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14/03/2008 | FRANCE | N°07/01066

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 14 mars 2008, 07/01066


14 / 03 / 2008
ARRÊT No
No RG : 07 / 01066 MH / HH

Décision déférée du 05 Février 2007- Conseil de Prud' hommes de TOULOUSE- 05 / 01252 Gérard BLANCHET

Louis X...
C /
SAS LAUREN VIDAL
INFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D' APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Louis X...... 31240 ST JEAN

représenté par Me Philippe ISOUX, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME (S)
SAS LAUREN VIDAL 22 / 24 rue Delizy

93500 PANTIN

représentée par Me Pascal NARBONI, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L' affa...

14 / 03 / 2008
ARRÊT No
No RG : 07 / 01066 MH / HH

Décision déférée du 05 Février 2007- Conseil de Prud' hommes de TOULOUSE- 05 / 01252 Gérard BLANCHET

Louis X...
C /
SAS LAUREN VIDAL
INFIRMATION
REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D' APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU QUATORZE MARS DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Louis X...... 31240 ST JEAN

représenté par Me Philippe ISOUX, avocat au barreau de TOULOUSE
INTIME (S)
SAS LAUREN VIDAL 22 / 24 rue Delizy 93500 PANTIN

représentée par Me Pascal NARBONI, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
L' affaire a été débattue le 31 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
P. de CHARETTE, président M. P. PELLARIN, conseiller M. HUYETTE, conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :- CONTRADICTOIRE- prononcé publiquement par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l' article 450 du nouveau Code de procédure civile- signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

