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09/11/2020 | FRANCE | N°18/03419

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 09 novembre 2020, 18/03419


09/11/2020



ARRÊT N°



N° RG 18/03419 - N° Portalis DBVI-V-B7C-MOHA

CR/NB



Décision déférée du 03 Juillet 2018 - Tribunal de Grande Instance de Toulouse ( 16/00517)

(Mme. [O])

















[Z] [B]

[X] [M]





C/



SASU SVH ENERGIE



















































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INFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT

***



APPELANTS



Madame [Z] [B]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier EZQUERRA, avocat au barreau de TOULOUSE



M...

09/11/2020

ARRÊT N°

N° RG 18/03419 - N° Portalis DBVI-V-B7C-MOHA

CR/NB

Décision déférée du 03 Juillet 2018 - Tribunal de Grande Instance de Toulouse ( 16/00517)

(Mme. [O])

[Z] [B]

[X] [M]

C/

SASU SVH ENERGIE

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT

***

APPELANTS

Madame [Z] [B]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier EZQUERRA, avocat au barreau de TOULOUSE

Monsieur [X] [M]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représenté par Me Olivier EZQUERRA, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMEE

SASU SVH ENERGIE, immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le n° 833 656 218, société venant aux droits de la SAS GSE INTEGRATION, anciennement dénommée SVH ENERGIE,

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me France CHARRUYER de la SELAS INTER-BARREAUX ALTIJ, avocat au barreau de TOULOUSE

Représentée par Me Cécile HUNAULT-CHEDRU de la SELARL POINTEL & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020, modifié par l'article 6 de l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020, portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale en raison de l'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l'épidémie de Covid-19 modifié par l'article 1er I de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire, l'affaire a été traitée selon la procédure sans audience, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.

La Cour était composée lors du délibéré de :

C. ROUGER, conseiller faisant fonction de président

C. MULLER, conseiller

j-c. GARRIGUES, conseiller

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. ROUGER, conseiller faisant fonction de président, et par L. SAINT LOUIS AUGUSTIN, greffier de chambre

EXPOSE DU LITIGE

Suite à un démarchage, Mme [Z] [B] a signé le 25 octobre 2013, pour un coût total de 47.690 € TTC, avec la Sas Groupe Solution Energie exerçant sous la dénomination de « Svh Energie » immatriculée au Rcs de Bobigny sous le n° 508.676.053, devenue aujourd'hui Sas Svh Energie immatriculée au Rcs de Bobigny sous le n° 833.656.218, un bon de commande n°30182 relatif à la pose et l'installation d'une centrale photovoltaïque et d'un ballon thermodynamique. Ce bon de commande précisait que le client avait opté pour un financement bancaire, sous réserve de l'acceptation du dossier de demande de prêt, auprès de la société Franfinance.

La demande de prêt faite par Mme [B] et M. [X] [M] portait sur un montant de 47.690 € correspondant à la totalité du prix, au taux de 5,80 %, remboursable en 144 mensualités, et a été refusée par la société Franfinance.

Le 8 novembre 2013, Mme [B] a signé un bon de commande n°29681 relatif à la pose et l'installation d'une centrale photovoltaïque et d'un ballon thermodynamique par la Sas Svh Energie pour un coût total de 47.290 € TTC.

Le 27 mai 2014, Mme [B] a signé un bon de fin de travaux reconnaissant que 34 panneaux photovoltaïques avaient été installés, mais pas le ballon avec PAC extérieur non disponible.

Suivant offre en date du 13 juin 2014, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Toulouse 31 a consenti à Mme [B] et

M. [M] un prêt personnel « travaux » d'un montant de

48.348,22 € au taux de 2,90% remboursable en 180 échéances de 725,22 € avec la caution de la Camca.

Le raccordement de l'installation photovoltaïque a été réalisé début 2015.

Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 17 juillet 2015, l'avocat de Mme [B] et M. [M] a revendiqué la nullité du contrat hors établissement conclu le 8 novembre 2013 avec la Sas Svh Energie pour irrégularité du bordereau de rétractation au regard des prescriptions des articles L.121-23 à L.121-26 anciens et R.121-5 du code de la consommation et la restitution consécutive des fonds perçus et des dommages et intérêts, et informé le Crédit Agricole de cette prétention et de ce que ses clients entendaient aussi revendiquer la nullité du contrat de crédit souscrit en ses livres.

Par actes d'huissier en date des 8 et 22 décembre 2015, Mme [B] et M. [M] ont fait assigner la Sas Svh Energie et la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Toulouse 31 devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins d'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit.

