15/04/2022
ARRÊT N° 2022/183
N° RG 20/01834 - N° Portalis DBVI-V-B7E-NUKS
CB/VM
Décision déférée du 30 Mars 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de MONTAUBAN ( F 18/00161)
Sandrine LECLERCQ, juge départiteur
[D] [V] épouse [X]
C/
SAS MOIGERE
SAS ALTIS
CONFIRMATION TOTALE
Grosse délivrée le 15/04/2022
à :
- Me MATSITSILA
- Me ROMIEU
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 2
***
ARRÊT DU QUINZE AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX
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APPELANTE
Madame [D] [V] épouse [X]
121Côte des Lièvres - Appart.121
82200 MOISSAC
Représentée par Me Jean Joseph Magloire MATSITSILA de la SELARL JEAN MATSITSILA, avocat au barreau de TARN-ET-GARONNE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555.2021.021570 du 18/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
INTIMÉES
SAS MOIGERE
805 Route de Lamégère - BP 70119
82200 MOISSAC
Représentée par Me Olivier ROMIEU de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
SAS ALTIS
77 Avenue des Lilas - BP 563
64012 PAU CEDEX 02
Représentée par Me Olivier ROMIEU de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. BRISSET, Présidente, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
A. PIERRE-BLANCHARD, conseillère
F. CROISILLE-CABROL, conseillère
Greffière, lors des débats : C. DELVER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre
EXPOSÉ DU LITIGE
Mme [D] [V] épouse [X] a été embauchée selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 22 juillet 2009 par la SAS Altis exploitant un magasin Carrefour à Moissac (82), en qualité d'hôtesse de caisse, catégorie employée, niveau Il A.
La SAS Moigère a été créée le 11 avril 2012 et a repris l'exploitation du magasin Carrefour de Moissac. Elle a procédé à un changement d'enseigne, pour en faire un point de vente lntermarché.
Le contrat de travail entre la société Altis et Mme [X] a été transféré à la société Moigère en application de l'article L1224-1 du code du travail.
Le 30 janvier 2017, Mme [X] a déclaré avoir subi un accident du travail. Elle a indiqué avoir ressenti une douleur dans le dos en dépotant une palette de produits et en déplaçant un carton de lessive. Son arrêt de travail pour accident du travail a fait l'objet de prolongations et son état a été considéré comme consolidé le 16 août 2017. À cette date elle a fait l'objet d'un nouvel arrêt de travail pour maladie.
Le 2 novembre 2017, Mme [X] a été déclarée inapte en un seul examen dans les termes suivants : 'l'état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi'.
Selon lettre du 13 novembre 2017, elle a été convoquée à un entretien préalable au licenciement, fixé au 23 novembre 2017.
Le 27 novembre 2017, la société Moigere a notifié à Mme [X] son licenciement pour inaptitude physique médicalement constatée et impossibilité de reclassement.
Le 27 juillet 2018, Mme [X] a attrait la société Altis devant le conseil de prud'hommes de Montauban en contestation de son licenciement.
Le 18 décembre 2018, elle a appelé en cause la SAS Moigère Intermarché.
Par jugement de départition du 30 mars 2020, le conseil de prud'hommes de Montauban, en substance, a débouté Mme [X] de ses demandes et l'a condamnée à payer à chacune des défenderesses la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.
Mme [X] a relevé appel de ce jugement le 16 juillet 2020, énonçant dans sa déclaration les chefs critiqués du jugement et intimant la société Altis ainsi que la société Moigere.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 16 octobre 2020, auxquelles il est expressément fait référence, Mme [X] demande à la cour de:
- réformer le jugement entrepris, en toutes ses dispositions,
- dire et juger que le licenciement dont a été l'objet Mme [V] épouse [X] a été décidé en violation des dispositions de l'article L.4121-1 du code du travail pour manquement de son employeur à l'obligation de sécurité de résultat.
Par conséquent,
- dire et juger que le licenciement dont a été l'objet Mme [V] épouse [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
- condamner l'employeur à payer à la salariée une indemnité de 12 748,16 euros représentant 8 mois de salaires bruts suivant le barème des ordonnances 2017-1387 du 22 septembre 2017, pour une ancienneté de 8 ans et demi, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail,
- condamner l'employeur à payer à Mme [V] épouse [X] une somme de 2500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner l'employeur aux entiers dépens de l'instance et de ses suites, en vertu de l'article 696 du code de procédure civile.
