La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/09/2018 | FRANCE | N°15/02579

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4eme chambre section 1, 07 septembre 2018, 15/02579


07/09/2018





ARRÊT N°2018/501



N° RG 15/02579





Décision déférée du 30 Avril 2015 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE F14/00380

























Société MUTUELLE GENERALE DE L'EDUCATION NATIONALE





C/



Frédérique G...































































CONFIRMATION PARTIELLE







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT

***



APPELANTE



Société MUTUELLE GENERALE DE L'EDUCATION NATIONALE

[...]



représentée par Me Philippe X..., avoca...

07/09/2018

ARRÊT N°2018/501

N° RG 15/02579

Décision déférée du 30 Avril 2015 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de TOULOUSE F14/00380

Société MUTUELLE GENERALE DE L'EDUCATION NATIONALE

C/

Frédérique G...

CONFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEPT SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX HUIT

***

APPELANTE

Société MUTUELLE GENERALE DE L'EDUCATION NATIONALE

[...]

représentée par Me Philippe X..., avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

Madame Frédérique G...

[...]

[...]

représentée par Me Véronique Y... de la SCP CABINET SABATTE ET ASSOCIEES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Mai 2018, en audience publique, devant M. Z... et C. A... chargés d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

M. Z..., président

C. A..., conseiller

J.C. GARRIGUES, conseiller

Greffier, lors des débats : M. SOUIFA

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile

- signé par M. Z..., président, et par N.CATHALA, greffier de chambre.

FAITS - PROCÉDURE - PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 1er septembre 2007, Mme Frédérique G..., professeure des écoles, a contracté avec la Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale (MGEN) pour exercer les fonctions de déléguée, suivant des détachements qui vont se succéder à partir de 2007 et dont le demier est intervenu le 1er septembre 2011 pour une période à échéance au 30 août 2014. La MGEN mettra fin au détachement avec effet au 31 août 2012.

Mme G... a saisi la juridiction prud'homale le 11 fevrier 2014 pour contester la rupture du contrat, alleguer des faits de harcelement et demander diverses indemnités.

Le conseil de prud'hommes de Toulouse, section encadrement, par jugement du 30 avril 2015, a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la MGEN, s'est déclaré compétent, a reconnu l'existence d'un lien contractuel salarial et a consideré que le licenciement est intervenu sans cause reelle et sérieuse. En conséquence, il a condamné le MGEN à verser à Mme G... les sommes de :

- 35 000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse,

- 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux depens.

Il a débouté les parties du surplus de leurs demandes et a condamné le MGEN aux dépens de l'instance.

-:-:-:-

Le MGEN a interjeté appel le 29 mai 2015 de ce jugement qui lui avait été notifié le 22 mai 2015.

-:-:-:-

Par conclusions déposées le 4 mai 2018, reprises oralement à l'audience et auxquelles la cour se réfère expressement, la Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale (MGEN) demande à la cour de declarer l'appel recevable, d'infirmer le jugement, de se déclarer incompetent au profit du tribunal de grande instance de Toulouse en raison de la qualité de mandataire de Mme G..., et à défaut, de la débouter de l'ensemble de ses demandes et de la condamner à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux depens.

Le MGEN soutient que le contrat d'engagement sur des fonctions de délégué, c'est-a-dire de mandataire social, exclut tout lien de subordination consubstantiel au contrat de travail, sans contredire la prescription légale de l'article 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'État selon laquelle, dans sa situation specifique, le fonctionnaire detaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement à l'exception des articles L.1234-9, L.1243-1 à L.1243-4 et L.1243-6 du code du travail ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prevoyant le versement d'indemnités de licenciement ou de fin de carrière. Elle ajoute que la rupture anticipée du détachement est un droit prévu par l'article 24 du décret du 16 septembre 1985 pour chacune des trois parties concernées, sans contrainte de motifs ni même de préavis.

