10/09/2008
ARRÊT No
NoRG: 06/04097
Décision déférée du 22 Mai 2006 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 05/341
Mme X...
Jean-Marc Y...
représenté par la SCP MALET
C/
Sylviane Y...
représenté par la SCP RIVES-PODESTA
Aide Juridictionnelle totale
confirmation
Grosse délivrée
le
à REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème Chambre Section 1
***
ARRÊT DU DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE HUIT
***
APPELANT(E/S)
Monsieur Jean-Marc Y...
...
31700 CORNEBARRIEU
représenté par la SCP MALET, avoués à la Cour
assisté de la SCP CABINET DARRIBERE, avocats au barreau de TOULOUSE
INTIME(E/S)
Monsieur Sylviane Y...
...
31200 TOULOUSE
représenté par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour
assisté de Me Marie Madeleine Z..., avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 31555/2006/017863 du 22/11/2006 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de TOULOUSE)
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 05 Juin 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :
D. VERDE DE LISLE, président
C. BELIERES, conseiller
C. COLENO, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : A. THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par C. BELIERES, conseiller pour le président empêché, et par A. THOMAS, greffier de chambre.
FAITS DE L'ESPECE
Mme Yvonne A... a souscrit auprès de la compagnie d'assurances la ZURICH aux droits de laquelle vient la société Generali, deux contrats.
Un contrat no 7110782K souscrit le 29 novembre 1984 dénommé Vita investissement retraite stipulant sous la rubrique bénéficiaire "en cas de décès de l'assuré avant le terme de l'adhésion l'épargne retraite constituée au jours du décès sera restituée aux enfants de l'intéressée".
Un contrat no provisoire 07006868 souscrit le 5 août 1993 dénommé contrat d'assurance sur la vie désignant en qualité de bénéficiaires Mlle Y... Sylviane et M.Castera Marc ses enfants.
Le 6 mars 2003 Mme Yvonne A... a rédigé chez son notaire Maître B... un testament olographe par lequel elle lègue à sa fille Sylviane la quotité disponible des biens meubles et immeubles dépendant de sa succession et révoque toute disposition à cause de mort antérieure à ce jour.
Yvonne A... est décédée le 13 avril 2003 laissant à sa survivance ses deux enfants Jean Marc et Sylviane Y...
La quotité disponible étant du tiers, Sylviane Y... a sollicité le règlement des deux tiers des sommes dues au titre des deux contrat d'assurance, représentant sa part réservataire et la quotité disponible.
La compagnie procédait au règlement des sommes incontestables soit moitié à Sylviane Y... , un tiers à Jean-Marc Y..., le sixième litigieux soit 16.439,11 euros étant consigné sur un compte CARPA en exécution d'une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse du 28 septembre 2004.
PROCEDURE
Par jugement du 22 mai 2006 le tribunal de grande instance de Toulouse, saisi par Sylviane Y... d'une demande tendant à se voir attribuer les sommes encore en litige, a accueilli cette demande, déclaré Sylviane Y... seule bénéficiaire du solde des capitaux décès prévus par les deux contrats soit la somme de 16.439,11 euros avec intérêts à compter du 7 octobre 2003, ordonné le déblocage des sommes à son profit, rejeté les demandes accessoires et condamné Jean-Marc Y... aux dépens.
Pour statuer ainsi le tribunal a retenu que par la formule "biens meubles dépendant de sa succession" utilisée par Mme A... dans son testament, celle ci avait entendu désigner les contrats d'assurances vie qui constituaient les seuls biens mobiliers de sa succession.
Par déclaration du 22 août 2006 Jean-Marc Y... a relevé appel de cette décision.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Jean-Marc Y... par conclusions récapitulatives signifiées le 31 octobre 2007 auxquelles il est fait expressément référence pour l'exposé du détail de l'argumentation conclut à l'infirmation de la décision et demande à la cour de dire qu'il est le seul bénéficiaire du solde des capitaux décès résultant des deux contrats d'assurance , d'ordonner le déblocage à son profit de la somme de 16.439,11 euros avec intérêts à compter du 7 octobre 2003, et de condamner Sylviane Y... aux dépens ainsi qu'à la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il soutient
* que la qualification en contrats d'assurance vie des deux contrats litigieux ne fait aucun doute,
* que ces contrats génèrent pour le bénéficiaire un droit propre et direct sur le capital, qui ne rentre pas dans la succession et n'est pas soumis aux règles successorale,
* que le testament du 6 mars 2003 ne vise pas les contrats d'assurance et ne peut avoir aucun effet en ce qui les concerne, puisque ceux ci sont régis par les dispositions contractuelles et non successorales.
