GB / JD
DOSSIER N 08/01246
ARRÊT DU 17 DECEMBRE 2008
3ème CHAMBRE,
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre,
N 1220 / 08
Prononcé publiquement le MERCREDI 17 DECEMBRE 2008, par Monsieur SUQUET, Président de la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,
Sur appel d'un jugement du T.G.I. DE TOULOUSE - 5EME CHAMBRE du 04 SEPTEMBRE 2008.
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats, du délibéré
Président:Monsieur SUQUET,
Conseillers:Monsieur LAMANT
Monsieur BASTIER
GREFFIER :
Madame DUBREUCQ, Greffier, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.
MINISTÈRE PUBLIC :
Monsieur SILVESTRE, Substitut Général, aux débats et au prononcé de l'arrêt.
PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :
Z... Ludovic
né le 29 Novembre 1984 à CASTRES (81)
de Roland et de A... Marie-Hélène
de nationalité francaise, célibataire
Operateur
demeurant
actuellement détenu pour autre cause à la Maison d'arrêt de
MONTAUBAN
Prévenu, appelant, comparant
Assisté de Maître CHEBBANI Karim, avocat au barreau de TOULOUSE
LE MINISTÈRE PUBLIC :
appelant,
B...
C...
Demeurant ...
Partie civile, non appelant, comparant, assisté de Maître CHAZEAU Marie-Victoire, avocat au barreau de TOULOUSE
VEOLIA EAUX - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX
...
Partie civile, non appelante, non comparante,
RAPPEL DE LA PROCÉDURE :
LE JUGEMENT :
Z... Ludovic a été cité devant le Tribunal correctionnel des chefs de :
VOL, entre 25 mars et le 27/05/2008, à Toulouse, infraction prévue par les articles 311-1, 311-3 du Code pénal et réprimée par les articles 311-3, 311-14 1 ,2 ,3 ,4 ,6 du Code pénal
ESCROQUERIE, entre 25 mars et le 27/05/2008, à Toulouse, Saix, Puylaurens,, Argelès sur Mer, infraction prévue par l'article 313-1 AL.1,AL.2 du Code pénal et réprimée par les articles 313-1 AL.2, 313-7, 313-8 du Code pénal
INJURE PUBLIQUE ENVERS UN PARTICULIER EN RAISON DE SA RACE, DE SA RELIGION OU DE SON ORIGINE, PAR PAROLE, IMAGE, ECRIT OU MOYEN DE COMMUNICATION PAR VOIE ELECTRONIQUE, le 19/05/2008, à Toulouse, infraction prévue par les articles 33 AL.3,AL.2, 23 AL.1, 29 AL.2, 42 de la Loi DU 29/07/1881 et réprimée par les articles 33 AL.3, 33 1 de la Loi DU 29/07/1881
Le Tribunal, par jugement en date du 04 septembre 2008 :
- a disqualifié et requalifié le délit d'injure publique en injure non publique en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race ou la religion,
- a condamné Z... Ludovic à : 4 mois d'emprisonnement avec sursis, 500 € d'amende.
SUR L'ACTION CIVILE : a alloué à :
- BOUARGOUB C..., 2500 € à titre de dommages intérêts, 500 € au titre de l'article 475-1 du CPP
- VEOLIA EAUX - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX, 1990 € à titre de dommages intérêts
LES APPELS :
Appel a été interjeté par :
Monsieur Z... Ludovic, le 11 Septembre 2008 contre Monsieur BOUARGOUB C..., VEOLIA EAUX - COMPAGNIE GENERALE DES EAUX
M. le Procureur de la République, le 11 Septembre 2008 contre Monsieur Z... Ludovic
DÉROULEMENT DES DÉBATS :
A l'audience publique du 26 Novembre 2008, le Président a constaté l'identité du prévenu ;
In limine litis, Me CHEBBANI soulève des exceptions de nullité de procédure, les parties ayant été entendues et le Ministère Public ayant requis sur ce point, la Cour a joint l'incident au fond.
Puis, ont été entendus :
Monsieur BASTIER en son rapport ;
L'appelant a sommairement indiqué à la Cour les motifs de son appel ;
Z... Ludovic en ses interrogatoire et moyens de défense ;
Maître CHAZEAU Avocat de la partie civile, en ses conclusions oralement développées;
Monsieur SILVESTRE, Substitut Général en ses réquisitions ;
Maître CHEBBANI, avocat de Z... Ludovic, en ses conclusions oralement développées ;
Z... Ludovic a eu la parole en dernier ;
Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 17 DECEMBRE 2008.
DÉCISION :
Ludovic Z... a relevé appel le 11/09/2008 du jugement contradictoire rendu le 04/11/2008, par le tribunal correctionnel de Toulouse, qui l'a déclaré coupable de vol, escroquerie, injure non publique en raison de l'origine de la victime, par moyen électronique, et, en répression, l'a condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis et à payer une amende de : 500 euros ainsi que des dommages et intérêts à la partie civile.
Monsieur le procureur de la république a relevé appel le même jour.
L'appel est général.
Les citations ont été délivrées aux personnes des parties civiles, la société VEOLIA a demandé la confirmation du jugement par lettre.
La partie civile C... BOUAGOUB a souligné la passivité de l'encadrement de la société vis à vis des injures ou propos racistes fréquents du prévenu avant de rappeler les faits, en soulignant que son grand père avait servi la France pendant la seconde guerre mondiale et qu'il était lui même de nationalité française.