Elle ajoute que la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et le décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 permettent au fonctionnaire d'exercer pour une durée determinée au sein d'un organisme privé dans trois hypothèses : en position de détachement, de mise à disposition ou de mise en disponibilité qui prend la forme d'un arrêté pris par le ministre dont dépend l'administration d'origine à la suite d'une demande expresse de l'intéressée et de l'organisme privé voulant l'accueillir et que parallèlement, un contrat a été régularisé avec Mme G... ayant pour objet de fixer à l'interieur du cadre légal et réglementaire les modalités auxquelles le militant et la mutuellc souhaite se référer pendant la période de détachement.

La MGEN précise que Mme G... s'est vue confier le rôle de déléguée de section attribué aux militants permanents chargés de missions politiques et opérationnelles garantissant la réalisation des objectifs fixés par les instances nationales et départementales au service de la qualité et de l'efficacité de la mutuelle. Elle a ajouté qu'il a été mis fin au détachemnet suite à des difficultés importantes de positionnement et d'intégration de l'intéressée qui a réintégré son corps d'origine dès le 1er septembre 2012.

Subsidiairement, elle fait valoir que Mme G... tente d'invoquer la thèse d'un harcèlement qui n'est soutenu que par ses propres écrits et dont elle ne rapporte pas la preuve du préjudice qui en serait résulté, le retrait de mandat étant exclusif de toute faute dans la mesure où cette dernière a été réintégrée dans un poste dès le 1er septembre 2012.

Mme Frédérique G..., par conclusions déposées lc 25 avril 2018, reprises oralement à l'audience et auxquelles la cour se référe expressement, demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a retenu sa compétence et sur le licenciement sans cause réelle et serieuse, l'article 700 du code de procédure civile et les depens et de le reformer pour le surplus, en disant qu'elle a été victime de harcèlernent rendant le licenciement nul, que l'employeur n'a pas respecté son obligation de sécurité et de condamner le MGEN à lui payer les sommes de :

- 61 500 euros au titre de l'indemnité pour licenciement nul, à défaut sans cause,

- 49 200 euros au titre des dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité,

- 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux depens.

Mme G... fait valoir que, professeur des écoles en détachement auprès de la MGEN, elle a occupé la fonction de déléguée assurant les missions correspondantes sans avoir jamais fait l'objet d'aucun reproche et dont le dernier détachement sera interrompu par une lettre de fin de détachernent non motivée qui est la conséquence de la mise en cause du fonctionnement de la section departementale qui ne lui sera pas pardonnée par M. B..., président de ladite section, à la suite des contrôles effectués qui font apparaître des problèmes de pilotage de section.

Elle indique que la situation d'un fonctionnaire détaché est régie par la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 aux termes de laquelle, pendant la période de détachement, le fonctionnaire détaché est dans la situation d'un salarié de droit privé soumis, sous quelques réserves énumérées par le texte, à la législation du travail. Elle affirme démontrer surabondamment l'existence d'un lien de subordination en ajoutant que, lorsque la personne morale de droit privé demande à l'autorité administrative compétente de mettre fin au detachement, cette rupture s'analyse en un licenciement qui, en l'absence de motivation, est un licenciement sans cause reelle et serieuse, comme en l'espèce.

Elle ajoute qu'elle a été victime d'un processus de harcèlement moral dès le mois de mars 2011, Monsieur B... l'accusant d'être responsable de certains dysfonctionnements enregistrés au sein de la structure départementale qui sont liées à l'organisation de la structure, ce qui va profondement la destabiliser, conduire à son arrêt maladie et à la rupture de son contrat de détachement. Qu'ensuite, le VAE qu'elle a sollicité lui sera refusé sans véritable raison exprimée. S'ajoute encore le retrait de ses responsabilités par la proposition faite d'occuper désormais des fonctions totalement déqualifiées, à son retour de congé maladie et le refus d'une formation dont elle a sollicité le bénéfice. Enfin, à la suite de l'alerte qu'elle a envoyée à la fin du mois de septembre 2011, l'employeur ne prendra aucune mesure préventive pour mettre un terme à la dégradation de son état de santé.

