28/05/2008
ARRÊT No
NoRG: 05/05179
Décision déférée du 01 Août 2005 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 02/3625
M. X...
Société SYRDREC
représentée par la SCP BOYER LESCAT MERLE
C/
GROUPEMENT CARTE BLEUE - GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE
représentée par la SCP RIVES-PODESTA
Société SETIB
représentée par la SCP B. CHATEAU
Société ORBISCOM
représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART
SAS CARTE BLEUE
représentée par la SCP RIVES-PODESTA
Sergio Y...
représenté par la SCP BOYER LESCAT MERLE
Societe ORBIS PATENTS LTD
représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART
Confirmation partielle
Grosse délivrée
le
à REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème Chambre Section 1
***
ARRÊT DU VINGT HUIT MAI DEUX MILLE HUIT
***
APPELANT(E/S)
Société SYRDREC
La Mirandette
32140 MASSEUBE
représentée par la SCP BOYER LESCAT MERLE, avoués à la Cour
assistée de Me Pascal GORRIAS, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME(E/S)
GROUPEMENT CARTE BLEUE - GROUPEMENT D'INTERET ECONOMIQUE
21, boulevard de la Madeleine
75001 PARIS
représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour
assistée de Me Benjamin MAY, avocat au barreau de PARIS
Société SETIB venant aux droits de la SA FTO
16, 18, rue du Dôme
92100 BOULOGNE BILLANCOURT
représentée par la SCP B. CHATEAU, avoués à la Cour
assistée de Me Xavier BUFFET DELMAS D'AUTANE, avocat au barreau de PARIS
Société ORBISCOM
3 Arkle Road Sandyford Ind.est
DUBLIN 18 IRLANDE
représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART, avoués à la Cour
assistée de la SELARL FUCHS COHANA REBOUL et BEROARD, avocats au barreau de PARIS
SAS CARTE BLEUE
21, boulevard de la Madeleine
75001 PARIS
représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour
assistée de Me Benjamin MAY, avocat au barreau de PARIS
INTERVENANT VOLONTAIRE
Monsieur Sergio Y...
...
32140 MASSEUBE
représenté par la SCP BOYER LESCAT MERLE, avoués à la Cour
assisté de Me Bernard DECKER, avocat au barreau de TOULOUSE
INTERVENANTE FORCEE
Société ORBIS PATENTS LTD
Block 1, Blackrock
Business park, Carysfrot avenue Blackrock
DUBLIN (IRLANDE)
représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART, avoués à la Cour
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 03 Avril 2008 en audience publique, devant la Cour composée de :
D. VERDE DE LISLE, président
C. BELIERES, conseiller
C. COLENO, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : A. THOMAS
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par D. VERDE DE LISLE, président, et par A. THOMAS, greffier de chambre.
La société Système de Règlement à distance à Référence Cachetée (Syrdrec) a relevé appel le 28 septembre 2005 du jugement rendu le 1er août 2005 par le tribunal de grande instance de Toulouse qui a dit que son brevet était une simple méthode au sens de l'article L 611-10 du Code de la propriété intellectuelle, qu'il ne comportait aucun principe inventif en l'état de la technique au sens de l'article 611-11 du même code, qui a annulé ledit brevet 9107 639, qui a débouté la société Syrdrec de son action en contrefaçon et de ses autres demandes, qui l'a condamnée à payer pour frais irrépétibles 3 000 € au GIE Carte Bleue et à la SAS Carte Bleue pris ensemble, 3 000 € à la société Setib, 3 000 € à la société Orbiscom Ltd. L'exécution provisoire a été prononcée.
M. Y... a déposé le 20 juin 1991 une demande de brevet français intitulé "système d'encaissement" sous le no 91/07639. Le brevet a été délivré le 17 septembre 1993 sous le no FR 2 678 087. M. Y... a créé la société Syrdrec dont il est le dirigeant et il lui a fait apport du brevet. Considérant que le service e-carte bleue contrefaisait son brevet, la société Syrdrec a assigné le Groupement Carte Bleue (GIE CB) par acte du 11 octobre 2002.
