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21/10/2008 | FRANCE | N°07/00906

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 21 octobre 2008, 07/00906


ROG / MB
DOSSIER N 07 / 00906
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2008
3ème CHAMBRE,




COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre,
N 956 / 08


Prononcé publiquement le MARDI 21 OCTOBRE 2008, par Monsieur SUQUET, Président de la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,


Sur appel d'un jugement du T. G. I. DE TOULOUSE- 6EME CHAMBRE du 21 MAI 2007.


COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré,
(suivant ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de TOULOUSE en date du 30 / 09 / 2008)
Président : Mon

sieur SUQUET,
Conseillers : Madame PANTZ,
Monsieur ROGER,


GREFFIER :
Madame BORJA, lors des débats et du prononcé de...

ROG / MB
DOSSIER N 07 / 00906
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2008
3ème CHAMBRE,

COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre,
N 956 / 08

Prononcé publiquement le MARDI 21 OCTOBRE 2008, par Monsieur SUQUET, Président de la 3ème Chambre des Appels Correctionnels,

Sur appel d'un jugement du T. G. I. DE TOULOUSE- 6EME CHAMBRE du 21 MAI 2007.

COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré,
(suivant ordonnance de Monsieur le Premier Président de la Cour d'Appel de TOULOUSE en date du 30 / 09 / 2008)
Président : Monsieur SUQUET,
Conseillers : Madame PANTZ,
Monsieur ROGER,

GREFFIER :
Madame BORJA, lors des débats et du prononcé de l'arrêt.

MINISTÈRE PUBLIC :
Monsieur SILVESTRE, Substitut Général, aux débats et au prononcé de l'arrêt.

PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

A...

A...

né le 26 Avril 1951 à PROMACHI (GRECE)
de Petros et de C... Alexandra
de nationalité francaise, divorcé
Sans profession
demeurant...
...

31000 TOULOUSE
O. C. J. du 29 / 10 / 2003
Prévenu, libre, appelant, comparant

Assisté de Maître MARTIN Alexandre, avocat au barreau de TOULOUSE

LE MINISTÈRE PUBLIC :
appelant,

E...
Camille
Demeurant...

Partie civile, non appelante, comparante
Assistée de Maître FAURE Anne, avocat au barreau de TOULOUSE

RAPPEL DE LA PROCÉDURE :

LE JUGEMENT :

Le Tribunal, par jugement en date du 21 Mai 2007, a déclaré
A...

A... coupable du chef de :

* TENTATIVE D'AGRESSION SEXUELLE, le 27 / 10 / 2003, à Toulouse, infraction prévue par les articles 222-27, 222-22 du Code pénal et réprimée par les articles 222-27, 222-44, 222-45, 222-47 AL. 1, 222-48-1 du Code pénal

Et, en application de ces articles, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement avec sursis.

SUR L'ACTION CIVILE :

* a alloué à
E...
Camille, 5000 € à titre de dommages intérêts pour le préjudice moral

LES APPELS :

Appel a été interjeté par :
Monsieur A...
A..., le 24 Mai 2007 contre Madame E... Camille
M. le Procureur de la République, le 24 Mai 2007 contre Monsieur A...
A...

DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Avril 2008, l'affaire a été renvoyée contradictoirement au 24 Juin 2008 puis au 30 Septembre 2008 ; à ladite audience, le Président a constaté l'identité du prévenu ;

Ont été entendus :

Monsieur ROGER en son rapport ;

A...

A... en ses interrogatoire et moyens de défense ;

L'appelant a sommairement indiqué à la Cour les motifs de son appel ;

Mlle E... Camille, partie civile, entendue en ses demandes ;

Maître FAURE, avocat de la partie civile, en ses conclusions oralement développées.

Monsieur SILVESTRE, Substitut Général, en ses réquisitions ;

Maître MARTIN, avocat de
A...

A..., en ses conclusions oralement développées ;

A...

A... a eu la parole en dernier ;

Le Président a ensuite déclaré que l'arrêt serait prononcé le 21 OCTOBRE 2008.

