La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/02/2008 | FRANCE | N°05/04034

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 2- chambre sociale, 22 février 2008, 05/04034


ARRÊT No
No RG : 05/ 04034 PC/ HH

Décision déférée du 16 Juin 2005- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE-02/ 03429

Laurent X...
C/
Société C...
REFORMATION RENVOI AUDIENCE DU 4. 09. 2008 A 10 H 30

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Laurent X...... 81470 AGUTS

comparant en personne
assisté de la SELARL DESPRES-EICHENHOLC-NAKACHE, avocats au barreau de TOULOUSE
INTIME

(S)
Société C......... ...

représentée par la SCP LAPUENTE-COUZI, avocats au barreau de TOULOUSE
COMPOSI...

ARRÊT No
No RG : 05/ 04034 PC/ HH

Décision déférée du 16 Juin 2005- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE-02/ 03429

Laurent X...
C/
Société C...
REFORMATION RENVOI AUDIENCE DU 4. 09. 2008 A 10 H 30

REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS *** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 2- Chambre sociale *** ARRÊT DU VINGT DEUX FEVRIER DEUX MILLE HUIT ***

APPELANT (S)
Monsieur Laurent X...... 81470 AGUTS

comparant en personne
assisté de la SELARL DESPRES-EICHENHOLC-NAKACHE, avocats au barreau de TOULOUSE
INTIME (S)
Société C......... ...

représentée par la SCP LAPUENTE-COUZI, avocats au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 10 Janvier 2008, en audience publique, devant la Cour composée de :
P. de CHARETTE, président M. P. PELLARIN, conseiller C. CHASSAGNE, conseiller qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :- CONTRADICTOIRE-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile-signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

OBJET DU LITIGE
M. X... a été embauché le 15 mars 1993 en qualité de médecin attaché commercial en contrat à durée déterminée puis à durée indéterminée. Il a été licencié pour faute grave le 8 juillet 2002.
Par jugement en date du 16 juin 2005, le conseil de prud'hommes de Bordeaux a écarté l'existence d'une faute grave mais a retenu celle d'une cause réelle et sérieuse et a alloué à M. X... la somme de 1 245, 99 € au titre du paiement de la mise à pied conservatoire, 121, 59 € au titre des congés payés sur mise à pied, 9 267, 75 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 926, 75 € au titre des congés payés sur préavis et 6 662, 78 € à titre d'indemnité de licenciement.
M. X... a régulièrement relevé appel de ce jugement. Il soutient que l'imprécision des griefs énoncés dans la lettre de licenciement équivaut à une absence de motifs. Il fait valoir subsidiairement que les griefs énoncés ne sont pas établis. Il demande la somme de 56 033, 82 € à titre de dommages-intérêts.
Il demande par ailleurs la confirmation du jugement sur le rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire. Il demande la réformation de jugement sur l'indemnité de préavis en énonçant que celle-ci est fixée à six mois par la convention collective et demande de ce chef 18 677, 94 €. Il demande 20 919, 27 € au titre de l'indemnité de licenciement. Il demande par ailleurs la somme de 6 000 € en paiement d'un logiciel de base de données réalisé par ses soins.
Pour ce qui concerne les commissions fixées par son contrat de travail, il demande la somme de 15 602, 86 € pour les commissions 2001 et les commissions sur les commandes passées avant son départ et pendant son préavis et celle de 27 562 € sur les commandes passées depuis son départ. Il demande qu'il soit ordonné en tant que de besoin à la SA C... de justifier des commandes du produit passées depuis son départ.
La SA C... forme appel incident et demande qu'il soit dit et jugé que le licenciement de M. X... repose sur une faute grave. Elle demande en conséquence que M. X... soit débouté de l'ensemble de ses demandes. Elle demande le remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le licenciement
La lettre de licenciement en date du 8 juillet 2002 est ainsi rédigée :
« Vous faites preuve de manière réitérée et en dépit des observations qui vous ont été formulées d'une insubordination inacceptable qui se caractérise notamment par :- un comportement insolent à l'égard de votre responsable hiérarchique et de moi-même-un refus de communiquer à votre responsable hiérarchique les informations demandées-un refus de collaborer avec l'un de vos collègues, ainsi que cela vous a été demandé-un refus de partager avec vos collègues les informations commerciales que vous détenez, ainsi que cela vous a également été demandé. De surcroît, vous avez pris des initiatives inadmissibles au niveau de l'utilisation de matériel informatique, initiatives de nature à préjudicier l'intégrité des données informatiques de l'activité VALAB et au bon fonctionnement des matériels informatiques. Enfin, nous relevons, en corollaire à ce comportement inacceptable, une activité commerciale faible, laquelle s'inscrit dans le cadre d'une exécution volontairement défectueuse de votre travail et que vous avez justifiée au cours de l'entretien préalable par une démotivation résultant d'une rémunération que vous considérez insuffisante et démotivante ».

