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05/03/2008 | FRANCE | N°07/01675

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 05 mars 2008, 07/01675


05 / 03 / 2008 ARRÊT No138

No RG : 07 / 01675
CC / MFM

Décision déférée du 28 Février 2007- Conseil de Prud' hommes de CASTRES 04 / 213
J. CASTELLE

André X...


C /

SAS GRANDS GARAGES DE CASTRES

REFORMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D' APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 1- Chambre sociale
***
ARRÊT DU CINQ MARS DEUX MILLE HUIT
***

APPELANT (S)

Monsieur André X...


...

81700 SAINT GERMAIN DES PRES
représenté p

ar M. FREMY en vertu d' un pouvoir général

INTIME (S)

SAS GRANDS GARAGES DE CASTRES
Route de Toulouse
Z. I. de Mélou
81100 CASTRES
représentée par la SEL...

05 / 03 / 2008 ARRÊT No138

No RG : 07 / 01675
CC / MFM

Décision déférée du 28 Février 2007- Conseil de Prud' hommes de CASTRES 04 / 213
J. CASTELLE

André X...

C /

SAS GRANDS GARAGES DE CASTRES

REFORMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D' APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 1- Chambre sociale
***
ARRÊT DU CINQ MARS DEUX MILLE HUIT
***

APPELANT (S)

Monsieur André X...

...

81700 SAINT GERMAIN DES PRES
représenté par M. FREMY en vertu d' un pouvoir général

INTIME (S)

SAS GRANDS GARAGES DE CASTRES
Route de Toulouse
Z. I. de Mélou
81100 CASTRES
représentée par la SELAFA AUDIT CONSEIL DEFENSE (A. C. D.), avocats au barreau d' EPINAL

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l' article 945. 1 du nouveau Code de procédure civile, l' affaire a été débattue le 23 Janvier 2008, en audience publique, devant B. BRUNET, président et C. CHASSAGNE, conseiller chargés d' instruire l' affaire, les parties ne s' y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

B. BRUNET, président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller

Greffier, lors des débats : P. MARENGO

ARRET :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l' arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l' article 450 du Code de procédure civile
- signé par B. BRUNET, président, et par P. MARENGO, greffier de chambre.

FAITS ET PROCEDURE :

Embauché à compter du 26 septembre 1969 en qualité d' ouvrier mécanicien et exerçant en dernier lieu la fonction de magasinier, par la SAS Grands Garages de Castres, André X... démissionnait le 29 mai 2004 en invoquant un « harcèlement hiérarchique ».

Le 2 décembre 2004, il saisissait le conseil de prud' hommes de Castres pour voir requalifier la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse et réclamer diverses indemnités ainsi que des rappels de salaire.

Par jugement de départition du 28 février 2007, il était débouté de l' ensemble de ses demandes aux motifs que ni la discrimination salariale ni le harcèlement moral invoqués n' étaient établis.

André X... interjetait régulièrement appel de cette décision.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :

André X... demande à la Cour d' infirmer le jugement déféré pour dire et juger que sa démission s' analyse en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la SAS Grands Garages de Castres à lui payer :

- 12. 351, 79 euros de rappel de salaire correspondant à la différence entre son salaire et celui de son collègue direct,
- 1. 601, 54 euros au titre des heures supplémentaires effectuées à partir de l' année 2000,
- 433, 58 euros au titre de la prime d' encouragement,
- 2655, 94 euros au titre du préavis ainsi que 265, 59 euros de congés payés afférents,
- 12. 482, 64 euros au titre de l' indemnité conventionnelle de licenciement,
- 15. 935, 64 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 20. 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,
- 13. 953, 33 euros de dommages et intérêts au titre de la discrimination,
- 800 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.

Il expose occuper depuis 1984 les fonctions de magasinier et s' être rendu compte par hasard au début de l' année 2000 que son collègue, Monsieur A..., moins ancien que lui et exerçant le même travail, percevait une rémunération supérieure à la sienne alors que leurs fonctions et leur positionnement dans la grille des salaires étaient les mêmes.

Il demandait alors une augmentation qui ne lui sera jamais accordée mais à partir de là commençait le harcèlement de l' employeur pour le pousser à la démission.

Il soutient que dès le mois de septembre 2000 l' employeur avait augmenté le coefficient appliqué à M. A... pour justifier cette différence dont il avait bien pris conscience de l' illégalité.

