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04/06/2018 | FRANCE | N°16/01277

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 1ere chambre section 1, 04 juin 2018, 16/01277


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04/06/2018





ARRÊT N° 169





N°RG: 16/01277


CM/CD





Décision déférée du 19 Janvier 2016 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 13/02892


M. X...


























Julien Y...








C/





Jean Z...





Compagnie d'assurances CNP ASSURANCES





Compagnie d'assurances CNP IAM





SA CREDIT IMMOBILIE

R DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD)

























































































CONFIRMATION PARTIELLE











Grosse délivrée





le





à


REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


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COUR D'APPEL DE TOULOUSE


1ere Chambre Section 1


***


ARRÊT DU QU...

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04/06/2018

ARRÊT N° 169

N°RG: 16/01277

CM/CD

Décision déférée du 19 Janvier 2016 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 13/02892

M. X...

Julien Y...

C/

Jean Z...

Compagnie d'assurances CNP ASSURANCES

Compagnie d'assurances CNP IAM

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD)

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU QUATRE JUIN DEUX MILLE DIX HUIT

***

APPELANT

Monsieur Julien Y...

[...] (SUISSE)

Représenté par Me Nicolas A... de la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

Assisté par Me Gilda B..., avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur Jean Z... es qualité de mandataire ad hoc de la Société LES CANNELLES

[...]

[...]

Représenté par Me Francis C..., avocat au barreau de TOULOUSE

Assisté par Me Violaine D... de la SELARL COTEG & AZAM ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

Compagnie d'assurances CNP ASSURANCES

[...]

Représentée par Me Martine ESPARBIE-CATALA de la SCP D'AVOCATS CATALA-ESPARBIE-TRICOIRE , avocat au barreau de TOULOUSE

Compagnie d'assurances CNP IAM

[...]

Représentée par Me Martine ESPARBIE-CATALA de la SCP D'AVOCATS CATALA-ESPARBIE-TRICOIRE , avocat au barreau de TOULOUSE

INTERVENANT VOLONTAIRE

SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD) venant aux droits de CIFRAA

[...]

Représenté par Me Marie-pierre DE MASQUARD DE LAVAL de la SCP MTBA AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

Assisté par Me BOISSIER de la SCP BILLY BOISSIER BAUDON, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 12 Février 2018 en audience publique, devant la Cour composée de :

C. BELIERES, président

C. ROUGER, conseiller

C. MULLER, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : C. PREVOT

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BELIERES, président, et par M. TANGUY, greffier de chambre.

*******

EXPOSÉ DU LITIGE

En vertu de permis de construire délivrés, l'un le 31 octobre 2000 pour l'édification d'un centre de remise en forme et modifié à plusieurs reprises, l'autre le 11 septembre 2003 pour l'édification d'une résidence services, la SARL CAPITOLE PATRIMOINE du groupe HOME HOTEL a entrepris la réalisation au lieudit [...] (Haute-Garonne) d'un programme immobilier dénommé 'Résidence-Balnéo Les Trois Cannelles' comprenant cinq bâtiments, dont le bâtiment E à usage de balnéothérapie, avant de se voir étendre le 17 mai 2004 la procédure de redressement judiciaire ouverte le 27 octobre 2003 à l'égard de la SCI LES TERRASSES DE CHARLARY.

La SCCV LES CANNELLES, immatriculée au RCS de TOULOUSE le 9 décembre 2003 sous le numéro 451157085, a acquis le terrain, cadastré section [...] et [...] pour une contenance de 1ha33a21ca, de la SARL L'AMALBERT INVESTISSEMENT le 14 janvier 2004 et, le chantier ayant été déclaré ouvert depuis le 19 janvier 2004, elle a poursuivi la réalisation de l'ensemble immobilier qui a été soumis au régime de la copropriété selon règlement contenant état descriptif de division reçu en la forme authentique le 7 février 2004.

