La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/09/2008 | FRANCE | N°382

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0042, 23 septembre 2008, 382


23 / 09 / 2008

ARRÊT No

No RG : 04 / 01259
CD / CI

Décision déférée du 04 Novembre 2003- Tribunal d'Instance de LAVAUR (2003 / 61)
F. CROISILLE CABROL

Jacob X... Y...
représenté par la SCP CANTALOUBE-FERRIEU CERRI

C /

Gaëtan DE Z...
représenté par la SCP B. CHATEAU

confirmation

Grosse délivrée

le

àRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE HUIT
***
>APPELANT (E / S)

Monsieur Jacob X... Y...
...
81705 LEMPAUT
représenté par la SCP CANTALOUBE-FERRIEU CERRI, avoués à la cour

INTIME (E / S)

Monsieur Gaëtan ...

23 / 09 / 2008

ARRÊT No

No RG : 04 / 01259
CD / CI

Décision déférée du 04 Novembre 2003- Tribunal d'Instance de LAVAUR (2003 / 61)
F. CROISILLE CABROL

Jacob X... Y...
représenté par la SCP CANTALOUBE-FERRIEU CERRI

C /

Gaëtan DE Z...
représenté par la SCP B. CHATEAU

confirmation

Grosse délivrée

le

àRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
3ème Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE HUIT
***

APPELANT (E / S)

Monsieur Jacob X... Y...
...
81705 LEMPAUT
représenté par la SCP CANTALOUBE-FERRIEU CERRI, avoués à la cour

INTIME (E / S)

Monsieur Gaëtan DE Z...
...
81700 LEMPAUT
représenté par la SCP B. CHATEAU, avoués à la cour
assisté de Me A...SANS, avocat au barreau de CASTRES

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 avril 2008 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant C. DREUILHE, président chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour composée de :

C. DREUILHE, président
M. O. POQUE, conseiller
A. FAVREAU, vice-président placé

Greffier, lors des débats : C. COQUEBLIN

ARRÊT :

- contradictoire
-prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
-signé par C. DREUILHE, président, et par C. COQUEBLIN, greffier de chambre

FAITS ET PROCÉDURE

Par arrêt du 21 juin 2005 auquel il est expressément fait référence quant à l'exposé des faits de la procédure et des moyens des parties, la cour d'appel de TOULOUSE, statuant dans l'instance qui oppose Monsieur Jacob X... Y...à Monsieur Gaëtan DE Z..., a ordonné un sursis à statuer jusqu'au résultat de l'affaire pénale en cours concernant la plainte avec constitution de partie civile déposée par Monsieur Gaëtan DE Z...à l'encontre de Monsieur Jacob X... Y...du chef de faux et usage de faux devant le juge d'instruction du tribunal de grande instance de CASTRES.

Il suffit de rappeler que par acte sous seing privé en date du 7 avril 1992 à effet du 1er avril 1992 Monsieur Gaëtan DE Z...a donné à bail à Monsieur Jacob X... Y...une maison sise lieu-dit "La Rode" (dite "la Maison de Pierre"), 81700 LEMPAUT..." (dite " la Maison de Pierre "), 81700 LEMPAUT.

Le 9 septembre 2000, Monsieur Gaëtan DE Z...a donné à son locataire un congé pour reprise au profit de sa fille à effet du 31 mars 2001.

Par jugement en date du 22 février 2002, le tribunal d'instance de LAVAUR a validé ce congé et ordonné l'expulsion de Monsieur Jacob X... Y....

Monsieur Jacob X... Y..., après avoir fait appel de cette décision, s'est désisté de sa voie de recours.

Les lieux loués ont été repris le 5 juillet 2002 et un état des lieux a été dressé à cette date.

Le 24 avril 2003, Monsieur Jacob X... Y...a fait assigner Monsieur Gaëtan DE Z...devant le tribunal d'instance de LAVAUR afin de voir déclarer le congé frauduleux au motif que son bailleur avait installé dans les lieux un locataire, Monsieur B..., suivant bail du 1er octobre 2002, et non sa fille.

Par jugement du 4 novembre 2003, le tribunal d'instance de LAVAUR a débouté Monsieur Jacob X... Y...de ses demandes et l'a condamné à payer à Monsieur Gaëtan DE Z...la somme de 237, 75 € à titre de dommages et intérêts pour les réparations locatives et 500 € de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration en date du 12 février 2004 dont la régularité et la recevabilité ne font pas l'objet de contestation, Monsieur Jacob X... Y...a fait appel de cette décision.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par conclusions récapitulatives déposées le 21 mars 2008, Monsieur Jacob X... Y...demande à la cour la réformation de cette décision.