DÉCISION :

M. A...
A... a interjeté appel le 24 mai 2007 des dispositions pénales et civiles du jugement du Tribunal de grande instance de TOULOUSE en date du 21 mai 2007 l'ayant condamné à la peine de 2 ans d'emprisonnement avec sursis et à payer à la Partie civile la somme de 5 000 € à titre de dommages intérêts du chef de tentative d'agression sexuelle.

Le Procureur de la République a interjeté appel incident le 24 mai 2007

La Partie civile, Melle E... Camille a été entendue. Son avocat a sollicité la confirmation de la décision.

M. L'Avocat général a requis la confirmation de la décision.

M. A...
A... a été entendu. Son conseil a sollicité la relaxe et la restitution des objets saisis.

M. A...
A... est prévenu d'avoir à TOULOUSE le 27 octobre 2003, commis ou tenté de commettre une atteinte sexuelle avec violence, contrainte, menace ou surprise, sur la personne de Camille
E...
, en l'espèce en la forçant à le masturber et en lui touchant le sexe et les seins.

LES FAITS

Le 27 octobre 2003, Melle Camille
E...
déposait plainte pour des faits d'agressions sexuelles à l'encontre de M. G.... Elle expliquait qu'elle avait rencontré cet homme le 27 septembre 2003, et que ce dernier, qui s'était présenté comme photographe de théâtre, lui avait proposé de servir de modèle lors d'une séance photo. Elle l'avait rappelé le 17 octobre et ils s'étaient revus le 21 octobre 2003, place du capitole, puis au domicile de M. H... le 23 octobre, où il lui avait montré des photos et enfin le 27 octobre 2003, date des faits dont se plaignait Melle
E...
.

Cette dernière précisait que devaient seulement être réalisées des photographies de son visage et des drapés, mais qu'elle avait expressément dit qu'elle ne voulait pas poser nue. Elle ajoutait que M. G... lui avait dit qu'il devait y avoir une certaine complicité entre le photographe et le modèle, et qu'il souhaitait qu'elle joue un rôle en portant le nom d'Aphrodite. Il lui avait également dit qu'il pouvait y avoir des contacts physiques et qu'elle devait être libérée de tous ses complexes.

Le jour des faits, alors qu'elle s'était déshabillée et s'était recouverte d'un drap blanc, il avait commencé par lui masser les cuisses en lui demandant de faire un travail de respiration afin qu'elle se libère pour rentrer dans la peau d'Aphrodite, puis lui avait massé le ventre en effleurant le pubis, alors qu'elle était allongée sur le dos. Il l'avait ensuite embrassée sur les lèvres en lui disant devant sa réticence, qu'elle n'était pas Camille mais Aphrodite, puis avait ensuite introduit un de ses doigts dans son vagin, frotté son sexe sans préservatif contre le sien et tenté à plusieurs reprises de la pénétrer. Enfin, il lui avait demandé de le masturber, et sollicité une fellation avant d'éjaculer sur sa poitrine.

Camille
E...
précisait que c'était quand il lui avait touché le sexe qu'elle avait paniqué. Elle l'accuse d'avoir insisté alors qu'il avait compris qu'elle n'était pas consentante. Elle indiquait qu'elle l'avait masturbé en se disant que peut être il la laisserait tranquille. Elle avait le sentiment d'avoir été manipulée psychologiquement quand il lui disait qu'elle ferait comme elle voulait. Elle répétait qu'à aucun moment elle n'avait été consentante.

L'expertise psychologique de Camille
E...
révélait qu'elle s'était trouvée dans un état de sidération émotionnelle et d'hébétude, de dissociation psychique, et qu'elle présentait des manifestations de stress post traumatiques, (syndromes anxiodépressifs modérés, flash back, intrusions d'images, sensations et d'odeurs liées à l'agression, perturbation de l'appétit et de la vie sexuelle).