Il ne peut être considéré que les griefs ainsi énoncés sont d'une imprécision telle qu'elle équivaudrait à une absence de motifs de la lettre de licenciement. Celle-ci énonce au contraire une série de comportements dont l'existence est susceptible de faire l'objet d'une vérification par le juge.
Il appartient en revanche à l'employeur, qui s'est placé sur le terrain disciplinaire, de justifier de l'existence et de la réalité de ces griefs, ainsi que de la survenance des faits fautifs dans le délai de la prescription de deux mois antérieurement à l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable le 27 juin 2002.
- Comportement insolent
L'attestation de Mme Y... produite par la SA C... est inopérante, dès lors que celle-ci a quitté l'entreprise en 2001, selon les termes mêmes de son attestation.
Aucune pièce ne vient établir l'existence d'un comportement insolent à l'égard du dirigeant de la SA C.... L'existence d'un comportement insolent n'est en aucune façon démontrée par le contenu de deux courriers du 10 juin 2002 adressés par M. X... au président de la société, dès lors que celui-ci, s'il présente une série de demandes et d'observations sur l'exécution de son contrat de travail, utilise une formulation mesurée exempte de tout reproche sur ce point.
Ce grief n'est pas davantage établi par l'attestation de M. Z..., technicien biomédical, qui fait état d'une « discussion venimeuse » entre M. et M. A..., son supérieur hiérarchique, sur une contestation du recrutement d'un nouveau commercial, mais ne cite aucun élément permettant de faire apparaître un comportement insolent.
Enfin, une attestation du supérieur hiérarchique, qui ne peut qu'être examinée avec réserve, énonce que M. X... a manifesté à plusieurs reprises des comportements « que l'on peut qualifier d'insolents » sans en dater la survenance et sans faire apparaître qu'ils ont été dirigés contre lui-même ou contre le président de la société
Ce premier grief n'est donc pas établi.
- Refus de communiquer des informations demandées par le supérieur hiérarchique
Pour établir ce grief, la SA C... verse aux débats une note interne en date du 24 mai 2002 émanant de M. A... destinée à M. X... avec copie au président de la société dans laquelle sont demandés les rapports d'activité du mois de mai, la mise à jour du fichier tournées, une copie des documents transmis au président concernant l'analyse commerciale et financière de l'activité VALAB et un rapport concernant un déplacement à Paris dans la semaine 21.
M. X... conteste avoir reçu ce document. Celui-ci n'est pas émargé par ses soins et n'a pas été adressé en courrier recommandé avec accusé de réception, alors pourtant que les discussions entre les parties avaient pris une intensité certaine depuis plusieurs mois.
Aucun autre élément n'est produit sur ce point, en dehors des propres affirmations de M. A.... Il existe dans ces conditions pour le moins un doute sur la réalité de ce grief, lequel doit profiter au salarié conformément aux dispositions de l'article L. 122-43 du code du travail.
- Le refus de collaborer avec un collègue
La SA C... verse sur ce point aux débats une attestation de Mlle B..., qui décrit l'hostilité à laquelle elle s'est trouvée en butte de la part de M. X... lors de son arrivée dans l'entreprise en juin 2002.
M. X... énonce sur ce point, sans être démenti, qu'il ne s'est trouvé en compagnie de cette salariée que pendant deux jours et demi dans le courant du mois de juin 2002, qui a précédé immédiatement son licenciement, étant rappelé qu'il a été mis à pied à titre conservatoire le 27 juin 2002.
Dans ces conditions, il ne peut être considéré que les faits en question puissent être constitutifs d'une faute.