Vu le constat d'huissier dressé par Maître C...le 12 février 2003,

- de constater la transgression par Monsieur DE Z...des dispositions de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 en n'intégrant pas dans les lieux le bénéficiaire du congé qui avait été donné et, de surcroît, en consentant un nouveau bail à un autre locataire qui occupe désormais les lieux depuis le 1er octobre 2002,
- de condamner en conséquence Monsieur DE Z...à payer à Monsieur X... Y..., toutes causes de préjudices confondues, une somme de 9. 000 € à titre de dommages et intérêts issus de ce congé frauduleux,
- de débouter Monsieur DE Z...de l'ensemble de ses demandes,
- de le condamner au paiement de la somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives déposées le 18 janvier 2008, Monsieur Gaëtan DE Z...demande à la cour :

- de constater qu'à compter du 1er avril 2001 Monsieur X... Y...était occupant sans droit ni titre de la " Maison de la Pierre ",
- de constater qu'il s'est maintenu abusivement dans les lieux postérieurement au 1er avril 2001,
- de dire et juger qu'il était impossible pour Madame D...de prendre possession de la " Maison de la Pierre " conformément au congé délivré à Monsieur X... Y...avant son départ effectif des lieux,
- de constater que les époux E...étaient locataires de la maison de l'Orangerie jusqu'à leur congé avec effet au 14 octobre 2001.
- de constater que Madame D...n'occupait pas les lieux de l'Orangerie avant la date de ce congé,

en conséquence,

- de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Monsieur X... Y...de ses demandes et condamné Monsieur X... Y...à payer à Monsieur DE Z...:
*une somme de 237, 75 € au titre des réparations locatives déduction faite de la caution,
*une somme de 500 € pour procédure abusive,
*une somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

- de dire et juger que la pièce C 23 communiquée par Monsieur X... Y...est un faux et la rejeter des débats, après avoir si besoin procédé à une vérification d'écriture par application des dispositions des articles 299, 287 et suivants du code de procédure civile, Monsieur X... Y...persistant à produire cette pièce aux débats

y ajoutant,
- de condamner Monsieur X... Y...à payer à Monsieur DE Z...une somme de 8. 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- de condamner Monsieur X... Y...à payer à Monsieur DE Z...une somme de 2. 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour le détail des moyens et prétentions des parties, il est expressément fait référence aux conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exception de faux concernant la pièce C 23, s'agissant d'une lettre datée du 8 septembre 2000 établie par Sylvain F..., mandataire de Monsieur DE Z..., donnant congé à M. Luc E..., autre locataire du même bailleur

Cette instance pénale a fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu du 25 juin 2007 faute de charges suffisantes contre Monsieur Jacob X... Y...et contre quiconque d'avoir commis le délit de faux et d'usage de faux.

Cette décision est désormais définitive et s'impose aux parties.

Au fond

Le premier juge a fait aux éléments de la cause, par des motifs pertinents que la cour adopte, une juste application de la loi et lui a apporté les solutions qui conviennent de sorte que sa décision est confirmée dans toutes ses dispositions.

Il convient cependant de rappeler aux parties qu'en droit, selon l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989, le congé peut être délivré pour reprise limitativement au profit des bénéficiaires énumérés, notamment par ses descendants.

En vertu d'une jurisprudence constante :
- le bailleur propriétaire du logement a le libre choix du logement sur lequel il entend exercer le droit de reprise,
- une durée minimale d'occupation après la reprise n'est pas exigée (un délai de cinq mois était validé par la cour d'appel de Toulouse le 23 juin 1998),
- il ne peut exister de contrôle a priori de la motivation du congé.

Cependant, le juge dispose d'un pouvoir de contrôle a posteriori qui lui permet d'annuler le congé pour vice de forme ou de fond et s'il apparaît que la reprise a été exercée en fraude des droits du locataire, notamment si le bailleur ne justifie pas d'une impossibilité quelconque l'ayant entraîné à l'empêcher d'y habiter ou d'y faire habiter.

Il résulte de l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 que pendant le délai de préavis de 6 mois le locataire est redevable du loyer et des charges pour le temps où il a réellement occupé les lieux.

Et enfin qu'en vertu de l'article 15-1 dernier alinéa, à l'expiration du délai de préavis, le locataire est déchu de tout titre d'occupation.

Dans le cas présent, Monsieur DE Z...est propriétaire ou usufruitier de logements dans le TARN.

Son mandataire, l'agence immobilière Reveloise,, a délivré congé pour le compte de Monsieur DE Z...à Monsieur X... Y...le 1er septembre 2000 avec effet au 31 mars 2001 pour que sa fille puisse habiter la " Maison de la Pierre ", avec mention de son adresse.

La validité du motif a été constatée par le jugement du 22 février 2002.

A cette époque, Monsieur DE Z...destinait ce logement à sa fille à compter du 31 mars 2001.

Or, il ressort des pièces du dossier que Monsieur X... Y...s'est maintenu illégalement dans les lieux (un procès-verbal de reprise de possession n'a été dressé que le 5 juillet 2002) en multipliant les procédures et voies de recours (référé ayant abouti à l'ordonnance du 15 mai 2001, appel du jugement du 22 février 2002, procédure devant le juge de l'exécution ayant abouti au jugement du 3 mai 2002).

Madame G...ne pouvait donc emménager à la " Maison de la Pierre " le 31 mars 2001 et elle est restée au domicile de son père.