Sur l'obligation de sécurité, elle fait valoir qu'elle est classée en invalidité et qu'elle devait donc à ce titre bénéficier d'un suivi régulier alors qu'elle n'a jamais vu le médecin du travail entre 2007 et 2011 date à laquelle elle le rencontrera à son initiative et sera victime d'un burnout au mois de décembre 2011 ainsi qu'elle en justifie, préjudice que la MGEN doit réparer.

Sur le prejudice, elle expose qu'outre la dégradation de son état de santé, lorsqu'elle a été réintégrée au sein de l'Éducation Nationale, elle a perçu une rémunération de 2 625 euros au lieu et place des 4100 euros que lui versait la MGEN et que depuis sa réintegration en 2012 et malgré sa spécialisation, elle n'obtient pas de poste correspondant à son profil, ce qui a eu pour effet de provoquer des difficultés financières au terme desquelles elle a dû renégocier un prêt immobilier, et obtenir un étalement de ses impôts.

MOTIVATION

- sur la compétence de la juridiction prud'homale :

Selon l'article 7 de la convention relative à la participation de fonctionnaires et agents relevant du MENESR au fonctionnement du groupe MGEN du 20 avril 2005 et intégralement repris dans la convention du 12 juillet 2011, 'les fonctionnaires du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sont détachés auprès du groupe MGEN pour exercer à temps plein des fonctions autres que celles d'administrateur, à savoir : directeur ou directeur adjoint d'établissement, président de section départementale et délégués nationaux, régionaux ou départementaux'.

L'article 45 al. 6 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa rédaction applicable au litige, 'Le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement, à l'exception des dispositions des articles L. 122-3-5, L. 122-3-8 et L. 122-9 du code du travail [aujourd'hui codifiés sous les articles L.1234-9, L.1243-1 à L.1243-4 et L.1243-6 du code du travail] ou de toute disposition législative, réglementaire ou conventionnelle prévoyant le versement d'indemnités de licenciement ou de fin de carrière'.

Le fonctionnaire ainsi détaché auprès d'un organisme de droit privé et qui accomplit un travail pour le compte de celui-ci dans un rapport de subordination se trouve lié à cet organisme par un contrat de travail.

En l'espèce, le contrat signé entre les intéressés mentionne en son article II que Mme G... sollicite son détachement auprès de la MGEN 'pour intégrer l'équipe des délégués de section Haute-Garonne et en assurer les missions à compter du 1/09/2007" étant précisé 'Son engagement militant, son adhésion aux valeurs que défend la Mgen, lui imposent le respect des dispositions du code des sections, des instructions et directives. Son engagement volontaire ainsi que sa disponibilité sont les éléments déterminants de sa relation avec la Mgen. Le Mgen peut mettre fin au détachement en cas de non respect de ces conditions'. L'article III précise pour sa part que 'l'engagement militant induit une entière disponibilité qui exclut une activité partagée. Une activité réduite ne peut être envisagée qu'à titre exceptionnel'.

Selon l'article IV de ce contrat, le délégué détaché perçoit 'un salaire indiciaire' établi en référence à l'indice Education Nationale, une indemnité de résidence, éventuellement le supplément familial, une indemnité de sujétion technique, une indemnité mutualiste brute et une indemnité de direction. Il est prévu à l'article VII une formation initiale et continue.

Les propres documents de la MGEN (guides, appels à candidature,...) décrivent le poste de délégué comme à la fois de militant et de responsable opérationnel. Il assure une présence permanente (à savoir un temps plein), pilote et encadre des projets, anime et coordonne des actions, représente la MGEN, communique et défend les positions de la Mutuelle, participe à la vie militante de la section et 'rend compte de l'exécution de ses missions'. Il est soumis à une formation probatoire d'une année (pièce 33 de l'intimée).

