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07/03/2008 | FRANCE | N°07/05094

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 07 mars 2008, 07/05094


07 / 03 / 2008

ARRÊT No

No RG : 07 / 05094
MP P / HH

Décision déférée du 27 Août 2007-

FIVA de PARIS-

Roger AA...
Monique BB... veuve AA...
Laurent AA...
Nathalie AA...-MONTIEL

C /

FIVA

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2-Chambre sociale
***
ARRÊT DU SEPT MARS DEUX MILLE HUIT
***
DEMANDEUR AU RECOURS

Monsieur Roger AA..., décédé

PARTIES INTERVENANTES

Madame Monique BB... veuve AA...,
a

yant droit de M. Roger AA... décédé
18 chemin de la Galage
09100 LA TOUR DU CRIEU

comparant en personne

Monsieur Laurent AA...,
fils et ayant droit de M. Ro...

07 / 03 / 2008

ARRÊT No

No RG : 07 / 05094
MP P / HH

Décision déférée du 27 Août 2007-

FIVA de PARIS-

Roger AA...
Monique BB... veuve AA...
Laurent AA...
Nathalie AA...-MONTIEL

C /

FIVA

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2-Chambre sociale
***
ARRÊT DU SEPT MARS DEUX MILLE HUIT
***
DEMANDEUR AU RECOURS

Monsieur Roger AA..., décédé

PARTIES INTERVENANTES

Madame Monique BB... veuve AA...,
ayant droit de M. Roger AA... décédé
18 chemin de la Galage
09100 LA TOUR DU CRIEU

comparant en personne

Monsieur Laurent AA...,
fils et ayant droit de M. Roger AA... décédé
Route de Bouchonne
09100 PAMIERS

comparant en personne

Madame Nathalie AA...-MONTIEL,
fille et ayant droit de M. Roger AA... décédé
...
09100 LA TOUR DU CRIEU

comparant en personne

tous représentés par la SCP TESSONNIERE ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS

DÉFENDEUR AU RECOURS

FIVA
Tour Gallienni II
36, Avenue du Général De Gaulle
93175 BAGNOLET

représentée par Me DINETY, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :

P. de CHARETTE, président
C. PESSO, conseiller
M. P. PELLARIN, conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER

ARRET :
-CONTRADICTOIRE
-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
-signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. Roger AA..., né en 1949, a été exposé à l'inhalation de poussières d'amiante. Il a été reconnu atteint d'un carcinome anaplasique à petites cellules (cancer broncho-pulmonaire) le 18 août 2005, dont le caractère professionnel a été admis par l'organisme social le 25 août 2006.

Régulièrement saisi, le FIVA lui a fait l'offre d'indemnisation suivante :

-préjudice patrimonial : en attente de l'information sur la rente versée par l'organisme social,

-préjudice extra-patrimonial complémentaire :

+ préjudice moral : 77. 500 €
+ souffrances physiques : 25. 000 €
+ préjudice d'agrément : 23. 000 €
+ soit au total un complément de 125. 000 €.

M. Roger AA... a formé un recours contre cette offre par lettre recommandée envoyée au greffe le 9 octobre 2007. Il est décédé le 18 octobre suivant. Ses ayants droit, Mme Monique BB... veuve AA..., M. Laurent AA... et Mme Nathalie AA... ont repris l'instance.

Les consorts AA... demandent que les pièces qu'ils ont communiquées soient déclarées recevables, ainsi que leur prétention nouvelle au titre de l'assistance de tierce personne, et réclament que l'indemnisation du préjudice extra-patrimonial de M. Roger AA... soit fixée de la manière suivante :

-souffrances physiques : 120. 000 €,
-souffrance morale : 140. 000 €,
-préjudice d'agrément : 120. 000 €,
-en réparation du préjudice esthétique : 25. 000 €,

Ils sollicitent en outre la somme de 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que l'irrecevabilité des pièces no 51 et 52 soulevée par le FIVA n'est pas fondée dans la mesure où elle constituerait une dérogation aux règles de droit commun non prévue par les textes applicables en la matière, et que la demande nouvelle relative à un chef de préjudice trouvant sa cause dans la contamination par l'amiante est recevable. Ils estiment l'indemnisation au titre de la tierce personne justifiée compte tenu de la dégradation de l'état de santé de M. AA... en août 2007, et décrivent les souffrances physique et morale subies par celui-ci jusqu'à son décès.

