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18/05/2022 | FRANCE | N°22/00072

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Referes 1° president, 18 mai 2022, 22/00072


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E





DU18 Mai 2022



ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ



104/22



N° RG 22/00072 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OVQ5

Décision déférée du 14 Décembre 2021

- Tribunal de Commerce de Toulouse/france - 2021F01765





DEMANDEUR



Monsieur [K] [C]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Représenté par Me Guillaume KHONG, avocat au barreau de TOULOUSE





DEFENDEURS



MP

PG COMMERCIAL

Cour d'Appel

[Adresse 6]

[Localité 1]



représenté lors des débats par Mr JARDIN, substitut général, qui a fait connaître son avis par écrit



S.E.L.A.R.L. AEGIS

mandataires judiciaires liquidateur

pr...

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

C O U R D ' A P P E L D E T O U L O U S E

DU18 Mai 2022

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ

104/22

N° RG 22/00072 - N° Portalis DBVI-V-B7G-OVQ5

Décision déférée du 14 Décembre 2021

- Tribunal de Commerce de Toulouse/france - 2021F01765

DEMANDEUR

Monsieur [K] [C]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représenté par Me Guillaume KHONG, avocat au barreau de TOULOUSE

DEFENDEURS

MP PG COMMERCIAL

Cour d'Appel

[Adresse 6]

[Localité 1]

représenté lors des débats par Mr JARDIN, substitut général, qui a fait connaître son avis par écrit

S.E.L.A.R.L. AEGIS

mandataires judiciaires liquidateur

prise en la personne de son représentant Me Orlane GACHET

[Adresse 4]

[Localité 3]

non comparante, non représentée

DÉBATS : A l'audience publique du 20 Avril 2022 devant A. DUBOIS, assistée de M.POZZOBON

Nous, A. DUBOIS, présidente de chambre déléguée par ordonnance de Monsieur le premier président en date du 21 décembre 2021, en présence de notre greffier et après avoir entendu les conseils des parties en leurs explications :

- avons mis l'affaire en délibéré au 18 Mai 2022

- avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, l'ordonnance suivante :

FAITS ' PROCÉDURE ' PRÉTENTIONS :

Le 13 décembre 2018, M. [K] [C] exploitant une entreprise individuelle de soudeur métallier, achat et vente de véhicules d'occasion, a été placé en redressement judiciaire converti en liquidation judiciaire le 30 juillet 2019 par le tribunal de commerce de Toulouse.

La Selarl Aegis prise en la personne de Maître Orlane Gachet a été initialement désignée en qualité de mandataire judiciaire puis de liquidateur.

Sur requête du parquet du 22 juin 2021 et par jugement du 14 décembre 2021, le tribunal a :

- prononcé l'interdiction de gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement pour une durée de 5 ans à l'encontre de M. [C] :

* toute entreprise commerciale ou artisanale,

* toute exploitation agricole,

* toute personne morale,

- dit que le jugement fera l'objet par les soins du greffe des communications et publicités prévues à l'article R.653-3 du code de commerce,

- dit que la mesure d'interdiction de gérer sera inscrite par le greffier sur le fichier national des interdits de gérer, conformément à l'article R.128-2 du code de commerce,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné M. [C] aux dépens.

Les 29 décembre 2021 et 3 février 2022, M. [C] a interjeté appel de cette décision à l'encontre du ministère public puis de la Selarl Aegis en qualité de mandataire judiciaire de l'entreprise individuelle de M. [C].

Par acte du 11 mars 2022, soutenu oralement à l'audience du 20 avril 2022, auquel il conviendra de se référer pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, il a fait assigner ces mêmes parties en référé devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse, sur le fondement de l'article R.661-1 du code de commerce, pour voir :

- constater l'existence de moyens sérieux de réformation du jugement entrepris,

- ordonner en conséquence la suspension de l'exécution provisoire assortissant ce jugement,

- réserver les dépens.

S'agissant des retraits d'espèces frauduleux, il indique avoir toujours procédé de manière régulière à des retraits d'argent dans la mesure où il s'acquitte auprès de ses fournisseurs par paiement en espèces. Il verse ses factures afin de démontrer que ses retraits ont servi à acheter des matières premières en vue de réaliser des chantiers. Il précise que n'ayant pas de compte professionnel, il utilisait le même compte pour ses besoins personnels. Il indique avoir effectué plusieurs dépôts à la banque dont le montant est supérieur aux sommes retirées ce qui démontre l'absence de détournement d'argents.

S'agissant des chèques non provisionnés, il dit avoir manifesté son étonnement quant à l'absence de provision compte tenu d'un chèque de 4 000 euros qui avait été remis à la banque.

S'agissant des obstacles au bon déroulement de la procédure découlant d'une volonté intentionnelle, il prétend que ni l'élément intentionnel de non-coopération ni l'élément matériel n'ont été démontrés.

S'agissant de l'absence de manquement à la tenue d'une comptabilité justifiant le prononcé d'une interdiction de gérer, il considère que celle-ci ne saurait justifier le prononcé d'une interdiction de gérer au regard de la nuisance qu'entraine le défaut d'un tel livre de recette sur les tiers.

Suivant l'avis reçu le 28 mars 2022, et

régulièrement communiqué aux parties, le Ministère public demande au premier président de :

- rejeter la demande de suspension de l'exécution provisoire du jugement rendu le 14 décembre 2021 par le tribunal de commerce de Toulouse.

