08/04/2019
ARRÊT N°129
N° RG 16/02125 - N° Portalis DBVI-V-B7A-K6CO
CM/CD
Décision déférée du 12 Avril 2016 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 14/00521
M. SERNY
S... Q...
SAS ICA PATRIMOINE
SCP K... G... Q... L...
M... Z... R...
C/
P... J...
X... E... épse J...
D... W...
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
SNC MANDILLET
INFIRMATION
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ere Chambre Section 1
***
ARRÊT DU HUIT AVRIL DEUX MILLE DIX NEUF
***
APPELANTS
Monsieur S... Q...
[...]
Représenté par Me Robert RIVES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Olivier KUHN de la SCP FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat plaidant au barreau de HAUTS-DE-SEINE
SAS ICA PATRIMOINE
[...]
Représentée par Me Hélène PONS, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Philippe NETTO de la SCP FIELD FISHER WATERHOUSE FRANCE LLP, avocat plaidant au barreau de PARIS
SCP K... G... Q... L... M... Z... R... prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au dit siège [...]
Représentée par Me Robert RIVES, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Olivier KUHN de la SCP FRANCIS LEFEBVRE AVOCATS, avocat plaidant au barreau de HAUTS-DE-SEINE
INTIMES
Monsieur P... J...
[...]
Représenté par Me Vincent ROBERT de la SELARL DESARNAUTS HORNY ROBERT DESPIERRES, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame X... E... épouse J...
[...]
Représentée par Me Vincent ROBERT de la SELARL DESARNAUTS HORNY ROBERT DESPIERRES, avocat au barreau de TOULOUSE
Madame D... W...
[...]
Représentée par Me Robert RIVES, avocat au barreau de TOULOUSE
SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
[...]
Représentée par Me Catherine BENOIDT-VERLINDE de la SCP CABINET MERCIE - SCP D'AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE
SNC MANDILLET prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [...]
Représentée par Me Francis NIDECKER, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Sandra HEIL-NUEZ, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 3 Septembre 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :
C. BELIERES, président
C. ROUGER, conseiller
C. MULLER, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : C. PREVOT
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par C. BELIERES, président, et par C. PREVOT, greffier de chambre.
*******
EXPOSÉ DU LITIGE
La SAS ICA PATRIMOINE a reçu de la SNC MANDILLET mandat de commercialiser le programme immobilier de 135 logements dénommé '[...]' en cours de réalisation par celle-ci à [...], au sein d'un ensemble immobilier plus vaste dénommé '[...]'.
Suite à un démarchage à domicile, M. P... J... et son épouse Mme X... E..., demeurant ensemble à [...], ont, sur proposition de la SAS ICA PATRIMOINE, réalisé un investissement immobilier locatif dans cette résidence services seniors répondant aux exigences du label BBC (bâtiment basse consommation), éligible au dispositif de défiscalisation «SCELLIER BBC», selon les modalités suivantes :
- selon contrat préliminaire de réservation en date du 26 mars 2011, procuration pour acquérir reçue le 21 octobre 2011 par Me François C..., notaire associé à [...], au profit de tous clercs ou employés de la SCP de notaires T... K... G... Q... L... M... Z... R... située à [...], acte authentique de vente reçu le 27 octobre 2011 par Me S... Q..., notaire associé au sein de cette SCP, et rectificatif établi le 14 novembre 2011 par ce dernier, ils ont acquis en l'état futur d'achèvement de la SNC MANDILLET au prix «acte en mains» de 185300 euros un appartement de type 2 avec balcon au [...] portant les numéros 212 et 43 au plan et constituant désormais les lots n°29 et 270 (au lieu de 239 comme indiqué dans l'acte initial) de l'ensemble immobilier ayant fait l'objet d'un état descriptif de division et règlement de copropriété reçu par ce même notaire le 25 octobre 2011
- selon offre préalable reçue le 31 août 2011 et acceptée le 11 septembre 2011, ils ont obtenu de la SA BNP PARIBAS Personal Finance (BNP PARIBAS PF) un prêt du même montant destiné à financer cette acquisition, remboursable après une période d'utilisation de 24 mois et une période de différé de 3 mois en 228 mensualités au taux d'intérêt de 4,45 % l'an révisable sur la base du taux interbancaire à 3 mois et garanti par l'engagement de caution solidaire de la SA CNP CAUTION en faveur de Mme X... J... et par la délégation au prêteur du bénéfice de l'adhésion de M. P... J... au contrat d'assurance collective souscrit par la SAS ICA PATRIMOINE auprès de la SA GENERALI VIE pour les risques décès et PTIA (perte totale et irréversible d'autonomie)
- selon mandat de gérance en date du 15 décembre 2011, ils ont confié la gestion locative du bien à la SARL ELYADE, qui s'est engagée à trouver un premier locataire dès le lendemain de la signature du procès-verbal de livraison et, à défaut, à leur verser pendant 12 mois un revenu foncier de substitution égal au loyer mensuel hors charges d'un montant de 525 euros, et ont adhéré au contrat d'assurance souscrit par celle-ci auprès de la SA SÉRÉNIS ASSURANCES pour les risques loyers impayés, détériorations immobilières, protection juridique, vacance de locataire et différentiel de loyer.
La livraison est intervenue le 31 janvier 2013 avec réserves qui ont été levées et le bien a été donné à bail d'habitation pour trois ans à effet du 21 juin 2013 moyennant un loyer mensuel hors charges de 525 euros à Mme Y... U..., retraitée, qui a fourni un garant personne physique, les acquéreurs ayant alors renoncé à l'assurance garantie locative non cumulable avec ce cautionnement en vertu de la loi 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion dite loi MOLLE.
Informés courant septembre 2013 par le gestionnaire de l'ouverture de la résidence à une clientèle plus jeune pour pallier l'insuffisance des revenus des prospects seniors et permettre une location plus rapide des logements vacants, les acquéreurs ont indiqué y être opposés.
Par actes d'huissiers en date des 24, 29 et 30 janvier 2014, publiés au service de la publicité foncière de TOULOUSE le 3 juillet 2014, volume 2014P n°[...], les époux P... et X... J... ont fait assigner la SNC MANDILLET, la SASU ICA PATRIMOINE, la SA BNP PARIBAS PF, Me S... Q..., la SCP K... G... Q... L... M... Z... R... et Mme D... W... devant le tribunal de grande instance de TOULOUSE afin d'obtenir, au principal, l'annulation du contrat de réservation et/ou de l'acte authentique de vente aux torts du vendeur et du démarcheur, subsidiairement la résolution de la vente aux torts du démarcheur ou, à défaut, sa condamnation à des dommages et intérêts pour manquement à son devoir de conseil, ainsi que la résolution subséquente du prêt et la condamnation solidaire du notaire, de la SCP dont il est membre et de la secrétaire notariale les ayant représentés à l'acte de vente en vertu de la procuration pour acquérir à réparer les préjudices subis.
Par jugement en date du 12 avril 2016, le tribunal a, au visa des articles L121-25 du code de la consommation et L271-1 du code de la construction et de l'habitation :
- déclaré l'action recevable contre toutes les parties à l'exception de Mme D... W... et mis celle-ci hors de cause
- prononcé la nullité de la vente, restitué la propriété du bien à la SNC MANDILLET, ordonné la publication du jugement à la conservation des hypothèques de TOULOUSE et ordonné la restitution aux époux J... du prix de 185 300 euros outre les intérêts, sauf à le déléguer partiellement à la SA BNP PARIBAS PF à hauteur du solde dû au titre du capital prêté après compensation
- corrélativement, prononcé la nullité du prêt, dit que les époux J... sont restituables envers la SA BNP PARIBAS PF des sommes effectivement versées par la banque en exécution des emprunts (et remises à la SCI), sauf à opérer compensation avec les sommes qu'elle doit leur restituer, à savoir toutes celles remboursées dans les conditions du contrat en principal, intérêts, frais de dossier, frais de constitution de garantie et primes d'assurance groupe, annulé l'adhésion des époux J... à l'assurance groupe, dit que le bénéfice en est, en tant que de besoin, transféré à la banque et maintenu les garanties hypothécaires jusqu'à complet règlement de la créance de la SA BNP PARIBAS PF
- déclaré aussi la SNC MANDILLET, Me Q... relevé par la SCP dont il est membre et la SAS ICA PATRIMOINE co-responsables de l'annulation du prêt et des préjudices qui en résultent, enjoint à Me Q... relevé par la SCP dont il est membre et à la SAS ICA PATRIMOINE sur le fondement de l'article 1382 du code civil de garantir in solidum la restitution par la SNC MANDILLET aux époux J... du prix incluant le coût de l'acte de vente et de ses accessoires en principal et intérêts, dit que les garants disposeront contre la SNC MANDILLET d'un recours à hauteur de toutes les sommes payées en son acquit et entre eux d'un recours devant conduire à supporter chacun à part égale la part que la SNC MANDILLET ne pourrait pas personnellement assumer, enjoint à la SNC MANDILLET, à Me Q... relevé par la SCP dont il est membre et à la SAS ICA PATRIMOINE sur le fondement de l'article 1382 du code civil de payer in solidum aux emprunteurs une indemnité de 19425 euros au titre du préjudice financier et une indemnité de 2 000 euros au titre du préjudice moral et à la banque une indemnité de 33922,13 euros et dit que les co-responsables se répartiront entre eux la charge du paiement des indemnités dues à la banque (33 922,13 euros) et aux époux J... (21 425 euros) à raison de 50 % pour le notaire et la SCP dont il est membre, de 25 % pour la SAS ICA PATRIMOINE et de 25 % pour la SNC MANDILLET
- déclaré aussi Me Q... et la SAS ICA PATRIMOINE co-responsables in solidum d'un préjudice moral de 2 000 euros subi par les acquéreurs, enjoint par conséquent à ceux-ci de payer cette somme aux époux J... et enjoint à la SNC MANDILLET de payer aux époux J... une indemnité de 2 000 euros en réparation des préjudices moraux et tracas
- enjoint à la SNC MANDILLET de payer aux époux J... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dit n'y avoir lieu à d'autre application de ce texte et condamné la SNC MANDILLET aux entiers dépens dont distraction au bénéfice de Me I...
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.
