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20/02/2008 | FRANCE | N°07/01405

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 20 février 2008, 07/01405


20/02/2008

ARRÊT No

No RG : 07/01405
MPP/MFM

Décision déférée du 06 Février 2007 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE 04/02307
S. HYLAIRE

SA ELECTRICITE DE FRANCE
SA GAZ DE FRANCE

C/

Patrice X...


CONFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale
***
ARRÊT DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE HUIT
***

APPELANT(S)

SA ELECTRICITE DE FRANCE
SIEGE SOCIAL
22-20 AVENUE DE WAGRAM
75008 PARIS
représentée par

la SCP SIMON JOLLY, avocats au barreau de TOULOUSE

SA GAZ DE FRANCE
SIEGE SOCIAL
23 RUE PHILIBERT DELORME
75017 PARIS
représentée par la SCP SIMON JOLLY, avocats...

20/02/2008

ARRÊT No

No RG : 07/01405
MPP/MFM

Décision déférée du 06 Février 2007 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE 04/02307
S. HYLAIRE

SA ELECTRICITE DE FRANCE
SA GAZ DE FRANCE

C/

Patrice X...

CONFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale
***
ARRÊT DU VINGT FEVRIER DEUX MILLE HUIT
***

APPELANT(S)

SA ELECTRICITE DE FRANCE
SIEGE SOCIAL
22-20 AVENUE DE WAGRAM
75008 PARIS
représentée par la SCP SIMON JOLLY, avocats au barreau de TOULOUSE

SA GAZ DE FRANCE
SIEGE SOCIAL
23 RUE PHILIBERT DELORME
75017 PARIS
représentée par la SCP SIMON JOLLY, avocats au barreau de TOULOUSE

INTIME(S)

Monsieur Patrice X...

...

31000 TOULOUSE
représenté par Me Christine VAYSSE-LACOSTE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945.1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2008, en audience publique, devant B. BRUNET, président et M-P PELLARIN, conseiller chargés d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

B. BRUNET, président
C. PESSO, conseiller
M.P. PELLARIN, conseiller

Greffier, lors des débats : P. MARENGO

ARRET :
- Contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile
- signé par B. BRUNET, président, et par P. MARENGO, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Salarié depuis le 6 janvier 1970 de l'entreprise EDF GDF aux droits de laquelle viennent la S.A EDF et la S.A GDF, M. Patrice X..., qui exerçait en dernier lieu la fonction de chargé de mission/statut cadre, emploi classé "sédentaire", s'est vu notifier par courrier du 4 juin 2004 sa mise en inactivité d'office à compter du 1er novembre 2005, date de son 55ème anniversaire, aux motifs qu'il remplissait les conditions réglementaires lui permettant l'obtention d'une prestation de pension de régime spécial des I.E.G, soit 55 ans d'âge, 25 ans de services civils dont 15 ans de services actifs.

Se prévalant d'une mention figurant au Manuel pratique des questions du personnel selon laquelle, n'étant plus en fonction dans un poste actif, il ne pouvait être mis à la retraite d'office qu'à l'âge de 60 ans, M. Patrice X... a contesté la décision.

Sa contestation ayant été rejetée et sa mise en inactivité confirmée pour le 1er décembre 2005, M. Patrice X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE qui, par jugement de départition du 6 février 2007, a dit que la rupture du contrat de travail de l'intéressé constituait un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, et a condamné la S.A EDF et la S.A GDF à lui payer les sommes de 28.664,79 € au titre de l'indemnité de licenciement, 120.000 € de dommages-intérêts, 1.500 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, après avoir rejeté la demande présentée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.

Le Conseil a retenu que si le Statut du personnel permettait la mise à la retraite d'office de M. Patrice X... à l'âge de 55 ans, l'employeur avait prévu une condition supplémentaire, plus favorable aux salariés, constitutive d'un engagement qui n'avait pas été dénoncé. Il a estimé que le salarié avait, de fait, bénéficié d'un préavis du 1er septembre au 1er décembre 2005.