Par jugement contradictoire en date du 3 juillet 2018, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- débouté Mme [Z] [B] et M. [X] [M] de leurs demandes à l'encontre de la Sas Svh Energie et de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Toulouse 31,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ni à exécution provisoire,

- rejeté toutes demandes autres ou plus amples formées par les parties,

- condamné solidairement Mme [Z] [B] et M. [X] [M] aux dépens,

- accordé à la société ALTIJ et à Maître Jérôme Marfaing-Didier, avocats, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que si l'ensemble des mentions devant figurer sur le bon de commande en application de l'article L 121-23 du code de la consommation, notamment celle relative au taux effectif global du prêt, ne figuraient pas, et si le bordereau de rétractation ne remplissait pas les conditions légales, la nullité en résultant n'était que relative, le bénéficiaire pouvant y renoncer à condition que cette renonciation soit sans équivoque ; qu'en l'espèce Mme [B] et M. [M] avaient accepté la livraison des matériels commandés et leur pose et commencé à rembourser le prêt souscrit auprès du Crédit Agricole à compter de juin 2014 et qu'en exécutant ainsi le contrat principal et le contrat de crédit, ils avaient entendu réparer, en toute connaissance de cause, les vices affectant la validité du bon de commande qui rappelait in extenso les dispositions des articles L 121-23 à L 121-26 du code de la consommation.

Rejetant l'action en dommages et intérêts fondée sur la responsabilité contractuelle et subsidiairement sur la responsabilité délictuelle, il a retenu qu'il n'était justifié par les demandeurs d'aucun manquement de la Sas Svh Energie à ses obligations, l'installation fonctionnant et aucune démonstration n'étant faite d'un rendement inférieur à celui annoncé en l'absence de factures, la Sas Svh Energie ne pouvant être responsable des modifications de la réglementation relative au crédit d'impôt et au tarif de rachat de l'électricité intervenues postérieurement à la conclusion du contrat, les demandeurs devant quant à eux accomplir les démarches nécessaires à la récupération de la Tva. Il a estimé qu'il ne pouvait être reproché à la Sas Svh Energie d'avoir entrepris des démarches antérieurement à la conclusion du prêt auprès du Crédit Agricole, à ses risques et périls si le prêt avait été refusé et qu'il n'était établi aucun manquement de l'établissement prêteur dans l'octroi du prêt.

Par déclaration du 27 juillet 2018, Mme [B] et M. [M] ont relevé appel de l'intégralité des chefs du dispositif de ce jugement, intimant néanmoins uniquement la Sas Svh Energie.

L'affaire a été suivie selon la procédure sans audience par décision du président de la formation de jugement, suivant avis adressé le 29 mai 2020 via le réseau virtuel privé avocats, à chaque avocat des parties qui ne s'y est pas opposé dans le délai de quinze jours.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 26 octobre 2018, Mme [B] et M. [M], appelants, demandent à la cour, au visa des articles L. 121-23 anciens à L. 121-26, L. 141-4 et R. 121-5 du code de la consommation, 1382 et suivants du Code civil, de :

- juger que le contrat de vente et de pose de panneaux photovoltaïques du 8 novembre 2013 doit être annulé pour manquement aux obligations des articles L. 121-23 à L. 121-26 anciens et R. 121-5 du Code de la consommation ;

- à défaut, dire que le contrat doit être résolu en raison des inexécutions graves du professionnel, et notamment du non-respect de la clause suspensive contenue dans ledit contrat par application des dispositions de l'article 1184 du Code civil alors applicable ;

- dire qu'ils laisseront l'accès à leur propriété à la Sas Svh Energie pour la dépose et le retrait de l'installation de panneaux photovoltaïques et de chauffe-eau ;

- condamner la Sas Svh Energie à leur rembourser la somme de

47.290 € ;

- condamner la Sas Svh Energie à leur verser la somme de

13.118,94 €, correspondant à la différence entre, d'une part, le coût total du crédit souscrit, d'un montant de 60.408,94 € et, d'autre part, le coût du contrat principal annulé, d'un montant de 47.290 € ;

- condamner la Sas Svh Energie au paiement de la somme de 6.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice ;

- condamner solidairement la Sas Svh Energie à leur payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance et, y ajoutant, la condamner à leur verser la somme de 2.000 € en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Ezquerra.

Ils soutiennent que les irrégularités formelles affectant le formulaire de rétractation au regard des dispositions protectrices d'ordre public édictées par le code de la consommation entraînent la nullité de la commande alors qu'ils ne pouvaient avoir une exacte connaissance de leur faculté de rétractation précisément en raison de ces irrégularités, revendiquant outre la restitution des fonds versés et des dommages et intérêts.

