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13/09/2019 | FRANCE | N°17/05870

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 13 septembre 2019, 17/05870


13/09/2019



ARRÊT N° 2019/551



N° RG 17/05870 - N° Portalis DBVI-V-B7B-L7ZT

J.C.GARRIGUES/M.S



Décision déférée du 06 Novembre 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Toulouse ( F16/00891)



















SARL FRANCE DISTRIB





C/



[T] [J]





























































CONFIRMATION PARTIELLE







Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***



APPELANTE



SARL FRANCE DISTRIB

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par la SAS DS AVOCATS...

13/09/2019

ARRÊT N° 2019/551

N° RG 17/05870 - N° Portalis DBVI-V-B7B-L7ZT

J.C.GARRIGUES/M.S

Décision déférée du 06 Novembre 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de Toulouse ( F16/00891)

SARL FRANCE DISTRIB

C/

[T] [J]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU TREIZE SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF

***

APPELANTE

SARL FRANCE DISTRIB

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par la SAS DS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX, plaidante

Ayant pour avocat postulant Me Géraldine BOIGAS, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉ

Monsieur [T] [J]

[Adresse 2]

[Adresse 6]

[Adresse 6] résidence [5]

[Localité 3]

Représenté par Me Nadine QUESADA, avocat au barreau de TOULOUSE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555/2018/002945 du 12/02/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Mai 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant J.C. GARRIGUES, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. DEFIX, président

C. PAGE, conseiller

J.C. GARRIGUES, conseiller

Greffier, lors des débats : N.CATHALA

Lors du prononcé : C.DELVER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par M. DEFIX, président, et par C. DELVER, greffière de chambre

FAITS ET PROCEDURE - MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

M. [T] [J] a été embauchée par la SARL France Distrib en qualité de VRP non exclusif à compter du 30 octobre 2014, en vue d'assurer la représentation et la vente au nom et pour le compte de la Société France Distrib des produits et offres de son partenaire GDF SUEZ.

Par courrier en date du 29 juillet 2015, M.[J] a été convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement.

Par courrier du 28 août 2015, M. [J] a été licencié pour faute grave.

Le 6 avril 2016, M. [J] a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse aux fins de solliciter la requalification de son contrat de VRP non exclusif en contrat de VRP exclusif, de contester son licenciement et d'obtenir le paiement de diverses sommes.

Par jugement en date du 6 novembre 2017, le conseil de prud'hommes a :

- jugé que le contrat de travail de Voyageur Représentant Placier non exclusif de M. [J] est requalifié en contrat de travail de Voyageur Représentant Placier exclusif ;

- jugé que le licenciement pour faute grave de M.[J] est requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- jugé que la SARL France Distrib a sciemment omis de faire passer la visite médicale d'embauche à M.[J] ;

- condamné la SARL France Distrib à payer à M.[J] les sommes suivantes :

# 16 528,34 € bruts à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti ;

# 1653 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

# 1000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;

# 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale

d'embauche ;

# 1665 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- ordonné la remise des bulletins de salaire et des documents sociaux dûment rectifiés sous un mois à compter du jugement ;

- débouté M. [J] du surplus de ses prétentions ;

- condamné la SARL France Distrib à payer à Maître Quesada, avocat de M. [J], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 400 € sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 091-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- condamné la SARL France Distrib aux entiers dépens ;

- rappelé que les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation et qu'elles sont assorties de plain droit de l'exécution provisoire ;

- rappelé que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement.

La SARL France Distrib a interjeté appel de cette décision.

Selon ses dernières conclusions déposées au RPVA le 20 juillet 2018, auxquelles il est fait référence pour un plus ample exposé des moyens, la SARL France Distrib demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le contrat de travail de Voyageur Représentant Placier non exclusif de M. [J] est requalifié en contrat de travail de Voyageur Représentant Placier exclusif, jugé que le licenciement pour faute grave de M.[J] est requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamné la SARL France Distrib à payer à M. [J] les sommes de 16 528,34 € bruts à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti, 1653 € bruts au titre des congés payés y afférents, 1000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche, et condamné la SARL France Distrib à payer à Maître Quesada, avocat de M. [J], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 400 € sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 091-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- confirmer la décision rendue le 6 novembre 2017 par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté M.[J] de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail ;

- juger que M.[J] est VRP multicarte ;

- juger que ses demandes sont donc mal fondées ou dépourvues de fondement juridique ;