La société Orbis Patents Limited a déposé le 25 mars 1999 un brevet européen no 999 12017.3 intitulé "système et procédé de carte de crédit" dont elle a vendu la licence d'exploitation à sa société mère la société Orbiscom. Celle-ci a consenti le 22 août 2001 à la société France Telecom Orbiscom (FTO) qui deviendra la société Européenne de Traitement de l'Information Bancaire (SETIB), une sous licence exclusive d'exploitation portant sur un système de sécurisation des paiements relatifs au système électronique avec exploitation du brevet européen. La société FTO a elle-même concédé au GIE CB une sous licence non exclusive d'exploitation et le GIE qui a défini un service e-carte bleue en a fait apport à la SAS Carte Bleue (CB).
M. Y... est intervenu volontairement à la procédure d'appel par conclusions du 26 janvier 2006. Il estime que le service e-carte bleue reproduit très exactement les fonctions du brevet Syrdrec dont il est l'inventeur ce qui lui confère intérêt et qualité pour agir. Il a appelé en intervention forcée la société Orbis Patents Ltd inventeur du système qu'il estime contrefaisant. La cour fait expressément référence aux conclusions de M. Y... du 26 février 2008 tendant à voir admettre l'intervention forcée de la société Orbis Patents Limited, à voir déclarer valable le brevet 91 07639 de la société Syrdrec et voir juger qu'il est l'inventeur de l'invention décrite dans le brevet européen 1 029 311 délivré à la société Orbis Patents Ltd, voir juger nul le brevet européen 1 029 311 voir dire et juger que le Groupement Carte Bleue, la SAS Carte bleue, la société Setib, la société Orbiscom Ltd et la société Orbis Patents Ltd ont commis des actes de contrefaçon en offrant, détenant, exploitant le système e-carte bleue ou tout système reproduisant les caractéristiques 1 et 7 du brevet Syrdrec, à voir débouter ces sociétés de toutes leurs demandes, à voir condamner in solidum ces sociétés au paiement de 500 000 € pour atteinte au droit moral et au paiement de 15 000 € pour frais irrépétibles, en toute hypothèse voir prononcer la distraction des dépens au profit de la SCP Boyer Lescat Merle.
La société Orbis Patents Ltd, inventeur du brevet à l'origine du service e-carte bleue, a été mise en cause dans la procédure d'appel par une assignation en intervention forcée de M. Y... en date du 9 juillet 2007. Elle soulève l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de M. Y... et partant de sa propre intervention forcée. Elle critique également cette intervention forcée au regard de la chose jugée par un arrêt de cette cour du 16 janvier 2008 et au regard de l'article 555 du Code de procédure civile. La cour fait expressément référence aux conclusions de la société Orbis Patents Ltd du 14 mars 2008 tendant à voir déclarer irrecevable l'intervention volontaire de M. Y..., voir déclarer irrecevable sa propre intervention forcée, voir débouter M. Y... de ses demandes, le voir condamner à payer 15 000 € pour frais irrépétibles, voir ordonner la distraction des dépens au profit de la SCP Dessart Sorel Dessart.