M.
A...
, confirmait les propos de Camille
E...
sur les circonstances dans lesquelles il l'avait rencontrée et les différents rendez vous qu'il avait eus avec elle. Il précisait qu'il l'avait trouvée froide et impassible, et qu'il lui avait dit qu'une sorte de sympathie devait passer entre le photographe et son modèle. Le jour de la séance photo, il lui avait demandé de se déshabiller et de mettre un drap blanc, et lui avait dit qu'elle ne le prenne pas mal s'il la touchait pour modifier une pause ou toucher le vêtement. Il ne voulait l'obliger en rien et lui avait demandé à plusieurs reprises si elle allait bien. Elle lui avait finalement dit qu'elle allait très bien et qu'elle était Aphrodite. Ils s'étaient alors embrassés spontanément et mutuellement, sur la bouche à plusieurs reprises, s'étaient allongés, enlacés et s'étaient de nouveau embrassés. Il précisait qu'il lui avait touché une fois les seins et caressé le sexe avec la main, mais qu'à un moment, alors qu'elle avait senti qu'il était en érection, elle avait mis sa main sur son sexe en lui disant " non, je ne veux pas de ça ". Il avait alors compris qu'elle ne désirait pas de rapport sexuel et s'était assis au bord du divan. Camille
E...
avait toutefois laissé sa main sur son sexe et l'avait caressé sur les vêtements puis après ouvert sa braguette, l'avait masturbé jusqu'à l'éjaculation sur sa poitrine. Il affirmait qu'il n'y avait pas eu de réticence de sa part et qu'elle l'avait encouragé par son comportement. Il expliquait la plainte de Camille
E...
par son immaturité. Pour lui, elle n'assumait pas ses actes.

Lors de la perquisition étaient découverts des appareils photos dépourvus de pellicules, des diapositives de jeunes filles prises à leur insu plus ou moins dénudées dans une piscine publique et d'une relation sexuelle entre M. I... et une femme, des cassettes audio supportant l'enregistrement de moments intimes d'un couple.

Interrogé sur l'absence de pellicules dans les appareils et l'absence de photos de Camille
E...
, M. G... déclarait qu'il ignorait qu'il n'y avait pas de pellicule lors de la séance photo et qu'il lui arrivait d'oublier d'en mettre.

L'expert psychiatre qui examinait M.
A...
le 29 octobre 2005, dans le cadre de la garde à vue, mentionnait que l'infraction qui lui était reprochée. n'était pas clairement en relation avec une maladie mentale, ce qui n'excluait pas un dysfonctionnement de la sphère sexuelle, chez un sujet qui semblait pour le moins isolé affectivement. La personnalité de M.
A...
apparaissait plutôt structurée sur le mode rigide et quelque peu " sensitif ".

L'expert psychologue, M. Alain J..., relevait chez lui des éléments de psychorigidité défensifs. Il indiquait que les faits, s'ils étaient établis, pouvaient être en relation avec une déviation ou une perversion partielle de type voyeurique chez un sujet plutôt isolé et en difficulté de contact, L'expert émettait l'hypothèse que M.
A...
pouvait mettre en place des stratégies de rapprochement en utilisant le subterfuge du document photographique et de la recherche artistique pour en réalité s'imposer au plan sexuel. Il n'y avait pas lieu, concluait l'expert, compte tenu de la position de M. G... par rapport aux faits, de mettre en place un suivi thérapeutique.

L'expert psychologue, M. J..., qui a examiné Melle
E...
le 18 juin 2004 conclut que Mlle
E...
ne présente aucune tendance mythomaniaque ni affabulatrice et que les faits ont entraîné des troubles sous la forme d'état de stress aigu puis de manifestations post traumatiques... flash back troubles du comportement alimentaire et de la libido.

A l'audience, Melle
E...
s'est expliqué difficilement son discours étant entrecoupé de pleurs. Elle a renouvelé ses accusations contre M. A...
A..., estimant avoir été manipulée psychologiquement et avoir subi une agression sexuelle. Elle a fermement contesté les déclarations du prévenu selon lesquelles il n'aurait pas mis de pellicule car il faisait des essais préalables. Il lui avait au contraire dit lors de cette séance que les photos seraient réussies et qu'il y aurait un beau grain.

M. A...
A... a maintenu qu'il n'avait pas utilisé de stratagème pour obtenir des relations sexuelles et qu'il avait bien l'intention de faire des photos de Melle
E...
.