Parmi les pièces versées au dossier, il sera relevé que :

- le 9 décembre 2011, le président de la section 31 a décidé de retirer à Mme G... la responsabilité directe du développement et de la mutualisation en la réorientant sur deux autres activités 'optique (vérification du conventionnement/Calendrier à finaliser) et prévention',

- en novembre 2011, Mme G... remet à l'autorisation du président de section une candidature au dispositif d'accompagnement VAE la concernant qui lui a été refusée.

Il ressort de l'ensemble de ces constatations que Mme G... a effectué au profit de la MGEN une prestation de travail et a perçu de cette dernière, en contrepartie, une rémunération étant relevé qu'il résulte des pièces produites aux débats que sa prestation de travail s'est exercée sous la direction de la MGEN dans le cadre d'un lien de subordination nonobstant l'appellation utilisée dans le contrat. Par application des dispositions précitées, Mme G... s'est donc trouvée soumise aux règles de droit commun dans le cadre de ses relations contractuelles avec la MGEN, organisme de droit privé, peu important à cet égard que la salariée continuerait à bénéficier de ses droits à avancement et à retraite dans son corps d'origine et également d'une réintégration à l'issue du détachement.

Le conseil de prud'hommes est donc bien la juridiction compétente pour connaître des litiges nés de la rupture de la relation contractuelle étant précisé que lorsque la personne morale de droit privé demande à l'autorité administrative compétente de mettre fin au détachement, cette rupture s'analyse en un licenciement régi, à l'exception des articles L. 1243-6, L. 1243-1 et L. 1234-9, par les dispositions du code du travail, notamment les articles L. 1234-5, L. 1232-2 et suivants de ce code.

Il convient en conséquence de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré le conseil de prud'hommes de Toulouse compétent.

- sur la rupture de la relation contractuelle :

Il est constant que par courrier du 30 mai 2012, la MGEN a informé Mme G... que le bureau de la section de la Haute-Garonne avait décidé de mettre fin à ses fonctions en tant que déléguée et qu'une demande ayant été transmise en ce sens au bureau national, ce dernier avait confirmé cette proposition et qu'elle en a informé le ministère de l'Éducation Nationale pour procéder à la réintégration de celle-ci à compter du 1er septembre 2012.

S'agissant d'un contrat de travail ainsi qu'il vient de l'être reconnu pour fonder la compétence de la juridiction prud'homale, il ne saurait y avoir de dérogation au droit commun du licenciement en dehors des prévisions des textes légaux et réglementaires applicables.

En l'espèce, ce courrier est dépourvu de toute motivation et contrevient aux dispositions de l'article L. 1232-1 du code du travail faisant obligation à l'employeur d'énoncer les motifs dans la lettre de licenciement, justifiant ainsi que cette rupture reçoive les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La confirmation du jugement entrepris sera donc également accordée sur ce point, faisant ainsi droit à la demande expresse de l'intimée en ce sens qui sollicite ensuite de la cour d'y ajouter, en déclarant le licenciement nul en raison du harcèlement dont elle dit avoir été victime.

Selon l'article L. 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L. 1154-1, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

La salariée présente à la cour les éléments de faits suivants :

- la volonté de la direction de la section de l'évincer dès 2011 en raison du souhait du président de la section départementale de passer d'un mi-temps à un temps complet, impliquant le départ de l'un des cadres de la section départementale,

- la démarche concomitante de la rendre responsable de certains dysfonctionnements enregistrés au sein de la structure départementale,

- le refus, sans véritable raison exprimée, du bénéfice d'une VAE,

- le retrait des responsabilités qui étaient confiées jusque-là confiées en lui proposant d'occuper désormais des fonctions totalement déqualifiées,

- la dégradation consécutive de son état de santé soulignée par l'attestation d'une de ses anciennes collègues de travail, Sandra C..., directrice du centre de santé mentale qui témoigne l'avoir vue beaucoup pleurer, demander de l'aide au siège, être malmenée.

