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10/02/2010 | FRANCE | N°09/01371

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 2ème chambre section 1, 10 février 2010, 09/01371


10/02/2010





ARRÊT N° 66



N° RG: 09/01371

CB/AT



Décision déférée du 30 Janvier 2009 - Cour d'Appel de PARIS - 08/14943

Institut National de la Propriété Industrielle

















SAS COMPAGNIE HOTELIERE ET FERMIERE D'EUGENIE LES BAINS MICHEL GUERAR DITE CHEF-EMG

représentée par la SCP RIVES-PODESTA





C/



INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE

représenté par Mme [Z] [B] munie d'un pouvoir spécial

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SAS SCAN IMPORT

non comparante



































































Grosse délivrée



le



à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Ch...

10/02/2010

ARRÊT N° 66

N° RG: 09/01371

CB/AT

Décision déférée du 30 Janvier 2009 - Cour d'Appel de PARIS - 08/14943

Institut National de la Propriété Industrielle

SAS COMPAGNIE HOTELIERE ET FERMIERE D'EUGENIE LES BAINS MICHEL GUERAR DITE CHEF-EMG

représentée par la SCP RIVES-PODESTA

C/

INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE

représenté par Mme [Z] [B] munie d'un pouvoir spécial

SAS SCAN IMPORT

non comparante

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Chambre Section 1

***

ARRÊT DU DIX FEVRIER DEUX MILLE DIX

***

DEMANDERESSE(S) AU RECOURS

SAS COMPAGNIE HOTELIERE ET FERMIERE D'EUGENIE LES BAINS MICHEL GUERARD DITE CHEF-EMG

[Adresse 6]

[Localité 2]

représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour

assistée de la SELARL CABINET CHRISTIAN TOURRET, avocats au barreau de PARIS

DEFENDEUR(S) AU RECOURS

INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INDUSTRIELLE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté par Mme [Z] [B] munie d'un pouvoir spécial

APPELEE EN CAUSE

SAS SCAN IMPORT

[Adresse 3]

[Localité 5]

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Décembre 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. BELIERES, conseiller, et V. SALMERON, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M.F. ALBERT, président

C. BELIERES, conseiller

V. SALMERON, conseiller

Greffier, lors des débats : A. THOMAS

MINISTERE PUBLIC :

Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée.

ARRET :

- réputé contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par C. BELIERES, conseiller, pour le président empêché, et par A. THOMAS, greffier de chambre.

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE

Le 10 décembre 2007 la SAS SCAN IMPORT a déposé auprès de l'Institut National de la Propriété Intellectuelle (INPI) la demande d'enregistrement n° 07 3 542 857 portant sur le signe verbal LA CUISINE DU JARDIN dans les classes 29, 30, 31 présentée comme destiné à distinguer divers produits alimentaires et agricoles.

Le 17 mars 2008 la SAS Compagnie Hôtelière et Fermière d'Eugénie les Bains Michel GUERARD (C.H.E.F.- E.M.G) a formé opposition à l'enregistrement de cette marque en invoquant comme antériorité la marque verbale CUISINE DE JARDIN déposée le 12 mai 1999 en classe 3, 5,16,18, 20, 21, 22, 24, 25, 29, 30, 31, 32, 33, 35, 38, 40, 41 et 42 et enregistrée sous le numéro 99 793 951 pour les produits suivants

classe 29 : Viande, poisson, volaille et gibier, extraits de viande, fruits et légumes conservés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes, oeufs, lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles

classe 30 : Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; farines et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie, glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse, levure, poudre pour faire lever ; sel, moutarde, vinaigre, sauces (condiments), épices ; glace à rafraîchir.

classe 31 : Produits agricoles, horticoles et forestiers ni préparés, ni transformés ; graines (semences) ; fruits et légumes frais, semences, plantes et fleurs naturelles, malt

Classe 33 : Bières, eaux minérales et gazeuses et autres boissons non alcooliques ; boissons de fruits et jus de fruits ; sirops et autres préparations pour faire des boissons. Boissons alcooliques (à l'exception des bières)

Classe 42 : Restauration (alimentation).