Pour statuer ainsi, le tribunal a considéré que :
- le contrat de réservation, qui ne respecte pas les formes exigées par les articles L121-23 à L121-26 et R121-4 à R121-6 du code de la consommation en matière de démarchage à domicile dans la mesure où le formulaire détachable de rétractation réunit sur la même face l'adresse d'envoi et les modalités d'annulation de la commande et comporte sur l'autre face, où auraient dû figurer ces modalités d'annulation, des stipulations contractuelles sans rapport avec la faculté de rétractation, est nul et n'a donc pas fait courir le délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation
- la procuration pour acquérir du 19 octobre 2011, qui donne pouvoir au mandataire de déclarer dans l'acte de vente que le mandant a renoncé au droit de rétractation initial, a reçu le projet d'acte authentique et a renoncé au délai d'un mois prévu par l'article R261-30 du code de la construction et de l'habitation et qui précise que l'acte de vente ne pourra être signé que lorsque l'acquéreur aura (au futur) reçu le projet d'acte authentique, dont l'envoi à la date du 19 octobre 2011 est un fait matériel contesté que les termes de la procuration ne permettent pas de vérifier, ainsi que le règlement de copropriété (et non un simple projet), qui n'a été signé que deux jours avant l'acte authentique, n'emporte pas renonciation à la nullité résultant du non-respect des conditions du démarchage à domicile
- si tant est qu'il ait été envoyé, le projet d'acte de vente ne peut être considéré comme valable dès lors qu'il n'a pu être accompagné du règlement de copropriété établi le 25 octobre 2011, entre la procuration et l'acte authentique de vente, de sorte que les acquéreurs, à supposer qu'ils aient été avisés dès cette date de la signature du règlement de copropriété, n'ont pas eu matériellement la possibilité de comparer la consistance du bien telle que promise dans le contrat de réservation avec celle qui sera publiée et n'ont ainsi pas valablement renoncé à l'article R261-30 susvisé qui impartit un délai d'un mois entre la prise de connaissance du projet d'acte et la vente, que le délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L271-1 susvisé n'a, en l'absence de contrat préliminaire de réservation, pu courir qu'à compter de la remise du projet d'acte complet incluant le règlement de copropriété, laquelle était juridiquement impossible avant le 25 octobre 2011, et que l'acte authentique de vente signé avant l'expiration de ce dernier délai est lui-même nul
- le lien de subordination de Mme D... W... envers l'étude notariale exclut toute responsabilité personnelle de sa part
- les deux fautes commises par le notaire, consistant à n'avoir pas analysé le contrat de réservation et vérifié, ou fait vérifier par le notaire chargé de recevoir la procuration, sa validité au regard de la législation sur le démarchage à domicile et à recevoir l'acte authentique alors que l'acquéreur ne pouvait avoir eu connaissance d'un projet d'acte complet et que le délai de sept jours imparti par l'article L271-1 n'était pas expiré, engagent sa responsabilité in solidum avec le vendeur au titre des conséquences de l'annulation de la vente pour les acquéreurs comme pour le prêteur et l'obligent à garantir le remboursement du prix par le vendeur insolvable
- l'irrégularité du contrat de réservation pour violation des formes requises en matière de démarchage à domicile, commise par la SAS ICA PATRIMOINE mandatée par la SNC MANDILLET, a contribué aux erreurs du notaire, qui a pu croire, à tort, que le délai de l'article L271-1 était purgé, et à l'annulation de la vente.
Suivant déclaration en date du 26 avril 2016, Me S... Q... et la SCP K... G... Q... L... M... Z... R... ont relevé appel de ce jugement sauf à l'égard de Mme D... W..., avant de conclure le 6 juillet 2016.
Suivant déclaration en date du 13 mai 2016, la SAS ICA PATRIMOINE a relevé appel de ce jugement à l'égard de toutes les parties, avant de conclure le 8 août 2016.
Suivant déclaration en date du 7 juin 2016, Mme D... W... a relevé appel de ce jugement à l'égard des époux P... et X... J..., avant de se désister de son appel le 23 juin 2016.
Les deux premières instances d'appel ont été jointes le 11 août 2016, tandis que le désistement d'appel de Mme D... W... emportant extinction de la troisième instance d'appel et dessaisissement de la cour a été constaté le 30 juin 2016.
Par ordonnance en date du 3 novembre 2016, le conseiller de la mise en état a suspendu l'exécution du contrat de prêt liant les époux P... et X... J... à la SA BNP PARIBAS PF jusqu'à l'issue du litige relatif au contrat de vente en l'état futur d'achèvement les liant à la SNC MANDILLET et a réservé les dépens.
L'affaire, fixée pour être plaidée à l'audience du 18 juin 2018, a été renvoyée au 3 septembre 2018 et la clôture a été reportée au 14 août 2018.
Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 juillet 2018, Me S... Q... et la SCP K... G... Q... L... M... Z... R... demandent à la cour de :
- au visa de l'article 1147 du code civil, dire irrecevables les demandes des époux J... à leur encontre
- au visa de l'article 1240 (anciennement 1382) du code civil, réformant en toutes ses dispositions le jugement dont appel, débouter les époux J... de toutes leurs demandes contre eux et Mme W... et débouter la société BNP PARIBAS PF de son appel en garantie contre eux et Mme W...
- reconventionnellement, dire et juger que l'action des époux J... revêt manifestement un caractère abusif et vexatoire, les condamner en conséquence à payer à Me Q... une somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts et les condamner par ailleurs au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de Me RIVES conformément à l'article 699 du même code.
Ils font valoir que :
- les obligations du notaire, lorsqu'elles ne tendent qu'à assurer l'efficacité d'un acte instrumenté par lui, relèvent de sa seule responsabilité délictuelle
- les acquéreurs ne font pas la preuve, qui leur incombe sur ce fondement, d'une faute du notaire, que ce soit au stade du contrat de réservation dans la mesure où, n'étant pas encore chargé de régulariser l'acte de vente, les modalités à effectuer conformément aux règles légales en matière de démarchage incombaient au seul vendeur, où, selon l'article L121-12 du code de la consommation, l'opération ne relève pas des dispositions de ce code relatives au démarchage, mais des dispositions particulières de l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation prévoyant un délai de rétractation de sept jours qui a été respecté et où la nullité relative du contrat de réservation, autonome et facultatif, qui sanctionnerait une violation de l'article L271-1 est sans incidence sur la validité de l'acte authentique de vente, signé sans réserve exprimée dans la procuration pour acquérir, ou au stade de la notification du projet d'acte de vente au réservataire puisque ce projet, ainsi que l'état descriptif de division et règlement de copropriété établi avant le 25 octobre 2011 qui n'est que la date de dépôt de ce document au rang des minutes de la SCP notariale, font partie des pièces notifiées aux acquéreurs par lettre recommandée du 19 octobre 2011, distribuée le lendemain à M. P... J... qui, ayant signé l'accusé de réception et reconnu avec son épouse avoir reçu ces pièces dans la procuration pour acquérir, ne peut soutenir le contraire, ou encore concernant le délai de réflexion d'un mois de l'article R261-30 du code de la construction et de l'habitation car les acquéreurs y ont renoncé dans la procuration pour acquérir ; en outre, le notaire ne saurait être responsable de l'ouverture de la résidence par le gestionnaire à une clientèle autre que la clientèle senior prévue à l'origine dans les autorisations d'urbanisme comme dans l'acte de vente et, au cas où il serait considéré que le mandataire a outrepassé ses pouvoirs en régularisant l'acte authentique qui présente la résidence comme 'un ensemble immobilier particulièrement adapté aux seniors' alors que la procuration évoquait une 'résidence service pour seniors', l'exécution volontaire par les acquéreurs emporte, en toute hypothèse, ratification de l'acte
- s'agissant du préjudice des acquéreurs, la restitution du prix, qui ne revêt pas un caractère indemnitaire, incombe au seul vendeur et la perte du gain lié à la VEFA anéantie n'est pas davantage indemnisable
- l'acte introductif d'instance précisant que la mention dans l'acte authentique de la notification du 19 octobre 2011 est fausse revêt un caractère injurieux à l'égard du notaire dont elle met en cause la compétence et l'honorabilité
- l'appel en garantie de la banque n'est pas fondé dès lors que les restitutions consécutives à l'anéantissement du prêt ne constituent pas un préjudice réparable et que les garanties subsistent jusqu'à l'extinction de l'obligation de restituer par désintéressement du prêteur.