Par la suite, un autre locataire de Monsieur DE Z..., Monsieur E..., habitant une autre maison (l'Orangerie), a donné congé le 21 août 2001 pour le 14 octobre 2001 (et ce n'est pas Monsieur DE Z...qui lui a donné congé pour reprise, contrairement à ce qu'affirme Monsieur X... Y...: le bail du 1er mai 2001 était certes prévu à l'origine de courte durée, jusqu'au 31 octobre 2002, car Monsieur DE Z..., voyant les difficultés que lui causait Monsieur X... Y...pour quitter la " Maison de la Pierre ", avait souhaité se ménager une autre possibilité d'hébergement pour sa fille, mais Monsieur E...est finalement parti de son plein gré avant l'expiration du bail).

Lors du départ de Monsieur E..., compte tenu de l'incertitude persistante sur la date de départ de Monsieur X... Y..., Monsieur DE Z...a décidé de reloger Madame G...à l'Orangerie à compter du 1er novembre 2001.

Après le départ de Monsieur X... Y..., Monsieur DE Z...a dû effectuer des travaux de remise en état à la " Maison de Pierre ".

Légitimement, Madame G..., qui habitait l'Orangerie depuis 11 mois, n'a pas souhaité déménager une seconde fois pour la " Maison de la Pierre ".

Monsieur DE Z...a alors reloué la maison de la Maison de Pierre à Monsieur SIMON à compter du 1er octobre 2002.

D'après Monsieur X... Y..., le congé qui lui a été donné serait frauduleux au premier motif que le logement n'a pas été repris par la fille du bailleur.

Comme l'a justement rappelé le tribunal de LAVAUR, pour apprécier a posteriori la validité du congé délivré à Monsieur X... Y..., il convient de se placer à la date de la fin du préavis de Monsieur X... Y...et non à la date de son départ effectif des lieux (15 mois après) ou de l'obtention d'une autorisation d'expulsion.

Il est dès lors constant qu'à compter du 31 mars 2001 il était strictement impossible pour la bénéficiaire de la reprise de la " Maison de la Pierre " d'occuper les lieux puisque Monsieur X... Y...s'est maintenu abusivement dans les lieux alors qu'il était déchu de tout titre d'occupation, conformément à l'article 15-1 alinéa 4 de la loi du 6 juillet 1989.

Nul ne pouvant invoquer sa propre turpitude, un locataire qui se maintient abusivement dans les lieux et de surcroît sans procéder au paiement de l'indemnité d'occupation avant d'y être condamné par jugement exécutoire ne peut, sans mauvaise foi, reprocher au propriétaire la non reprise du logement par son descendant visé dans le congé puisqu'à l'évidence il rend cette reprise impossible par son comportement.

Le congé serait également frauduleux au second motif qu'un autre congé a été délivré au profit du même bénéficiaire pour une maison située à proximité.

Monsieur X... Y...a produit le document argué de faux signé par Monsieur F...qui a clairement démenti être l'auteur de cet acte alors que la provenance de cette photocopie miraculeusement retrouvée dans sa boîte aux lettres reste douteuse.

Quoi qu'il en soit,
- la plainte pour faux a fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu et cette pièce à la provenance douteuse ne peut faire preuve de la fraude alléguée,
- et si Monsieur X... Y...avait quitté les lieux le 31 mars 2001, Madame DE Z...aurait à cette date occupé la " Maison de la Pierre " puisque le bail consenti aux époux E...en mai 2001 courait pendant 18 mois.

Par ailleurs, Monsieur X... Y..., étranger aux relations contractuelles entre Monsieur DE Z...et les époux E...n'a pas qualité pour contester la validité de ce bail, n'étant pas partie à l'acte.

La décision est donc confirmée dans toutes ses dispositions.

Sur les demandes annexes

Cette procédure diligentée pendant des années avec mauvaise foi a entraîné soucis et tracas pour l'intimé, préjudice particulier qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts.

L'équité commande également l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à Monsieur DE Z...contraint d'exposer des frais devant la cour pour défendre ses intérêts.

Les dépens suivent le sort du principal.

PAR CES MOTIFS

La cour

Rejetant toute autre demande,

Vu l'arrêt avant dire droit de la cour d'appel de TOULOUSE du 21 juin 2005,

Vu l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction de CASTRES en date du 25 juin 2007,

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne Monsieur X... Y...à payer à Monsieur DE Z...
*la somme de 2. 000 € à titre de dommages et intérêts,
*la somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur X... Y...aux entiers dépens avec distraction au profit de la SCP B. CHATEAU, avoué, selon l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0042
Numéro d'arrêt : 382
Date de la décision : 23/09/2008

Analyses

BAIL D'HABITATION - Bail soumis à la loi du 6 juillet 1989 - Congé - Congé pour habiter - / JDF

En vertu de l'article 15-I de la loi du 6 juillet 1989 et du principe selon lequel "nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude", un locataire ne peut, sans mauvaise foi, reprocher au bailleur l'absence de reprise du logement par son descendant, visé dans le congé, dès lors qu'il rend lui-même cette reprise impossible par son maintien abusif dans les lieux


Références :

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Lavaur, 04 novembre 2003


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-09-23;382 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award