LE FIVA conclut à l'irrecevabilité de la demande au titre de la tierce personne car non présentée devant lui alors que le formulaire permet de l'émettre, subsidiairement au rejet des pièces 51 et 52, non produites lors de l'introduction de la demande, très subsidiairement à la réduction des sommes réclamées à ce titre. Sur les autres préjudices, il demande la confirmation de ses offres et la réduction des prétentions des consorts AA... fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

I / sur l'indemnisation du préjudice patrimonial

A / l'incapacité permanente partielle :

Le FIVA s'engage à faire une offre dès réception des informations relatives au versement de la rente par l'organisme social.

B / l'indemnisation au titre de la tierce personne :

-sur la recevabilité de la demande

Dès lors que M. Roger AA... n'a pas accepté l'offre que lui a faite le FIVA, ses ayants droit sont recevables à soumettre à la Cour d'appel toute demande d'indemnisation d'un chef de préjudice trouvant sa source dans la contamination par l'amiante, en application de l'article 53-V de la loi du 23 décembre 2000, même s'il ne l'a pas développée auparavant auprès du FIVA.

-sur la recevabilité de pièces communiquées après la saisine de la Cour

L'article 26 du décret 2001-963 du 23 octobre 2001 relatif au FIVA prévoit que " par dérogation aux dispositions du titre VI du livre II du code de procédure civile, les actions intentées devant la cour d'appel sont engagées, instruites et jugées conformément aux dispositions ci-après. " Il n'exclut donc pas l'ensemble des règles de procédure applicables devant les juridictions civiles énoncées dans le livre Io du code de procédure civile, en particulier les principes directeurs du procès, tel celui de la contradiction, et les dispositions relatives aux moyens de défense, à l'administration de la preuve, à la communication des pièces. En outre, l'article 28 du décret du 23 octobre 2001 dispose que l'auteur de l'action contre le FIVA mentionne la liste des pièces et documents justificatifs qu'il produit, dans la déclaration remise ou adressée au greffe pour exercer l'action ou dans l'exposé des motifs qui peut être déposé dans le mois suivant la déclaration et les remet au greffe de la Cour en même temps que cette déclaration ou cet exposé.

Mais ni cet article ni aucun autre du décret ne prévoient l'irrecevabilité des pièces ne figurant pas sur ladite liste et aucune disposition n'interdit la communication ultérieure de pièces. Au contraire, les dispositions du livre Io du code de procédure civile consacrent le droit pour chaque partie de produire les pièces nécessaires au succès de ses prétentions.

En conséquence, les pièces no 51 et 52 communiquées en cours de procédure par les consorts AA... sont recevables.

-sur la demande d'indemnisation au titre de l'assistance d'une tierce personne

Il ressort des pièces produites que l'état de santé de M. Roger AA... nécessitait depuis le 1er août 2007 et jusqu'à son hospitalisation au 31 août 2007 une assistance de 4 à 6 heures par jour pour réaliser les actes élémentaires de la vie quotidienne, cette assistance étant accomplie par son épouse. La durée de 6 heures réclamée apparaît justifiée au regard des interventions nécessaires à tout moment, y compris la nuit. Le montant de l'indemnité allouée ne saurait être réduit du fait que l'assistance a été assurée par un membre de la famille. Le montant de l'indemnisation est donc fixé, sur la base d'un taux horaire de 13 € à la somme de (6 h x 14 € x 30 j) = 2. 520 €.