À la suite d'un démarchage téléphonique par un conseiller en patrimoine de la SARL P3 CONSULTANTS, M. Julien Y..., domicilié en Suisse, a réalisé un investissement locatif dans cette résidence ouvrant droit à défiscalisation dans le cadre du régime loueur en meublé non professionnel (LMNP), selon les modalités suivantes:

- suivant contrat de réservation préliminaire sous seing privé conclu le 22 juillet 2003 avec la SARL CAPITOLE PATRIMOINE et acte authentique de vente passé le 10 mars 2004 avec la SCCV LES CANNELLES devant Me Xavier G..., notaire associé à CARAMAN, il a acquis en l'état futur d'achèvement un appartement de type 2 avec terrasse situé au 1er étage du bâtiment B et une place de parking non couverte, constituant les lots n°37 et 120 de la copropriété, ce au prix de 117055 euros TTC, frais compris, sans avoir versé de dépôt de garantie

- selon offre préalable acceptée le 27 janvier 2004 et acte authentique de prêt reçu le 23 février 2004 par Me Denis H..., notaire associé à NICE, il a souscrit auprès de la SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE FINANCIERE RHÔNE-AIN (CIFFRA) un prêt 'INVESTIMMO 02 révisable' d'un montant de 118574 euros et d'une durée de 180 mois destiné à financer intégralement cette acquisition, remboursable in fine à taux d'intérêt révisable et garanti notamment par son adhésion au contrat d'assurance collectif conclu par le prêteur auprès des SA CNP ASSURANCES et CNP INVALIDITE ACCIDENT MALADIE (CNP IAM), par l'affectation hypothécaire du bien et par le nantissement d'un contrat d'assurance vie à capital variable HORIZONS souscrit auprès de la SA OPTIMUM VIE le 22 juillet 2003

- lors de la signature du contrat de réservation, il a donné le lot n° 37 à bail à titre commercial pour douze ans à la Société de gestion LES TROIS CANNELLES en cours de constitution représentée par M. Paul I..., également gérant de la SARL CAPITOLE PATRIMOINE, en vue d'y exercer une activité de prestations para-hôtelières incluant la sous-location meublée du logement, le nettoyage des locaux, la distribution de petits-déjeuners, la fourniture de linge de maison et l'accueil-gardiennage moyennant un loyer annuel de 6851 euros HT en déclarant opter pour l'assujettissement à la TVA.

Après achèvement des travaux des appartements, le bien a été livré à l'acquéreur le 27 avril 2005, mais le bâtiment de balnéothérapie n'a jamais été édifié.

La SARL VALGO RESIDENCES, à laquelle le droit au bail a été cédé le 21 mars 2007 à effet rétroactif du 27 octobre 2005 par le mandataire liquidateur de M. Paul I... a à son tour été placée en redressement judiciaire le 31 juillet 2008, son administrateur judiciaire a résilié le bail commercial le 26 septembre 2008 à effet du 31 octobre 2008, la résidence a été vidée de ses occupants fin 2008, puis transformée en résidence à usage d'habitation classique, mais le logement est resté vacant et, en l'absence d'activité para-hôtelière ouvrant droit à défiscalisation depuis cette date, M. Julien Y... s'est vu notifier le 12 juillet 2011 par l'administration fiscale une proposition de rectification portant sur la somme de 22702 euros, pénalités comprises, au titre du reversement d'une partie de la TVA sur le prix d'acquisition, qui lui avait été remboursée pour un montant de 19183 euros.

Entre-temps, la SCCV LES CANNELLES a été radiée du RCS le 16 décembre 2008 après clôture des opérations de liquidation consécutives à sa dissolution anticipée décidée à compter du 30 septembre 2008.

Parallèlement, la procédure de saisie immobilière du bien initiée par la SA CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE RHÔNE ALPES AUVERGNE (CIFRAA) s'est achevée par un jugement en date du 31 janvier 2013 constatant la caducité du commandement délivré le 27 février 2012 en vue de cette saisie.

Par actes d'huissiers en date des 18 juin et 6 juillet 2013, publiés au service de la publicité foncière de TOULOUSE le 24 mars 2014, volume 2014 P n°4015, M. Julien Y... a fait assigner M. Jean Z... en qualité de mandataire ad hoc de la SCCV LES CANNELLES, désigné à cette fin par ordonnance en date du 11 juin 2013, la SA CIFRAA, la SA CNP ASSURANCES et la SA CNP IAM devant le tribunal de grande instance de TOULOUSE en nullité de la vente et, subséquemment, nullité du prêt et résiliation de l'adhésion au contrat d'assurance pour dol et, à défaut, pour défaut de dépôt de garantie et, subsidiairement, en responsabilité du vendeur et réparation du préjudice subi.