La société Syrdrec rappelle qu'elle possède le brevet 91/07639 déposé par M. Y... et elle résume l'invention comme un système de règlement à distance sécurisé, dédié notamment aux transactions à distance et mis en oeuvre à l'aide de cartes de paiement aux caractéristiques variables selon les revendications dont il est fait application. La cour fait expressément référence aux conclusions de la société Syrdrec qui tendent à la réformation du jugement, voir dire que le brevet français 91/07639 est valable, voir dire que les sociétés GIE CB, SAS Carte Bleue, Setib, Orbiscom Ltd et Orbis Patents Ltd ont commis des actes de contrefaçon du brevet 91/07639 en offrant, détenant et/ou exploitant le système e-Carte Bleue ou tout système équivalent reproduisant les caractéristiques des revendications 1 et 7 du brevet Syrdrec, voir juger que le brevet européen no1 029 311 constitue une contrefaçon du brevet Syrdrec, voir juger que ce brevet est nul et qu'en conséquence le brevet délivré par l'OMPI sous le no WO 99/49424 l'est aussi, voir interdire aux sociétés GIE CB, SAS Carte Bleue, Setib, Orbiscom Ltd et Orbis Patents Ltd d'offrir, détenir, vendre ou exploiter le système e-Carte Bleue ou tout système équivalent reproduisant les caractéristiques revendiquées dans le brevet FR 91/07639 sous astreinte de 100 000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir, voir condamner les mêmes in solidum à faire disparaître toutes pages et tous liens figurant sur les sites internet de ces parties et sur tout site partenaire faisant référence au système e-carte bleue ou tout système équivalent sous la même astreinte, voir condamner in solidum lesdites sociétés à payer par provision 6 000 000 € pour atteinte à l'image et aux droits moraux, 12 000 000 € pour le préjudice patrimonial, 3 000 000 € au titre du préjudice économique subi en France à parfaire au vu des relations contractuelles prévues dans le contrat de licence, la convention cadre et la convention de développement ainsi qu'au vu des statistiques de la fraude à la carte bancaire et des résultats de la mission d'expertise à intervenir, voir condamner les mêmes sociétés à remettre une copie complète de leurs comptes annuels à compter de 2002 outre les comptes annuels consolidés du groupe Orbiscom à compter de 1999 sous astreinte de 10 000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir, voir condamner in solidum les mêmes sociétés à remettre à la société Syrdrec une copie complète du contrat de licence, de la convention cadre et de la convention de développement, les statistiques officielles de la fraude à la carte bancaire faisant ressortir la part imputable aux transactions à distance et ce à compter de 1991 sous astreinte de 10 000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir, voir juger que la cour se réservera la liquidation des astreintes, voir désigner un expert avec mission de rechercher auprès des banques offrant le service e-Carte Bleue à leurs clients tous les éléments permettant de définir le volume des transactions effectuées par carte e-Carte Bleue et ce depuis la création du système e-Carte Bleue jusqu'à son arrêt définitif, voir ordonner la réouverture des débats à une prochaine audience en vue de statuer sur la liquidation définitive des préjudices moraux, patrimoniaux et économiques, voir ordonner la publication de l'arrêt dans trois journaux ou revues au choix de la société Syrdrec aux frais des sociétés GIE CB, SAS Carte Bleue, Setib, Orbiscom Ltd et Orbis Patents Ltd, voir condamner in solidum les mêmes sociétés à payer 30 000 € au titre de l'article 550 du Code de procédure civile, voir débouter ces sociétés de toutes leurs prétentions, les voir condamner in solidum à payer 45 000 € pour frais irrépétibles, voir ordonner la distraction des dépens au profit de la SCP Boyer Lescat Merle.