Il indique que non seulement l' employeur ne lui a pas accordé l' augmentation sollicitée mais qu' en plus il a réduit sa prime d' encouragement, ce qui a entraîné une baisse de sa rémunération annuelle.

Saisie par ses soins l' inspection du travail se heurtait à la résistance de la SAS Grands Garages de Castres qui ne communiquait jamais les justificatifs demandés.

Il accuse l' employeur d' avoir tenter de justifier à posteriori la différence de salaire dénoncée en le « saquant » à l' occasion des entretiens individuels et à l' inverse en gratifiant M. A... de bonnes appréciations, en augmentant son coefficient et en modifiant sa fiche de fonctions.

Il réclame donc un réajustement de sa rémunération (salaire de base, heures supplémentaires et primes) à partir du mois de janvier 2000 et les rappels de salaire correspondants jusqu' à la rupture.

Il affirme avoir également subi une discrimination en matière de formation car il a été écarté d' actions de formation organisées au sein de l' entreprise, ce qui justifie l' allocation de dommages et intérêts à ce titre.

Il prétend que les faits de harcèlement, qu' il décrit longuement, ont commencé après l' embauche de Benoît B..., fils de son supérieur hiérarchique et que peu de temps après sa démission provoquée, le fils de M. A... a aussi été embauché.

Il reproche au conseil de prud' hommes d' avoir écarté d' emblée les attestations qu' il produit émanant pourtant de salariés toujours en poste dans l' entreprise lorsqu' ils les ont établies, ce qui confortent leur véracité.

Il indique avoir été durablement affecté par ce harcèlement moral et réclame des dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral et de santé.
Il ajoute que sa démission consécutive à ce harcèlement moral est nulle et doit s' analyser un en licenciement sans cause réelle et sérieuse et lui ouvrir droit aux diverses indemnités de rupture.

La SAS Grands Garages de Castres conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation de André X... à lui payer 3000 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.

Elle affirme que M. A... n' avait ni les mêmes fonctions, ni le même poste, ni la même classification que André X... et que l' inspecteur du travail, auquel elle a fourni tous les renseignements demandés, n' a dressé aucun procès verbal.

Elle souligne que :
- André X... a lui- même admis que ses fonctions étaient différentes de celles de M. A... en rayant sur sa fiche de poste la fonction de magasinier gestionnaire ;

- Dans le cadre de la poly compétence instaurée au sein du service des pièces de rechange, M. A... exerce la fonction d' adjoint PR en remplacement du titulaire, contrairement à André X... ;

- La dénomination de « vendeur magasinier » figurant sur les bulletins de salaire de André X... n' existe pas dans la classification des emplois de la convention collective, c' est la raison pour laquelle il a été classé en tant que magasinier échelon 3 suite à l' entrée en vigueur au 1er juin 2003 de cette nouvelle classification sans faire l' objet de la moindre rétrogradation, pendant que M. A... a été classé en tant que magasinier vendeur confirmé PRA ;

- André X... n' a jamais contesté cette nouvelle classification ;

- Contrairement à ce que prétend André X..., il a toujours servi les clients et il travaillait au guichet atelier alors que l' atelier est le plus gros client du magasin ;

Elle prétend que même avant le mois d' octobre 2000, date à laquelle les deux salariés ont été classés à des coefficients différents, ils n' effectuaient pas le même travail tout en étant tous deux au coefficient 190.

Elle ajoute que :

- la situation de André X... doit être comparée à l' ensemble des magasiniers dont la plupart percevaient un salaire inférieur au sien bien qu' ils sont pour la majorité titulaire du CAP contrairement à l' appelant.
- le salaire mensuel de base de André X... était supérieur au salaire minimum pour sa classification.
- la prime de fin d' année est une gratification évaluée par la direction selon des critères quantitatifs et qualitatifs.
- les entretiens annuels d' évaluation, mis en place à compter de l' année 2000 dans le cadre de la mise en place de la certification ISO, démontrent que les capacités de André X... à tenir son poste étaient en baisse constante et que sa note globale était inférieure à celle de ses collègues.
- les tests d' évaluation des compétences ont confirmé qu' André X... était moins performant que M. A....
- il est licite d' octroyer à deux salariés occupant les mêmes fonctions des rémunérations différentes si leur productivité est différente ;
- non seulement la productivité de André X... était inférieure à celle de M. A... mais il ne maîtrisait pas bien l' outil informatique ce qui générait des erreurs de commandes et il rechignait à servir les clients qui arrivaient juste avant l' heure de fermeture, ce qui l' avait contrainte à faire vérifier ses horaires par un agent de maîtrise.