- en tout état de cause, le débouter de l'ensemble de ses demandes, fins et

conclusions ;

- reconventionnellement, le condamner au versement de la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon ses dernières conclusions déposées au RPVA le 13 novembre 2018, auxquelles il est fait référence pour un plus ample exposé des moyens, M. [J] demande à la cour de :

- déclarer mal fondé l'appel principal interjeté par la SARL France Distrib ;

- débouter la SARL France Distrib de l'ensemble de ses demandes ;

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes en date du 6 novembre 2017 en ce qu'il a condamné la SARL France Distrib à payer à M.[J] :

# 16 528,34 € bruts à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti ;

# 1653 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

# 1000 € à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;

# 500 € à titre de dommages et intérêts pour absence de visite médicale d'embauche ;

# 1665 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

# 400 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

et a ordonné la remise des bulletins de salaire de M.[J] et des documents sociaux dûment rectifiés ;

- réformer le jugement du 6 novembre 2017 en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

- statuant à nouveau sur ce point, condamner la SARL France Distrib à lui payer la somme de 9994 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;

- condamner la SARL France Distrib à lui payer la somme de 3000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la SARL France Distrib aux dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 29 avril 2019.

MOTIFS

Sur la demande de requalification du contrat de travail de VRP non exclusif en contrat de travail de VRP exclusif et sur la demande de rappel de salaire minimum

L'article L.7313-6 du Code du travail dispose :

' Le contrat de travail peut, pour sa durée, prévoir l'interdiction pour le voyageur, représentant ou placier, de représenter des entreprises ou des produits déterminés.

Lorsque le contrat de travail ne prévoit pas cette interdiction, il comporte, à moins que les parties n'y renoncent par une stipulation expresse, la déclaration des entreprises ou des produits que le voyageur, le représentant ou placier représente déjà et l'engagement de ne pas prendre en cours de contrat de nouvelles représentations sans autorisation préalable de l'employeur '.

L'article 5-1de l'accord national interprofessionnel des voyageurs, représentants, placiers du 3 octobre 1975 dispose, dans sa rédaction applicable au litige :

1° La fixation de la rémunération relève du libre accord des représentants de commerce et de leurs employeurs.

2° Néanmoins, lorsqu'un représentant de commerce réalisant des ventes, au sens de la loi du 22 décembre 1972, est engagé à titre exclusif par un seul employeur, il aura droit, au titre de chaque trimestre d'emploi à plein temps, à une ressource minimale forfaitaire.

3° Pour les 3 premiers mois d'emploi à plein temps, la ressource minimale forfaitaire ne pourra, déduction faite des frais professionnels, être inférieure à 390 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance, le taux applicable étant celui en vigueur à la fin du dernier mois échu pris en compte à l'échéance.

En cas de rupture au cours de ce premier trimestre, cette ressource minimale forfaitaire sera due selon les modalités suivantes :

- 80 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance aux représentants présents dans l'entreprise à l'issue du premier mois à plein temps ;

- 220 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance aux représentants présents dans l'entreprise à l'issue du deuxième mois d'emploi à plein temps ;

- 390 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance aux représentants présents dans l'entreprise à l'issue du troisième mois d'emploi à plein temps (...) '

4° A partir du deuxième trimestre d'emploi à plein temps, la ressource minimale trimestrielle ne pourra être inférieure, déduction faite des frais professionnels, à 520 fois le taux horaire du salaire minimum de croissance, le taux applicable étant celui en vigueur à la fin du dernier mois échu pris en compte à chaque paiement .

(...) '

M.[J] a été embauché en qualité de VRP non exclusif.

Il a été stipulé à l'article 3 du contrat :

' Le VRP non exclusif est autorisé pendant toute la durée du contrat à commercialiser d'autres cartes que celles fournies par la Société France Distrib et/ou à exercer en complément, une activité entrant dans le champ d'application du statut professionnel.

En contrepartie, le VRP non exclusif s'engage à ne faire aucune prospection pour des entreprises susceptibles de concurrencer la Société France Distrib et la marque qu'elle commercialise. Tout manquement à cette obligation pourrait conduire la société à envisager la rupture du présent contrat '.

M. [J] soutient qu'il était en réalité à la disposition permanente de son employeur, que la charge de travail nécessitée par ses missions l'empêchait de pouvoir travailler au service d'un autre employeur et qu'il a donc en réalité été engagé en qualité de VRP exclusif, d'où la demande de requalification de son contrat en ce sens.