Par jugement en date du 19 janvier 2016, le tribunal a dit que M. Jean Z... n'est pas assigné ni partie à l'instance à titre personnel, débouté M. Julien Y... de ses demandes, rejeté toutes les demandes indemnitaires formées à titre reconventionnel, déclaré le jugement commun au CREDIT IMMOBILIER DE FRANCE DEVELOPPEMENT (CIFD) venu aux droits de la SA CIFRAA et à la CNP, dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. Julien Y... aux dépens.

Pour statuer ainsi, il a considéré que l'action en nullité est atteinte par la prescription quinquennale, que l'action en responsabilité est également prescrite par application des règles de droit transitoire et, surabondamment, que la responsabilité contractuelle du vendeur n'est pas engagée.

Suivant déclaration en date du 10 mars 2016, M. Julien Y... a relevé appel général de ce jugement, avant de conclure le 8 juin 2016 dans le délai de trois mois imparti par l'article 908 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions (récapitulatives) notifiées par voie électronique les 15 et 24 janvier 2018, il demande à la cour, infirmant le jugement dont appel en ce qu'il l'a débouté de ses demandes, au visa des articles 1116, 1154, 2222 et 1382 du code civil et L261-15 du code de la construction et de l'habitation, de:

- à titre principal, dire et juger son action en nullité pour dol recevable, fixer le point de départ de cette action au 30 septembre 2008, dire et juger que son consentement a été surpris par dol et, en conséquence, prononcer la nullité de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004 et ordonner la publication de l'arrêt au service de la publicité foncière de TOULOUSE

- à titre subsidiaire, si la cour considère qu'aucun dol n'est caractérisé, dire et juger que le contrat de réservation contrevient aux dispositions impératives de l'article L261-15 du code de la construction et l'habitation en l'absence de paiement d'un dépôt de garantie et que sa demande est recevable et, en conséquence, prononcer la nullité du contrat de réservation et de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004

- dans l'un et l'autre cas, prononcer la nullité et, à tout le moins, la résolution de l'acte authentique de prêt conclu avec le CIFD venant aux droits du CIFRAA, ordonner la résiliation de ses adhésions au contrat d'assurance collectif souscrit auprès des sociétés CNP ASSURANCES et CNP IAM, dire et juger, en conséquence des nullités/résolutions prononcées, que les parties devront être remises en l'état, que le prix de vente d'un montant de 117055 euros devra lui être restitué par la SCCV LES CANNELLES prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean Z..., avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil, qu'il ne devra transférer à cette société la propriété du bien immobilier litigieux qu'après l'arrêt des sommes dues par celle-ci, qu'il devra restituer au CIFD les sommes mises à sa disposition, soit au total 118574 euros, que celui-ci devra lui restituer le montant du capital, des intérêts, frais et accessoires de toute nature acquittés par lui à la date de l'arrêt à intervenir et que la SCCV LES CANNELLES sera condamnée à les relever et garantir des restitutions précitées et dire et juger que l'annulation de la vente laisse subsister pour lui un préjudice qui sera réparé par la condamnation de la SCCV LES CANNELLES prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean Z... à lui payer, à titre de dommages et intérêts, les sommes de 2000 euros au titre des peines et soins et de 10000 euros au titre du préjudice moral, avec intérêts aux taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil

- à titre plus subsidiaire, si la cour considère qu'il n'y a pas lieu d'ordonner la nullité de la vente, dire et juger que des manquements fautifs l'ont privé de la perte de chance (sic) de n'avoir pas contracté l'opération litigieuse et sont aussi à l'origine d'un important préjudice moral et, en conséquence, condamner la SCCV LES CANNELLES prise à la personne de son administrateur ad hoc M. Jean Z... au paiement, à titre de dommages et intérêts, des sommes de 189800 euros en réparation de la perte de chance et de 15000 euros en réparation du préjudice moral, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du code civil

- en tout état de cause, condamner la SCCV LES CANNELLES prise en la personne de son administrateur ad hoc M. Jean Z... au paiement de la somme de 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, ordonner l'exécution provisoire sur les condamnations indemnitaires à intervenir, déclarer les intimés infondés en leurs appels incidents et les débouter de toutes leurs demandes.