Elle conteste toute discrimination en matière de formation et indique avoir assuré à André X... une formation en matière informatique ainsi que pour la conduite de chariots élévateur comme cela était préconisé dans son bilan de compétences.

Elle estime que la demande en dommages et intérêts présentée au titre de la discrimination n' est pas fondée surtout que André X... n' explique pas son chiffrage.

Elle considère que l' existence de faits permettant de faire présumer un harcèlement moral n' est pas démontrée et répond point par point aux arguments développés par le salarié à ce sujet.

Elle rappelle que André X... a démissionné pour travailler chez l' un de ses concurrents qui lui a débauché plusieurs autres salariés et qu' il a toujours été déclaré apte à son emploi par le médecin du travail que l' appelant a tenté de manipuler.

SUR QUOI :

- Sur la discrimination salariale :

Attendu qu' à titre liminaire il convient d' observer que c' est à tort qu' André X... invoque les dispositions de l' article L 122- 45 du code du travail alors qu' il ne prétend pas se trouver dans l' un des cas restrictivement prévu par ce texte ; qu' en réalité sa demande est fondée sur le principe « à travail égal, salaire égal « résultant des articles L 140- 2, L133- 5- 4 et L 136- 2, 8° du même code ;
Qu' en application de l' article 1315 du code civil, s' il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l' employeur de rapporter la preuve d' éléments objectifs justifiant cette différence ;

Attendu qu' en l' espèce André X... verse aux débats les bulletins de salaire de M. A... qui, jusqu' au mois septembre 2000 était tout comme l' appelant, affecté au poste de vendeur magasinier et classé à l' échelon 3 du niveau II coefficient 190, mais percevait une rémunération horaire supérieure à la sienne de 61, 13 francs contre 51, 54 francs ;
Que toutefois, la SAS Grands Garages de Castres rapporte la preuve que cette différence de rémunération repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables puisqu' au vu des fiches de postes, M. A... exerçait, outre les fonctions de magasinier guichet atelier, vendeur boutique et réception expédition, celles de magasinier gestionnaire que n' exerçait pas André X..., ce qu' il a lui- même admis en barrant d' une croix cette partie de la fiche de fonction avant de la signer ; qu' il résulte d' ailleurs du bilan de compétence établi à la fin de l' année 2003, que l' appelant ne maîtrisait pas « la gestion stocks simple à savoir les fiches de stocks selon les diverses méthodes » ;
Qu' ensuite, les relevés informatiques d' analyse de la productivité des salariés de l' année 2000 révèlent que M. A... avait une productivité supérieure à celle d' André X... ;

Qu' enfin il n' est pas contesté que dans le cadre de la poly compétence, M. A... était amené à remplacer leur supérieur hiérarchique, contrairement au demandeur ;
Qu' au vu de ces éléments, il n' est pas établi de violation de la règle « à travail égal, salaire égal » ;

Attendu qu' il s' évince du compte rendu de la réunion du comité d' entreprise du 27 septembre 2000, que la prime de fin d' année est une gratification attribuée au mérite par l' employeur en fonction de l' évaluation du salarié réalisée lors de son entretien avec sa hiérarchie ainsi que sur des critères qualitatifs et quantitatifs ;
Que l' intimée verse aux débats les entretiens d' évaluation du demandeur, établis contradictoirement et signés par lui les 19 avril 2000, 13 décembre 2001, 2 décembre 2002 et 20 février 2004, qui font apparaître des insuffisances non contestées par le salarié ; que d' autre part, les résultats des tests comparatifs d' évaluation des compétences à partir de l' outil mis à disposition du constructeur « RENAULT » sont eux aussi défavorables à André X... ; qu' en conséquence, celui- ci ne peut soutenir que la baisse de sa prime de fin d' année, résulte d' une discrimination ;

Attendu qu' en matière de formation, André X... ne démontre pas avoir demandé une formation qui lui aurait été refusée ni que l' employeur a offert à ses collègues une formation qui ne lui a pas été proposée ; qu' à l' inverse, les pièces versées aux débats démontre qu' il a toujours été réticent à passer le « CACES » bien que cela lui aurait évité le port de lourdes charges alors que l' employeur avait pris les dispositions pour lui faire dispenser cette formation préconisée par le bilan de compétences ;