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 mars 2008 la SAS SCAN IMPORT a été invitée à présenter ses observations et y a procédé le 9 avril 2008 en demandant en application des articles L 714-5 et R 712-17 du code de la propriété intellectuelle (CPI) que la SAS C.H.E.F.- E.M.G produise les pièces propres à établir que la déchéance de ses droits pour défaut d'exploitation de la marque invoquée à l'appui de l'opposition n'était pas encourue.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 14 avril 2008 l'INPI a invité l'opposante à produire ces pièces dans le délai d'un mois et celle-ci a communiqué différents documents le 13 mai 2008.

Par décision du 23 mai 2008 le directeur de l'INPI a clôturé l'opposition au visa de l'article R 712-18-1° du CPI aux motifs que 'les documents produits non datés ou datés de février 2000, 15 octobre 2001 et juillet 2002 n'étaient pas propres à établir que la déchéance des droits de la société opposante pour défaut d'exploitation de sa marque n'est pas encourue de sorte qu'elle n'a pas satisfait à l'obligation qui lui est faite par l'article R 712-17 du code de la propriété intellectuelle'.

Par acte d'avoué du 23 juin 2008 la SAS C.H.E.F -.E.M.G a formé devant la cour d'appel de Paris un recours contre cette décision.

Par arrêt du 30 janvier 2009 cette juridiction s'est déclarée territorialement incompétente pour statuer au profit de la cour d'appel de Toulouse.

Les parties ont été convoquées par les soins du greffe de la cour de renvoi à l'audience du 18 juin 2009 puis après renvoi à celle du 2 décembre 2009.

MOYENS DES PARTIES

La SAS C.H.E.F.-E.M.G demande dans ses conclusions du 30 novembre 2009 de 29 pages auxquelles il convient de se reporter pour plus de précisions

A titre principal,

- relever la compétence de la Cour de Justice des Communautés Européennes pour apprécier la portée de l'article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales (CEDH)

En conséquence,

- Poser les questions préjudicielles suivantes à cette juridiction

1ère question

L'article 6 de la CEDH implique-t-il pour les normes que sont la Loi et le Règlement National de prévoir une procédure auprès de l'organe administratif chargé de prendre des décisions à l'occasion de la délivrance, du rejet ou du maintien des titres de propriété industrielle, en ce compris dans le cadre de l'opposition à l'enregistrement d'un signe contesté par le propriétaire d'une marque première, lors de la prise de décision de clôture de l'opposition, respectant ses dispositions, notamment au regard du principe du contradictoire et de l'égalité des armes'

2ème question

Dans l'affirmative à la 1ère question, la réglementation issue des articles L 411-1, L 411-4, R 712-16 à R 712-18 et R 718-1 du CPI est-elle conforme aux exigences issues des dispositions de l'article 6'1 de la CEDH pour sa mise en oeuvre par l'INPI à savoir 'établissement public doté de la personnalité civile et de l'autonomie financière, placé auprès du ministre chargé de la propriété intellectuelle' dont la mission est de prendre 'les décisions prévues par le présent code à l'occasion de la délivrance, du rejet ou du maintien des titres de propriété industrielle' dans le cadre de l'opposition à l'enregistrement d'un signe contesté par le propriétaire d'une marque première, lors de la prise de décision de clôture de l'opposition, notamment au regard du principe du contradictoire et de l'égalité des armes entre les parties''

3ème question

Dans l'affirmative à la 2ème question, les dispositions de l'article 6'1 de la CEDH impliquent-elles pour l'INPI dont le statut et la mission sont définis ci-dessus, l'obligation pour cet organe administratif de respecter une procédure contradictoire à l'égard des deux parties et l'obligation de rendre un projet de décision soumis contradictoirement aux parties tels que définis à l'article R 712-16 du CPI en toutes circonstances, c'est-à-dire même en cas de choix de décision de clôture de la procédure d'opposition à enregistrement d'un signe estimé comme concurrent par l'Opposant dont l'usage sérieux et continu de la marque première fondant l'opposition est contesté par le titulaire de la demande d'enregistrement du signe contesté, afin qu'il assure un maintien de l'égalité des armes et non une rupture du principe d'équité dans cette procédure'

Et ce faisant,

- surseoir à statuer jusqu'à la décision de la Cour de Justice des Communautés Européennes sur ces questions.