Dans ses dernières conclusions (n°5) notifiées par voie électronique le 31 juillet 2018, la SA ICA PATRIMOINE demande à la cour, réformant le jugement dont appel en toutes ses dispositions, au visa des articles L121-1 et suivants, R121-3 et suivants du code de la consommation, R261-30 et L271-1 du code de la construction et de l'habitation, 1109 et suivants du code civil, de :
- à titre principal, dire et juger que le contrat de réservation conclu entre les époux J... et la SNC MANDILLET n'est pas nul et qu'en toutes hypothèses, une irrégularité formelle ne peut entraîner la nullité de l'acte de vente conclu entre ceux-ci
- subsidiairement, dire et juger que la remise du projet d'acte a été effectuée plus de sept jours avant la signature de l'acte authentique conformément à l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation, qu'aucune manoeuvre dolosive n'est établie à son encontre et que l'acte authentique de vente a été signé par les époux J... dans le respect des dispositions de ce texte
- très subsidiairement, dire et juger que la signature par les époux J... de l'acte authentique de vente sans réserve emporte renonciation par eux à se prévaloir d'une éventuelle irrégularité de la notification du droit de rétractation prévu à l'article L271-1 susvisé, que l'acte authentique de vente a été signé par ceux-ci dans le respect des dispositions de ce texte, qu'ils ont renoncé au délai prévu par l'article R261-30 du code de la construction et de l'habitation et que le notaire n'a pas dépassé les pouvoirs qui lui étaient conférés dans la procuration en signant l'acte authentique
- à titre infiniment subsidiaire, en cas de confirmation de l'annulation de la vente, dire et juger que les époux J... doivent restituer l'intégralité des loyers perçus d'un montant mensuel de 525 euros, ce depuis la mise en location du bien ou, à tout le moins, depuis l'acte introductif d'instance en date du 23 janvier 2014 jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir, ainsi que les avantages fiscaux perçus
- en tout état de cause, débouter les époux J... de l'ensemble de leurs demandes, dire et juger qu'elle n'a commis aucun dol, qu'il n'existe aucun défaut de conformité en l'espèce, qu'elle n'a pas manqué à son devoir de conseil ni commis de faute envers eux et qu'ils n'ont souffert d'aucun préjudice, condamner tout succombant à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre en principal, frais, intérêts et accessoires et condamner les époux J... à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que :
- le contrat de réservation, qui est le fruit d'un démarchage à domicile mais ne constitue pas un contrat de vente en l'absence d'engagement ferme, ni a fortiori une vente à tempérament ou à crédit en l'absence de crédit proposé par elle ou le vendeur aux acquéreurs lors de la signature de ce contrat, n'est pas soumis au 6° du second membre de l'article L121-23 du code de la consommation imposant de mentionner au contrat les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global
- l'article R261-26 du code de la construction et de l'habitation imposant de mentionner au contrat préliminaire le prix prévisionnel de vente, les modalités de sa révision, la date à laquelle la vente pourra être conclue et, s'il y a lieu, les prêts que le réservant déclare qu'il fera obtenir au réservataire ou dont il lui transmettra le bénéfice, inexistants en l'espèce car les réservataires ont fait leur affaire personnelle de l'obtention d'un prêt, sans engagement de sa part même si elle est intervenue dans la constitution du dossier bancaire, a été respecté
- le formulaire de rétractation prévu à l'article L121-23 7° du code de la consommation dont elle n'a jamais contesté qu'il soit applicable au démarchage à domicile pour les ventes immobilières est, tel qu'inséré au contrat de réservation, conforme à l'esprit des articles R121-3 à R121-6 du même code, même s'il réunit sur une même face l'adresse d'envoi et les modalités d'annulation de la commande, car il renseigne suffisamment les acquéreurs sur la faculté de rétractation et ses modalités et n'a causé aucun grief à ceux-ci qui n'ont d'ailleurs jamais envisagé d'en faire usage, de sorte qu'aucune nullité n'est encourue à ce titre, en cohérence avec la protection plus raisonnée du consommateur désormais en vigueur, qui sanctionne à l'article L221-20 l'omission des informations relatives au droit de rétractation par une simple prolongation de douze mois du délai de rétractation et exclut à l'article L221-2 12° les ventes immobilières du champ d'application des dispositions relatives aux contrats conclus à distance et hors établissement
- le contrat de réservation étant valable, le délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation a valablement couru à l'égard des acquéreurs qui ont reconnu dans l'acte authentique de vente que ce contrat leur a été notifié par pli recommandé avec accusé de réception et une éventuelle irrégularité à ce titre est couverte par la signature de l'acte authentique de vente et la prise de possession de l'immeuble vendu
- le contrat de réservation étant un contrat purement facultatif et autonome par rapport à l'acte authentique de vente, sa nullité est sans incidence sur la validité de ce dernier
- l'acte authentique de vente a été signé dans des conditions respectant l'article L271-1 susvisé, après expiration du délai de réflexion de sept jours prévu par ce texte qui, dans l'hypothèse où le contrat de réservation serait jugé non valable, a couru à compter du 19 octobre 2011, date à laquelle le notaire a fait parvenir aux acquéreurs, sous pli recommandé avec accusé de réception distribué à ceux-ci, le projet d'acte de vente complet comprenant tant l'état descriptif de division et règlement de copropriété dont la communication préalable aux acquéreurs, exigée par l'article L261-11 alinéa 5 du code de la construction et de l'habitation mais non par l'article L271-1, est mentionnée dans la procuration pour acquérir et ne peut être démentie par les époux J... qui ne démontrent pas une quelconque différence d'avec le règlement de copropriété publié, que le document d'information, nonobstant l'emploi erroné du futur dans la phrase de la procuration précisant que ce document 'sera été établi'
- les acquéreurs ont valablement renoncé dans la procuration pour acquérir au délai d'un mois prévu par l'article R261-30 du même code entre la notification du projet d'acte de vente et la signature de l'acte
- le mandataire n'a pas excédé ses pouvoirs en signant l'acte authentique de vente qui décrit la résidence comme 'plus particulièrement adaptée pour les seniors' et a été ratifié par son exécution volontaire par les acquéreurs qui, à réception du projet d'acte, n'ont nullement relevé la contradiction entre cet acte et la procuration laissant penser, selon eux, que la résidence était exclusivement destinée à une clientèle senior
- la signature de l'acte authentique de vente sans réserve en vertu d'une procuration pour acquérir elle-même donnée sans réserve emporte renonciation des acquéreurs à se prévaloir d'une éventuelle irrégularité de la notification du droit de rétractation prévu à l'article L271-1
- aucun dol ne lui est imputable dans la mesure où elle n'est pas le cocontractant des acquéreurs et s'est contentée de leur répercuter les informations reçues du vendeur, notamment sur le fait que la résidence bénéficie de plusieurs services qui sont 'plus particulièrement', mais non exclusivement, destinés à une population âgée, ce dans des documents publicitaires dépourvus de toute valeur contractuelle et exempts de tout mensonge, sans user de manoeuvres en vue de les tromper lors de la conclusion du contrat, date à laquelle elle ne pouvait savoir qu'en cours d'exécution, afin de satisfaire aux engagements de louer liés à ce type d'investissements de défiscalisation, le gestionnaire proposerait en septembre 2013 certains logements à une clientèle plus jeune tout en respectant le choix des époux J... dont le bien est resté loué à une personne âgée jusqu'au 30 juin 2018 et qui n'ont ainsi été victimes d'aucune erreur déterminante et préjudiciable pour eux
- le bien livré est conforme au permis de construire accordé pour un 'restaurant, hôtel, résidence 3ème âge, résidence de tourisme' et bénéficie, d'ailleurs, d'une attestation de conformité délivrée par la mairie de [...]
- le manquement allégué à son devoir de conseil concernant les garanties locatives et la rentabilité de l'investissement, qui ne saurait entraîner la résolution du contrat de vente auquel elle n'est pas partie, n'est pas caractérisé dès lors que les acquéreurs, qui sont tenus d'un devoir de prudence et de renseignement, ne pouvaient ignorer un changement de législation survenu plus de deux ans avant la vente et ont été informés de l'intérêt de souscrire une assurance pour couvrir le risque de carence locative et que l'écart entre les charges réelles et les charges simulées, dans lesquelles ils intègrent à tort deux fois le coût de l'assureur emprunteur et l'impôt foncier, n'est que de 124,04 euros par an et s'est trouvé largement compensé par la baisse constante du taux Euribor depuis la conclusion de l'emprunt et l'économie subséquente sur le coût du crédit
- les acquéreurs, qui jouissent paisiblement du bien, ne subissent aucun préjudice et devront, en cas de résolution de la vente, restituer les loyers et les avantages fiscaux qui en sont issus car ils ne peuvent plus être considérés comme possesseurs de bonne foi à compter, à tout le moins, de l'introduction de l'instance, cette demande de restitution, qui est la conséquence du prononcé de la résolution de la vente, étant recevable au regard de l'article 566 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions (récapitulatives n°4) notifiées par voie électronique le 12 juillet 2018, les époux P... et X... J... demandent à la cour, rejetant l'appel principal de la SCP K... G... Q... L... M... Z... R..., Me S... Q... et la SAS ICA PATRIMOINE et l'appel incident de la SNC MANDILLET et la SA BNP PARIBAS PF et confirmant partiellement le jugement dont appel, au visa des articles L121-1 et suivants, R121-3 à R121-6, L312-12 à L312-14 du code de la consommation, L261-1 et suivants, L271-1 et suivants, R261-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation, 1109, 1116, 1117, 1134, 1147, 1184, 1304, 1382, 1384 alinéa 5, 1984, 1989 et 1991 du code civil, de :
- dire que le contrat de réservation du 26 mars 2011 n'est pas conforme aux dispositions des articles L121-23 6° du code de la consommation et R261-26 du code de la construction et de l'habitation et prononcer en conséquence son annulation aux torts des sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE, dire également que l'acte authentique de vente du 27 octobre 2011 n'a pas été conclu conformément aux dispositions des articles R261-30, L261-11 alinéa 5 et L271-1 du code de la construction et de l'habitation et prononcer en conséquence son annulation aux torts des mêmes sociétés, subsidiairement dire que cet acte doit être annulé aux torts des mêmes sociétés, de la SCP notariale et de Me S... Q... en raison du dépassement de pouvoir du titulaire de la procuration, plus subsidiairement prononcer son annulation aux torts des sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE pour vice de consentement en raison de l'erreur provoquée par celles-ci sur la destination de l'immeuble, en conséquence prononcer l'annulation de la vente du 27 octobre 2011 portant sur les lots n°29 et 239 de la [...], dont le terrain d'assiette et attenant figure au cadastre de cette commune sous les références section [...] lieudit '[...]' pour une surface de 1ha 33 a 63 ca, et ordonner la publication de l'arrêt à intervenir à la conservation des hypothèques de TOULOUSE aux frais des sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE
- subsidiairement, prononcer la résolution judiciaire de la vente du 27 octobre 2011 aux torts de la SNC MANDILLET en raison d'un défaut de conformité par rapport au permis de construire accordé pour une résidence 3ème âge ou, plus subsidiairement, aux torts de la SAS ICA PATRIMOINE en raison des manquements à son devoir de conseil portant sur les garanties locatives et la rentabilité de l'investissement
- en conséquence de l'annulation ou la résolution judiciaire de la vente, leur ordonner de restituer à la SNC MANDILLET l'immeuble objet de la vente, ordonner à celle-ci de leur restituer la somme de 189 220 euros correspondant au prix d'acquisition et aux frais de l'acte, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, la débouter de sa demande de remboursement des frais d'actes payés au notaire pour une somme de 3920 euros et de la caution bancaire pour une somme de 2 954,20 euros, déclarer irrecevables en application de l'article 564 du code de procédure civile les demandes des sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE tendant à la restitution des fruits et de la seconde tendant à la restitution des avantages fiscaux et, subsidiairement, les en débouter, dire que le transfert de propriété et de jouissance n'aura lieu qu'après la restitution des fonds, condamner la SCP Notariale et Me S... Q... à garantir la restitution des fonds, prononcer la résolution du contrat de prêt souscrit le 21 octobre 2011 avec toutes conséquences concernant les restitutions réciproques telles qu'exposées dans le jugement de première instance et à parfaire jusqu'à l'arrêt à intervenir, retenir qu'au 8 août 2016, la créance résiduelle de la banque s'élève à la somme de 131 359,20 euros, dire que les intérêts sur cette somme seront dûs au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et que la restitution des fonds à la banque sera conditionnée au remboursement préalable du prix de vente par les sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE et condamner, en tant que besoin, ces sociétés au paiement de toutes les sommes qui pourraient être sollicitées par la SA BNP PARIBAS PF en conséquence de la résolution judiciaire du prêt
- condamner solidairement les sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE, la SCP notariale et Me S... Q... à leur payer la somme de 11 890,56 euros à titre de dommages et intérêts en remboursement des charges de copropriété, cotisations d'assurance et frais de gestion arrêtés au mois de décembre 2016 et des impôts fonciers supportés au titre des années 2013 à 2017, à rembourser ces différentes charges et impôts jusqu'à l'arrêt à intervenir et l'annulation effective de la vente et à leur payer la somme de 69 834 euros au titre de leur perte de chance de gains ou, subsidiairement, celle de 37 122 euros au titre des pertes sur une période de 46 mois correspondant au différentiel entre le remboursement des mensualités du prêt et les loyers perçus, à parfaire jusqu'à l'arrêt à intervenir
- infiniment subsidiairement, si la cour ne prononce pas la nullité ou la résolution de la vente, condamner la SAS ICA PATRIMOINE à leur payer la somme de 25 300,44 euros (11 690,52 + 13 609,92) à titre de dommages et intérêts en application des articles 1134 et 1147 du code civil du fait de ses manquements à son devoir de conseil
- dire que Mme D... W... n'a pas respecté les termes de la procuration reçue concernant la désignation du bien à acquérir et que la responsabilité de son employeur, la SCP notariale, est engagée, dire que Me S... Q... a manqué à ses obligations professionnelles en passant un acte non conforme à la procuration concernant la désignation du bien à acquérir et en ne respectant pas les dispositions d'ordre public des articles R261-30, L261-11 alinéa 5 et L271-1 du code de la construction et de l'habitation et condamner solidairement Me S... Q... et la SCP K... G... Q... L...-M... Z... R... à leur payer à titre de dommages et intérêts les sommes de 69 834 euros au titre de la perte de gain, ce solidairement avec les sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE, et de 40 000 euros au titre de leur préjudice moral
- confirmer le jugement dont appel en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile et condamner solidairement les sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE, Me S... Q... et la SCP K... G... Q... L...-M... Z... R... aux entiers frais et dépens d'appel, ainsi qu'au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 en appel.