La SARL France Distrib soutient au contraire que M. [J] avait bien le statut de VRP non exclusif, n'était soumis à aucun horaire et organisait son temps de travail comme il le souhaitait, qu'il était expressément autorisé à exercer pour le compte d'autres employeurs, peu important qu'il ait fait le choix de ne pas prospecter pour d'autres structures.

M.[J] produit à l'appui de ses allégations les attestations établies par cinq autres salariés de la société :

- M.[X] [W] indique : 'Du 28 octobre 2014 au 19 août 2015, alors que j'étais chef d'équipe pour la société France Distrib, on nous demander à M.[H] [P], M.[J] [T], Melle [D] [C], Melle [K] [Z], Melle [A] [U], M.[N] [V], moi-même et nombreuses autres personnes, d'être présents tous les jours du lundi au vendredi de 9 heures à 20 heures. Avec mon rôle de chef d'équipe c'est moi qui les véhiculais pendant ces plages horaires. Il était donc pour nous impossible de cumuler un deuxième emploi et donc d'être VRP Multicarte (...) ' ;

- M.[P] [H] indique : ' Durant ma période de travail pour l'entreprise France Distrib, du 05 février 2015 au 8 avril 2015, M.[W] [X], Melle [K] [Z], M.[N] [V], Mme [C] [D] et moi-même, affirmons avoir eu comme horaires 9h00 - 20h00 du lundi au vendredi. Il était donc impossible de cumuler deux emplois et d'être VRP non exclusif multi cartes (...) J'atteste avoir étais véhiculer durant toute la période de travail par M.[W]' ;

- Melle [Z] [K] indique : ' ' Durant ma période de travail pour l'entreprise France Distrib, du 07 octobre 2014 au 19 août 2015, M.[H] [P], M.[J] [T], Melle [D] [C], Melle [L] [U], M.[N] [V], M.[W] [X] et moi-même, affirmons avoir eu comme horaires de 9h00 - 20h00 du lundi au vendredi. Il était donc impossible de cumuler un deuxième emploi. (...) J'ai été véhiculé par M.[W] [X] du 1er décembre 2014 au 15 mai 2015' ;

- M.[V] [N] et Mme [C].[D] attestent de faits similaires, qu'il s'agisse des horaires de travail, de l'impossibilité pour eux de cumuler un deuxième

emploi ou encore du fait qu'ils étaient véhiculés sur leur lieu de travail par M.[W] ; Mme [D] précise que les salariés avaient une petite heure de pose

vers 15 h 30 / 16 h 00 'histoire de manger', que les rendez-vous de travail étaient fixés dans un café le matin et que le chef [X] [W] les véhiculait toute la journée.

La SARL France Distrib met en doute l'objectivité de ces attestations émanant d'autres VRP de la société qui eux aussi n'ont travaillé que un mois et demi ou deux mois pour le compte de la structure et ont saisi en même temps la juridiction prud'homale des mêmes chefs de demandes que M.[J].

La cour constate sur ce point qu'il n'est pas justifié de saisines prud'homales autres que celles de M.[W], M.[N] et Mme [D] et que les faits relatés par M.[H] et Melle [K] dans leurs attestations ne sont pas réellement contestés par la SARL France Distrib, en particulier sur les points fondamentaux relatifs aux horaires de travail de 11 heures par jour cinq jours par semaine, à l'impossibilité de cumuler un deuxième emploi, et au fait que les salariés étaient véhiculés sur leurs lieux de travail par leur chef d'équipe, M.[W]. Le conseil de prud'hommes a justement relevé que la SARL France Distrib n'expliquait pas en quoi un chef d'équipe était nécessaire pour véhiculer des VRP non exclusifs sur leur lieu de prospection.

Ces éléments sont corroborés par l'article 6 du contrat de travail 'Volume d'affaires minimum' dont les exigences étaient d'une importance telle qu'elles nécessitaient à l'évidence un travail à temps complet pour le compte de l'employeur : 'Dans le cadre de ses fonctions, le VRP non exclusif s'engage à réaliser un volume d'affaires mensuel minimum de 80 contrats d'abonnement GDF SUEZ. Si au cours de trois mois consécutifs, le volume d'affaires mensuel cité ci-dessus n'est pas réalisé, la société France Distrib pourra valablement rompre le contrat du salarié '.