A titre subsidiaire,

Si la cour retient sa compétence pour apprécier la portée de l'article 6-1 de la CEDH

- juger que le Directeur de l'INPI viole les dispositions de cet article lorsqu'il prend immédiatement une décision de clôture de la procédure d'opposition prévue à l'article R 712-18 du CPI à l'occasion de laquelle, en application de l'article R 712-17 il a été sollicité par le titulaire de la demande d'enregistrement contestée, des preuves d'usage de la marque première fondant l'opposition à l'enregistrement du signe contesté démontrant que sa déchéance n'est pas encourue

* sans prendre en compte les explications fournies par l'Opposante relatives à la signification de la date apposée sur les documents versés aux débats pour la fourniture de ladite preuve d'usage de la marque fondant l'opposition

* sans rendre un projet de décision ayant pour objet la clôture de la procédure, projet de décision pourtant prévu dans le déroulement de la procédure d'instruction de l'opposition définie à l'article R 712-16 alinéa 1er 2° afin de permettre à l'Opposante de contester, le cas échéant, ce projet de décision et de fournir des éléments de preuve d'usage complémentaire de la marque fondant l'opposition dans les délais réglementairement prévus à l'article R 178-1 du code de la propriété intellectuelle

* sans même porter préalablement à la connaissance de l'Opposante sur le sens qu'il est susceptible de retenir à propos du caractère pertinent ou non de la date apposée sur les documents, conformément au principe du contradictoire expressément visé à l'alinéa 2 de l'article R 712-16 du CPI régissant la procédure d'opposition qui lie également le directeur de l'INPI autant que les parties à la procédure d'opposition

Et alors que la portée du recours devant la cour d'appel tel que régi par les articles L 411-4 et R 411-19 à R 411-26 du CPI sur la décision prise par le directeur de l'INPI et plus particulièrement lorsqu'il s'agit d'une décision de clôture de l'opposition ne comporte aucun effet dévolutif au profit de la cour d'appel qui ne dispose d'aucun pouvoir de réformation de la décision de l'INPI et ne permet pas davantage à la partie contestant cette décision de pouvoir produire des pièce complémentaires au soutien de son recours devant la cour d'appel.

A titre infiniment subsidiaire, dans le cadre de la procédure d'opposition de l'espèce

- juger de la violation par le directeur de l'INPI des dispositions de l'article R 712-17 du CPI résultant de l'ajout d'une condition non exigée par la loi et le règlement

- juger de l'application abusive par le directeur de l'INPI des dispositions de l'article R 712-18 1° du CPI en raison d'une appréciation erronée de la portée de la date figurant sur les pièces produites par l'Opposante qu'il ne lui appartenait pas de dénaturer compte tenu des explications fournies par elle.

- juger de la violation par le directeur de l'INPI des dispositions de l'article R 712-16

* 1er aliéna 2° du CPI en ce qu'aucune décision de projet de clôture n'est intervenu en amont de celle-ci

* dernier alinéa en ce qu'il n'a pas respecté le principe du contradictoire à l'égard de l'Opposante

En tout état de cause

- relever que l'article R 718-1 du CPI dispose de la possibilité d'étendre à 4 mois le délai visé par l'article R 712-17 du même code pour permettre à l'opposant de produire des pièces au soutien de la preuve d'usage de la marque fondant l'opposition dans les cinq dernières années

- relever que l'opportunité tirée de l'imitation manifeste de la marque première CUISINE DE JARDIN par le signe contesté LA CUISINE DU JARDIN commande que l'examen au fond du bien fondé de l'opposition soit effectué par l'INPI dans des conditions où l'Opposant pourra bénéficier d'un délai suffisant pour collecter les éléments de preuve de l'usage de la marque fondant l'opposition

- déclarer irrecevable le mémoire déposé par la SAS SCAN IMPORT auprès de la cour d'appel et se refuser par voie de conséquence d'en prendre connaissance dans le cadre de la présente instance

Et par conséquent, qu'il s'agisse de la demande formulée à titre subsidiaire ou à titre infiniment subsidiaire,

- annuler la décision de clôture de l'opposition n° 08-993 du 23 mai 2008.

Et ce faisant, conformément à la demande subsidiaire de l'INPI,

- renvoyer l'instruction de l'opposition devant l'INPI et ordonner la poursuite du débat contradictoire devant l'INPI afin que soit reprise la procédure d'opposition au fond sur la base des pièces complémentaires qui pourront être produites dans un nouveau délai fixé par l'INPI dans le respect des conditions fixées au dernier aliéna de l'article R 712-17 et R 718-1 du CPI.

- condamner solidairement l'INPI et la SAS SCAN IMPORT à la somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- laisser le sentiers dépens solidairement à la charge de l'INPI et de la SAS SCAN IMPORT.