Ils font valoir que :
- les règles d'ordre public relatives au démarchage à domicile, en vigueur lors de la conclusion du contrat et applicables en vertu des articles L121-1 et L121-22 du code de la consommation dès lors que les articles L271-1 et suivants du code de la construction et de l'urbanisme ne contiennent aucune disposition spécifique aux ventes immobilières par démarchage et que le contrat de réservation reproduit les articles L121-23 à L121-26, n'ont pas été respectées en ce que, d'une part, le montant et le taux du prêt qu'ils ont déclaré vouloir solliciter pour financer l'acquisition en s'engageant à transmettre les documents nécessaires à la constitution du dossier bancaire au vendeur qui s'est ainsi engagé avec le démarcheur à leur faire obtenir ce prêt ne sont pas indiqués dans la rubrique correspondante du contrat de réservation en violation de l'article L121-23 6° du code de la consommation comme de l'article R261-26 du code de la construction et de l'habitation, d'autre part, le formulaire détachable de rétractation exigé par l'article L121-24 du code de la consommation ne comporte qu'une face au lieu de deux et ne contient pas les mentions 'si vous annulez votre commande, vous pouvez utiliser le formulaire détachable ci-contre', 'l'envoyer par lettre recommandée avec avis de réception', 'l'expédier au plus tard le septième jour à partir de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant' et 'signature du client' ni d'espace avant la mention 'je soussigné, déclare annuler la commande ci-après...', alors que la profession d'avocat de M. P... J... est indifférente à cet égard, qu'en l'absence de clause de renonciation au droit de rétraction insérée dans la procuration pour acquérir, la mention de l'acte de vente selon laquelle ils ont bénéficié du délai de rétractation de sept jours et n'ont pas entendu user de ce droit leur est inopposable et que la sanction de ces irrégularités réside en la nullité du contrat de réservation, qui affecte nécessairement la validité de l'acte authentique de vente qui en est la réitération
- la signature de l'acte authentique de vente n'a pu couvrir ces irrégularités puisque cet acte est lui-même nul ; en effet, n'ont pas été respectées les règles protectrices du code de la construction et de l'habitation relatives tant au délai de rétractation de sept jours de l'article L271-1 dernier alinéa, qui n'a commencé à courir que le lendemain de la présentation de la lettre du 19 octobre 2011 par laquelle le notaire prétend leur avoir notifié le projet d'acte, soit le 21 octobre 2011, et interdisait de signer l'acte de vente avant le 28 octobre 2011, qu'à la notification du projet d'acte qui aurait dû être effectuée au moins un mois avant la signature de l'acte selon l'article R261-30 mais n'est jamais intervenue car la lettre du 19 octobre 2011, dont un exemplaire intégral et l'original de l'accusé de réception signé seulement de M. P... J... n'ont jamais été produits malgré sommation, ne contenait que le modèle de procuration signé deux jours plus tard et la procuration précise, d'ailleurs, qu'il est donné mandat pour acquérir uniquement dès que le vendeur aura, au futur, procédé à l'envoi des pièces visées à l'article R261-30, notamment l'état descriptif de division et règlement de copropriété et le document d'information à établir, et qu'à la communication préalable du règlement de copropriété et du document d'information, qui n'est pas davantage intervenue en violation des articles L261-11 alinéa 5 et R261-30 car ces documents n'ont été établis que le 25 octobre 2011 alors qu'aucune dérogation conventionnelle au délai de réflexion d'un mois de l'article R261-30 n'est admise en matière de vente d'immeuble à construire relevant du secteur protégé et que la renonciation à ce délai figure dans un acte de procuration qui, faute d'avoir été respecté et signé dans des conditions régulières, n'a pu produire aucun effet ; en outre, l'acte est nul en raison du défaut de pouvoir du mandataire qui l'a signé en dépit de la non-conformité de la stipulation relative à la désignation du bien à acquérir qui est présenté dans la procuration à valeur de mandat spécial comme dépendant d'un ensemble immobilier 'destiné à [...] être exploité en résidence service pour seniors', c'est-à-dire exclusivement destiné à une clientèle senior, et dans l'acte de vente comme dépendant d'un ensemble immobilier 'plus particulièrement adapté pour les seniors', de la stipulation subordonnant sa signature à la réception préalable des documents visés à l'article R261-30 et de l'absence de clause lui donnant pouvoir de renoncer au délai de rétractation de sept jours
- leur consentement, déterminé par la volonté d'effectuer un investissement immobilier dans une résidence seniors offrant de meilleures garanties en termes de revenus locatifs et de stabilité des baux, a été vicié par l'omission dolosive du vendeur et de son mandataire dont il doit répondre, qui, tenus en tant que professionnels de la vente et de la promotion immobilière de dispenser une information loyale quelles que soient les qualités professionnelles de l'acquéreur, n'ont pas attiré leur attention sur la divergence essentielle de formulation de la clause de désignation du bien à acquérir entre, d'un côté, la procuration pour acquérir et les documents publicitaires suffisamment explicites pour avoir valeur contractuelle et, de l'autre, l'acte de vente et le règlement de copropriété alors en cours de publication mais non communiqué, la résidence étant désormais majoritairement occupée par des personnes de moins de 40 ans peu intéressées par les services spécifiques proposés à la clientèle âgée tels que l'assistance 24 heures sur 24, la blanchisserie, les repas à domicile... et grevant d'autant les charges de copropriété, qui ne sont que partiellement récupérables, sans que les copropriétaires aient été appelés à voter pour donner leur autorisation à ce changement de destination
- la non-conformité contractuelle du bien livré au regard du permis de construire accordé pour une 'résidence 3ème âge' et visé dans l'acte de vente justifie, quand bien même il a été loué à une personne âgée, la résolution de la vente, le promoteur et son mandataire n'étant nullement étrangers au changement de destination de la résidence, qui ne constitue pas un cas fortuit ou de force majeure exonératoire de responsabilité puisqu'ils ont été consultés par le gestionnaire sur l'ouverture de l'immeuble, pour des raisons purement économiques, à une clientèle non spécifiquement senior, rendue possible par la rédaction de l'acte de vente et du règlement de copropriété non conformes à l'intention des parties
- la SA ICA PATRIMOINE, professionnel de l'investissement immobilier, auteur de la simulation financière et rédacteur du contrat de réservation, a manqué à son devoir de conseil concernant, d'une part, les garanties locatives car ils n'ont pas été informés lors de la signature de ce contrat de la clause du contrat d'assurance souscrit auprès de la SA SÉRÉNIS ASSURANCES, qui prévoit que 'les garanties ne sont acquises que si le montant du loyer mensuel, charges comprises, ne représente pas plus de 40 % du revenu mensuel net permanent imposable en France' et s'avère à l'origine des difficultés de location au profit des personnes âgées, ni des dispositions de la récente loi MOLLE interdisant de cumuler une garantie d'assurance et un cautionnement, ce qui les a contraints à renoncer à la garantie carence locative pour pouvoir louer leur bien à une personne âgée ne remplissant pas les conditions de revenus exigées par l'assureur, et, d'autre part, la rentabilité de l'investissement car la simulation repose sur une mauvaise évaluation des charges diverses (charges de copropriété, impôt foncier, assurances du prêt et frais de gestion), qui ont été sous-estimées de 9216,36 euros sur la période de défiscalisation de 9 années, et de la charge de remboursement du prêt, qui a été sous-estimée de 4 393,56 euros sur la durée du prêt n'ayant enregistré aucune diminution du montant des échéances nonobstant la baisse du taux Euribor, alors que leur propre devoir de renseignement se limite à une vérification normale des actes et documents fournis et que les compétences professionnelles de M. P... J... sont indifférentes ; à défaut de résolution de la vente, ces manquements justifient l'octroi à titre de dommages et intérêts des sommes de 11 690,52 euros correspondant à une année de loyers et charges (7 188 euros) et aux cotisations d'assurance (4 502,52 euros) et de 13 609,92 euros correspondant à la sous-évaluation des charges de copropriété (9216,36 euros) et d'emprunt (4 393,56 euros)
- la responsabilité de l'office notarial qui, par ses défaillances, a permis la vente du bien dans une résidence dont la destination a été modifiée à leur insu est recherchée sur le fondement, non du dol, mais des articles 1147, 1989 et 1384 alinéa 5 du code civil pour manquement à ses obligations contractuelles et d'information, pour non respect du mandat spécial et en qualité d'employeur responsable des actes de sa préposée ; en effet, Mme D... W..., clerc de notaire, n'a pas respecté les termes de la procuration sur la désignation du bien à acquérir, sur la réception préalable des documents visés à l'article R261-30 du code de la construction et de l'habitation et sur l'absence de pouvoir de renoncer au délai de rétractation de sept jours et engage ainsi sa propre responsabilité sur le fondement de l'article 1991 du code civil, solidairement avec son employeur, tandis que Me S... Q... s'est abstenu de vérifier la conformité de la procuration à l'acte authentique de vente sur la destination de la résidence, de transmettre le projet d'acte de vente dans les délais d'ordre public prescrits par les articles L271-1 et R261-30 du code de la construction et de l'habitation, la mention de l'acte authentique selon laquelle le projet d'acte 'a été notifié à l'acquéreur, par pli recommandé avec demande d'avis de réception, le 19 octobre 2011' étant fausse car il n'ont jamais reçu cette lettre, de transmettre le règlement de copropriété qui, selon l'article L261-11 alinéa 5 du même code, doit être remis à chaque acquéreur lors de la signature du contrat et lui être communiqué préalablement mais qui ne leur a été transmis que le 6 décembre 2013 par la SARL ELYADE, soit après la signature du bail qui ne peut donc valoir ratification de l'irrégularité de la procuration ni acceptation du changement de destination de l'immeuble, et de les informer des incidences de la formulation 'plus particulièrement adaptée pour les seniors' figurant au règlement de copropriété par rapport aux prescriptions du permis de construire
- les restitutions réciproques consécutives à l'annulation de la vente et à celle corrélative du prêt et de l'assurance groupe comprennent les frais d'acte notarié, les frais de caution bancaire, mais pas les loyers perçus dont les sociétés MANDILLET et ICA PATRIMOINE sont irrecevables à demander restitution en appel faute de l'avoir fait en première instance et dont, au demeurant, ils ne sont pas redevables puisque possesseurs de bonne foi, ni les avantages fiscaux perçus qui ne constituent pas un préjudice pour la SA ICA PATRIMOINE et qu'ils devront vraisemblablement rembourser à l'administration fiscale lorsque l'annulation de la vente sera devenue définitive
- n'ayant nullement fait preuve de légèreté en finançant l'acquisition à 100 % par un emprunt sur 20 ans à taux variable, auquel était précisément lié l'avantage fiscal et qui leur permettait au-delà de 10 ans d'opter pour un taux fixe et de revendre le bien, l'indemnisation de leur préjudice doit être intégrale et porter sur les charges de copropriété assumées jusqu'à l'annulation de la vente (5 182,36 euros de mars 2013 à décembre 2016), l'impôt foncier (2 858 euros de 2013 à 2017), les cotisations d'assurance emprunteur (1 917,74 euros de mars 2013 à décembre 2016), les frais de gestion (1 932,46 euros de mars 2013 à décembre 2016), sur la perte d'une chance, estimée à 75 %, de réaliser à l'issue de l'opération le gain total espéré de 93 112 euros annoncé dans la simulation comptable puisque la loi fiscale n'offre plus aujourd'hui les mêmes avantages, ainsi que sur le préjudice moral que leur a causé le notaire en trahissant leur confiance et en les contraignant à engager une procédure qui a perturbé leurs conditions d'existence et leur projet d'investissement locatif
- les propos tenus dans leurs écritures à l'égard du notaire n'ont rien d'injurieux, reflètent exactement le déroulement de la vente et n'ont causé nul préjudice matériel à celui-ci, ses associés et la SCP notariale.