II / Sur le préjudice extra-patrimonial

L'article 53 I de la loi du 23 décembre 2000 pose le principe de la réparation intégrale des préjudices résultant directement d'une exposition à l'amiante. Cette indemnisation doit être évaluée en fonction des préjudices effectivement subis par chaque victime, appréciés à partir d'éléments objectifs relatifs à son état de santé, à son âge, à sa situation personnelle, familiale et sociale. A la souffrance physique et au préjudice d'agrément, résultant de la privation des activités de loisir normales de l'existence, s'ajoute la souffrance morale spécifique aux victimes de l'amiante qui varie en fonction du degré de gravité de la pathologie et de l'âge de l'intéressé.
Les documents médicaux ainsi que les attestations produits aux débats témoignent de l'importance des souffrances physiques endurées par M. Roger AA... à compter de l'été 2005, liées aux effets du carcinome anaplasique qui, en dépit de multiples chimiothérapies, a récidivé et progressé, avec métastases cérébrales. Les traitements et examens médicaux ont également été source de souffrances. Sont décrites une dysphagie, des difficultés d'alimentation, des nausées et vomissements, des douleurs thoraciques et abdominales, une intense fatigue, des pertes d'équilibre et maux de tête.

La souffrance morale résulte de la connaissance par le malade du caractère incurable et douloureux de sa pathologie révélée alors qu'il avait 56 ans, de sa dépendance totale à l'égard de ses proches.

Son état l'a privé de tous les agréments normaux de l'existence, et notamment de la possibilité de toute sortie en plein air avec ses petits enfants. Enfin, M. Roger AA... a subi rapidement une déchéance physique du fait d'une perte de poids considérable (de 82 à 52kg en juillet 2006, soit plus d'un an avant son décès) qui incontestablement lui a causé un préjudice esthétique.

Compte tenu de ces éléments, ses préjudices extra-patrimoniaux sont évalués de la manière suivante :

-souffrances physiques : 60. 000 €,
-préjudice moral : 80. 000 €
-préjudice d'agrément : 35. 000 €.
-préjudice esthétique : 15. 000 €

Sur les demandes annexes

Aux termes de l'article 31 du décret du 23 octobre 2001, les dépens de procédure restent à la charge du FIVA.

Les consorts AA... obtenant satisfaction, le FIVA devra leur payer la somme 1. 200 € par application de l'article 700 code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Donne acte à Mme Monique BB... veuve AA..., M. Laurent AA... et Mme Nathalie AA..., dénommés ci-après les consorts AA..., de leur reprise d'instance.

Les déclare recevables en leur demande présentée au titre de l'assistance tierce personne. Dit n'y avoir lieu à écarter des débats les pièces communiquées sous les no 51 et 52.

Fixe l'indemnisation au titre de l'assistance d'une tierce personne à la somme de 2. 520 €.

Fixe l'indemnisation des préjudices extra-patrimoniaux de M. Roger AA... de la manière suivante :

-souffrances physiques : 60. 000 €,
-préjudice moral : 80. 000 €
-préjudice d'agrément : 35. 000 €.
-préjudice esthétique : 15. 000 €

Dit que le FIVA devra payer aux consorts AA... la somme de 1. 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit que les dépens de procédure sont à la charge du FIVA.

Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

Dominique FOLTYN-NIDECKERPatrice de CHARETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : 07/05094
Date de la décision : 07/03/2008

Analyses

FONDS DE GARANTIE - Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante - Victime de l'amiante - Action en justice contre le fonds - / JDF

L'article 26 du décret 2001-963 du 23 octobre 2001 relatif au FIVA n'exclut pas l'ensemble des règles de procédure applicables devant les juridictions civiles énoncées dans le livre Iº du code de procédure civile, en particulier les principes directeurs du procès, tel celui de la contradiction, et les dispositions relatives aux moyens de défense, à l'administration de la preuve, à la communication des pièces. En outre, l'article 28 de ce texte dispose que l'auteur de l'action contre le FIVA mentionne la liste des pièces et documents justificatifs qu'il produit, dans la déclaration remise ou adressée au greffe pour exercer l'action ou dans l'exposé des motifs qui peut être déposé dans le mois suivant la déclaration et les remet au greffe de la Cour en même temps que cette déclaration ou cet exposé. Ni cet article ni aucun autre du décret ne prévoient l'irrecevabilité des pièces ne figurant pas sur ladite liste et aucune disposition n'interdit la communication ultérieure de pièces. Au contraire, les dispositions du livre Iº du code de procédure civile consacrent le droit pour chaque partie de produire les pièces nécessaires au succès de ses prétentions. Les pièces communiquées en cours de procédure par les requérants sont donc recevables.


Références :

articles 26 et 28 du décret 2001-963 du 23 octobre 2001

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-03-07;07.05094 ?
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