Attendu qu' au vu de ces considérations, le jugement sera confirmé en ce qu' il a débouté André X... de ses demandes fondées sur la discrimination ;

- Sur le harcèlement moral :

Attendu qu' aux termes de l' article L 122- 49 du code du travail, aucun salarié ne peut subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d' altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;
Qu' en cas de litige, dès lors que le salarié concerné établit des fait qui permettent de présumer l' existence d' un harcèlement, il incombe à l' employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d' un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

Attendu que si certains des faits cités par André X... ne peuvent à l' évidence être retenus comme constitutifs de harcèlement moral (comme la levée du drapeau demandée à tous les salariés, le fait d' être appelé par son nom ou la demande d' explication sur des dossiers traités par lui) d' autres, en revanche, laissent bien présumer la réalité de tels agissements de la part de l' ensemble de la chaîne hiérarchique du site de Castres, et ce d' autant plus que ces faits sont confirmés par d' autres salariés dont certains étaient toujours en poste dans l' entreprise au jour où ils ont attesté :

- qu' ainsi, au mois de mars 2002, les conditions de travail de André X... ont été modifiées dans le sens où il a du quitter le comptoir client (sauf pour les permanences du samedis) où il travaillait depuis dix huit ans sans avoir reçu la moindre sanction disciplinaire, pour se consacrer au rangement des pièces, la réception des livraisons et la préparation des commandes pour l' atelier ; que non seulement la SAS Grands Garages de Castres ne produit aucun justificatif de la réorganisation du service alléguée par elle mais elle ne démontre pas non plus que cette réorganisation a entraîné des changements pour d' autres salariés déjà en poste au moment de sa mise en oeuvre ; qu' en tout état de cause, cette opération n' a pas été réalisée dans la transparence puisqu' elle n' a été expliquée ni aux salariés ni aux clients, ce qui accrédite son caractère vexatoire (cf attestations de MM C..., D..., E..., F...) ;

- à la fin de l' année 2003, le chef d' atelier Philippe G..., a recommandé à l' ensemble des mécaniciens de l' atelier de ne pas s' adresser à André X... mais à un autre salarié du guichet atelier en ajoutant qu' avec l' appelant " on était bien monté " (cf attestations de MM H..., I..., J...) ;

- en octobre 2003, Jean- Louis K..., responsable du magasin, accusait injustement l' appelant d' avoir omis de facturer des pièces (attestation Madame L...) ;

- au mois de janvier 2004, la SAS Grands Garages de Castres admet que André X... n' a pas été convié au repas auquel participait tout le personnel, sous prétexte qu' il avait refusé d' y participer les deux années précédentes ;

- au mois de février 2004, le directeur Jacques M... et Francis B..., responsable des magasins, demandaient respectivement à un mécanicien et à un agent de maîtrise de surveiller si André X... respectait bien les horaires bien qu' aucun abus de sa part n' ait jamais été constaté par ses collègues (attestations de MM N... et O...) ;

- au mois de février 2004, Jean- Louis K..., l' accusait injustement d' avoir omis de facturer des pièces emportées par un client alors que l' erreur avait été commise par un autre vendeur magasinier ; (attestation du client Monsieur P...) ;

- au mois de mai 2004, l' appelant était exclu d' un challenge commercial organisé à la demande d' un fournisseur et ce n' était que suite à sa réclamation que son nom était rajouté à la liste ; qu' à cet égard, la SAS Grands Garages de Castres soutient que comme il ne vendait plus au guichet client, il n' était pas concerné par cette opération, ce qui n' est pas opérant puisque André X... continuait à servir des clients à l' occasion des permanences du samedi ; (attestation Madame L... ET DE Monsieur E..., circulaire d' animation) ;

- le 28 juin 2004, alors qu' il circulait dans l' entreprise en serrant la main des autres salariés, Francis B... a ostensiblement refusé de serrer la main de André X..., interrogé quelques instant plus tard par Monsieur Q...(préparateur de véhicules) il a indiqué se livrer à du harcèlement moral ;

- le 2 juillet 2004, alors que André X... venait de se rendre dans le bureau de la comptable pour chercher son bulletin de paie, Francis B..., après son départ a dit à la comptable que si il le revoyait il se chargerait de le sortir de la comptabilité ; (attestation de Madame S...) ;