La société Orbiscom Ltd expose que la société Orbis Patents Ltd lui a concédé la licence d'exploitation du brevet enregistré sous le no99 912 017 322 et publié le 23 août 2000 sous le no1 029 311 A. Elle soulève l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de M. Y... faute d'intérêt et de qualité pour agir. Elle analyse le brevet Syrdrec et le service e-Carte Bleue, elle critique les moyens de preuve par lesquels la société Syrdrec prétend à une contrefaçon et en toute hypothèse elle exclut celle-ci en ce que le brevet Syrdrec prévoit un système de paiement alors que le service e-Carte Bleue n'a pour fonction que de sécuriser le paiement. La cour fait expressément référence aux conclusions de la société Orbiscom du 13 mars 2008 tendant à voir déclarer irrecevable l'intervention volontaire de M. Y..., tendant à voir confirmer le jugement, tendant subsidiairement à voir déclarer nulles les revendications 1 et 7 du brevet, au débouté des prétentions de la société Syrdrec et de M. Y..., à titre très subsidiaire au débouté des demandes de dommages et intérêts de la société Syrdrec et de M. Y.... Sur l'appel en garantie formé à son encontre par la société Setib, la société Orbiscum Ltd fait la réserve du cadre strict des accords intervenus. En tout état de cause la société Orbiscom Ltd demande la condamnation solidaire de la société Syrdrec et de M. Y... à lui payer 100 000 € pour procédure abusive et 100 000 € pour frais irrépétibles avec distraction des dépens au profit de la SCP Dessart Sorel Dessart.
La société Setib (aux droits de la société FTO) expose qu'elle a fourni au GIE Carte Bleue le modèle de sécurisation des paiements obtenu de la société Orbiscom Ltd par un contrat de licence du 7 février 2002. Elle traite de l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de M. Y... et de l'intervention forcée de la société Orbis Patents ainsi que de la nullité du brevet Syrdrec en faisant essentiellement référence aux écritures de la société Orbiscom Ltd. Elle indique avoir consenti une garantie au GIE Carte Bleue et devoir être elle-même garantie par la société Orbiscom Ltd. La société Setib conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'intervention de M. Y..., à la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé de la nullité du brevet no91/07639, à titre subsidiaire à la nullité des revendications 1 et 7, au débouté des prétentions de la société Syrdrec et de M. Y..., à titre très subsidiaire au débouté des demandes de dommages et intérêts de la société Syrdrec et de M. Y.... En tout état de cause elle déclare qu'elle garantirait le GIE Groupement Carte Bleue et la société Carte Bleue au titre des condamnations qui seraient prononcées dans les termes des conventions conclues avec ces sociétés, et elle demande à être elle-même garantie par la société Orbiscom. Elle sollicite de la société Syrdrec et de M. Y... solidairement 50 000 € pour action abusive et appel abusif outre 50 000 € pour frais irrépétibles avec distraction des dépens au profit de la SCP Chateau.
Le groupement Carte Bleue et la société Carte Bleue s'en rapportent aux écritures déposées par la société Orbiscom Ltd et la société Setib. Ils s'indignent de la mauvaise foi de la société Syrdrec qui pratique des amalgames et qui procède par affirmations gratuites. Ils soutiennent que la procédure présente un caractère abusif et avoir subi un préjudice en raison d'une mise en cause par des communiqués de presse publiés sur internet entre août et novembre 2007. S'ils venaient à faire l'objet d'une condamnation, le Groupement Carte Bleue et la société Carte Bleue demandent la garantie de la société Setib. Ils concluent à l'irrecevabilité de l'intervention de M. Y..., à la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé de la nullité du brevet no91/07639, à titre subsidiaire à la nullité des revendications 1 et 7, au débouté des prétentions de la société Syrdrec et de M. Y..., à titre très subsidiaire au débouté des demandes de dommages et intérêts de la société Syrdrec et de M. Y.... En tout état de cause ils demandent la garantie de la société Setib, le paiement solidaire par la société Syrdrec et M. Y... de 100 000 € pour procédure abusive et 100 000 € pour frais irrépétibles, la distraction des dépens au profit de la Scp Rives Podesta.