* que le tribunal a procédé à un abus d'interprétation en considérant que l'expression biens meubles dépendant de la succession permettait d'inclure les placements dans les dispositions testamentaires
* que ses relations avec sa mère ne présentaient en aucune façon le caractère conflictuel que lui reproche sa soeur.
* que l'article L 132-8 du code des assurances qui stipule que les héritiers ont droit au bénéfice de l'assurance à proportion de leur part ne concernent que le cas ou le bénéficiaire n'est pas nommément désigné dans le contrat et ne s'applique donc pas en l'espèce.
Sylviane Y... par conclusions signifiées le 24 décembre 2007 auxquelles il est fait expressément référence pour l'exposé du détail de l'argumentation conclut à la confirmation de la décision, et relevant appel incident demande à la cour de condamner Jean-Marc Y... à lui payer la somme de 791,25 euros correspondant à la part d'honoraires non prise en charge en première instance par l'Etat en application de l'article 700 du code de procédure civile
Elle souligne qu'aucun des deux contrats d'assurance vie ne prévoit de répartition des sommes dues aux deux bénéficiaires désignés, que Mme A... qui pouvait révoquer la désignation du bénéficiaire par voie testamentaire, pouvait à fortiori fixer par la même voie les modalités de répartition des sommes dues au titre de ces contrats.
Elle développe longuement les griefs qu'elle nourrit contre son frère en produisant diverses attestations .
L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 mai 2008.
MOTIFS DE LA DECISION
La qualification de contrat d'assurance vie des deux contrats litigieux ne fait pas l'objet de discussion.
Jean Marc et Sylviane Y... sont les bénéficiaires désignés dans les deux contrats.
Le bénéficiaire du contrat d'assurance vie dispose d'un droit propre et direct à l'encontre de l'assureur , et le capital ou la rente stipulés payables lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers ne font pas partie de la succession de l'assuré.
Il s'en suit que le souscripteur ne peut disposer par voie testamentaire du sort du contrat, dès lors que celui ci ne fait pas partie de sa succession.
La seule faculté dont disposait Mme A... par voie testamentaire était de révoquer l'une ou l'autre des désignations de bénéficiaire, par application combinée des articles L 132-8 et L 132-9 du code des assurances, compte tenu du fait que l'acceptation par les bénéficiaires n'avait pas eu lieu.
Elle n'a pas usé de cette possibilité, ce qui est admis par les deux parties, puisque le droit de Jean-Marc Y... sur une part au moins des sommes dues au titre de ces contrat a déjà été reconnu.
Il n'en demeure pas moins qu'en application de l'article L 132-8 du code des assurances, les héritiers désignés ont droit au bénéfice de l'assurance en proportion de leurs parts héréditaires.
Ces dispositions s'appliquent bien à l'espèce, Jean Marc Y... étant un héritier désigné.
Sa vocation héréditaire doit donc être prise en considération pour le calcul de sa part, sans qu'il y ait lieu d'examiner les diverses polémiques existant entre les parties sur leur comportement respectif à l'égard de leur mère, ces considérations étant surabondantes.
Il est constant que Mme A... a disposé par testament du 6 mars 2003 de la quotité disponible au bénéfice de sa fille Sylviane, de sorte que la part de celle ci dans la succession est de deux tiers, pour un tiers à Jean Marc Y....
La répartition des sommes dues au titre des contrats d'assurances doit donc s'effectuer dans les mêmes proportions, et la décision déférée qui consacre le droit de Sylviane Y... sur le solde restant dû au titre des contrats d'assurances sera donc confirmée.
L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile.
Jean-Marc Y..., dont l'appel est rejeté, supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Confirme la décision déférée,
Rejette l'appel incident,
Condamne Jean-Marc Y... aux dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP Rives Podesta avoués, étant précisé que Sylviane Y... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.
Le greffier, P/le président empêché
(Art.456 du CPC)