A défaut, ils invoquent divers manquements de la Sas Svh Energie à ses obligations justifiant selon eux la résolution du contrat et la restitution, outre du prix de la prestation, de la différence entre le coût du crédit souscrit et le coût du crédit principal annulé, ainsi que des dommages et intérêts, le contrat ne correspondant pas ou peu à ce qui avait été promis.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 25 janvier 2019, la Sas Svh Energie, intimée, appelante incidente, demande à la cour, au visa des articles L. 121-23 et suivants du code de la consommation, 564 du code de procédure civile, 1147, 1149, 1184, 1224, 1240 du Code civil dans leur rédaction applicable à ce litige, de :
A titre principal,

- infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a reconnu l'existence d'une nullité du contrat conclu le 8 novembre 2013 ;

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [B] et

M. [M] de leur demande d'annulation et reconnu qu'ils ont confirmé leur engagement ;

- en conséquence, débouter purement et simplement Mme [B] et

M. [M] de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- condamner Mme [B] et M. [M] au paiement d'une somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit de la société Altij.

Elle relève qu'à défaut d'obtention du financement sollicité initialement auprès de Franfinance, les consorts [B]/[M], le premier bon de commande étant devenu caduc, ont persévéré dans leur intention d'installation d'une centrale photovoltaïque, actionnant leur banque personnelle, le Crédit Agricole, la sollicitant pour qu'elle facilite la procédure ; qu'ils ont signé un second bon de commande le 8 novembre 2013 mentionnant un financement par prêt Crédit Agricole et n'ont nullement été « piégés » ou « forcés ».

Elle soutient que le formulaire de rétractation comporte l'ensemble des mentions légales exigées par l'article R 121-5 et que le seul fait que les mentions prévues ne soient pas énoncées en lignes distinctes ou que la mention «  L'expédier au plus tard le septième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, dimanche ou jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant » ne soit pas soulignée dans le formulaire ou en caractères gras, ne saurait justifier la nullité de la vente dans la mesure où les conditions d'exercice de cette faculté de rétractation étaient bel et bien explicites et présentées de manière parfaitement apparente dans le bon de commande.

Elle relève qu'en toute hypothèse conformément aux dispositions de l'article 1338 du code civil, il y a eu confirmation du contrat, un bon de fin de travaux ayant été signé sans réserve, le bon de commande comportant la reproduction des articles du code de la consommation applicables au moment de la conclusion du contrat, l'installation étant fonctionnelle et permettant depuis le 15 janvier 2015 la revente de production d'électricité.

Elle conteste tout manquement de sa part de nature à justifier la résolution du contrat ou l'engagement de sa responsabilité, relevant que les consorts [B]/[M], contrairement à ce qu'ils affirment, ont été parfaitement informés du refus du prêt par Franfinance dès le 25 octobre 2013, qu'ils ne justifient d'aucune insuffisance de production pour laquelle ils ont souscrit une assurance dont les cotisations ont été prises en charge par le prestataire pendant deux ans, assurance dont il n'est pas établi qu'elle ait été mobilisée, que la suppression du crédit d'impôt résultant de la loi de finance du 29 décembre 2013 ne lui est pas imputable, qu'un « kit fiscal » a été remis aux acquéreurs lors du démarchage avec les coordonnées du correspondant à contacter en cas de difficulté, sans que les consorts [B]/[M] aient retourné les documents réclamés pour leur permettre de récupérer la Tva, qu'elle n'est pas responsable des variations du tarif d'achat de l'électricité arrêté tous les trimestres.

SUR CE, LA COUR :

Nonobstant l'étendue de la déclaration initiale d'appel, les consorts [B]/[M] n'ont pas intimé la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Toulouse, de sorte que la Cour n'est pas saisie des dispositions concernant cette dernière dans ses rapports avec les consorts [B]/[M].

1°/ Sur la demande tendant à la nullité du contrat du 8 novembre 2013 et ses conséquences

Il est acquis que Mme [B] a signé le second bon de commande du 8 novembre 2013 hors établissement après un démarchage à domicile intervenu le 25 octobre 2013 ayant donné lieu à un premier bon de commande devenu caduc en raison de la non obtention du crédit Franfinance initialement prévu pour procéder au financement de l'installation photovoltaïque. Le contrat de fourniture de panneaux photovoltaïques avec ballon thermodynamique se trouve donc soumis aux dispositions d'ordre public édictées par les articles L 121-23 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 applicable au litige.

