07 / 11 / 2008
ARRÊT No
No RG : 08 / 01182
PC / HH
Décision déférée du 27 Décembre 2007 de PARIS
Henri X...
C /
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
***
ARRÊT DU SEPT NOVEMBRE DEUX MILLE HUIT
***
DEMANDEUR AU RECOURS
Monsieur Henri X...
...
81150 LAGRAVE
représenté par la SCP TESSONNIERE ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS
DEFENDEUR AU RECOURS
FONDS D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE
Tour Galliéni II
Avenue du général de Gaulle
93175 BAGNOLET CEDEX
représentée par Me Erwan DINETY, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 23 Octobre 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
P. de CHARETTE, président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
-signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.
OBJET DU LITIGE
M. X..., chez lequel le diagnostic de plaques pleurales a été posé en décembre 2002, alors qu'il était âgé de 55 ans, a vu reconnaître le caractère professionnel de cette pathologie, avec un taux d'IPP de 5 %, en fonction duquel la CPAM lui a versé une indemnité en capital de 1 652, 73 €.
Le tribunal de sécurité sociale a ultérieurement reconnu la faute inexcusable de l'employeur de M. X..., lequel a obtenu la majoration de son indemnité en capital, soit la somme complémentaire de 1 652, 73 €, ainsi que des dommages-intérêts au titre des souffrances endurées et du préjudice d'agrément.
Le FIVA, saisi d'une demande d'indemnisation des préjudices subis du fait de la pathologie liée à l'amiante, a formulé une offre d'indemnité au titre du préjudice patrimonial, calculée sur le pourcentage d'incapacité de 5 %, pour un montant de 8 358, 86 €, dont il a déduit les deux sommes versées par la CPAM, soit 3 305, 46 €, pour parvenir à une offre de 5 053, 40 €.
L'offre en date du 27 décembre 2007 a énoncé qu'aucune indemnisation ne pouvait être proposée au titre de la réparation des préjudices extra patrimoniaux, dès lors que M. X...avait bénéficié d'une indemnisation de ces préjudices dans le cadre du jugement reconnaissant la faute inexcusable de l'employeur.
M. X...a régulièrement contesté l'offre ainsi formulée. Il discute en premier lieu le montant du point d'incapacité ayant servi au calcul de l'indemnité, en demandant que soit retenu le système de la linéarité, autrement dénommé proportionnalité, dans le cadre duquel le point d'incapacité est celui correspondant à une incapacité de 100 %, multiplié par le taux d'incapacité reconnu en l'espèce, pour parvenir à un montant de 16 723, 56 €.
Dans ses dernières écritures, il demande au surplus que l'indemnité allouée par la CPAM ne soit pas déduite de cette somme. Il se fonde sur les termes d'un avis de la Cour de cassation en date du 6 octobre 2008 qui considère que le FIVA est tenu de faire application des dispositions des articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, dans leur rédaction de la loi du 21 décembre 2006. Il soutient que l'indemnité offerte par le FIVA répare l'atteinte à l'intégrité corporelle d'une personne et indemnise donc un chef de préjudice personnel et considère, au vu des principes posés par la Cour de cassation, que le FIVA, qui ne rapporte pas la preuve que la CPAM a également indemnisé un poste de préjudice personnel, ne peut opérer la déduction de la somme versée par celle-ci.
Le FIVA soutient, sur le calcul de l'indemnité, qu'il est fondé à utiliser une méthode proportionnelle le conduisant à un montant du point plus élevé pour les taux importants d'incapacité.
Il considère d'autre part que, n'étant pas un organisme social subrogé dans les droits d'une victime et n'exerçant pas de recours contre un tiers responsable, il ne peut être concerné par les dispositions de la loi du 21 décembre 2006 qui ne portent que sur les modalités de ces recours subrogatoires.