Par ailleurs, si le fait que le contrat ne comporte pas la déclaration des entreprises ou des produits que le voyageur, le représentant ou placier représente déjà et l'engagement de ne pas prendre en cours de contrat de nouvelles représentations sans autorisation préalable de l'employeur , exigée par le second alinéa de l'article L.7313-6 du Code du travail, n'emporte pas automatiquement requalification du contrat de VRP non exclusif en contrat de VRP exclusif, le non respect de ces dispositions milite en faveur d'une telle requalification et ce d'autant plus qu'il n'est pas établi ni même allégué que M.[J] aurait eu d'autres représentations avant ou pendant la relation contractuelle.

Il se déduit de l'ensemble de ces éléments et de l'économie générale du contrat telle qu'analysée ci dessus, que M.[J] devait consacrer tout son temps de travail à son activité pour le compte de la SARL France Distrib et qu'il était dans l'impossibilité de travailler pour un autre employeur, et ce d'autant plus qu'il était amené sur son lieu de travail et ramenée par son chef d'équipe. Il était donc soumis de fait par la SARL France Distrib, son unique employeur, à une clause d'exclusivité.

Dans ces conditions, le jugement du conseil de prud'hommes doit être confirmé en ce qu'il a requalifié le contrat de travail de Voyageur Représentant Placier non exclusif de M.[J] en contrat de travail de Voyageur Représentant Placier exclusif.

M.[J] peut donc prétendre au bénéfice de la rémunération minimale garantie nonobstant l'intitulé de son contrat et l'absence de clause d'exclusivité.

Cela étant, M.[J] réclame le paiement de cette rémunération minimale sur une durée de 10 mois alors que la SARL France Distrib affirme qu'il a cessé de travailler à compter du 1er décembre 2014.

Au vu du listing des contrats conclus par le salarié et des bulletins de paie établis par l'employeur, il apparaît que M.[J] a cessé toute activité pour le compte de la société au plus tard le 31 décembre 2014. Aucune rupture de la relation contractuelle n'est intervenue dans les mois qui ont suivi, mais il ne justifie pas avoir travaillé ni même être resté à la disposition de l'entreprise. Le salaire étant la contrepartie du travail, il ne peut prétendre à l'octroi de la rémunération minimale que pour une durée de deux mois.

En application de l'article 5-1 susvisé, compte tenu de la durée de sa présence dans l'entreprise et du taux horaire du SMIC applicable, M. [J] avait droit à une rémunération minimale de 2477,80 € dont doivent être déduites les commissions perçues pendant cette période pour un montant de 161,76 € , la SARL France Distrib ne justifiant pas lui avoir réglé des commissions pour un montant total de 1359,42 € , soit une rémunération restant due de 2316,04 € , outre 247,78 € au titre des congés payés y afférents.

Sur le licenciement

En application des articles L.1232-1, L. 1232-6 et L.1235-1 du Code du travail, lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception qui doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis.

Il appartient à l'employeur qui entend se prévaloir de la faute grave de l'autre partie d'en apporter seul la preuve.

M.[J] a été convoqué par LR/AR en date du 29 juillet 2015 à un entretien préalable devant avoir lieu le 7 août 2015.

Il a été licencié par LR/AR en date du 28 août 2015 en ces termes :

' Vous avez été convoqué à un entretien préalable qui devait normalement se tenir le 7 août 2015 à 9 heures.

Vous n'avez pas souhaité vous rendre à cet entretien alors même que la convocation vous invitait à nous faire connaître les raisons pour lesquelles vous ne donnez plus signe de vie et ne répondez plus aux appels de la société depuis plus de 3 mois.

S'il est vrai que vous avez régularisé un contrat de VRP multi-cartes qui vous permet d'avoir d'autres activités, vous êtes tout de même tenu auprès de France Distrib de réaliser votre mission de représentation, ce que vous ne faites plus maintenant depuis de nombreux mois.

Le fait que vous n'ayez pas souhaité nous donner de raison à votre silence, nous contraint à prononcer votre licenciement immédiat, pour faute grave, c'est à dire privative de toute indemnité. Vous sortez donc de nos effectifs au 28 août 2015 (...) '

M.[J] critique la régularité de la procédure de licenciement, tant sur le non respect du délai de 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre de convocation et l'entretien préalable, que sur le défaut d'envoi de la lettre de licenciement. Sur le fond, il soutient que la SARL France Distrib ne produit aucun élément de preuve sur les faits reprochés et il conteste la cessation de son activité au 31 décembre 2014.