- Refus de partager des informations commerciales avec les collègues
Bien que la SA C... ne fournisse pas de précisions particulières devant la Cour sur ce grief, il faut déduire de l'attestation de M. A... que le reproche porterait sur un refus de mettre à la disposition du supérieur hiérarchique la base de données commerciale contenant les coordonnées des prospects ou partenaires et l'historique des contacts avec les laboratoires hospitaliers et privés et le refus d'en faire une copie de sauvegarde à la société.
Outre le fait que cette unique attestation ne constitue pas une preuve suffisante, en dehors d'autres éléments matériels, le compte-rendu d'une réunion du 12 juin 2002 fait apparaître que les données en question étaient sauvegardées dans l'entreprise.
- Initiatives inadmissibles au niveau du matériel informatique
Aucune précision n'est apportée par la SA C... sur ce grief qui ne peut donc qu'être écarté.
- Activité commerciale faible s'inscrivant dans une exécution volontairement défectueuse du travail
Aucune pièce ne vient établir que M. X... aurait volontairement exécuté son travail de façon défectueuse. Ce grief n'est donc pas établi.
Il apparaît ainsi que le licenciement n'est justifié ni par une faute grave, ni par une faute de moindre gravité ni par une cause réelle et sérieuse. Le jugement sera donc réformé.
L'indemnisation de la rupture
Au vu des pièces versées aux débats, la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour fixer à 40 000 € le montant des dommages-intérêts provenant à M. X....
Celui-ci justifie de son droit à six mois de préavis par application de l'article 27 de la convention collective de la métallurgie concernant les ingénieurs et cadres. Il sera donc fait droit à sa demande portant sur la somme de 18 677, 94 €, au regard de son salaire de référence fixé à 3112, 99 €.
De même, par application de l'article 29 de la convention collective, l'indemnité de licenciement s'établit à 20 919, 27 €.
Le jugement sera confirmé sur le salaire pendant la période de mise à pied conservatoire et les congés payés afférents.
Le paiement des commissions
Après une série de discussions entre les parties, une transaction conclue le 28 juin 2000 a modifié les modalités de la rémunération de M. X..., en prévoyant que celui-ci reconnaissait être rempli de ses droits jusqu'à la date de signature du document. Un avenant au contrat de travail, reprenant les termes de la transaction, a prévu que la rémunération serait composée d'une partie fixe et d'une partie variable correspondant à des commissions calculées sur la base de 4 % sur les ventes indirectes démarchées par M. X... et finalisées par un tiers et 8 % sur les ventes directes démarchées et finalisées par M. X..., à la condition toutefois que le chiffre d'affaires facturé de M. X... soit au minimum de 1 800 000 F HT. Dans le cas contraire, les pourcentages de commission seraient ramenés à 3 % et 6 %.
Le dernier alinéa de l'article 1 de l'avenant a énoncé que le paiement des commissions interviendrait sur factures effectivement payées par les clients.
Il résulte de ces dispositions que le droit à commission est reconnu à M. X... dès la finalisation de la vente, en l'espèce la passation de la commande ferme, étant précisé que le paiement de la commission n'interviendra qu'après le paiement de la facture par le client. Il ressort sur ce point des différentes pièces produites que, compte tenu du caractère spécifique du produit informatique, un délai important pouvant atteindre plusieurs années peut être constaté entre la commande et le paiement par le client.