Elle fait valoir que l'INPI a indûment clôturé la procédure et estime qu'il appartient à la cour de justice des communautés européennes de préciser la portée de l'article 6-1 de la CEDH à l'égard des textes du CPI relatifs à la procédure d'opposition et à sa mise en oeuvre dans la présente cause, ce qui justifie que la cour d'appel pose plusieurs questions préjudicielles distinctes à ce sujet.

Elle estime que l'appréciation par le directeur de l'INPI de la pertinence de la date des pièces produites est erronée et abusive car elle a été effectuée d'une part sans prendre en compte les observations fournies expliquant l'absence de date d'usage sur les couvertures de menus ou les menus eux-mêmes reproduisant la marque par la nécessité de les réutiliser à plusieurs reprises non seulement au cours d'une même saison mais également au cours des années successives de sorte que la date figurant sur ces documents correspond à leur date d'édition et donc au point de départ de l'usage et d'autre part sans lui permettre de compléter les pièces initialement fournies à l'issue du sens de l'analyse de la date retenue pour appliquer immédiatement les dispositions de l'article R 712-18 du CPI et clôturer la procédure d'opposition sans lui avoir préalablement notifié un projet de décision et donc sans respecter le principe du contradictoire prévu à l'article R 712-16 du CPI et en la privant de la possibilité de faire examiner au fond son droit d'opposition.

Elle fait valoir que les produits désignés sous la demande d'enregistrement sont soit identiques, soit similaires ou complémentaires avec les services désignés sous la marque antérieure et que l'impression d'ensemble entre les signes en cause est identique, les deux éléments distinctifs 'CUISINE' et 'JARDIN' étant reproduits de façon similaire et séparés par une préposition à la consonance très proche, DE dans la marque antérieure et DU dans la demande d'enregistrement, de sorte que le risque de confusion est manifeste pour un consommateur de produits alimentaires ou de préparation culinaire d'attention moyenne.

La SAS SCAN IMPORT a présenté des observations écrites en date du 15 mai 2009 et du 19 novembre 2009 signées de son président mais n'était ni présente ni représentée à chacune des audiences où elle a été régulièrement convoquée, de sorte que la procédure étant orale celles-ci ne peuvent suppléer le défaut de comparution de cette partie et être prises en considération.

L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIETE INTELLECTUELLE (INPI) demande le rejet du recours.

Il fait valoir que les articles R 712-18 et R 712-17 du CPI, qui disposent que la procédure d'opposition est clôturée lorsque l'opposant n'a fourni dans le délai imparti aucune pièce propre à établir que la déchéance de ses droits n'est pas encourue, confèrent à son directeur le pouvoir de vérifier que ces pièces sont de nature à attester d'une exploitation de la marque antérieure au cours des 5 années précédant la demande de preuve d'usage et doit donc s'assurer qu'elles comportent une date pertinente, ce qui ne constitue pas une exigence supplémentaire.

Il indique que la SAS C.H.E.F.- E.M.G lui a communiqué des menus et des couvertures de menus sur lesquels les seules dates qui apparaissent relèvent des années 2000, 2001 et 2002, soit plus de cinq ans auparavant, qu'aucune de ces pièces n'atteste de la période d'usage de la marque et en aucun cas d'une exploitation écartant la déchéance, une date antérieure à la période considérée ne pouvant laisser présumer que l'exploitation s'est poursuivie.

Il estime que cette société n'a pas satisfait à son obligation de sorte que l'article R 712-18 s'applique et que la procédure d'opposition doit être clôturée.

Il soutient que les dernières pièces versées aux débats devant la cour d'appel ne peuvent être prises en considération, s'agissant d'un recours en annulation régi par les articles R 411-19 et suivants du CPI et non d 'un recours en réformation régi par les articles 563 et 564 du code de procédure civile.

Il prétend que les moyens tirés de la prétendue violation de l'article 6-1 de la CEDH et du principe du contradictoire doivent être déclarés irrecevables au regard des dispositions de l'article R 411-21 du CPI dernier alinéa qui impose d'exposer c'est-à-dire d'annoncer et d'expliciter les moyens du recours dans la déclaration elle-même ou dans un mémoire transmis dans le délai d'un mois alors que la déclaration de recours est du 23 juin 2008 et que le mémoire initial déposé le 22 juillet 2009 n'y faisait aucunement référence.