Dans ses dernières conclusions (n°6) notifiées par voie électronique le 7 août 2018, la SNC MANDILLET demande à la cour, réformant en toutes ses dispositions le jugement dont appel, au visa des articles 1102 et suivants du code civil, de :
- débouter les époux J... de l'intégralité de leurs demandes à son encontre et les condamner à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP NIDECKER conformément à l'article 699 du même code
- à titre subsidiaire, en cas d'annulation du contrat de vente du bien immobilier des époux J..., condamner ceux-ci à lui rembourser la somme totale de 6 044,31 euros réglée par elle et à lui restituer les fruits effectivement reçus du bien litigieux, débouter la SA BNP PARIBAS PF de ses demandes d'indemnisation et condamner tout succombant à la relever et la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre en principal, frais, intérêts et accessoires et à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle fait valoir que :
- s'il n'est pas contesté que le contrat de réservation, que le commercialisateur a seul fait signer aux acquéreurs, était à l'époque soumis aux règles du code de la consommation relatives au démarchage à domicile, le formulaire de rétractation qu'il comporte n'est pas irrégulier car il renseigne suffisamment les acquéreurs sur la faculté de rétractation et les modalités d'annulation de la commande, même si celles-ci se trouvent sur la même face que l'adresse d'envoi, et n'a causé aucun grief à ceux-ci qui n'ont d'ailleurs jamais envisagé d'en faire usage
- l'alinéa 6 de l'article L121-23 du code de la consommation imposant au vendeur de faire figurer dans l'écrit remis au consommateur le prix global à payer et les modalités de paiement a été respecté et le contrat de réservation, qui fait état d'un prêt amortissable, ne pouvait en mentionner le taux qui n'était pas alors connu et a été porté à la connaissance de l'emprunteur par l'offre de prêt dont la validité n'a jamais été contestée
- l'article R261-26 du code de la construction et de l'habitation prévoyant que le contrat préliminaire doit indiquer le prix prévisionnel de vente et, le cas échéant, les modalités de sa révision a été respecté et la suite de cet article, d'interprétation stricte, relative à l'indication des prêts que le réservant déclare qu'il fera obtenir au réservataire ou dont il lui transmettra le bénéfice, n'a pas vocation à s'appliquer car elle n'a pas pris un tel engagement envers les réservataires qui seuls se sont engagés à lui transmettre les informations nécessaires à la constitution du dossier bancaire et auxquels il n'était pas interdit de rechercher un financement autonome
- le contrat de réservation est donc valable, étant relevé que le législateur a depuis opté pour une protection plus raisonnée du consommateur car le nouvel article L221-20 sanctionne l'omission des informations relatives au droit de rétractation par une simple prolongation de douze mois du délai de rétractation et ne s'applique plus aux ventes immobilières selon l'article L221-2 12°
- le contrat de réservation étant un contrat purement facultatif et autonome par rapport à l'acte authentique de vente en VEFA, la signature de ce dernier annule et remplace tous actes antérieurs, dont le contrat de réservation, qu'elle purge de toutes éventuelles irrégularités, excepté concernant le délai de rétractation auquel ouvre droit l'acte authentique lui-même
- ce délai de rétractation de sept jours prévu par l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation court à compter, non pas de la signature du règlement de copropriété comme jugé en première instance, mais de l'envoi du projet d'acte dont il n'est nullement précisé qu'il doit être complet ni accompagné du règlement de copropriété, lequel doit seulement, en vertu de l'article L261-11 alinéa 5 du même code, être remis à l'acquéreur lors de la signature du contrat et lui être communiqué préalablement ; or il ne peut plus être contesté que les acquéreurs ont reçu du notaire le 20 octobre 2011 le projet d'acte et l'état descriptif de division et règlement de copropriété conforme, à défaut de preuve contraire, à celui déposé le 25 du même mois au rang de ses minutes, de sorte que la communication valable du projet d'acte a bien ouvert aux époux J... le délai de rétractation de sept jours avant la signature de l'acte de vente le 27 octobre 2011
- le dol au sens de l'article 1116 du code civil ne se présumant pas, devant être prouvé et n'étant une cause de nullité de la convention que s'il émane du co-contractant et provoque une erreur déterminante de l'autre partie, les acquéreurs ne justifient d'aucune manoeuvre de sa part ni de son intention dolosive dès lors que les documents publicitaires et termes de la procuration n'ont aucune valeur contractuelle, que le contrat de réservation ne mentionne pas une résidence senior, que l'acte authentique, qui fait seul foi entre les parties, et le règlement de copropriété, qui s'impose également aux propriétaires, mentionnent l'un et l'autre une résidence 'plus particulièrement adaptée pour les séniors', sans aucune contradiction avec la définition d'une résidence senior qui offre des prestations adaptées aux seniors dans des locaux adaptés, qu'aucune destination exclusive pour l'habitation des seniors n'a jamais été annoncée, même dans les documents pré-contractuels relatant tout au plus les services offerts aux seniors, ni été déterminante de l'acquisition, que la dépréciation et l'augmentation des charges qu'engendrerait la location à d'autres personnes que des seniors ne sont pas démontrées et que, à supposer qu'existe un changement de destination de la résidence et qu'il soit fautif, il est imputable au seul gestionnaire chargé de la mise en location des appartements après la vente et la livraison du bien et ne cause pas préjudice aux époux J... dont le logement est loué depuis juin 2013 à la même personne âgée bénéficiant des services et animations proposés
- le bien livré est conforme au permis de construire accordé pour un 'restaurant, hôtel, résidence 3ème âge, résidence de tourisme' et la mairie de [...] a, d'ailleurs, attesté de sa conformité aux prescriptions d'urbanisme n'incluant pas la destination de l'immeuble
- les agissements reprochés au commercialisateur, tiers à la vente, ne peuvent justifier la résolution de la vente, d'autant que l'appréciation erronée de la rentabilité économique d'une opération ne constitue pas, à défaut de stipulation expresse érigeant cette rentabilité en condition, une erreur sur la substance de nature à vicier le consentement
- l'anéantissement rétroactif de la vente fait obstacle à toute indemnisation de la perte des avantages ou bénéfices attachés à la propriété du bien tels que les loyers, dont il entraîne restitution, et la demande de restitution des loyers, qui en est la conséquence légale, ne saurait être considérée comme nouvelle ni être subordonnée à la preuve de la mauvaise foi des acquéreurs qui, en tout état de cause, est caractérisée à compter de la lettre de septembre 2013 les informant de l'ouverture de la location à une clientèle plus jeune et au plus tard de l'assignation de janvier 2014
- la seule faute retenue à son encontre par le premier juge, consistant à n'avoir pas vérifié que la SAS ICA PATRIMOINE commercialisait en présentant des formulaires de démarchage à domicile non susceptibles d'encourir la critique n'est pas établie, de sorte qu'elle devra, le cas échéant, être relevée et garantie intégralement par le ou les responsables de la nullité ou la résolution de la vente.
Dans ses dernières conclusions (récapitulatives n°2) notifiées par voie électronique le 13 août 2018, la SA BNP PARIBAS PF demande à la cour de :
- dire et juger que le prêt qu'elle a consenti aux époux J... a été conclu dans le plus strict respect des articles L312-1 et suivants du code de la consommation, lui donner acte qu'elle s'en remet à la justice sur la nullité de la vente et du prêt et statuer ce que de droit sur les demandes présentées à ce titre par les époux J...