Pour ce qui concerne le montant des commissions revenant à M. X..., aucune pièce ne fait apparaître que le chiffre d'affaires facturé ait atteint 1 800 000 F au titre de l'activité de M. X..., quelle que soit l'année considérée. Dans ces conditions, le pourcentage des commissions a été à juste titre appliqué par la SA C... à hauteur respectivement de 3 % et 6 %.
Par suite, les demandes de rappels de commissions présentées par M. X... pour l'année 2001 et pour l'année 2002 sur la base d'un taux de 8 % sont sans fondement et seront rejetées.
Pour ce qui concerne l'activité de M. X..., notamment pendant l'année 2002 jusqu'à son licenciement, il existe en l'état une incertitude sur le nombre de commandes démarchées par M. X... et finalisées ultérieurement par un tiers, susceptibles d'ouvrir droit en sa faveur à des commissions au taux de 3 %. En effet, malgré les demandes présentées par voie de sommation par M. X... devant le conseil de prud'hommes puis devant la Cour, la SA C... a refusé de lui faire parvenir le tableau des commandes enregistrées depuis son licenciement.
Dans ces conditions, il y a lieu d'ordonner à la SA C... de transmettre ces éléments au vu desquelles M. X... chiffrera sa demande, étant précisé qu'il appartiendra au salarié de tirer toutes conséquences d'un refus persistant de la SA C....
Paiement d'un logiciel
La SA C... est demeurée taisante sur la demande présentée par M. X... tendant au paiement d'un logiciel conçu par ses soins pour le compte de la société.
Il y a lieu en conséquence, en l'absence de toute contestation, de faire droit à la demande en question, dès lors que par ailleurs la création de ce logiciel ressort de plusieurs pièces versées aux débats.
Il sera fait droit à la demande de M. X... fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile
PAR CES MOTIFS
La Cour
Confirme le jugement en ce qu'il a condamné la SA C... à payer à M. X... la somme de 1 255, 56 € au titre du salaire pendant la mise à pied conservatoire et celle de 124, 59 € au titre des congés payés correspondants.
Le réforme pour le surplus.
Dit et juge que le licenciement de M. X... n'est justifié ni par une faute grave ni par une cause réelle et sérieuse.
Condamne la SA C... à payer à M. X... :
- la somme de 40 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
-la somme de 18 677, 94 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis
-la somme de 20 919, 27 € à titre d'indemnité de licenciement
-la somme de 6 000 € en paiement d'un logiciel.
Rejette les demandes de rappels de commissions présentées par M. X... pour les années 2001 et 2002 sur le fondement d'un taux de commissionnement de 8 %.
Sursoit à statuer sur le surplus des demandes en paiement de commissions.
Ordonne la réouverture des débats à l'audience du 4 septembre 2008 à 10 h 30.
Ordonne à la SA C... de communiquer les pièces justifiant de l'intégralité des commandes enregistrées après le licenciement de M. X... correspondant à des ventes indirectes démarchées par celui-ci.
Dit qu'au vu des pièces communiquées, M. X... présentera ses demandes en paiement avant le 4 juin 2008.
Dit que la SA C... conclura en réponse avant le 11 juillet 2008.
Condamne la SA C... à payer à M. X... la somme de 2 000 € en application de l'articles 700 du nouveau code de procédure civile.
Dit que la SA C... supportera les dépens de première instance et les dépens d'appel liquidés à ce jour.
Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.
Le greffier Le président
Dominique FOLTYN-NIDECKER Patrice de CHARETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 2- chambre sociale
Numéro d'arrêt : 05/04034
Date de la décision : 22/02/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 16 juin 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2008-02-22;05.04034 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award