Dans ses dernières conclusions (n°2 responsives et récapitulatives) notifiées par voie électronique le 29 septembre 2016, M. Jean Z... en qualité d'administrateur ad hoc de la SCCV LES CANNELLES demande à la cour, au visa des articles 122 du code de procédure civile, 1304 et 2248 du code civil et L261-15 du code de la construction et de l'habitation, de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, de déclarer prescrite l'action engagée par M. Julien Y... et, en toute hypothèse, de débouter celui-ci de ses demandes, notamment indemnitaires, de débouter le CIFD de ses demandes dirigées contre la SCCV LES CANNELLES et de condamner M. Julien Y... à lui verser la somme de 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions (récapitulatives avec intervention volontaire) notifiées par voie électronique le 13 juillet 2017, la SA CIFD venant aux droits de la SA CIFRAA par fusion absorption demande à la cour, au visa des articles 1109 et 1304 anciens (devenus 1130, 1144, 1147, 1152 et 2224) du code civil, de dire et juger recevable son intervention volontaire, de confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, notamment en ce qu'il a déclaré prescrite l'action en nullité du contrat de vente entraînant celle du contrat de prêt souscrits par M. Julien Y... et de condamner celui-ci au paiement de la somme de 16939,33 euros au titre des échéances impayées au 5 juillet 2017, sauf à parfaire au jour de l'audience, subsidiairement, en cas de nullité de la vente entraînant celle du prêt, de condamner in solidum M. Julien Y... et la SCCV LES CANNELLES prise en la personne de son administrateur ad hoc à lui payer la somme empruntée de 118574 euros, avec intérêts au taux légal depuis la mise à disposition des fonds ou, à défaut, depuis la signification des premières conclusions devant le tribunal en date du 26 novembre 2013 conformément à l'article 1153 ancien (devenu 1231-6) du code civil, mais sous déduction de l'ensemble des sommes payées au titre des intérêts et des frais du prêt in fine par M. Julien Y..., ce par compensation conformément aux articles 1289 ancien (devenu 1347) et suivants du code civil, de dire et juger que l'inscription de privilège de prêteur de deniers et d'hypothèque conventionnelle publiée à TOULOUSE le 16 avril 2004, volume 2004 V n°2123, sur les lots n°37 (appartement) et 120 (parking) continuera de produire ses effets jusqu'à complet remboursement des sommes susvisées et de condamner la partie qui succombera aux entiers dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 3000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 juillet 2016, la SA CNP ASSURANCES et la SA CNP IAM demandent à la cour, au visa de l'article 1134 du code civil, de constater qu'elles s'en rapportent quant au bien-fondé des demandes de M. Julien Y... et plus particulièrement de celles relatives à la résiliation de son adhésion au contrat d'assurance, de dire et juger qu'elles ont exécuté de bonne foi leurs obligations contractuelles et de condamner la partie succombante à leur payer la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 30 janvier 2018.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la nullité pour dol

En droit, l'article 1116 ancien (devenu 1137) du code civil dispose, en son alinéa 1er, que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté et, en son alinéa 2, qu'il ne se présume pas et doit être prouvé.

Conformément à l'article 1304 ancien du même code, l'action en nullité pour dol se prescrit par cinq ans à compter du jour où le dol a été découvert.

En l'espèce, le dol allégué a trait principalement à la non-réalisation de la balnéothérapie et accessoirement au contexte immobilier local.