- au cas où la nullité de la vente et celle du prêt seraient prononcées, confirmant dans son principe le jugement dont appel, dire et juger que les époux J... devront lui restituer le montant du capital prêté, soit la somme de 185 300 euros, et qu'elle devra leur restituer l'intégralité des sommes perçues au titre du remboursement du crédit en capital, intérêts et frais, étant précisé qu'au 8 août 2016, les versements effectués par l'emprunteur s'élèvent à la somme de 53940,80 euros, ordonner la compensation entre ces créances et dettes réciproques, condamner les époux J... à payer sa créance résiduelle, soit à titre indicatif la somme de 131 359,20 euros au 8 août 2016, les comptes définitifs devant être établis au jour de l'exécution de la décision, condamner solidairement la SNC MANDILLET, la SAS ICA PATRIMOINE et la SCP K... G... Q... L... M... Z... R... à garantir le remboursement de sa créance par les époux J... en application des articles 1165 et 1382 du code civil et à lui payer en réparation de son préjudice sur le fondement de l'article 1382 des dommages et intérêts d'un montant équivalent aux frais de dossiers, intérêts et commissions ayant couru jusqu'à la date de la résolution, augmenté de l'indemnité de remboursement anticipée fixée par le contrat à 3 % du capital dû, les comptes étant à faire au jour de l'exécution de la décision, mais réformant le jugement en ses dispositions consacrées à l'assurance invalidité et incapacité de travail souscrite par M. J..., constater que les garanties n'ont pas été souscrites par son entremise dans le cadre d'un contrat de groupe et qu'elle ne peut dès lors être tenue de restituer les cotisations qui ont du être réglées directement auprès de la SA GENERALI et, y ajoutant, dire que les condamnations prononcées à l'encontre des époux J... quant aux restitutions à opérer et celles prononcées à l'encontre de la SNC MANDILLET, de la SAS ICA PATRIMOINE et, le cas échéant, du notaire produiront intérêts à compter de ses conclusions de première instance notifiées le 18 septembre 2014, ce au taux du prêt pour ce qui concerne sa créance résiduelle à l'égard des emprunteurs et au taux légal pour ce qui concerne les dommages et intérêts mis à la charge du vendeur, de la SAS ICA PATRIMOINE et du notaire
- condamner tout succombant sous la même solidarité à lui payer la somme de 2 500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP MERCIE, avocats.
Mme D... W... a constitué avocat le 16 juin 2016 dans la seconde instance d'appel aux cotés du notaire et de la SCP dont celui-ci est membre, mais n'a pas conclu.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la nullité du contrat préliminaire de réservation
Dans la mesure où le contrat préliminaire de réservation conclu le 26 mars 2011 fait suite à un démarchage à domicile et où, à cette date, les ventes immobilières en l'état futur d'achèvement ne comptaient pas parmi les activités pour lesquelles le démarchage faisait l'objet d'une réglementation par un texte législatif particulier au sens du premier alinéa de l'article L121-22 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi 2014-344 du 17 mars 2014 et applicable en la cause, ce contrat était soumis aux dispositions d'ordre public des articles L121-23 à L121-29 du même code régissant le démarchage, ce qui n'est, d'ailleurs, contesté ni par la SA ICA PATRIMOINE ni par la SNC MANDILLET.
Selon l'article L121-23, l'exemplaire du contrat remis au client lors de sa conclusion devait comporter, à peine de nullité, diverses mentions, dont les suivantes :
6° Prix global à payer et modalités de paiement ; en cas de vente à tempérament ou de vente à crédit, les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, ainsi que le taux nominal de l'intérêt et le taux effectif global de l'intérêt déterminé dans les conditions prévues à l'article L313-1 ;
7° Faculté de renonciation prévue à l'article L121-25, ainsi que les conditions d'exercice de cette faculté et, de façon apparente, le texte intégral des articles L121-23, L121-24, L121-25 et L121-26.
Toutefois, le contrat préliminaire prévu à l'article L261-15 du code de la construction et de l'habitation n'étant pas une promesse de vente, mais un contrat sui generis, distinct et autonome du contrat de vente d'immeuble à construire, par lequel le promoteur s'engage à réserver au souscripteur, en contrepartie d'un dépôt de garantie, une partie d'un ensemble immobilier qu'il se propose de construire, il n'est pas assujetti à l'obligation édictée par l'article L121-23 6° in fine d'indiquer les formes exigées par la réglementation sur la vente à crédit, le taux d'intérêt nominal et le taux effectif global, mais uniquement à celle, spécifique à ce type de contrat et édictée par l'article R261-26 du code de la construction et de l'habitation, d'indiquer, s'il y a lieu, les prêts que le réservant déclare qu'il fera obtenir au réservataire ou dont il lui transmettra le bénéfice, leur montant, leurs conditions et le nom du prêteur, étant rappelé que l'obligation d'indiquer au contrat préliminaire si le prix sera payé directement ou indirectement, même en partie, avec ou sans l'aide d'un ou plusieurs prêts régis par les dispositions du code de la consommation relatives au crédit immobilier n'a été introduite que par la loi 2011-525 du 17 mai 2011 ayant modifié l'article L312-15 ancien dudit code.
Or le contrat de réservation litigieux, qui mentionne seulement que 'le RÉSERVATAIRE déclare son intention de solliciter un ou plusieurs prêts pour le financement de son opération' et 's'oblige à transmettre au vendeur les documents nécessaires à la constitution du dossier bancaire dans les 10 jours de la date du présent contrat sous peine de rendre caduque les présentes', ne contient aucun engagement du réservant à faire obtenir ou transférer un prêt au réservataire.
Dès lors, l'absence de mention expresse du montant du prêt envisagé par les époux P... et X... J..., montant qui ne se déduit que de leur apport personnel nul, des conditions de ce prêt autres que son caractère amortissable et du nom du prêteur, éléments qui n'ont été connus que lorsque l'un des partenaires bancaires sollicités par la SA ICA PATRIMOINE, à savoir la SA BNP PARIBAS PF, a accepté d'apporter son concours financier et émis l'offre de prêt du 24 août 2011 qui a été ensuite acceptée par les acquéreurs, ne saurait entraîner l'annulation du contrat de réservation.
S'agissant de la faculté de renonciation instituée par l'article L121-25 du code de la consommation, offerte dans un délai de sept jours à compter de la commande ou de l'engagement d'achat, sans possibilité pour le client démarché d'abandonner ce droit par une clause du contrat, le contrat de réservation litigieux reproduit de façon apparente le texte intégral des articles L121-23, L121-24, L121-25 et L121-26 et intègre, sous l'intitulé 'ANNULATION DE COMMANDE 'CODE DE LA CONSOMMATION, ART. L.121-23 A L.121-26"', un formulaire détachable destiné à faciliter l'exercice de cette faculté.
Toutefois, les mentions de ce formulaire détachable ne sont pas exactement celles exigées par l'article R121-5 du même code, comme cela est détaillé dans les conclusions des époux P... et X... J..., même si elles ne s'en écartent guère en substance.
En outre, il réunit sur la même face ces mentions et l'adresse exacte et complète à laquelle il doit être envoyé, alors que cette adresse aurait dû figurer sur l'autre face en vertu de l'article R121-4, et comprend sur l'autre face le rappel des dispositions des articles L271-1, L271-2 et R261-25 du code de la construction et de l'habitation, alors que l'article R121-6 interdit d'y porter d'autres mentions que celles prévues aux articles R121-4 et R121-5 et des références d'ordres comptables.
Il ne répond donc pas aux conditions de forme que doit remplir le formulaire détachable prévu par l'article L121-24 du code de la consommation.
Au surplus, l'existence de la faculté de renonciation prévue à l'article L121-25 du code de la consommation et les conditions d'exercice de cette faculté ne sont pas rappelées sans équivoque au contrat de réservation dont l'article 7 'Faculté de Rétractation' stipulant que 'le RÉSERVATAIRE peut se rétracter et annuler sa commande jusqu'à l'expiration du délai de 7 jours, décompté à partir du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée avec AR, par laquelle le RÉSERVANT lui notifiera le présent contrat signé par son représentant légal' fait plutôt référence au délai de rétractation de l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation, qui court à compter du lendemain de la première présentation de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception notifiant l'acte à l'acquéreur.
Le contrat de réservation du 26 mars 2011 est donc entaché d'irrégularités de nature à entraîner sa nullité, indépendamment de toute preuve d'un grief, étant relevé que, si la méconnaissance des dispositions des articles L121-21 et suivants du code de la consommation, édictées dans l'intérêt des personnes démarchées à domicile, est sanctionnée par une nullité relative, il n'est pas soutenu que les époux P... et X... J... auraient renoncé à se prévaloir de cette nullité.
En conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité de ce contrat.
Sur la nullité de l'acte authentique de vente
L'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction en vigueur à l'époque des faits, dispose :
- en son premier alinéa, que, pour tout acte ayant pour objet la construction ou l'acquisition d'un immeuble à usage d'habitation, la souscription de parts donnant vocation à l'attribution en jouissance ou en propriété d'immeubles d'habitation ou la vente d'immeubles à construire ou de location-accession à la propriété immobilière, l'acquéreur non professionnel peut se rétracter dans un délai de sept jours à compter du lendemain de la première présentation de la lettre lui notifiant l'acte
- en son deuxième alinéa, que cet acte est notifié à l'acquéreur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par tout autre moyen présentant des garanties équivalentes pour la détermination de la date de réception ou de remise et que la faculté de rétractation est exercée dans ces mêmes formes
- en son troisième alinéa, que, lorsque l'acte est conclu par l'intermédiaire d'un professionnel ayant reçu mandat pour prêter son concours à la vente, cet acte peut être remis directement au bénéficiaire du droit de rétractation et que, dans ce cas, le délai de rétractation court à compter du lendemain de la remise de l'acte, qui doit être attestée selon des modalités fixées par décret
- en son quatrième alinéa, que, lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est précédé d'un contrat préliminaire ou d'une promesse synallagmatique ou unilatérale, les dispositions figurant aux trois alinéas précédents ne s'appliquent qu'à ce contrat ou à cette promesse
- en son cinquième alinéa, que, lorsque le contrat constatant ou réalisant la convention est dressé en la forme authentique et n'est pas précédé d'un contrat préliminaire ou d'une promesse synallagmatique ou unilatérale, l'acquéreur non professionnel dispose d'un délai de réflexion de sept jours à compter de la notification ou de la remise du projet d'acte selon les mêmes modalités que celles prévues pour le délai de rétractation mentionné aux premier et troisième alinéas et qu'en aucun cas l'acte authentique ne peut être signé pendant ce délai de sept jours.
Si la nullité du contrat préliminaire prévu à l'article L261-15 du même code est, compte tenu du caractère facultatif et autonome de ce contrat, sans incidence sur la validité de l'acte authentique de vente, elle place les acquéreurs dans la situation visée au cinquième alinéa de l'article L271-1.
En outre, l'article R261-30 du même code oblige le réservant à notifier au réservataire le projet d'acte de vente un mois au moins avant la date de la signature de cet acte, mais cette formalité n'est pas prescrite à peine de nullité et l'acquéreur peut, après avoir signé un document comportant renonciation expresse à ce délai, valablement conclure la vente avant son expiration.
Enfin, l'article L261-11 du même code prévoit, en son avant-dernier alinéa, que le règlement de copropriété est remis à chaque acquéreur lors de la signature du contrat et doit lui être communiqué préalablement, toute clause contraire à cette disposition étant réputée non écrite par l'article L261-16.