Monsieur X... a été embauché le 4 octobre 1996 par la société LAUREN VIDAL, comme VRP.
Il a été licencié pour faute grave par lettre du 18 avril 2005, l' employeur lui indiquant en substance avoir dans un premier temps accepté qu' il développe sa carte avec sa compagne Madame Y..., avoir demandé à tous les représentants de ne pas travailler pour la société concurrente OLIVER JUNG, avoir constaté que Madame Y... avait pris une carte pour représenter cette société, que tous deux ont continué à tourner ensemble, qu' à l' occasion de ces campagnes Madame Y... a dénigré la société LAUREN VIDAL, qu' il a tardé à transmettre ses plans de tournée et les informations sur son activité pour laisser libre champ à sa compagne, que pendant son arrêt pour maladie c' est sa compagne qui a utilisé des rendez- vous prévus avec des clients, qu' il s' agit là d' un comportement déloyal, que par ailleurs le chiffre d' affaires sur son secteur a considérablement baissé parce qu' il l' a laissé en état d' abandon.
Monsieur X... a saisi le Conseil de prud' hommes afin de faire juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et d' obtenir un dédommagement à ce titre, outre une indemnité de clientèle.
Par jugement du 5 février 2007, le Conseil a dit le licenciement justifié mais la faute grave non caractérisée, a alloué une indemnité pour préavis et l' indemnité de licenciement, ainsi qu' une somme à titre d' indemnité de clientèle.
Devant la Cour, Monsieur X... plaide que son employeur a toléré que sa compagne l' aide dans son travail, que bien qu' il ait été embauché comme multicarte la société LAUREN VIDAL a toujours fait pression pour qu' il travaille uniquement pour elle, qu' il a loyalement informé son employeur, en août 2004, du fait que Madame Y... allait représenter la société OLIVER JUNG, que ni l' un ni l' autre n' ont eu un comportement critiquable, qu' il ne pourrait pas être sanctionné pour une éventuelle faute commise par sa compagne, que sur le secteur qui lui a été attribué il est parti de rien et à généré un important chiffre d' affaires, que si les résultats ont chuté c' est du fait de son arrêt pour dépression à compter de janvier 2005 et parce que les dernières collections étaient moins attrayantes et concurrencées par d' autres griffes, que son licenciement est injustifié et qu' il doit être indemnisé, que l' attitude fautive de son employeur lui permet de réclamer un dédommagement complémentaire, qu' il a droit à une indemnité de clientèle à hauteur de 239. 393 euros.
Il sollicite 3. 000 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.
La société LAUREN VIDAL répond que si un contrat de travail a été signé avec Monsieur X... c' est de fait Madame Y... qui a travaillé pour l' entreprise comme VRP, que de toutes façons ils ont toujours travaillé ensemble, que la direction a fait savoir aux VRP qu' elle n' accepterait pas qu' ils prennent une carte OLIVER JUNG, le styliste maison travaillant également pour ce concurrent, que par lettre de février 2004 Monsieur X... et Madame Y... ont assuré qu' ils ne travailleraient pas pour OLIVER JUNG, qu' en août 2004 Monsieur X... a de nouveau sollicité le droit pour sa compagne d' obtenir une carte OLIVER JUNG, qu' une réponse négative lui a été apportée, que Madame Y... est devenue représentante de la société FASHION VIP créée par l' ancien styliste de LAUREN VIDAL, ce concurrent se livrant à des manoeuvres déloyales, qu' elle a admis en mars 2005 représenter aussi OLIVER JUNG, qu' il a fallu deux mises en demeure pour que Monsieur X... communique la liste de ses show- rooms, que pendant l' arrêt maladie de Monsieur X... deux rendez- vous pris par lui ont été utilisés par Madame Y... pour présenter les produits des marques concurrentes, que tout ceci caractérise une violation de l' obligation de loyauté qui pèse sur chaque salarié tant pendant ses périodes d' activités que ses périodes d' arrêt pour maladie, que la déloyauté constitue une faute grave, qu' elle démontre que Monsieur X... a totalement délaissé son secteur et ses clients notamment en février 2005, qu' il n' a rien fait pour aider son employeur à organiser une tournée de remplacement pendant son arrêt pour maladie, que son arrêt ne l' empêchait pas de transmettre les informations indispensables, que son chiffre d' affaires a considérablement chuté entre 2004 et 2005, que du fait de l' existence d' une faute grave Monsieur X... n' a pas droit à une indemnité de clientèle, qu' une partie du travail a été effectué par Madame Y..., qu' il n' a pas développé la clientèle seul mais a été aidé par l' entreprise, qu' il n' a subi aucun préjudice.
Elle conclut au rejet de toutes les demandes,
MOTIFS DE LA DÉCISION
1 : La rupture du contrat de travail
Il ressort des documents produits que si un contrat de travail a été signé entre la société LAUREN VIDAL et Monsieur X..., Madame Y... a de fait toujours exercé une activité de représentation de cette entreprise, ainsi que cela ressort de factures sur lesquelles elle apparaît comme " représentant ", de ses courriers aux gérants et de sa participation à des réunions internes, et d' attestations produites (Madame Z..., Kmeron Boutik, Madame A...) qui lui donnent même un rôle essentiel.
Il en ressort également que le styliste de LAUREN VIDAL a quitté l' entreprise en août 2004 et a travaillé pour les marques OLIVER JUNG et FASHION VIP, les trois sociétés étant concurrentes (attestation du gérant du magasin Divine, attestation du gérant de Italfrance diffusion).
Par courrier du 8 décembre 2004, la société LAUREN VIDAL a attiré l' attention de Monsieur X... sur le fait que Madame Y... représentant avec son fils des marques concurrentes il n' était plus envisageable qu' elle l' accompagne sur les stands de l' entreprise et lors des réunions du personnel, et lui a demandé de conserver confidentiellement tous les éléments de politique commerciale et plus largement tout ce qui concerne les produits de la marque. L' employeur a également demandé la communication de la liste des show rooms et présentations pour les mois à venir.
Après deux relances Monsieur X... a envoyé le 15 janvier 2005 un planning d' activités pour la période allant du 24 janvier au 8 mars 2005.
Il a été placé en arrêt pour maladie le 25 janvier 2005 et jusqu' au 28 février.
La société LAUREN VIDAL lui a demandé à plusieurs reprises de l' informer de l' état des rendez- vous pris et des coordonnées des interlocuteurs afin de pouvoir tenir les clients informés des dates de possibles rencontres avec un autre commercial de la société.