Selon les dispositions de l'article L 121-23, les opérations visées à l'article L 121-21 doivent faire l'objet d'un contrat dont un exemplaire doit être remis au client au moment de la conclusion de ce contrat, et comporter, à peine de nullité, diverses mentions, notamment celle de la faculté de rétractation prévue à l'article L 121-25 ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté, et, de façon apparente, le texte intégral des articles L 121-23, L 121-24 et L 121-25 et L 121-26.

En application de l'article L 121-24 le contrat visé à l'article L 121-23 doit comprendre un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de la faculté de rétractation dans les conditions prévues à l'article L 121-25. Un décret en Conseil d'Etat, codifié en l'espèce à l'article R 121-5 du code de la consommation dans sa version en vigueur à l'époque du contrat, précise les mentions devant figurer sur ce formulaire.

La nullité du contrat du 8 novembre 2013 est sollicitée exclusivement en cause d'appel pour non respect, par le bordereau de rétractation, du formalisme imposé par l'article R 121-5 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, en ce que :

- les instructions ne sont pas mentionnées en lignes distinctes

- la quatrième instruction est mentionnée dans le formulaire sans caractères gras et sans être soulignée

- les indications relatives à la nature et à la date de la commande ne sont pas faites en raison d'une seule par ligne

- il n'y a aucun espacement précédant la déclaration du consommateur.

Ces anomalies ne sont pas contestées par la Sas Svh Energie, laquelle conteste uniquement qu'elles soient de nature à justifier une nullité alors que selon elle les mentions du bon de commande permettraient une information claire et non équivoque du consommateur quant à son droit de rétractation et, qu'en toute hypothèse, les consorts [B]/[M] auraient en toute connaissance de cause confirmé, au sens de l'article 1338 du code civil, l'acte prétendu nul en laissant notamment exécuter la prestation de service et en remboursant le prêt.

En l'espèce, sur le bordereau de rétractation la mention relative aux modalités d'exercice de la faculté de rétractation en terme de délai, formalité essentielle à l'efficacité de cet exercice, à savoir «  L'expédier au plus tard le septième jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant », n'est ni mentionnée en caractères gras ni soulignée alors que ce formalisme est exigé pour attirer particulièrement l'attention du consommateur sur les modalités affectant l'efficience de son droit de rétractation. Il s'agit donc d'une irrégularité affectant la régularité même du bordereau de rétractation de nature à justifier consécutivement la nullité du contrat en application des dispositions des articles L 121-23 et L 121-24 susvisés.

En application de l'article 1338 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 applicable au litige, la confirmation d'une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion ou l'exécution d'un acte révélant que son auteur d'une part, a eu connaissance du vice affectant l'obligation et d'autre part, a manifesté son intention de le réparer. La nullité ne peut donc être couverte qu'à la condition qu'il soit établi que Mme [B], en toute connaissance du vice affectant le contrat, a manifesté son intention claire et non équivoque de le ratifier ce qui suppose qu'elle ait été parfaitement informée de ses droits.

En l'espèce, aucune confirmation tacite de l'obligation entachée de nullité ne peut être admise.

En effet, le fait que les articles L 121-23 à L 121-26 du code de la consommation aient été reproduits aux conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande, en petits caractères, ou que le bon de commande lui-même énonce en recto la faculté de renonciation ouverte au consommateur ainsi que le délai et les textes applicables sans renvoi exprès au formulaire détachable figurant au verso contrairement aux dispositions de l'article R 121-3, ne permet pas de caractériser que Mme [B], seule signataire du bon de commande, ait pu prendre conscience que le bordereau de rétractation ne satisfaisait pas aux prescriptions légales destinées à la protéger et viciait son engagement du 8 novembre 2013 .

Consécutivement, ni le fait qu'elle ait laissé le contrat s'exécuter en acceptant la livraison des panneaux photovoltaïques, en signant le 27 mai 2014 un bon de fin de travaux, en signant le 22 juillet 2014 avec Erdf un contrat de raccordement, d'accès et d'exploitation devenu effectif courant janvier 2015 ainsi qu'il résulte du bordereau d'intervention sur l'onduleur produit en pièce 22 des appelants, ni celui qu'elle ait réglé, par le biais d'un compte joint avec son compagnon, les échéances du prêt Crédit Agricole qu'elle n'a souscrit avec M. [M] auprès du Crédit Agricole que le 13 juin 2014 après la signature du bon de livraison, ne démontrent qu'au moment de leur intervention elle avait connaissance du vice affectant son engagement initial ni ne peuvent caractériser une volonté univoque de renonciation de nature à couvrir l'irrégularité affectant le contrat du 8 novembre 2013.