SUR QUOI
Attendu, sur l'intervention volontaire de M. Y... en cause d'appel, que l'article 554 du Code de procédure civile offre cette intervention à la personne qui y a intérêt dès lors qu'elle n'a pas été partie ou représentée en première instance ;
Attendu que M. Y... a apporté son brevet à la société Syrdrec par acte du 13 février 1998 ; qu'il est intéressé au résultat du litige sur la validité de ce brevet et qu'il n'a pas été partie ni représenté en première instance ; que son intervention volontaire sera déclarée recevable ;
Attendu, sur l'intervention forcée de la société Orbis Patents Ltd en cause d'appel, que l'article 555 du Code de procédure civile autorise d'appeler une personne qui n'était ni partie ni représentée en première instance quand l'évolution du litige implique sa mise en cause ;
Attendu qu'aucune évolution du litige ne s'est produite depuis le jugement du 1er août 2005 qui impliquerait la nécessité d'une présence de la société Orbis Patents Ltd en cause d'appel ; que l'intervention forcée de la société Orbis Patents Ltd sera déclarée irrecevable ;
Attendu au fond que la validité du brevet no 91/07639 propriété actuelle de la société Syrdrec est contestée, spécialement dans ses revendications 1 et 7 dont cette société estime qu'elles sont contrefaites par le système e-Carte Bleue ; qu'il doit être statué en premier lieu sur la validité du brevet; que l'appréciation doit se faire au regard des revendications telles qu'elles sont libellées et non au regard des commentaires dont les revendications peuvent être assorties dans les écritures de la société Syrdrec ;
Attendu que la revendication 1 protège un :
"Système d'encaissement via des points encaisseurs (P1), (P2), ... (Pm), ...ayant des références (RP1), (RP2), ... (Rpm), ... l'encaissement étant effectué à l'aide de cartes (C1), (C2), ... (Cn), ..., le système étant caractérisé en ce qu'il comporte :
"- lesdites cartes (C1), (C2), ... (Cn), ..., munies chacune d'une référence d'identification (R1), (R2), ... (Rn), ..., chaque référence correspondant à une valeur actuelle (Va1), (Va2), ... (Van), ..., allant d'une valeur initiale finie (V1), (V2), ... (Vn) ... à une valeur nulle,
"- une unité de calcul et de commande ayant une mémoire dans laquelle sont mémorisées, d'une part, les références d'identification (R1), (R2), ...(Rn), et leurs valeurs actuelles (Va1), (Va2), ... (Van) ..., et d'autre part, des références de points encaisseurs (RP1), (RP2), ... (Rpm) ..., et des valeurs actuelles correspondantes (VP1), (VP2),... (Vpm), ..., ces dernières étant égales ou supérieures à zéro, ladite unité :
"a) - recevant à l'aide d'un moyen de communication de la part d'un point encaisseur (Pm) dont la référence est (Rpm) une demande de déduction d'une valeur quelconque (V) de la valeur actuelle (Van) d'une carte dont la référence est (Rn),
"b) - vérifiant la présence de la référence (Rn) et émettant un signal de rejet (S1) en cas d'absence,
"c) - calculant dans le cas de présence de la référence (Rn), la différence (D = Van-V)
"d) - émettant un signal (S2) dans le cas où (D 0) ou un signal (S3) d'acceptation dans le cas ou (D ou = à 0),
"e) - remplaçant dans le cas où (D ou = à 0) la valeur actuelle (Van) par une nouvelle valeur actuelle égale à (D) et enfin,
"f) - ajoutant, dans le cas où (D ou = à 0), sur la valeur (VPm) du point encaisseur (Pm) une valeur (aV) où (a) est un coefficient inférieur ou égal à l'unité"
Attendu que la revendication 7 protège un :
"Système d'encaissement selon l'une quelconque des revendication précédentes caractérisé en ce qu'à chacune des références (R1), (R2), ... (Rn) ..., correspond une durée de validité (T1), (T2), ... (Tn) ..., à compter d'une date initiale (t1), (t2), ... (tn) ..., la dite unité de calcul et de commande :
"a) - recevant à une date (tn') une demande de déduction concernant une carte (Cn) dont la référence est (Rn) et la durée de validité (Tn),
"b) - calculant une durée (Tn' = tn' - tn),
"c) - émettant un signal (S6) dans le cas où (Tn' Tn)" ;