Monsieur l'avocat général a requis l'application de la loi ; la citation ne lui parait pas nulle dans la mesure où la personne poursuivie, malgré le visa inutile de l'article 23, est informée de ce qui lui est reproché. Il convient de confirmer sur les premières infractions.
L'appelant et son conseil demandent la relaxe sur l'injure en raison de la nullité de la citation, pour les motifs développés dans les conclusions. Le message envoyé était de très mauvais goût, mais il n'y a jamais eu de plainte contre Ludovic Z... avant ce fait unique.
MOTIFS DE LA DÉCISION,
Les appels sont recevables pour avoir été faits dans les formes et délais requis par la loi.
Le tribunal ne pouvait pas ainsi qu'il l'a jugé disqualifier une infraction avant d'examiner les conclusions de nullité selon lesquelles le tribunal n'était pas saisi correctement.
Le prévenu reconnaît avoir envoyé par message écrit sur son téléphone mobile un message plus ou moins humoristique, qu'il aurait lui même reçu, mais qui se terminait par les mots "(ça m'a coûté treize centimes,) avec cet argent j'aurais pu nourrir un arabe en Irak, fais comme moi, fais passer ce SMS et laisse crever un bougnoule" ;
Cet envoi est qualifié dans les poursuites " d'avoir, sans avoir été provoqué, adressé publiquement, à monsieur Missoum B..., particulier, par...moyen de communication au public par voie électronique, des propos outrageants, un terme de mépris ou une invective ne remportant l'imputation d'aucun fait..."
Avec visa des articles 33 . 23 . 29 . 42 . 93-3 de la loi du 20/07/1881. Ainsi que le relève le prévenu dans ses conclusions le visa de l'article 23 alinéa un est inapproprié en l'espèce puisqu'il vise la provocation, suivi d'effet, à un crime ou à un délit, ce dont il n'est pas question dans cette procédure. Sont visés aussi l'article 29 alinéa 2 puis l'article 33 alinéas 2 et 3 qui visent l'injure publique à caractère racial.
Alors qu'en l'espèce il s'agit d'un message envoyé sur son récepteur personnel à une personne précise, et choisie ; le caractère d'injure publique visé dans les poursuites n'est donc pas constitué. Il pourrait s'agir d'injure non publique. En choisissant la partie civile, d'origine maghrébine, comme destinataire de ce message, l'auteur de l'envoi recherchait un effet injurieux personnel, méprisant un groupe ethnique, auquel appartient la personne destinataire du message, par ses origines familiales, jugées dans ce message de très peu de valeur et ne méritant pas de vivre.
Si la citation n'est pas correcte, elle n'est pas pour autant nulle car Ludovic Z... a été mis en mesure de connaître le fait qui lui était reproché, et ainsi de préparer sa défense.
En matière de délit de presse la requalification et la disqualification sont prohibées, sauf comme en l'espèce lorsque la juridiction constate que la publicité n'est pas constituée. Les éléments constitutifs de l'infraction étant constitués, il convient de déclarer Ludovic Z... coupable de la contravention d'injure non publique, commise envers une personne, en raison de son origine, ou de son appartenance à une ethnie, ou une nation, fait prévu et puni par l'article R 624-4 du code pénal.
Les faits commis au préjudice de la société VEOLIA sont bien établis par les constatations des enquêteurs et les relevés de compte d'usage des cartes volées, et reconnus par le prévenu, il a subtilisé des cartes magnétiques de paiement de carburant dans deux véhicules de la société où il travaillait et a revendu à ses connaissances le carburant qu'il obtenait frauduleusement par l'usage de ces cartes.
Sur la peine, vu 132-24 du code pénal, la cour considérant que le prévenu actuellement détenu pour autre cause, en attente de jugement, n'avait jamais été condamné avant cette affaire, confirme la condamnation prononcée.
Sur le plan de l'action civile, le tribunal a justement considéré que les faits reprochés au prévenu avaient causé un préjudice aux parties civiles, et il a correctement apprécié ces préjudices et les réparations qui devaient être accordées, il y a lieu de confirmer les dispositions civiles du jugement.
Au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale, il reviendra en outre une indemnité de 500 euros à la partie civile C... BOUAGOUB qui a dû exposer de nouveaux frais pour se défendre en appel.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant contradictoirement à l'égard de B...
C..., par arrêt à signifier au prévenu Z... Ludovic (détenu pour autre cause non extrait pour le prononcé de l'arrêt), par défaut envers la partie civile VEOLIA S.A.en dernier ressort, après en avoir délibéré conformément à la loi,
En la forme, reçoit les appels,
Au fond :
SUR L'ACTION PUBLIQUE
- confirme le jugement en ses dispositions sur la déclaration de culpabilité, pour les délits, le déclare en outre coupable de la contravention d'injure non publique en raison de l'appartenance de la victime à une nation ou une ethnie,
- confirme les peines prononcées contre le prévenu,
* dit qu'il sera sursis à l'exécution de la peine d'emprisonnement dans les conditions de l'article 132-29 du code pénal
Le Président n'a pu donner au condamné l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code Pénal en raison de son absence à l'audience de lecture de l'arrêt.
La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 EUROS dont chaque condamné est redevable ;
SUR L'ACTION CIVILE
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Condamne Z... Ludovic à payer une indemnité de 500 euros à la partie civile C... BOUAGOUB au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale;
Le tout par application des dispositions du code pénal, articles visés à la prévention, et des articles 512 et suivants du code de procédure pénale.
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier.
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,