Il ajoute qu'en toute hypothèse, ces moyens sont dépourvus de toute pertinence puisque l'article R 712-8 du CPI dispose que l'article R 712-6 relatif à l'élaboration d'un projet de décision ne s'applique pas lorsque la procédure d'opposition fait l'objet d'une clôture, que cette procédure élaborée dans un souci de rapidité ne prévoit pas la possibilité pour l'opposant de fournir de nouvelles pièces hors du délai initialement imparti qui était en l'espèce d'un mois et donc parfaitement conforme à l'article R 718-1 du CPI qui prévoit qu'il ne peut être inférieur à un mois ni supérieur à 4 mois, étant rappelé que sa décision doit intervenir dans le délai de 6 mois suivant l'expiration du délai imparti aux tiers pour former opposition.

Il rappelle que ses décisions n'étant pas des actes de nature juridictionnelle mais des actes administratifs ne sont pas soumis aux exigences de la CEDH, qu'en toute hypothèse la procédure prévue par le CPI scrupuleusement respectée en l'espèce n'est pas contraire à la CEDH, que les questions préjudicielles proposées ne sont pas sérieuses dès lors qu'une telle procédure n'existe pas devant la Cour Européenne des droits de l'homme

Il fait remarquer que la SAS C.H.E.F.- E.M.G qui s'est de son propre fait privée de la possibilité de voir son opposition examinée au fond ne se trouve pas démunie de moyens si elle estime que l'enregistrement du signe contesté lui porte atteinte puisqu'elle dispose toujours de la faculté d'engager les procédures adéquates devant les juridictions de l'ordre judiciaire compétentes.

Subsidiairement, il fait valoir que les arguments de la SAS C.H.E.F.- E.M.G tendant à la comparaison de produits et de signes sont inopérants dès lors que l'opposition n'a pas à être examinée au fond, que si par extraordinaire la cour annulait la décision déférée elle ne pourrait que renvoyer les parties devant lui afin qu'il reprenne la procédure et apprécie le bien fondé de l'opposition mais ne pourrait se substituer à lui pour se prononcer sur des éléments qu'il n'a pas examinés, s'agissant d'un recours en annulation.

Il précise qu'il ne peut être condamné aux dépens, n'étant pas partie à la procédure.

Le MINISTERE PUBLIC à qui l'affaire a été communiqué le 24 avril 2009 a apposé son visa.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la procédure

Le recours exercé contre une décision du directeur de l'INPI statuant dans le cadre d'une opposition à l'enregistrement présente la particularité de soumettre une décision administrative à l'appréciation d'une juridiction judiciaire et a pour objet le contrôle de sa légalité à l'occasion de la délivrance, du rejet ou du maintien des titres de propriété intellectuelle.

Il s'agit d'un recours en annulation et non en réformation qui ne peut tendre qu'à l'annulation de la décision ou au rejet du recours.

Elle est par la-même soumise à un régime procédural spécifique prévu aux article R 411-19 à R 411-26 du CPI et notamment à l'article R 411-21 qui impose au demandeur au recours, à peine d'irrecevabilité, de faire figurer dans sa déclaration les moyens invoqués ou bien de les déposer au greffe dans le délai d'un mois.

La déclaration de recours déposée le 23 juin 2008 par la SAS C.H.E.F.- E.M.G ne contenait aucun moyen ; ceux-ci ont été exposés dans un mémoire déposé au greffe le 22 juillet 2008 soit dans le délai légal.

Mais sa lecture révèle que ces moyens concernaient exclusivement d'une part la clôture de la procédure d'opposition en raison de l'analyse faite par l'INPI des pièces produites au soutient de la preuve de l'usage continu de la marque CUISINE DE JARDIN et d'autre part la comparaison des produits et/ou services et des signes conduisant à un risque de confusion dans l'esprit du public entre la marque française antérieure CUISINE DE JARDIN et le signe LA CUISINE DU JARDIN.

Aucune critique n'a été émise sur la régularité de la procédure suivie par l'INPI ni au regard des exigences de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni de la procédure d'opposition telle que régie par les articles R 712-16, R 712-17 et R 712-18 du CPI.