Attendu que l'article L 611-10 2odu Code de la propriété intellectuelle exclut de la notion d'invention "les plans, principes et méthodes ... dans le domaine des activités économiques..." ; que force est de constater qu'en l'espèce la revendication 1 porte sur un système d'encaissement, donc une activité économique, qui n'a de technique que la référence à l'unité de calcul et de commande; que toutefois cette unité de calcul et de commande, bien que revendiquée par M. Y... et la société Sydrec, n'est pas décrite ; qu'il est dit les résultats qui en sont attendus mais son fonctionnement n'est nullement expliqué de sorte que le brevet détenu par la société Syrdrec se borne à poser des principes sans que les moyens techniques permettant la réalisation soient explicités; que ce brevet enfreint l'article précité ;
Attendu par ailleurs qu'aux termes de l'article L 611-11, une invention n'est pas nouvelle et elle n'est pas non plus protégeable si elle est comprise dans l'état de la technique ;
Attendu que le rapport d'examen préliminaire de la demande internationale déposée le 18 juin 1992 par M. Y... dans le cadre du Traité de coopération en matière de brevet écarte l'activité inventive du brevet litigieux pour les revendications 1, 5, 7, 14 par une motivation explicitée aux feuillets 3 à 5 du rapport; que M. Y... n'a pas poursuivi sa demande ;
Attendu par ailleurs que des brevets antérieurs ont été déposés qui ruinent la nouveauté du brevet de la société Syrdrec ;
Attendu que le brevet français FR-A-2 092 282, Hempstead Bank Inc a été publié le 21 janvier 1972; que la revendication 1 décrit "un dispositif de transferts de fonds entre des comptes de clients et des comptes de cessionnaires, caractérisé en ce qu'il comprend une carte d'identité pour chaque client, chaque carte portant des indices d'identification lisibles à la machine, au moins un terminal entrée-sortie pour coder les indices d'identification et le montant à transférer, des moyens installés à un emplacement central pour mémoriser le solde disponible sur lequel on peut "tirer" pour chaque compte de client, et pour accumuler le crédit au compte du cessionnaire, une liaison de communication pour transmettre les indices d'identification codés et le montant à transférer de chaque terminal entrée-sortie audit emplacement, une calculatrice digitale audit emplacement central pour porter ledit montant au débit du solde disponible du client et pour l'ajouter au crédit cumulé du cessionnaire et des moyens pour appliquer à cette liaison de communication un signal d'exécution du transfert si et seulement si le solde disponible mémorisé du client dépasse le montant à transférer et pour appliquer un signal de non exécution du transfert si ledit montant dépasse le solde disponible du client" ;
Attendu qu'un tel brevet portant sur un système de transfert de fonds (soit un système d'encaissement) permettant des opérations entre clients et cessionnaires (soit des points encaisseurs) au moyen de cartes portant des références d'identification avec une valeur actuelle, comportant un emplacement central (soit une unité de calcul et de commande) recevant de la part d'un point encaisseur une demande de déduction de valeur de la carte, calculant la différence entre la valeur de la carte et la valeur à déduire, remplaçant la valeur actuelle à l'instant T par une nouvelle valeur actuelle (T-1), ajoutant la valeur correspondante au compte du point encaisseur et émettant un signal d'exécution si la valeur actuelle est insuffisante et un signal de non exécution dans le cas contraire; qu'un tel brevet publié en 1972 comporte et décrit les caractéristiques essentielles de l'invention de 1991 dont la société Syrdrec se prévaut ;