DISCUSSION

Sur la culpabilité

Le Tribunal a justement considéré que la version de Camille
E...
était confortée par plusieurs éléments :

- son dépôt immédiat de plainte, qui exclut toute autre motivation que celle de son ressenti après l'agression dont elle se plaint,
- les conclusions de son expertise psychologique, selon lesquelles elle ne présente aucune tendance mythomaniaque, ni affabulatrice,
- ses troubles sous forme d'état de stress aigu puis de manifestations post traumatiques à distance.

En revanche, les déclarations de M. G... sont contradictoires. Il déclare lui même que Camille
E...
était froide et même " glacée ", ce qui n'est pas le cas d'une jeune fille consentant à des relations de nature sexuelle et qui, pour le moins, aurait du l'alerter sur l'absence de consentement de la jeune fille. Elle lui a de plus clairement dit " non pas ça ", signifiant une absence de consentement de sa part mais il l'a interprété comme une acceptation de la masturbation.

Il prétend que Melle
E...
est immature mais ne reconnaît pas que leur différence d'âge de 32 ans a pu créer une emprise psychologique, déclarant au contraire que c'est elle qui est à l'origine de leurs relations intimes.

M. I..., n'a pas contesté que, âgé de 52 ans, il a abordé une toute jeune fille, s'est présenté sous son meilleur jour de photographe d'art et a organisé une séance photo de " drapé " où Camille
E...
devait être nue sous un drap et se fondre dans le rôle d'Aphrodite. Il a ensuite massé la jeune fille pour soi disant la relaxer. En réalité pour effectuer des caresses préliminaires. La quasi nudité de la victime, la mise en scène théâtrale, le discours adapté d'un homme cultivé, devaient à l'évidence mettre en position d'infériorité la victime.

Le stratagème constaté par le Tribunal est avéré du fait de l'absence de pellicule dans l'appareil.

M G... déclare certes aujourd'hui qu'il faisait des essais de cadrage pour lesquels on peut se passer de pellicule mais ses déclarations sont fermement contestées par la victime et lui même n'a pas été clair sur ce point puisqu'il déclarait au contraire lors de ses premières déclarations qu'il avait fait quelques clichés.

Ainsi, le Tribunal a fort justement décidé que M. G... a imposé des attouchements de nature sexuelle à Camille
E...
en surprenant son consentement par l'utilisation d'un véritable stratagème et en faisant peser sur la jeune fille une véritable emprise que lui conféraient, à la fois son âge et sa qualité d'artiste.

Sur la sanction

La gravité des faits reprochés à M. G... justifie le prononcé d'une peine d'emprisonnement de deux ans, assortie du sursis simple en l'absence d'antécédents judiciaires.

Sur la demande de restitution

Le matériel ayant servi à M. G... à commettre l'infraction doit être confisqué ainsi que les photos de jeunes femmes dénudées prises à leur insu et les enregistrements pornographiques, toutes choses qui ont servi ou qui étaient destinées à commettre l'infraction au sens de l'article 222-44 du Code pénal.

M. G... n'a pas précisé ni prouvé quels étaient les clichés qui auraient été réalisés avec le consentement éclairé des modèles. Il y a donc lieu de rejeter sa demande et de prononcer la confiscation de l'ensemble des objets saisis.

SUR L'ACTION CIVILE

Attendu que Mlle E... Camille se constitue partie civile et sollicite la condamnation du prévenu à lui payer la somme de 5. 000, 00 Euros à titre de dommages et intérêts, et celle de 800, 00 Euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale,

La constitution de partie civile de Mademoiselle Camille
E...
est recevable et fondée.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné M. G... à lui payer la somme de 5000, 00 euros au titre de son préjudice moral.

Il lui sera en oute alloué la somme de 800, 00 Euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.
PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Déclare les appels recevables,

Sur l'action publique

Confirme le jugement en toutes ses dispositions.

Y ajoutant, ordonne la confiscation des objets saisis.

Le Président a donné au condamné l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code Pénal en raison de sa présence à l'audience de lecture de l'arrêt.

Sur l'action civile

Confirme le jugement en toutes ses dispositions

Y ajoutant, condamne M. G... à lui payer la somme de 800, 00 Euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de Procédure Pénale.

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 EUROS dont chaque condamné est redevable ;

Le tout en vertu des textes sus-visés ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 07/00906
Date de la décision : 21/10/2008

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Toulouse


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-10-21;07.00906 ?
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