Il est constant que la fiche d'évaluation et de validation du stage de Mme G... en 2008, mentionne un 'potentiel pour travailler en équipe avec une vision réaliste des difficultés', des 'qualités relationnelles indéniables avec parfois un besoin de pondération', 'son dynamisme est un point fort' ayant conduit à un avis favorable à la confirmation de la collaboration de l'intéressée avec la mutuelle.

Il ressort des pièces produites qu'un certain nombre d'écrits (courriels, comptes rendus de bureau...) évoquent en 2011 et 2012 des difficultés de positionnement de Mme G... et de fonctionnement de l'équipe de direction exprimées par le président de la section 31, M. Marc B..., dans des termes généraux, jamais illustrés de faits précis :

- 'son positionnement par rapport aux salariés et à l'équipe de direction est parfois difficile. Son caractère fort et indépendant peut s'avérer incompatible avec un travail d'équipe et militant. Une régulation entre les différents membres de l'équipe de direction est indispensable pour que Frédérique puisse réellement appréhender ses fonctions' (notification d'une augmentation d'un demi point de la note de Mme G... le 5 janvier 2011),

- 'la situation au sein de l'Equipe de Direction s'est beaucoup dégradée et le climat de travail est très difficile. L'intégration de Frédérique G... (dernière déléguée recrutée) pose problème. J'avoue humblement que j'ai n'ai rien vu venir et que l'élément 'déclencheur' a été la visite de la CSACS en octobre/novembre 2010 (...) le problème est complexe et les solutions et la marge de manoeuvre réduites' (courriel de M.B... à Mme D..., l'invitant à en discuter avec elle de 'vive voix' le 24 mars 2011),

- après avoir évoqué que sa priorité était le 'dysfonctionnement de l'équipe de direction de la section', il est ajouté 'En attendant, je reviens sur mon cas. J'avais sollicité l'année passée une décharge complète et ce, en raison de mon implication grandissante dans le milieu mutualiste. J'avais compris que pour diverses raisons, cela n'avait pas été possible. J'espère que les choses pourront évoluer car, entre mes fonctions de Président de la section, secrétaire général de l'UT 31 (...) j'ai beaucoup de mal à mener correctement mes différentes missions' (courriel de M. B... à M. E... du 28 mars 2011).

Dans des termes toujours aussi mystérieux, M. F..., délégué national a écrit le 27 avril 2011 un courriel en indiquant 'Jocelyne D..., à la suite des entretiens qu'elle a menés auprès de votre équipe, suggère une étape complémentaire d'évaluation de votre problématique. Elle propose que nous fassions appel à un médiateur externe afin d'apprécier avec le maximum de justesse les différentes hypothèses susceptibles d'être appréhendées'.

Des échanges ultérieurs de courriels font apparaître une adhésion de Mme G... à ce 'processus d'accompagnement' et à l'intervention d'un consultant extérieur en évoquant le caractère 'particulièrement pénible' des dernières semaines en espérant un 'travail de définition de la place du délégué mutualisation au sein de l'équipe de direction' (courriel du 8 juin 2011)

Il est constant qu'un refus d'une candidature VAE a été refusée à la suite de l'avis défavorable de M. B... du 1er décembre 2011 ainsi motivée 'en raison du positionnement difficile de Frédérique au sein de la section et du questionnement sur la continuité de son implication dans la MGEN et que des responsabilité ont été officiellement retirées à Mme G... le 9 décembre 2011 en la réorientant vers des activités sans modification du contrat ni aucune motivation explicite et dont le libellé n'évoque pas de responsabilités équivalentes.