En l'espèce, du fait de nullité du contrat de réservation du 26 mars 2011, les époux P... et X... J... bénéficiaient, en application du cinquième alinéa de l'article L271-1, d'un délai de réflexion incompressible de sept jours courant à compter du lendemain, soit de la première présentation de la lettre recommandée de notification du projet d'acte de vente, soit de la remise de ce projet par le notaire, sans que ce texte exige la communication simultanée du règlement de copropriété.
La procuration pour acquérir reçue devant notaire le 21 octobre 2011, par laquelle ils ont constitué comme mandataire tout clerc ou employé de la SCP T... K... G... Q... L... M... Z... R..., confère à ce mandataire pouvoir d''ACQUÉRIR [...] uniquement dès que le VENDEUR aura procédé à l'envoi' de diverses pièces dont le 'projet de l'acte de vente en état futur d'achèvement' et 'copie de l'état descriptif de division et règlement de copropriété' et, à cet effet, notamment, de 'DÉCLARER qu'il [le CONSTITUANT] ne désire pas user du bénéfice du délai d'un mois à compter du jour de la notification qui lui en sera faite ou qui lui a été faite pour signer l'acte authentique de vente conformément à l'article R261-30 du Code de la Construction et de l'Habitation, et vouloir signer ledit acte sans attendre l'expiration de ce délai', de 'RECONNAÎTRE aux termes de l'acte authentique de vente que le projet d'acte ainsi que le règlement de copropriété et l'état descriptif de division [...] ont été remis au MANDANT, préalablement à l'acte de vente', d''ATTESTER que conformément aux dispositions du Code de la Construction et de l'Habitation le CONSTITUANT a reçu dans le délai légal sous pli recommandé avec avis de réception savoir [...] un projet d'acte complet vente en état futur d'achèvement à son profit en ce compris [...] le règlement de copropriété état descriptif de division et qu'il en a pris parfaite connaissance' et de 'RECONNAÎTRE avoir pris connaissance des dispositions de l'article R261-30 du Code de la Construction et de l'Habitation prévoyant que le réservant doit notifier au réservataire le projet d'acte un mois au moins avant la date de signature de cet acte'.
Les époux P... et X... J... ont ainsi valablement renoncé au délai de réflexion d'un mois prévu par l'article R261-30.
Si cette procuration ne fait pas état d'une remise à ceux-ci du projet d'acte de vente, il ressort de la clause relative à la notification du projet de vente, figurant en page 10 de l'acte authentique de vente du 27 octobre 2011 et faisant foi jusqu'à inscription de faux de l'existence matérielle des faits que le notaire y a énoncés comme les ayant accomplis lui-même, que Me S... Q... leur a notifié ce projet de même qu'une copie de l'état descriptif de division et règlement de copropriété 'par pli recommandé avec demande d'avis de réception, le 19 octobre 2011", dont une copie est demeurée annexée à l'acte, et que les époux P... et X... J... ne peuvent soutenir le contraire.
Les appelants versent aux débats une copie de la première page, non signée, de ce pli recommandé de notification daté du 19 octobre 2011, ainsi que de l'accusé de réception n°1A [...] qui, à leurs dires, s'y rapporterait et qui est revêtu, sous la mention 'Présenté/Avisé le : 20/10/2011", de la signature non contestée de M. P... J....
Il s'en déduit que, quel que soit le mérite de la contestation des époux P... et X... J... sur le pli recommandé correspondant à cet accusé de réception dont le numéro d'envoi n'est pas reproduit sur le pli communiqué, le délai de réflexion de sept jours a couru, au plus tôt, à compter du 21 octobre 2011, lendemain de la première présentation du pli susvisé, et que ceux-ci n'ont pas bénéficié de l'intégralité de ce délai qui interdisait toute signature de l'acte authentique de vente avant le 28 octobre 2011.
L'acte authentique de vente du 27 octobre 2011 est donc irrégulier à cet égard.
Cependant, l'irrégularité a été couverte par les époux P... et X... J... qui, après avoir reçu du notaire une copie de l'acte de vente faisant référence expresse à la notification du 19 octobre 2011 dont ils contestent jusqu'à l'existence, ont acquitté le solde du prix de vente, pris possession du bien vendu le 31 janvier 2013 et donné celui-ci à bail le 21 juin 2013, exécutant ainsi volontairement leurs obligations d'acquéreurs sans jamais manifester alors une quelconque volonté de se rétracter, en toute connaissance de la violation de l'article L271-1 du code de la construction et de l'habitation intégralement reproduit au contrat de réservation.
Par conséquent, l'acte authentique de vente ne saurait être annulé pour non-respect des dispositions protectrices du code de la construction et de l'habitation.
Par ailleurs, l'article 1989 du code civil dispose que le mandataire ne peut rien faire au delà de ce qui est porté dans son mandat et l'article 1998 du même code dispose que le mandant est tenu d'exécuter les engagements contractés par le mandataire, conformément au pouvoir qui lui a été donné, mais n'est tenu de ce qui peut être fait au delà qu'autant qu'il l'a ratifié expressément ou tacitement.
L'acte de disposition accompli par un mandataire hors des limites de sa mission peut ainsi être anéanti par une action en nullité relative ouverte au seul mandant, sauf ratification par ce dernier.
En l'espèce, les époux P... et X... J..., qui ne justifient pas de la fausseté des énonciations de l'acte de vente sur la notification préalable du projet d'acte, de l'état descriptif de division et règlement de copropriété et des autres pièces à la réception desquelles était subordonnée la signature de cet acte dans la procuration pour acquérir du 21 octobre 2011 donnant pouvoir au mandataire de reconnaître avoir reçu ces pièces et de renoncer au délai de réflexion d'un mois de l'article R261-30, ne peuvent se plaindre d'un dépassement de pouvoir de leur mandataire à cet égard.
Quant au dépassement de pouvoir lié à la signature de l'acte de vente avant l'expiration du délai de réflexion de sept jours du cinquième alinéa de l'article L271-1, il a été ratifié tacitement mais sans équivoque par leur exécution volontaire de l'acte.
Enfin, le fait que l'ensemble immobilier dont dépend le lot de copropriété à acquérir soit désigné dans la procuration pour acquérir comme un 'ensemble immobilier en cours d'édification dénommé '[...]', destiné à être [...] exploité en Résidence service pour séniors' et dans l'acte authentique de vente comme un 'ensemble immobilier en cours d'édification dénommé '[...]', [...] plus particulièrement adapté pour les séniors', ne révèle, nonobstant la différence lexicale, aucune différence de nature de cet ensemble immobilier dont le règlement de copropriété du 25 octobre 2011 précise qu'il 'comprendra à son achèvement deux bâtiments à usage de logement pour personnes âgées et divers aménagements extérieurs', est destiné 'à l'usage principal de résidence services, plus particulièrement adaptée pour les séniors', et 'à accueillir plus spécifiquement et par priorité des occupants dont l'âge (seniors) requiert : - une offre de prestations spécifiques adaptée, à l'exclusion de tous soins et/ou assistance médicale, le tout dans le respect des articles 41-1 et suivants de la loi du 10 juillet 1965 modifiée - des services collectifs optimisant la sécurité, la tranquillité, le calme, la convivialité et le maintien du lien social' et que 'la destination de l'ensemble immobilier nécessite également l'existence d'un local à usage de services internes, dit 'Club House', destiné à assurer l'accueil, les rencontres nécessaires à la vie sociale et associative, un espace de détente et d'animation'.
Les résidences services seniors sont, en effet, des hébergements non médicalisés pour personnes autonomes, généralement âgées de plus de 60 ans, qui offrent à leurs résidents autonomie, sécurité et lien social au travers d'une gamme de services déclinée en prestations de base et services «à la carte» en fonction des besoins de chacun et comprenant, dans la plupart des formules, un service d'accueil avec une présence sept jours sur sept, un standard téléphonique, la fourniture du linge, le nettoyage des locaux, des animations et un accès à des espaces collectifs.
Dans leur premier courrier de demande d'annulation de la vente adressé le 18 octobre 2013 à la SAS ICA PATRIMOINE et à la SNC MANDILLET, les époux P... et X... J... ont, d'ailleurs, souligné que la destination de la résidence senior Eris apparaissait très clairement dans l'acte authentique indiquant que l'ensemble immobilier était plus particulièrement adapté pour les seniors, sans relever alors la moindre distorsion d'avec la procuration pour acquérir et les documents annexés au contrat de réservation.
Aucun dépassement de pouvoir ne peut donc être reproché au mandataire à cet égard.
Par conséquent, l'acte authentique de vente ne saurait être annulé pour défaut de pouvoir du mandataire.
Par ailleurs, l'article 1116 ancien du code civil dispose, en son premier alinéa, que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté et, en son deuxième alinéa, qu'il ne se présume pas et doit être prouvé.
Le dol au sens de ce texte peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve que l'auteur de cette réticence a eu l'intention de le tromper puisque le dol, supposant la conscience de la faute et la volonté de réaliser le dommage, ne se présume pas.
Le manquement à une obligation pré-contractuelle d'information, à le supposer établi, ne peut suffire à caractériser le dol par réticence, si ne s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci.
En l'espèce, la documentation établie par la SAS ICA PATRIMOINE et intégrée au contrat de réservation du 26 mars 2011 présente la [...] en ces termes :
'Labellisée BBC, cette Résidence Services Senior comprend 135 logements avec terrasse ou balcon. Espaces communs, services à la personne, gouvernant et régisseur composent l'offre de prestations destinée aux résidents. Ainsi espace extérieur traité avec soin, salon de détente, salle de bar, espace de remise en forme, espace informatique, laverie, manifestations ou encore ménage, repas, transport à la carte forment une palette complète de services qui animeront le quotidien des futurs occupants'
'Une résidence Scellier avec services pour les seniors !'
'Une présence humaine 24h/24, 7j/7
Un(e) gouvernant(e)
Un régisseur
Télé-assistance 24h/24"
'Un cadre sécurisé et serein
Télésurveillance
Vidéo-surveillance'
'Des services à la carte
Ménage - Blanchisserie
Repas à domicile
Courses et approvisionnement des résidents
Auxiliaires de vie (aide à domicile...)
Office services (courrier, fax, e-mail...)'
'Une animation personnalisée
Cinéma - Théâtre
Excursions - sorties culturelles
Fêtes
Ateliers créatifs'
'Des espaces de vie communs
Boulodrome - potager
Bar - salon de détente - TV
Espace remise en forme - Spa
Espace Internet - Salle d'ateliers'.
En outre, elle met l'accent sur la forte augmentation de la population senior et sur l'insuffisance de l'offre de logements adaptée aux souhaits de cette population dans l'agglomération toulousaine, avec deux résidences services seniors déjà en exploitation et trois en projet.