Il soutient que le constat de l'absence de la quasi-totalité de l'outillage répertorié lors du redressement judiciaire de l'absence de justificatif d'éventuelles ventes, vols ou mises à dispositions du matériel et des retraits d'espèces sans justificatifs comptables caractérisent le délit de banqueroute.

Le 13 avril 2022 , la société Aegis, régulièrement convoquée, a écrit pour s'excuser de ne pouvoir être présente ni représentée à l'audience.

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MOTIVATION :

Aux termes de l'article R. 661-1 alinéa 3 du code de commerce, par dérogation aux dispositions de l'article 524 du code de procédure civile et indépendamment des conséquences manifestement excessives exigées par cet article, le premier président ne peut arrêter l'exécution provisoire d'une décision d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler que lorsque les moyens à l'appui de l'appel paraissent sérieux.

M. [C] soutient à bon droit que l'article L653-4-5°qui vise notamment le fait d'avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale, ne concerne que les dirigeants de personnes morales et pour des faits commis antérieurement à l'ouverture de la procédure collective et que c'est donc à tort que le premier juge s'est notamment fondé sur ce texte.

Cependant, l'interdiction de gérer peut être prononcée dès lors qu'un seul des faits prévus aux articles L653-5 et L653-8 du code de commerce est établi,étant précisé que si la sanction infligée relève de l'appréciation souveraine des juges du fond, il importe lorsque plusieurs faits sont retenus, que chacun d'eux soit légalement justifié.

Selon l'article L653-5-5°dudit code, le tribunal peut prononcer l'interdiction de gérer à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 contre laquelle a été relevé le fait d'avoir, en s'abstenant volontairement de coopérer avec les organes de la procédure, fait obstacle à son bon déroulement.

En l'espèce, le premier juge a valablement relevé que le requérant n'a pas comparu aux audiences du 11 décembre 2018 et du 23 juillet 2019. M. [C] soutient tout à la fois qu'il a activement collaboré avec les organes de la procédure et qu'il n'a jamais reçu les convocations pour avoir déménagé à plusieurs reprises. Cependant, non seulement il n'en justifie pas mais en outre, il devait en informer les organes de la procédure pour permettre le bon déroulement de celle-ci.

De plus, ce n'est qu'à l'audience du 5 novembre 2021 qu'il s'est enfin décidé à restituer son carnet de chèques, dont tous les chèques avaient au demeurant été détachés, pourtant réclamés par le mandataire judiciaire depuis le 1er octobre 2019.

M. [C] savait depuis plus de deux ans que la société AEGIS lui réclamait la remise de ses moyens de paiement. Il ne peut ainsi prétendre qu'il n'avait pas l'intention de ne pas remettre le chéquier aux motifs qu'il avait répondu au courriel du mandataire judiciaire d'octobre 2019 une heure après sa réception et que le choc de la conversion de son redressement judiciaire en liquidation judiciaire lui avait fait perdre son discernement et empêché de satisfaire le liquidateur.

Par ailleurs, par application des articles L653-5-6° et L. 653-8, l'interdiction de gérer peut aussi être prononcée à l'encontre de toute personne mentionnée à l'article L. 653-1 qui aura fait disparaître des documents comptables, n'aura pas tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou aura tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables.

S'il est indéniable que le requérant, bénéficiant du régime fiscal de la micro-entrepise ou micro-social, n'avait pas de bilan annuel à présenter, il devait néanmoins enregistrer chronologiquement ses recettes et achats conformément aux dispositions des articles R123-203 à R123-208 du code de commerce.

Or, il n'a tenu aucun livre de recettes encaissées, ordonné de façon chronologique et contenant les mentions légalement prévues et n'a remis aucun document comptable de son entreprise sur la période allant de 2017 au prononcé de son redressement judiciaire malgré les demandes du liquidateur judiciaire, le chèquier remis à l'audience du 5 novembre 2021 ne pouvant constituer le document idoine.

M. [C] qui s'est

privé d'un outil de gestion indispensable depuis des années, se retranche dès lors vainement derrière l'absence de délai pour tenir le livre, le fait que la chronologie des encaissements peut être reconstitué par la production des relevés bancaires, que les services fiscaux et l'Urssaf peuvent reconstituer le chiffre d'affaires, l'absence de nuisance à l'égard des tiers et le bon fonctionnement d'une autre société qu'il vient de créer.

Enfin, c'est après avoir rappelé le parcours professionnel et les antécédents judiciaires du requérant et au vu des éléments qu'il a retenus, que le tribunal a fixé la durée de l'interdiction de gérer.

M. [C] ne démontre donc pas l'existence de moyens sérieux de réformation de la décision d'interdiction de gérer et sera en conséquence débouté de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement du 14 décembre 2021.

Comme il succombe, il sera condamné aux dépens de la présente instance.

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PAR CES MOTIFS

Statuant par décision réputée contradictoire, après débats en audience publique,

Déboutons M. [K] [C] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le tribunal de commerce de Toulouse le 14 décembre 2021,

Rejetons le surplus des demandes,

Condamnons M. [K] [C] aux dépens de la présente instance.

LE GREFFIERLE MAGISTRAT DELEGUE

M.POZZOBONA. DUBOIS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Referes 1° president
Numéro d'arrêt : 22/00072
Date de la décision : 18/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-18;22.00072 ?
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