Il fait valoir en toute hypothèse que l'indemnité versée par lui, tout comme l'indemnisation versée par la Sécurité sociale après un accident du travail, réparent le préjudice professionnel mais également le déficit fonctionnel et que dès lors il a déduit à juste titre l'indemnité versée par l'organisme social.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le calcul de l'indemnité
Dans sa proposition d'indemnisation, le FIVA a calculé de façon justifiée le montant de l'indemnité sur la base d'un barème posant le principe d'une progression de la valeur du point en fonction de l'importance du taux de l'incapacité subie par la victime. Cette façon de procéder doit en effet être approuvée, dès lors que les conséquences des pathologies malignes sont hors de proportion avec celles inhérentes aux pathologies bénignes.
Dans ces conditions, le recours de M. X...portant sur le calcul de l'indemnité proposée est sans fondement.
La déduction des sommes versées par la CPAM
Le FIVA n'est pas fondé à soutenir que les dispositions introduites par la loi du 21 décembre 2006 sur les modalités des recours subrogatoires exercés par les organismes sociaux à l'encontre des tiers responsables ne seraient pas applicables aux offres d'indemnisation formulées par lui.
En effet, l'article 53 IV de la loi du 23 décembre 2000 régissant les modalités de son intervention énonce que dans l'offre d'indemnisation, le Fonds « indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, ainsi que le montant des indemnités qui lui reviennent compte tenu des prestations énumérées à l'article 29 de la loi no 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et des indemnités de toutes natures reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice ».
L'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 énumère les prestations versées à la victime d'un dommage résultant des atteintes à sa personne qui ouvrent droit à un recours contre la personne tenue à réparation. Le dispositif des recours contre les tiers responsables fait donc explicitement partie des modalités d'intervention du FIVA, pour ce qui concerne les prestations susceptibles d'être déduites de l'indemnité proposée.
Les alinéas 1 et 3 de l'article 31 du même texte font sur ce point partie intégrante de ce dispositif applicable aux indemnités versées par le FIVA.
Dans sa rédaction issue de la loi no 2006-1640 du 21 décembre 2006, l'alinéa premier dispose : « Les recours subrogatoires des tiers payeurs s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel ».
L'alinéa 3 est ainsi rédigé : « Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice ».
Il ressort de la combinaison de ces textes avec celui de l'article 53 IV de la loi du 23 décembre 2000 que le FIVA est tenu de faire à la victime une offre pour chaque chef de préjudice, en déduisant poste par poste les prestations énumérées par l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985, dans les conditions prévues aux alinéas 1 et 3 de l'article 31 de ce texte. Le FIVA ne peut donc déduire d'une indemnité versée par lui réparant un poste de préjudice personnel une prestation versée par un organisme de sécurité sociale que s'il établit que celle-ci indemnise de manière incontestable un poste de préjudice personnel.
Il convient donc, pour apprécier le bien-fondé de la déduction de l'indemnité versée par l'organisme social, de connaître la nature de celle-ci, ainsi que celle de l'indemnité versée par le Fonds.
En l'espèce, l'indemnité proposée par le FIVA à M. X...pour une incapacité de 5 % indemnise le préjudice fonctionnel résultant de la réduction du potentiel physique, mais également le préjudice résultant de la perte de gains et de l'incidence professionnelle de l'incapacité.
L'indemnisation en capital, ainsi que la majoration de celui-ci résultant de la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, versées par la CPAM, indemnisent de même à la fois la réduction du potentiel physique de M. X...et le préjudice résultant de la perte de gains et de l'incidence professionnelle de l'incapacité de 5 % qui lui a été reconnue.
Dans ces conditions, les deux indemnisations ont un caractère mixte et réparent des préjudices identiques. Par suite, le capital et sa majoration versés par la CPAM doivent venir intégralement en déduction de l'indemnité versée par le Fonds.
La contestation élevée par M. X...sera donc rejetée.
Conformément à l'article 31 du décret du 23 octobre 2001, les dépens restent à la charge du FIVA.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Rejette la contestation formée par M. X...à l'encontre de l'offre du FIVA en date du 27 décembre 2007.
Laisse les dépens à la charge du FIVA.
Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.
Le greffierLe président
Dominique FOLTYN-NIDECKERPatrice de CHARETTE