En conséquence, infirmant le jugement entrepris, le bon de commande du 8 novembre 2013 doit être déclaré nul et de nul effet, la demande subsidiaire de résolution du contrat pour inexécutions contractuelles et d'indemnisation consécutive à ces inexécutions devenant sans objet.

Le contrat étant mis à néant, la société Svh Energie doit être condamnée à restituer à Mme [B] les sommes qu'elle a reçues en exécution du contrat annulé, à savoir la somme principale de 47.290 € mentionnée comme acquittée sur les deux factures proforma n° FA 1007216 et FA 1007217 éditées le 26 mai 2014, qu'elle ne conteste pas avoir perçue.

Corrélativement, Mme [B] et M. [M], propriétaires de l'immeuble sur lequel est située l'installation, doivent mettre en mesure la société Svh Energie de récupérer l'installation photovoltaïque et le chauffe eau, à charge pour elle de les déposer et d'en retirer les éléments, et il convient de prendre acte de ce qu'ils s'engagent à cette fin à lui laisser accéder à leur propriété.

En raison du contrat de fourniture et de prestations de service, nul du fait du non respect par la Sas Svh des dispositions d'ordre public du code de la consommation, Mme [B] et M. [M] ont souscrit, en pure perte, auprès du Crédit Agricole un prêt de 48.348,22 € pour en assurer le financement, subissant ainsi un préjudice financier représenté par la différence entre le coût total du crédit qu'ils vont assumer, limité dans leurs écritures à 60.408,94 € (au lieu de

65.741,76 € sur le contrat de crédit), et le coût principal du contrat annulé qui doit leur être restitué (47.290 €), soit la somme de

13.118,94 €. Ils sont donc fondés à solliciter la condamnation de la société Svh Energie à leur payer cette somme à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice financier sur le fondement de l'article 1382 du code civil devenu 1240.

Aucun préjudice autre résultant de la nullité prononcée n'étant caractérisé, le surplus des demandes d'indemnisation sera rejeté.

2°/ Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Succombant au principal, la Sas Svh Energie supportera les dépens de première instance, à l'exception de ceux inhérents à la mise en cause du Crédit Agricole, non intimé en cause d'appel, qui resteront à la charge solidaire de Mme [B] et M. [M] en exécution du jugement de première instance. Elle supportera aussi les dépens d'appel et se trouve redevable d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et d'appel dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt, sans pouvoir elle-même prétendre à une indemnité sur ce même fondement.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Infirme le jugement entrepris quant à ses dispositions concernant les rapports entre la Sas Svh Energie d'une part, Mme [Z] [B] et M. [X] [M] d'autre part,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Prononce la nullité du contrat de fourniture et d'installation de 34 panneaux photovoltaïques avec ballon thermodynamique signé le 8 novembre 2013 par Mme [Z] [B] auprès de la Sas Groupe Solution Energie exerçant sous la dénomination « Svh Energie » immatriculée au Rcs de Bobigny sous le n° 508.676.053, devenue aujourd'hui Sas Svh Energie immatriculée au Rcs de Bobigny sous le n° 833.656.218

Condamne la Sas Svh Energie à rembourser à Mme [Z] [B] la somme de 47.290 € au titre du prix de l'installation

Dit que la Sas Svh Energie devra procéder à la dépose et l'enlèvement de l'installation susvisée sur l'immeuble sis [Adresse 3]

Donne acte aux consorts [B]/[M] de ce qu'ils s'engagent à cette fin à laisser la Sas Svh Energie accéder à leur propriété

Condamne la Sas Svh Energie à payer à Mme [Z] [B] et M. [X] [M] pris ensemble la somme de 13.118,94 € à titre de dommages et intérêts

Rejette le surplus des demandes de dommages et intérêts

Condamne la Sas Svh Energie à payer à Mme [Z] [B] et M. [X] [M] pris ensemble une indemnité de 2.500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure de première instance et d'appel

Déboute la Sas Svh Energie de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la Sas Svh Energie aux dépens de première instance, à l'exception de ceux inhérents à la mise en cause de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel de Toulouse qui resteront à la charge solidaire de Mme [Z] [B] et M. [X] [M], ainsi qu'aux dépens d'appel avec autorisation de recouvrement direct au profit de M. Olivier Ezquerra, Avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 18/03419
Date de la décision : 09/11/2020

Références :

Cour d'appel de Toulouse 11, arrêt n°18/03419 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-11-09;18.03419 ?
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