Elle soutient que compte tenu du poste de travail et de son évolution d'hôtesse de caisse vers la mise en rayon sans avenant, l'employeur a manqué à son obligation de sécurité. Elle considère que ce manquement est à l'origine de son inaptitude.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 décembre 2020 auxquelles il est expressément fait référence, la société Moigère et la société Altis demandent à la cour de :
- confirmer le jugement rendu en toutes ses dispositions,
- juger que Mme [V] épouse [X] ne justifie d'aucun manquement des sociétés Altis et Moigere à leur obligation de sécurité,
- juger que les sociétés Altis et Moigere justifient du respect de leur obligation de sécurité,
- juger que le licenciement de Mme [V] épouse [X] repose sur une cause réelle et sérieuse.
En conséquence,
- rejeter l'intégralité des demandes de Mme [V] épouse [X] à l'encontre des sociétés Altis et Moigere.
A titre reconventionnel,
- condamner Mme [V] épouse [X] à verser à chacune des sociétés Altis et Moigere la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elles contestent tout manquement à l'obligation de sécurité et précisent que l'évolution du poste de la salariée sans modification de sa classification correspondait à ses souhaits et qu'elle a été déclarée apte plusieurs fois.
La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 22 février 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Mme [X] a intimé devant la cour à la fois la société Moigère et la société Altis. Elle sollicite, par voie de réformation du jugement, la condamnation de l'employeur sans autre précision dans le dispositif de ses écritures.
Ceci constitue une première difficulté étant observé qu'il est manifeste que Mme [X] a eu deux employeurs successifs, à savoir la société Altis puis la société Moigère. En effet, le changement d'enseigne s'était accompagné d'un changement de la société exploitant le magasin. Or, à aucun moment, l'appelante ne précise vers quelle partie elle dirige sa prétention.
Pour contester son licenciement, Mme [X] invoque un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité. Il est certain que c'est la société Moigère qui a prononcé le licenciement. Cependant, Mme [X] invoque alternativement la société Altis et la société Moigère sans bien distinguer ce qu'elle peut reprocher à l'une ou à l'autre.
Elle invoque tout d'abord une modification de son contrat de travail qui lui aurait été imposée en l'absence d'avenant.
Il est constant que Mme [X] a été embauchée en qualité d'hôtesse de caisse, catégorie employé, niveau 2 A. Dans le dernier état ses bulletins de paie mentionnaient des fonctions d'employée commerciale niveau 2 B.
Il apparaît ainsi qu'il n'y a eu aucune déclassification de ses fonctions. La modification portait uniquement sur les tâches à accomplir ce qui relève dans ce cas des seules conditions de travail et non du contrat. Mais surtout, même en l'absence d'avenant écrit, il apparaît que Mme [X] avait manifesté son accord et même suscité le changement invoqué à présent comme imposé. En effet, il résulte de son entretien d'évaluation pour l'année 2010 que non seulement elle acceptait la polyvalence dans une autre fonction mais indiquait au titre de ses souhaits pour l'avenir le travail dans les rayons.
Or, ce sont précisément les tâches dont elle se plaint à présent comme lui ayant été imposées et pour lesquelles, elle a fait l'objet de plusieurs avis d'aptitude sans aucune réserve.
Dans de telles conditions il ne peut être considéré que l'absence d'un avenant écrit, lequel ne s'imposait nullement, constitue un manquement de l'employeur, ou des employeurs successifs, à leur obligation de sécurité.
Mme [X] fait encore valoir que le délai de deux ans entre les visites périodiques a été dépassé de sorte que là encore l'employeur aurait manqué à son obligation de sécurité. Il est exact que plus de deux ans se sont écoulés entre la visite du 30 juin 2011 et celle du 4 décembre 2014. Cependant toutes les deux ont conclu à une aptitude sans réserve de la salariée de sorte que la cour ne peut constater aucun lien entre ce délai et l'accident du travail survenu le 30 janvier 2017 puis l'inaptitude, étant encore rappelé que la seule prétention dont la cour est saisie est celle d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Enfin Mme [X] invoque un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité par absence de formation. Toutefois, il résulte de l'entretien d'évaluation cité ci-dessus que Mme [X] avait été formée en épicerie, rayon dans lequel elle intervenait précisément lors de l'accident du travail. Ainsi, la cour ne peut caractériser un quelconque lien entre un déficit de formation, dont la teneur n'est pas plus amplement précisée, et l'inaptitude telle que constatée par le médecin du travail. La cour ne peut d'ailleurs que constater que l'inaptitude n'a pas été prononcée comme une conséquence de l'accident du travail et que l'appelante ne remet pas en cause le caractère non professionnel de l'inaptitude.
Mme [X] ne pouvait donc qu'être déboutée de sa demande indemnitaire et le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
L'appel étant mal fondé, Mme [X] supportera les dépens sans qu'il y ait lieu de faire application devant la cour des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au regard de la situation respective des parties.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Montauban du 30 mars 2020 en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [X] aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Catherine BRISSET, présidente, et par Arielle RAVEANE, greffière.
LA GREFFIERELA PRESIDENTE
A. RAVEANEC. BRISSET.