015 s'élevant à 28 970 € TTC,

- facture du 22 mai 2016 pour des travaux d'implantation de blé en novembre 2015 d'un montant de 2 695,76 € TTC.

M. [S] produit les 'observations sur les chiffres comptables de l'exploitation [H] [S]' établies à sa demande par Mme [N], expert agricole, qui indique que les travaux agricoles jusqu'à fin 2015 étaient réalisés par la Sarl [J] et que depuis la récolte 2016, M. [S] a changé de prestataire de service en la personne de [C] [O].

Ainsi, alors même qu'il admet que les travaux agricoles facturés ont été réalisés sur ses terres par M.[J], M.[S] ne justifie du règlement d'aucune facture relative à ce travail dont il n'est pas contesté qu'il était rémunéré jusque-là.

Il apparaît ensuite au vu des factures versées au débat (pièces n° 1) que les travaux facturés sont conformes dans leur montant à ceux facturés annuellement depuis plus de dix ans et réglés sans contestation par M. [S].

Il doit également être relevé que suite à la réception de la mise en demeure de payer les factures qui lui a été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 22 mai 2016, M.[S] n'a émis aucune contestation tant sur le principe que sur le montant de ces factures.

La réalité des travaux effectués par M.[J] sur la propriété [S] jusqu'à la fin de l'année 2015 est également confirmée par la production de plusieurs attestations établies en la forme légale (pièces n° 8 à 15).

M. [S] ne saurait s'exonérer de son obligation à l'égard de M. [J] par la production des seules 'observations' de Mme [N] qui émet des doutes sur la qualité du travail de M. [J] mais ne remet pas réellement en cause leur réalité.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [J] a travaillé les terres de M. [S] jusqu'à la fin de l'année 2015, que ce travail était rémunéré selon l'usage instauré entre les parties, que les montants facturés ne sont pas utilement critiqués par M. [S] et que ce dernier ne justifie ni s'être acquitté du paiement de ce travail auprès de M. [J], ni qu'il aurait existé une cause justifiant l'extinction de son obligation à son égard.

Le jugement dont appel doit en conséquence être confirmé en ce que M. [S] a été condamné au paiement des deux factures litigieuses.

Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

M. [S], partie perdante, doit supporter les dépens de première instance, ainsi que décidé par le premier juge, et les dépens d'appel.

Il se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, que le premier juge a justement estimée au titre de la procédure de première instance, et dans les conditions définies par le dispositif du présent arrêt au titre de la procédure d'appel.

Il ne peut lui-même prétendre à une indemnité sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Montauban du 18 juin 2019 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne M.[S] aux dépens d'appel ;

Condamne M.[S] à payer à M.[J] la somme de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme déjà allouée à ce titre par le premier juge ;

Le déboute de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La Directrice des services de greffeLe Président

C. GIRAUDM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 19/03081
Date de la décision : 30/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-30;19.03081 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award