Or, contrairement à ce qu'a considéré le premier juge, aucun élément ne démontre que M. Julien Y... ait pu avoir connaissance de ces difficultés avant la dissolution anticipée de la SCCV LES CANNELLES le 30 septembre 2008 et la résiliation du bail commercial le 26 du même mois dans le cadre du redressement judiciaire de la SARL VALGO RESIDENCES, une telle connaissance ne pouvant être déduite ni de l'acte authentique de vente du 10 mars 2004 qui ne fait pas état de la caducité du permis de construire n°3146200CC030 délivré le 31 décembre 2000 en vue d'édifier un centre de remise en forme, mais rappelle au contraire la modification de ce permis obtenue le 11 septembre 2003 sous le numéro 3146202CC031, la confirmation du permis de construire n°3146203CC010 délivré le 13 septembre 2003 en vue d'édifier une résidence services et le transfert de 'ce permis' au profit du vendeur le 28 janvier 2004, ni de la livraison de son appartement le 27 avril 2005, qui ne l'obligeait pas à émettre de réserve sur l'absence de réalisation des installations de balnéothérapie et ne laissait pas présager que celles-ci ne seraient pas réalisées dans un second temps, ni d'un avenant au bail commercial au profit de la SARL VALGO RESIDENCES, qu'il admet tout au plus avoir reçu en 2006 mais non avoir régularisé et qui n'est d'ailleurs pas versé aux débats, ni de l'acte du 21 mars 2007 emportant cession du droit au bail à cette société, qui ne laissait pas présager de la situation de vacance locative subie fin 2008 et ayant conduit les copropriétaires à décider en 2009 de transformer l'immeuble en résidence à usage d'habitation classique.

Dès lors, M. Julien Y... doit être jugé recevable en son action qui, engagée dès le 18 juin 2013, n'est pas atteinte par la prescription quinquennale, le jugement dont appel étant infirmé sur ce point.

Au fond, le dol peut être constitué par le silence d'une partie dissimulant à son cocontractant un fait qui, s'il avait été connu de lui, l'aurait empêché de contracter, à charge pour ce dernier de rapporter la preuve que l'auteur de cette réticence a eu l'intention de le tromper puisque le dol, supposant la conscience de la faute et la volonté de réaliser le dommage, ne se présume pas.

Certes, la SCCV LES CANNELLES, qui vient aux droits de la SARL CAPITOLE PATRIMOINE à laquelle elle s'est substituée en qualité de promoteur-vendeur dans tous ses droits et obligations, doit répondre du dol éventuellement commis par cette dernière au préjudice des acquéreurs.

En outre, dans la mesure où le bien vendu est présenté au contrat de réservation du 22 juillet 2003 produit par le prêteur comme situé dans la 'Résidence-Balnéo Les Trois Cannelles' et où l'acte authentique de vente en l'état futur d'achèvement du 23 février 2004 et le projet d'acte transmis à l'acquéreur en vue de la signature de la procuration pour acquérir du 7 février 2004 font l'un et l'autre état du 'bâtiment E désigné sur le plan Balnéothérapie', M. Julien Y... justifie suffisamment que la réalisation du complexe de balnéothérapie, constituant un indiscutable atout pour la résidence, a été un élément déterminant de son consentement, sans lequel il n'aurait pas procédé à l'investissement litigieux, quand bien même ce bâtiment E restait défini au règlement de copropriété de la résidence Les Trois Cannelles du 7 février 2004 comme un simple 'lot transitoire n°149', correspondant à 'un emplacement sur lequel pourra être édifié un bâtiment sur sous-sol, rez-de-chaussée et étage, sous réserve des autorisations administratives et des règlements en vigueur'.

Toutefois, il échoue à rapporter la preuve du dol qu'il allègue à ce titre dès lors que la SCCV LES CANNELLES a obtenu le transfert à son profit le 30 juillet 2004 du permis de construire n°3146202CC031 concernant le complexe de balnéothérapie et de son dernier modificatif n°3146203CC031 du 16 juillet 2004 relatif à l'implantation, l'aménagement intérieur et l'aspect extérieur du complexe, a affiché ce permis modifié sur le chantier comme constaté par huissier le 11 octobre 2004, a confié une étude géotechnique complémentaire à la SARL GFC en février 2005 et une mission de contrôle technique à la SA BUREAU VERITAS en janvier 2006 pour la construction du complexe et a participé en février 2006 à la recherche d'un exploitant pour le spa avec le maître d'oeuvre et les sociétés VALGO RESIDENCES, LES SOURCES D'EQUILIBRE et CONSEIL INVEST et justifie ainsi avoir, postérieurement à la vente, poursuivi sérieusement la réalisation du projet de balnéothérapie, ce qui exclut toute mensonge délibéré de sa part sur cette réalisation à laquelle elle a ensuite personnellement renoncé, ce au plus tard lors de sa dissolution anticipée.