Il n'est pas discuté que Mme G... a adressé le 23 décembre 2011 un long exposé chronologique des faits et fait état d'un 'harcèlement permanent' en page 8 de ce document qu'elle a également envoyé le 28 décembre 2011 au président de la MGEN et à divers cadres nationaux.

Mme G... a été placée en congés maladie jusqu'en mars 2012 et, effectivement, Mme C..., directrice du centre de santé mentale, atteste 'l'avoir vue beaucoup pleurer, demander de l'aide au siège national qui n'a prêté aucune attention'.

Il résulte donc de l'ensemble de ces constatations la présentation de faits qui, pris dans leur ensemble, sont bien de nature à laisser présumer des agissements répétés ayant eu pour objet ou pour effet d'entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

La MGEN, dans ses développements subsidiaires, ne discute que le montant des dommages et intérêts réclamés et n'apporte strictement aucun élément pour justifier ces faits par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En conséquence, il convient de constater l'existence du harcèlement à l'endroit de Mme G..., colorant de nullité le licenciement intervenu hors des formes légales de sorte que le jugement entrepris devra être infirmé sur ce point.

Il sera constaté que Mme G... sollicite en phase d'appel la condamnation de la MGEN à des dommages et intérêts qui couvrent en une somme unique (61 500 euros) l'indemnisation du préjudice subi à la fois du chef de la rupture abusive et du harcèlement.

En contemplation de l'ensemble des éléments qui précèdent, la cour évalue à la somme de 40 000 euros l'entier préjudice subi par Mme G... en raison des circonstances de la rupture du contrat de travail.

- sur la demande présentée au titre du manquement à l'obligation de sécurité :

Mme G..., estimant qu'elle était classée en invalidité et qu'elle devait bénéficier d'un suivi régulier de sa situation de santé a soutenu n'avoir pas vu le médecin du travail entre 2007 et 2011.Elle demande d'une somme équivalente à 12 mois de rémunération, soit 49 200 euros.

Il sera relevé que si Mme G... a été suivie à la fin de l'année 2011 pour 'Burn out', elle avait pu consulter, fût-il à son initiative, le médecin du travail au mois de mai 2011 sans qu'aucun avis d'inaptitude ni réserve particulière n'ait été émis et qu'il puisse être déterminé l'existence d'un préjudice résultant par un lien de causalité démontré du défaut de visite médicale avant cette période.

Mme G... a donc été, à bon droit, déboutée de sa demande par les premiers juges dont la décision sera confirmée sur ce point.

- sur les demandes accessoires :

La MGEN, partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera tenue aux dépens d'appel.

Mme G... est en droit de réclamer l'indemnisation des frais non compris dans les dépens exposés à l'occasion de cette procédure. La MGEN sera condamnée à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 al. 1er 1° du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse du 30 avril 2015 en ce qu'il s'est déclaré compétent et admis l'absence de cause réelle et sérieuse de la rupture du contrat, débouté Mme G... de sa demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité et condamné la MGEN aux frais irrépétibles et aux dépens.

L'infirme pour le surplus.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

Juge que Mme Frédérique G... a été victime d'un harcèlement moral de nature à conférer à la rupture du contrat de travail avec la MGEN les conséquences d'un licenciement nul.

Condamne la Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale à payer à Mme Frédérique G... la somme de quarante mille euros (40 000 €) à titre de dommage et intérêts en réparation du préjudice causé par la rupture du contrat de travail.

Condamne la Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale aux dépens d'appel.

Condamne la Mutuelle Générale de l'Éducation Nationale à payer à Mme Frédérique G... la somme de trois mille euros (3 000 €) sur le fondement de l'article 700 al. 1er 1° du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. Z..., président et par N. CATHALA, greffière.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

N. CATHALA M. Z...


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4eme chambre section 1
Numéro d'arrêt : 15/02579
Date de la décision : 07/09/2018

Références :

Cour d'appel de Toulouse 41, arrêt n°15/02579 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-09-07;15.02579 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award