Contrairement à ce que soutiennent les époux P... et X... J..., la [...] ne leur a jamais été présentée comme destinée exclusivement à une clientèle senior, mais seulement comme offrant, en complément de l'hébergement, des services spécifiques non médicalisés permettant de répondre aux attentes et besoins d'une telle clientèle, et la divergence de formulation entre cette documentation et la procuration pour acquérir, d'une part, et l'acte authentique de vente et le règlement de copropriété, d'autre part, n'apparaît nullement essentielle.
Même s'il n'a manifestement pas été envisagé par les parties à l'époque du contrat de réservation comme de l'acte de vente que la résidence puisse être un jour occupée majoritairement par une clientèle plus jeune, la réticence dolosive reprochée à la SAS ICA PATRIMOINE et dont devrait répondre son mandant la SNC MANDILLET n'est pas démontrée.
Par conséquent, l'acte authentique de vente ne saurait être annulé pour dol.
Du tout, il résulte que les époux P... et X... J... ne peuvent qu'être déboutés de leur demande principale de nullité de la vente, le jugement dont appel étant infirmé.
Sur la résolution de la vente
La non-conformité de la chose vendue aux spécifications contractuelles constitue un manquement du vendeur à son obligation principale de délivrance et autorise l'acquéreur à demander la résolution de la vente sur le fondement de l'article 1610 du code civil.
Conformément à l'article 1605 du même code, l'obligation de délivrance du vendeur est, en matière d'immeubles, remplie lors de la remise des clefs du bâtiment ou du titre de propriété.
En l'espèce, le permis de construire N°[...] obtenu le 10 décembre 2009 visé au contrat de réservation correspond, comme exposé dans la clause y afférente de l'acte authentique de vente, au second modificatif du permis de construire initial délivré le 31 décembre 2007 en vue de l'édification d'un hôtel, transformé grâce à ce modificatif en résidence de tourisme, d'un restaurant, d'une résidence de tourisme et d'une résidence service pour le 3ème âge, suivi d'un troisième modificatif demandé le 20 juin 2011 en vue de l'adaptation de la résidence de service pour le 3ème âge aux normes BBC et «accessibilité handicapé» et de la suppression de l'ensemble du service de restauration.
Au 31 janvier 2013, date de livraison du bâtiment A et de remise des clés de l'appartement des époux P... et X... J..., la conformité au permis de construire de l'ensemble immobilier dont dépend le bien vendu n'était pas contestable et n'a, d'ailleurs, fait l'objet d'aucune contestation après dépôt en mairie le 31 décembre 2012 de la déclaration d'achèvement des travaux.
Le fait que, postérieurement, le gestionnaire, soucieux de hâter la location des logements encore disponibles, ce qui n'était plus le cas de l'appartement des époux P... et X... J... qui était loué depuis le 21 juin 2013, a informé les copropriétaires concernés que, tout en maintenant sa communication vers la cible des seniors, il proposerait désormais leurs logements, sauf avis contraire de leur part, à une clientèle plus jeune n'est pas de nature à caractériser un manquement de la SNC MANDILLET à son obligation de délivrance conforme.
Quant aux manquements allégués de la SAS ICA PATRIMOINE au devoir de conseil pesant sur elle en qualité de professionnel de l'investissement immobilier, auteur de la simulation financière et rédacteur du contrat de réservation, ils ne sauraient justifier la résolution du contrat de vente auquel elle n'est pas partie.
Par conséquent, les époux P... et X... J... seront déboutés de leur demande subsidiaire de résolution de la vente.
Sur les responsabilités
Compte tenu de ce qui précède, les fautes reprochées à Mme D... W..., dont, au demeurant, les époux P... et X... J... ne recherchent pas la responsabilité et la condamnation personnelles qui ne figurent pas parmi les prétentions énoncées au dispositif de leurs conclusions, sur lesquelles la cour doit exclusivement statuer en application de l'article 954 du code de procédure civile, à Me S... Q... à titre personnel ou en qualité d'employeur et à la SNC MANDILLET manquent en fait.
Seuls restent à examiner les manquements au devoir de conseil imputés à la SAS ICA PATRIMOINE.
Celle-ci, qui ne s'est pas contentée de transmettre aux candidats acquéreurs les données reçues de son mandant et a élaboré une «projection financière», à valeur de simulation non contractuelle, faisant apparaître, en fonction de leurs revenus et de leur situation, l'avantage fiscal et patrimonial sur dix ans de l'opération d'investissement et relatant les 25 garanties qui composent la «garantie ICA Platinium» conçue par elle, dont font partie les garanties «carence locative», «loyers impayés», «dégradations immobilières», «protection juridique», «vacance de locataire» et «différentiel de loyers» regroupées sous l'appellation garanties locatives, ne disconvient pas être tenue envers les époux P... et X... J... d'une véritable obligation d'information et de conseil, sauf à limiter celle-ci au seul investissement proposé, à ses caractéristiques et aux choix à effectuer par les candidats acquéreurs.
Certes, l'«attestation garanties locatives» insérée à cette projection financière, qui cite les éléments essentiels (durée, montant, base d'indemnisation, franchise, seuil d'intervention) de la proposition d'assurance que le réservataire demande à recevoir et devra retourner avec le mandat de gestion pour bénéficier des garanties locatives, ne dit mot des conditions de délivrance des garanties, énoncées dans le «résumé des garanties du contrat collectif LOCARIS» valant notice d'information, remise aux époux P... et X... J... lors de leur adhésion au contrat d'assurance souscrit par la SARL ELYADE auprès de la SA SÉRÉNIS ASSURANCES, à savoir que 'les garanties ne sont acquises que si le montant du loyer mensuel, charges comprises, ne représente pas plus de 40 % du revenu mensuel net permanent imposable en France'.
Toutefois, la projection financière prenant soin de rappeler que 'chaque garantie est octroyée par une compagnie d'assurance indépendante et soumise à des conditions d'applications particulières (cf. les conditions particulières et générales)', l'information due au stade de la signature du contrat de réservation ne saurait porter sur l'ensemble de ces conditions.
Elle n'avait pas davantage à porter sur les dispositions, censées être connues de tous, de la loi 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion dite loi MOLLE qui interdisent de cumuler un cautionnement et une assurance garantissant les obligations locatives du locataire, dispositions dont les époux P... et X... J... ont, au demeurant, été clairement informés par la SARL ELYADE le 20 février 2013 avant d'accepter la candidature de Mme Y... U... qui nécessitait le recours à un garant personne physique, sans avoir eu à pâtir de leur choix par la suite.
S'agissant de la rentabilité de l'investissement, la simulation comptable se présente sous forme d'un tableau sur dix ans dans lequel sont reportés chaque année, les montants de l'épargne mensuelle, du loyer annuel, du résultat 2044, du fiscal foncier de l'opération, du gain fiscal réinvesti, du remboursement du prêt, des charges diverses, du bilan annuel, de la trésorerie placée et du capital restant dû.
N'ayant pas valeur contractuelle, elle repose sur l'hypothèse d'un loyer de 525 euros par mois progressant de 2 % par an, d'une épargne mensuelle de 384 euros et d'une acquisition financée sans apport par un emprunt amortissable de 194 300 euros remboursable sur 20 ans au taux d'intérêt de 4,5 % l'an par mensualités de 1 313 euros augmentées des primes d'assurance ADI de 2,25 euros par tranche de 10 000 euros pour un couple marié avec un enfant disposant d'un revenu annuel de 61 300 euros avant investissement.
Il y est précisé que la trésorerie placée correspond à la différence entre les montants, au crédit, du fonds de roulement, du loyer annuel, du gain fiscal réinvesti et de l'épargne mensuelle et, au débit, du remboursement du prêt et des charges diverses, sans plus d'indications sur la nature des charges diverses qui, en toute logique, ne devraient pas intégrer les charges déductibles des revenus fonciers déjà prises en compte dans le résultat 2044 telles que les frais de gestion, charges de copropriété et taxes foncières.
La sous-évaluation des charges diverses alléguée par les époux P... et X... J... n'est donc pas démontrée.
Quant à la charge effective de remboursement du prêt, qui s'élève à 1 332,27 euros par mois, hors coût de l'assurance décès et PTIA extérieure au prêt souscrite par M. P... J...(41,69 euros par mois), elle bénéficie de la baisse du taux Euribor sur lequel est indexé le taux variable du prêt car, si cette baisse ne diminue pas le montant des échéances de remboursement, elle réduit la durée du prêt qui était initialement de 255 mois, périodes d'anticipation et de différé comprises.
La sous-évaluation de la charge de remboursement du prêt n'est donc pas manifeste pour une simulation à valeur de simple projection.
Dès lors, la SAS ICA PATRIMOINE n'apparaît pas avoir manqué à son devoir de conseil.
Par conséquent, les époux P... et X... J... seront déboutés de leurs demandes infiniment subsidiaires de dommages et intérêts.
Sur les demandes accessoires
Sauf circonstances particulières qu'il appartient au juge de spécifier, une action en justice ne peut constituer un abus de droit lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet ; de telles circonstances ne sont pas caractérisées en l'espèce, l'imputation de faux portée par les époux P... et X... J... contre Me S... Q... en dehors de tout incident d'inscription de faux au sens des articles 306 et suivants du code de procédure civile n'excédant pas les limites d'une défense légitime.
Parties perdantes, les époux P... et X... J... supporteront in solidum les entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi que, en application de l'article 700 1° du code de procédure civile, les frais non compris dans les dépens exposés par leurs adversaires dans les proportions indiquées au dispositif en considération de l'équité et de la situation respective des parties, sans pouvoir bénéficier du même texte.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions, excepté en ce qu'il a mis hors de cause Mme D... W....
Statuant à nouveau et y ajoutant,
PRONONCE la nullité du contrat de réservation du 26 mars 2011 pour non-respect des dispositions du code de la consommation relatives à la faculté de renonciation.
DIT n'y avoir lieu à annulation ni résolution de l'acte authentique de vente en date du 27 octobre 2011.
DÉBOUTE M. P... J... et son épouse Mme X... E... de toutes leurs demandes de dommages et intérêts.
DÉBOUTE Me S... Q... de sa demande de dommages et intérêts.
CONDAMNE in solidum M. P... J... et son épouse Mme X... E... à payer les sommes de 5 000 (cinq mille) euros à Me S... Q... et la SCP K... G... Q... L... M... Z... R... ensemble, de 5 000 (cinq mille) euros à la SAS ICA PATRIMOINE, de 5 000 (cinq mille) euros à la SNC MANDILLET et de 2 500 (deux mille cinq cents) euros à la SA BNP PARIBAS Personal Finance en application de l'article 700 1° du code de procédure civile.
Les DÉBOUTE de leur demande au même titre.
Les CONDAMNE in solidum aux entiers dépens de première instance et d'appel, à recouvrer directement par Me RIVES et la SCP MERCIE, avocats, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le greffier Le président
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