Par ailleurs, l'unique extrait des chiffres clés publiés par l'INSEE en 2011 concernant l'évolution et la structure de la population ainsi que le logement à ROUFFIAC TOLOSAN n'est pas de nature à établir que le programme immobilier comprenant 59 appartements à usage d'habitation, 24 locaux potentiellement à usage professionnel ou commercial et 65 places de parking, outre le lot transitoire n°149, était d'emblée inadapté à l'état du marché locatif local, ni a fortiori que le vendeur aurait volontairement omis de le préciser aux acquéreurs.

M. Julien Y... ne peut donc qu'être débouté de sa demande d'annulation de la vente et, subséquemment, du prêt fondée sur le dol.

Sur la nullité pour absence de dépôt de garantie

En droit, en matière de ventes d'immeuble à construire, l'article L261-15 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, dispose que la vente peut être précédée d'un contrat préliminaire par lequel, en contrepartie d'un dépôt de garantie effectué à un compte spécial, le vendeur s'engage à réserver à un acheteur un immeuble ou une partie d'immeuble, que ce contrat doit comporter les indications essentielles relatives à la consistance de l'immeuble, à la qualité de la construction et aux délais d'exécution des travaux ainsi qu'à la consistance, à la situation et au prix du local réservé, que les fonds déposés en garantie sont indisponibles, incessibles et insaisissables jusqu'à la conclusion du contrat de vente et restitués, dans le délai de trois mois, au déposant si le contrat n'est pas conclu du fait du vendeur, si la condition suspensive prévue à l'article L312-16 du code de la consommation n'est pas réalisée ou si le contrat proposé fait apparaître une différence anormale par rapport aux prévisions du contrat préliminaire et que toute autre promesse d'achat ou de vente est nulle.

Conformément à l'article 1304 ancien du code civil, l'action en nullité pour inobservation des dispositions d'ordre public de protection du texte susvisé se prescrit par cinq ans à compter de l'acte entaché d'irrégularité.

En l'espèce, l'action engagée le 18 juin 2013, plus de cinq ans après la signature du contrat de réservation du 22 juillet 2003, est prescrite.

M. Julien Y... sera donc déclaré irrecevable en sa demande d'annulation tant du contrat de réservation que de la vente et, subséquemment, du prêt fondée sur l'absence de dépôt de garantie, le jugement dont appel étant réformé en ce qu'il a rejeté cette demande tout en retenant la prescription.

Sur la responsabilité du promoteur-vendeur

L'action en responsabilité intentée par l'acquéreur d'un bien immobilier contre son vendeur est soumise depuis le 19 juin 2008, date d'entrée en vigueur de la loi 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, à la nouvelle prescription quinquennale de droit commun prévue par l'actuel article 2224 du code civil, qui a réduit le délai de prescription antérieurement applicable, fixé à trente ans par l'ancien article 2262 du même code si l'on considère qu'il s'agit d'une action en responsabilité contractuelle comme l'a fait le premier juge et comme l'admet le mandataire ad hoc de la SCCV LES CANNELLES ou à dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation par l'ancien article 2270-1 du même code si l'on considère qu'il s'agit d'une action en responsabilité civile extra-contractuelle comme le laisse penser le visa de l'article 1382 ancien (devenu1240) du code civil au dispositif des conclusions de M. Julien Y... qui fait état de manquements du vendeur professionnel à ses obligations d'information et de conseil uniquement dans la phase pré-contractuelle, sans se prononcer sur la nature, contractuelle ou délictuelle, de la responsabilité encourue du fait de tels manquements.