Attendu que le brevet européen no0 357 634 (Sankey Vending Ltd) publié le 20 octobre 1988 décrit à la revendication 1 "une machine de vente destinée à être commandée par l'utilisation d'une carte de club ayant des informations enregistrées comprenant un code d'identification, la machine comportant un lecteur de carte qui peut lire l'information, un dispositif de validation associé au lecteur de carte et destiné à mettre la machine en fonctionnement sous la commande d'un utilisateur qui a fait passer une carte valide de club dans le lecteur de carte, une mémoire, un dispositif d'enregistrement dans la mémoire d'un crédit ou d'une limite de crédit (crédit de carte) correspondant à cette carte de club, un dispositif de saisie destiné à permettre à l'utilisateur de sélectionner un article ou un service en vente, un dispositif comparateur du crédit de carte conservé par la mémoire pour la carte de club qui a été lue par le lecteur au coût de l'article ou service sélectionné, destiné à permettre la distribution de l'article choisi ou l'exécution du service choisi par l'utilisateur si le crédit de la carte est égal ou supérieur au coût, et un dispositif de commande destiné à permettre la distribution de l'article choisi ou l'exécution du service choisi par l'utilisateur lorsque le comparateur le permet et destiné à réduire le crédit de la carte du coût, caractérisée en ce que le dispositif d'enregistrement dans la mémoire du crédit de la carte enregistre le crédit de la carte dans la mémoire à la suite du passage de la carte de club dans le lecteur de carte lorsque la carte de club est transmise pour la première fois dans le lecteur de carte" ;
Attendu qu'une telle revendication comporte une carte à valeur finie présentée à une machine de vente (qui peut être remplacée par un point encaisseur), carte qui est reliée à une mémoire centrale (unité de calcul et de commande) qui la vérifie, qui vérifie si le paiement est autorisé et qui rectifie le nouveau solde après paiement; qu'un tel système présente les mêmes caractéristiques que le brevet Syrdrec ;
Attendu, sur la revendication no7, qu'elle se borne à fixer à la carte une durée limitée dans le temps; que cette caractéristique n'a rien de nouveau ;
Attendu en conséquence que le brevet revendiqué par la société Syrdrec et par M. Y... est nul ; que ces derniers ne sont pas fondés à se plaindre d'une contrefaçon quelconque ; qu'en conséquence le jugement sera confirmé sauf à préciser que le débat contradictoire a porté sur les revendications 1 et 7 de sorte qu'elles seules peuvent être annulées ;
Attendu, sur les dommages et intérêts pour procédure abusive, que si la procédure est particulièrement lourde en raison des longs développements des écritures de la société Syrdrec, il n'en résulte pas pour autant une faute et un préjudice dans l'exercice du droit d'appel et dans l'intervention volontaire de M. Y... ; que les demandes d'indemnisation pour procédure abusive seront rejetées ;
Attendu qu'il convient d'appliquer l'article 700 du code de procédure civile ; que la société Syrdrec et M. Y... devront payer in solidum à ce titre 5 000 € à la société Orbis Patents Ltd, 5 000 € à la société Setib, 5 000 €au Groupement Carte Bleue et à la société Carte Bleue pris ensemble et 20 000 € à la société Orbiscom Ltd ;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Reçoit l'intervention volontaire de M. Y....
Déclare irrecevable l'intervention forcée de la société Orbis Patents Ltd
Réforme le jugement déféré en ce qu'il a annulé le brevet 91 07 639 déposé le 20 juin 1991 et détenu par la société Syrdrec.
Prononce la nullité des revendications 1 et 7 du dit brevet.
Confirme les autres dispositions du jugement
Y ajoutant,
Condamne in solidum la société Syrdrec et M. Y... à payer cinq mille euros (5 000 €) à la société Orbis Patents Ltd, cinq mille euros (5 000 €) à la société Setib, cinq mille euros (5 000 €) au Groupement Carte Bleue et à la société Carte Bleue pris ensemble et vingt mille euros (20 000 €) à la société Orbiscom Ltd pour frais d'appel irrépétibles.
Condamne in solidum la société Syrdrec et M. Y... aux dépens.
Autorise la SCP Rives Podesta, la SCP Dessart Sorel Dessart, la SCP Chateau à faire application de l'article 699 du Code de procédure civile.
Le greffier, Le président,