Les moyens tirés l'article 6-1 de la CEDH, de la juridiction compétente pour apprécier la portée de ce texte figurant pour la première fois dans les conclusions de la SAS C.H.E.F.- E.M.G en date du 17 juin 2009, repris et complétés dans celles du 30 novembre 2009 et les moyens tirés de la conformité des articles R 712-16, R 712-17 et R 712-18 du CPI au regard de ce texte ainsi que, subsidiairement, de la violation de ces règles nationales lors de leur mise en oeuvre par l'INPI dans le cadre de l'opposition litigieuse figurant pour la première fois dans ses conclusions en date du 14 et du 17 novembre 2008 repris et complétés dans celles du 17 juin 2009 et 30 novembre 2009, doivent donc être déclarés irrecevables.

*

De même, aucun effet dévolutif n'étant attaché à ce recours, les éléments produits devant la cour d'appel qui n'auraient pas été soumis à l'INPI doivent être écartés des débats.

Il en va ainsi des pièces numérotées 9-1, 9-2, 11-1 à 11-4, 12-1 et 12-2 communiqués pour la première fois devant la cour d'appel de Toulouse.

Sur le sort du recours

Aux termes de l'article R 712-17 du CPI, dans le cadre de ses premières observations en réponse le titulaire de la marque contestée peut inviter l'opposant titulaire d'une marque enregistrée depuis plus de 5 ans à produire des pièces propres à établir qu'il n'encourt pas la déchéance de ses droits pour défaut d'exploitation ; les pièces produites par l'opposant doivent établir l'exploitation de la marque antérieure au cours des cinq dernières années précédant la demande de preuve d'usage pour au moins l'un des produits ou services sur lesquels l'opposition est formée ou faire état de justes motifs de non exploitation ; à défaut de justification dans le délai imparti en application de l'article R 718-1 du CPI, l'INPI est tenue de clôturer la procédure conformément à l'article R 712-18 -1° du CPI.

Le délai imparti à la SAS C.H.E.F.- E.M.G par l'INPI était d'un mois, comme prévu à l'article R 718-1 du CPI à compter de l'invitation qui lui a été faite par lettre du 11 avril 2008 reçue le 14 avril 2008.

Des pièces ont été communiquées le 13 mai 2008 soit dans le délai légal, numérotées 1 à 8-3 qui sont pour l'essentiel constituées de couvertures de menus ou de menus reproduisant la marque CUISINE DE JARDIN.

Elles sont, de toute évidence, dépourvues de pertinence.

Elle sont, en effet, insuceptibles d'établir que la déchéance n'est pas encourue puisqu'elles ne sont pas datées ou bien portent des dates (d'édition semble-t-il), de février 2000, octobre 2001 ou juillet 2002 et donc largement antérieures à l'époque à prendre en considération soit d'avril 2003 à avril 2008.

Elle sont impropres, en elles-mêmes et à elles seules, à attester d'un usage commercial de cette marque durant cette dernière période.

Elles ne peuvent en raison du caractère impératif du délai imparti être complétées postérieurement à son expiration par de nouveaux documents, inopérants, en droit, à pallier la carence initiale de l'opposant.

Si le directeur de l'INPI n'a pas à se faire juge de la déchéance, rôle réservé au tribunal de grande instance, il a néanmoins reçu mission d'examiner les documents qui lui ont été remis pour vérifier la réalité de l'exploitation sur la durée considérée.

Face au défaut manifeste de portée des pièces produites, il a, à bon droit, clôturé la procédure d'opposition, sans aucunement dépasser ses pouvoirs.

Le recours exercé par la SAS C.H.E.F.- E.M.G doit être rejeté.

Cette société doit donc supporter les dépens et être déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Déclare irrecevables les moyens soulevés par la SAS Compagnie Hôtelière et Fermière d'Eugénie les Bains Michel GUERARD postérieurement au 23 juillet 2008.

- Ecarte des débats les pièces numérotées 9-1, 9-2, 11-1 à 11-4, 12-1 et 12-2 communiquées devant la cour d'appel.

- Rejette le recours formé par la SAS Compagnie Hôtelière et Fermière d'Eugénie les Bains Michel GUERARD.

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

- Condamne la SAS Compagnie Hôtelière et Fermière d'Eugénie les Bains Michel GUERARD aux dépens.

Le greffierP/Le président empêché

(Art.456 CPC)

.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 2ème chambre section 1
Numéro d'arrêt : 09/01371
Date de la décision : 10/02/2010

Références :

Cour d'appel de Toulouse 21, arrêt n°09/01371 : Autres décisions constatant le dessaisissement en mettant fin à l'instance et à l'action


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2010-02-10;09.01371 ?
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