Dans tous les cas, la prescription n'était pas acquise à la date de l'assignation introductive d'instance délivrée au mandataire ad hoc de la SCCV LES CANNELLES, non pas le 16 juillet 2003 comme indiqué par le premier juge, mais le 18 juin 2013, soit moins de cinq ans après l'entrée en vigueur de la loi susvisée et moins de dix ans après la signature du contrat de réservation préliminaire, de sorte que l'action de M. Julien Y... est recevable.

Au fond, l'article L111-1 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits, dispose que tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service.

En l'espèce, il n'est pas établi que la présentation, avant la vente, des lots réservés ait été inexacte en ce qu'elle faisait référence explicite à la construction d'un complexe de balnéothérapie et au moins implicite à la rentabilité de l'investissement dans le contexte immobilier local, même si ces prévisions ont été démenties par la suite avec la déconfiture du preneur exploitant la résidence services et l'abandon du projet de balnéothérapie par le promoteur-vendeur, de sorte que les manquements imputés à ces deux titres à la SCCV LES CANNELLES venue aux droits de la SARL CAPITOLE PATRIMOINE n'apparaissent pas caractérisés.

M. Julien Y... sera donc également débouté de sa demande de dommages et intérêts, le jugement dont appel confirmé sur ce point et simplement réformé en ce qu'il a retenu la prescription.

Sur la demande reconventionnelle en paiement des échéances du prêt

Bien qu'ayant été en mesure de le faire, M. Julien Y... n'a pas répondu dans ses dernières conclusions à cette demande reconventionnelle formulée en appel par la SA CIFD, dont la recevabilité n'est pas contestable au regard de l'article 567 du code de procédure civile.

Il ressort des pièces justificatives produites que le prêt immobilier in fine au taux d'intérêt initial de 4,20% l'an révisable a été transformé en prêt à taux d'intérêt fixe de 5,25% l'an sur les 150 mois restant à courir selon avenant en date du 19 octobre 2007 et qu'après avoir apuré l'arriéré antérieur pour lequel il avait fait l'objet en 2012 d'une procédure de saisie immobilière de ses lots de copropriété n°37 et 120 au sein de la résidence Les trois Cannelles, procédure à laquelle le prêteur a renoncé lors de l'audience tenue le 31 janvier 2013 devant le juge de l'exécution, M. Julien Y... a à nouveau cessé de régler les échéances du prêt s'élevant à 546,43 euros par mois en intérêts et assurance et reste devoir, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée par courrier recommandé en date du 5 juillet 2017, la somme de 16939,33 euros au titre de l'arriéré d'échéances impayées à cette date.

Il sera donc condamné à verser cette somme à la SA CIFD venant aux droits de la SA CIFRAA par fusion-absorption.

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement dont appel disant que M. Jean Z... n'est pas partie à l'instance à titre personnel, rejetant toutes demandes indemnitaires formées à titre reconventionnel et déclarant le jugement commun à la SA CIFD venue aux droits de la SA CIFRAA et aux SA CNP ASSURANCES et CNP IAM, indemnes de toute critique, seront confirmées.

Partie perdante, l'appelant supportera les entiers dépens de première instance et d'appel, sans qu'il apparaisse équitable de faire application à son encontre de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés par les intimés.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

CONFIRME le jugement entrepris excepté en ce qu'il a débouté M. Julien Y... de toutes ses demandes.

L'infirmant de ce chef et statuant à nouveau,

DÉCLARE M. Julien Y... irrecevable en sa demande de nullité pour absence de dépôt de garantie.

Le DÉCLARE recevable en ses demandes de nullité pour dol et de dommages et intérêts, mais l'en DÉBOUTE.

Y ajoutant,

CONDAMNE M. Julien Y... à payer à la SA CIFD la somme de 16939,33 euros (Seize mille neuf cent trente neuf euros et trente trois cents) au titre des échéances impayées du prêt au 5 juillet 2017.

Le CONDAMNE aux entiers dépens d'appel et DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 1ere chambre section 1
Numéro d'arrêt : 16/01277
Date de la décision : 04/06/2018

Références :

Cour d'appel de Toulouse 11, arrêt n°16/01277 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-04;16.01277 ?
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