Le listing des contrats conclus par M.[J] ne mentionne aucun contrat signé après le 1er décembre 2014 et le salarié ne justifie pas avoir effectué la moindre démarche commerciale dans les mois qui ont suivi. De plus, M.[J] ne peut pas utilement soutenir qu'il continuait à travailler alors qu'il ne lui était versé aucun salaire et qu'il n'a formulé aucune réclamation sur ce point.

Cela étant, la faute grave ne peut être retenue lorsque, comme en l'espèce, l'employeur n'a, à aucun moment, invité l'intéressé à reprendre son poste.

C'est donc à juste titre que le conseil de prud'hommes a jugé que le licenciement de M.[J] était dépourvu de cause réelle et sérieuse. Les irrégularités de procédure ont également été justement retenues par le premier juge, tant en ce qui concerne la convocation à l'entretien préalable que la notification du licenciement.

Il a droit à une indemnité compensatrice de préavis qui sera fixée à la somme de 1238,90 € égale à un mois de rémunération minimale garantie.

M.[J], né en 1986, n'a effectivement travaillé que deux mois dans la société avant de cesser toute activité pendant plusieurs mois puis de solliciter une rupture conventionnelle le 27 juin 2015. Son licenciement apparaît comme la régularisation d'un état de fait tacitement accepté par les parties, M.[J] ne travaillant plus et la SARL France Distrib ne lui versant plus de rémunération. Dans ces conditions, le préjudice résultant de son licenciement abusif doit être réparé, en application de l'article L.1235-5 du Code du travail, par l'allocation de la somme de 2000,00 € à titre de dommages et intérêts, laquelle inclut le préjudice résultant de l'irrégularité du licenciement pour vice de forme.

Sur l'absence de visite médicale

Aux termes de l'article R. 4624-10 du code du travail dans sa rédaction alors applicable, le salarié bénéficie d'un examen médical avant l'embauche ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai par le médecin du travail. L'organisation de cette visite périodique est une obligation impérative pour l'employeur qui doit assurer l'effectivité de cette visite et ne peut se contenter d'accomplir les formalités qui doivent conduire à la convocation du salarié à la visite médicale d'embauche.

Il n'est effectivement pas contesté que le salarié n'a pas bénéficié de visite médicale d'embauche.

Toutefois, ainsi que le souligne la SARL France Distrib dans ses écritures, M.[J] ne justifie ni même n'allègue aucun préjudice résultant de l'absence de visite médicale d'embauche.

Dans ces conditions, M.[J] doit être débouté de sa demande. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

La SARL France Distrib, partie principalement perdante, sera condamnée aux dépens d'appel.

M.[J] est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens qu'il a dû exposer à l'occasion de cette procédure. La SARL France Distrib sera donc tenue de lui payer la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 al.1er 1° du code de procédure civile, seule applicables en l'espèce en état de la demande de l'intimé en paiement à son profit de l'indemnité sollicitée.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse en date du 6 novembre 2017 en ce qu'il a :

- requalifié le contrat de travail de Voyageur Représentant Placier non exclusif de M.[S] en contrat de travail de Voyageur Représentant Placier exclusif ;

- jugé que le licenciement pour faute grave de M.[J] était dépourvu de cause réelle et sérieuse

- ordonné la remise des bulletins de salaire et des documents sociaux dûment rectifiés sous un mois à compter du jugement ;

- condamné la SARL France Distrib à payer à Maître Quesada, avocat de M. [J], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, la somme de 400 € sur le fondement de l'article 37 de la loi n° 091-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- condamné la SARL France Distrib aux entiers dépens de première instance ;

L'infirme sur le surplus et statuant à nouveau,

Condamne la SARL France Distrib à payer à M.[T] [J] les sommes

suivantes :

- 2316,04 € bruts à titre de rappel de salaire sur la base du minimum garanti ;

- 247,78 € bruts au titre des congés payés y afférents ;

- 1238,90 € bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 2000,00 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

Déboute M.[J] du surplus de ses demandes ;

Condamne la SARL France Distrib aux dépens d'appel ;

Condamne la SARL France Distrib à payer à M.[J] la somme de 1000,00 € en application des dispositions de l'article 700 al.1er 1° du Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. DEFIX, président et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE,LE PRESIDENT,

C.DELVERM. DEFIX


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 17/05870
Date de la décision : 13/09/2019

Références :

Cour d'appel de Toulouse 41, arrêt n°17/05870 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-09-13;17.05870 ?
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