Attendu que ces éléments corroborent les dires d' André X... et ne sont pas utilement démentis par l' employeur ; qu' au contraire, Monsieur Jean- Marie T..., directeur de la plate forme Renault du Tarn, représentant l' employeur lors de l' enquête menée par les conseillers rapporteurs, a admis à cette occasion qu' il existait bien un contentieux et un conflit entre André X... et son supérieur hiérarchique " de nature très complexe " et a indiqué qu' il était intervenu en les recevant personnellement tous les deux et qu' il avait constaté que ce conflit était partagé ; que toutefois une simple enquête au sein du magasin de CASTRES aurait permis à la direction de constater que les responsables locaux y entretenaient volontairement un climat délétère pour inciter les salariés à quitter l' entreprise comme cela ressort de la plupart des témoignages versés aux débats, ce qui explique d' ailleurs le nombre inhabituel de démissions depuis le mois d' octobre 2003 ; (cf attestations de MM André U..., Cyril C..., Olivier V..., Sébastien W..., Véronique Y...) ;

Attendu que le fait de travailler en subissant ce harcèlement moral a causé à André X... un préjudice dont la SAS Grands Garages de Castres doit assumer la réparation en lui versant la somme de 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que par lettre du 29 mai 2004, André X... démissionnait dans les termes suivants :

« Monsieur le directeur,
alors que je suis dans votre établissement depuis 1969, que j' ai fait preuve de dévouement, de conscience professionnelle, je suis depuis janvier 2002, victime d' un harcèlement hiérarchique ayant pour but ma démission, ce qui aujourd' hui, si je veux préserver ma santé, devient inévitable.
Vous connaissez les griefs que j' ai à vous reprocher puisque, vous êtes, en grande partie, responsable de cet acharnement soit en fermant les yeux sur les agissements de ma hiérarchie, soit en m' incitant, devant mes revendications, à démissionner et me proposant même de m' aider à chercher une autre place, ce qui me conforte dans ma conviction que vous ne voulez plus de moi … » ;

Attendu que la démission est un acte unilatéral par lequel un salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l' annulation de sa démission, remet en cause celle- ci en raison de faits ou de manquements imputables à son employeur, le juge doit, s' il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu' à la date à laquelle elle a été donnée, celle- ci était équivoque, l' analyser en une prise d' acte de la rupture qui produit les effets d' un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifiaient ou, dans le cas contraire d' une démission ;
Attendu qu' en application de ce principe et des dispositions de l' article L122- 49 du code du travail, la démission d' André X... entraîne les effets d' un licenciement nul ; que dans la mesure où il ne demande pas sa réintégration dans l' entreprise, l' appelant se verra octroyer les sommes qu' il réclame au titre du préavis et de l' indemnité conventionnelle de licenciement, dont la SAS Grands Garages de Castres ne conteste pas le calcul ;

Attendu qu' en outre, la SAS Grands Garages de Castres sera condamnée à indemniser André X... du préjudice causé par la perte injustifiée de son emploi ; qu' en application de l' article L 122- 14- 4 du code du travail, l' indemnité allouée à ce titre ne peut être inférieure au montant des salaires perçus au cours des douze derniers mois ; qu' il sera donc fait droit à la réclamation de André X... à ce titre, calculée selon ce principe ;

Attendu que la SAS Grands Garages de Castres assumera les dépens de première instance et d' appel et sera condamnée à payer à André X... la somme de 500 en application de l' article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS LA COUR :

Confirme le jugement de départition rendu le 28 février 2007 par le conseil de prud' hommes de Castres en ce qu' il a rejeté les demandes fondées sur la discrimination salariale, le réforme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit et juge que André X... a été victime de harcèlement moral,

Dit et juge que sa démission produit les effets d' un licenciement nul,

Condamne la SAS Grands Garages de Castres à lui payer :

- 20. 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral,

- 2655, 94 euros brut d' indemnité compensatrice de préavis,

- 265, 59 euros brut de congés payés sur préavis,

- 12. 482, 64 euros d' indemnité conventionnelle de licenciement,
- 15. 935, 64 euros de dommages et intérêts en application de l' article L 122- 14- 4 du code du travail,
- 500 euros en application de l' article 700 du code de procédure civile.

Condamne la SAS Grands Garages de Castres aux dépens de première instance et d' appel.
Le présent arrêt a été signé par monsieur BRUNET, président et madame MARENGO, greffier. Le greffierLe président

P. MARENGO B. BRUNET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 07/01675
Date de la décision : 05/03/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Castres


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-03-05;07.01675 ?
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