Monsieur X... transmettait le 28 février un document mentionnant des visites aux clients le jour même ainsi qu' en mars, tout en obtenant, le 28 février, un nouvel arrêt de travail jusqu' au 15 mars.
Le planning envoyé par Monsieur X... mentionnait notamment les visites aux clients Folie de Marie et Barranx le 28 février. Il ne s' y est pas rendu du fait de la prolongation de son arrêt de travail.
Mais la société LAUREN VIDAL a contacté ces deux clients qui ont indiqué avoir reçu la visite de Madame Y... en tant que représentant des marques OLIVER JUNG et FASHION VIP.
De la même façon, alors que le 4 février Madame Y... et Monsieur X... devaient présenter la collection LAUREN VIDAL dans un bowling, seule la première s' y est rendue et a présenté uniquement les collections OLIVER JUNG et FASHION VIP. De ce fait, ainsi que l' atteste une cliente (Madame B...), la collection LAUREN VIDAL n' a été ni présentée ni vendue.
L' employeur a aussi appris, le 12 avril 2005, qu' à l' occasion du salon de Paris qui s' est tenu en septembre 2004 Madame Y... a fait l' intermédiaire entre un revendeur potentiel italien et la marque OLIVER JUNG, la marque LAUREN VIDAL étant critiquée à cette occasion. Ce revendeur, qui travaillait déjà avec LAUREN VIDAL, a été choqué par l' attitude de Madame Y... qui mettait en avant des entreprises concurrentes de celle pour laquelle elle travaillait jusque là.
Une cliente a également raconté (attestation de Madame C...) qu' alors qu' un rendez- vous était prévu avec Madame Y... pour la présentation des produits LAUREN VIDAL, cette dernière a mis en avant les produits concurrents et indiqué que son époux passerait plus tard présenter les produits LAUREN VIDAL.
Une autre cliente a indiqué (attestation de Madame D...) qu' à l' occasion d' une présentation de vêtements Madame Y..., qui devait initialement montrer la collection LAUREN VIDAL, a dénigré cette société et mis en avant les produits concurrents. Cette cliente a ajouté avoir été choquée par le comportement de Madame Y....
Un VRP de l' entreprise LAUREN VIDAL (Monsieur E...) a indiqué avoir appris de l' une de ses clientes que Madame Y... s' était d' abord présentée comme représentant de LAUREN VIDAL pour ensuite critiquer cette marque et placer des produits des sociétés concurrentes pour lesquelles elle travaillait également.
Par ailleurs, Madame Y... a confirmé dans une lettre du 7 mars 2005 qu' elle avait acquis des cartes de représentation pour les marques OLIVER JUNG et FASHION VIP.
* * *
Ce qui précède fait apparaître que pendant de très nombreuses années Monsieur X... et Madame Y... ont, ensemble, dans le cadre d' un contrat pour le premier et d' une activité non contractualisée pour la seconde, travaillé en permanence et exclusivement pour la société LAUREN VIDAL.
Par la suite, Madame Y... a acquis des cartes de représentation pour des sociétés directement concurrentes de LAUREN VIDAL.
Si le fait pour un VRP d' avoir pour conjoint une personne qui travaille également comme VRP et pour une ou plusieurs sociétés concurrentes n' est pas en soi une faute susceptible d' être sanctionnée par son employeur, encore faut- il qu' à aucun moment son comportement ne soit de nature à favoriser délibérément l' activité de son conjoint au détriment de la sienne.
En l' espèce, il est démontré que Monsieur X..., sans rien faire pour l' empêcher, a laissé Madame Y..., qui intervenait alors pour des sociétés concurrentes, l' accompagner lors de salons présentant les marques que chacun représentait et aller d' un stand à l' autre pour favoriser ses propres cartes, démarcher sa propre clientèle dans ces salons, visiter des clients à sa place, et cela notamment pendant son arrêt pour maladie. Pendant cet arrêt il a même envoyé à son employeur un tableau des visites ne correspondant pas à la réalité, les dates prévues étant utilisées à son seul profit par Madame Y... pour placer les vêtements des sociétés concurrentes de LAUREN VIDAL.
En laissant la confusion s' installer, en permettant à Madame Y... de profiter du réseau mis en place par lui pour vendre les produits de marques concurrentes, ceci malgré les multiples avertissements de ses employeurs et alors qu' il savait que son attitude et celle de sa compagne conduisaient inéluctablement à une perte de clientèle pour la société LAUREN VIDAL, en n' informant pas cette dernière des difficultés rencontrées et du conflit d' intérêts au sein de son couple, en ne recherchant pas les moyens de préserver d' abord les intérêts de son employeur, Monsieur X... a agi de façon déloyale et a commis une faute rendant impossible son maintien dans l' entreprise pendant la durée du préavis.
2 : L' indemnité de clientèle
En application de l' article L 751- 9 du code du travail, le VRP qui est licencié pour une faute grave n' a pas droit à une indemnité de clientèle.
Tel étant le cas de Monsieur X..., sa demande présentée à ce titre doit être rejetée.
3 : Les fautes de la société LAUREN VIDAL
Non seulement la société LAUREN VIDAL n' a jamais interdit à Monsieur X... de prendre d' autres cartes à condition qu' il ne travaille pas pour des sociétés concurrentes, ainsi que cela ressort de la lettre du 19 mars 2001 par laquelle l' employeur demandait à son salarié de lui transmettre la liste des cartes en sa possession, mais les échanges de courriers, les réunions, et les mises au point ont toujours eu légitimement pour objet de faire obstacle à l' atteinte aux intérêts de l' entreprise.
En agissant ainsi la société LAUREN VIDAL n' a nullement harcelé Monsieur X... ni eu un comportement fautif à son égard.
La demande de dédommagement est donc sans fondement.
4 : les frais de procédure
Pour ses frais devant la Cour la société LAUREN VIDAL recevra 1. 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Infirme le jugement contesté.
Et statuant à nouveau,
Dit le licenciement de Monsieur X... pour faute grave justifié.
Rejette les demandes de Monsieur X....
Condamne Monsieur X... à payer à la société LAUREN VIDAL 1. 000 euros en application de l' acte 700 du code de procédure civile.
Condamne Monsieur X... aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN- NIDECKER, greffier.
Le greffier Le président
Dominique FOLTYN- NIDECKER Patrice de CHARETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : 07/01066
Date de la décision : 14/03/2008

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 05 février 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-03-14;07.01066 ?
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