La S.A EDF et la S.A GDF ont relevé appel le 8 mars 2007 de cette décision qui leur avait été notifiée le 12 février précédent.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Pour conclure par infirmation du jugement au rejet des prétentions adverses, les sociétés appelantes, après avoir rappelé les textes réglementaires applicables, font essentiellement valoir :
- que le Manuel pratique des questions du personnel est dénué de toute valeur en ses parties contraires aux textes réglementaires, et au surplus obsolète,
- que le jugement est contradictoire en ce qu'il admet que les mentions en italique du Manuel pratique des questions du personnel sont dépourvues de valeur normative puis en leur attribuant force obligatoire,
- que les deux documents sur lesquels se fondent les premiers juges ne peuvent caractériser un engagement unilatéral de l'employeur puisqu'en contradiction avec d'autres documents émanant de la Direction du personnel entre 1997 et 2002 qui rappellent les conditions réglementaires de la mise en inactivité d'office,
- qu'en toute hypothèse, M. Patrice X... ne peut se prévaloir du document émanant de la Direction des études et recherches dont il ne dépendait pas ;
- qu'en outre les directeurs n'avaient pas le pouvoir de prendre un engagement au nom des sociétés concluantes ;
- que M. Patrice X... ne prouve pas l'existence d'une pratique généralisée, constante et fixe susceptible de caractériser un usage consistant à ne mettre en inactivité d'office à 55 ans que les agents affectés à cet âge à un poste actif à 100% ou par prépondérance, les éléments produits par les appelantes démontrant le contraire.

La S.A EDF et la S.A GDF réclament une indemnité de 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. Patrice X... demande à la Cour de confirmer le jugement sur le principe de l'illégitimité de la rupture, pour les motifs qui y sont développés, les mentions du Manuel pratique des questions du personnel, plus favorables au salarié, reprenant les indications de la Direction du Personnel à laquelle sont soumises les difficultés d'application, conformément à la circulaire PERS 70, et traduisant donc selon lui un engagement de l'employeur. Il conteste l'obsolescence du Manuel pratique des questions du personnel, en décrivant divers cas d'application.

Il estime en outre démontrer l'existence d'un usage, notamment au sein du Centre Pyrénées Gascogne dont il dépendait, de par la pratique pendant plusieurs années des dispositions litigieuses du Manuel.

Par réformation partielle du jugement, M. Patrice X... réclame une somme de 300.000 € de dommages-intérêts, ainsi que la somme de 5.141,21 € pour irrégularité de procédure, celles de 17.694,96 € et 1.769,50 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité de congés payés y afférente, en contestant avoir bénéficié d'un préavis. Il sollicite enfin une indemnité de 4.000 € en remboursement des frais exposés pour sa défense.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte de la combinaison de l'article 2 du décret no54-50 du 16 janvier 1954, de l'article 3 de l'annexe 3 du statut du personnel des I.E.G, et de la circulaire PERS 70 que la mise en inactivité peut être prononcée d'office à l'égard d'un agent ayant 55 ans d'âge, 25 ans de service dont 15 ans dans un service actif.

Il n'est pas discuté que M. Patrice X... réunissait les conditions réglementaires précitées.

Le Manuel pratique des questions du personnel, document de travail interne à l'entreprise, qui reproduit le corpus réglementaire (statut, circulaires PERS, circulaires N, notes d'instruction de la direction du personnel) contient des mentions en italiques qui, selon l'avertissement figurant en-tête de l'ouvrage, sont tirées d'explications ou d'instructions données par la direction du personnel et des relations sociales dans des cas particuliers qui lui ont été soumis.

Dans cet ouvrage, s'agissant de la mise en inactivité d'office de l'agent ayant 55 ans d'âge, figure, en ajout des conditions réglementaires précitées, et par mention en italiques, celle tenant à l'affectation, à l'âge précité, à un poste classé actif à 100% ou par prépondérance ; M. Patrice X... ne remplissait pas cette condition.

Il est constant que cette mention n'a pas valeur normative dans le sens où elle n'est pas incluse dans l'arsenal des documents constituant la réglementation interne à l'entreprise.

Pour autant, elle peut valablement être opposée à l'employeur si elle traduit de la part de ce dernier un engagement unilatéral. Ainsi que l'a exactement rappelé le Conseil, l'engagement unilatéral de l'employeur, dès lors qu'il résulte d'une manifestation claire et non équivoque de volonté, peut être créateur de droits au profit du salarié, et permet à celui-ci de s'en prévaloir s'il en découle des dispositions plus avantageuses que celles du statut collectif antérieur. Cet engagement a force obligatoire envers l'employeur.

Or, conformément à ce qu'ont relevé les premiers juges, la mention litigieuse est confirmée par une note du 10 juillet 1990 par laquelle le Chef de division de la Direction nationale du personnel et des relations sociales confirme cette exigence d'affectation pour pouvoir imposer à un agent la mise en inactivité à 55 ans. Ce responsable est bien la personne compétente pour fournir les explications et préciser les modalités d'application des textes, comme le rappelle la circulaire PERS 70.

On ne peut manquer d'observer que la condition tenant au lieu d'affectation de l'agent lorsqu'il atteint 55 ans est claire, ne nécessite pas d'interprétation, et, au travers de sa diffusion dans le Manuel pratique des questions du personnel, a traduit de la part de l'employeur sa volonté claire d'en faire application au sein de l'entreprise.

Par ailleurs les sociétés appelantes ne sont pas fondées à invoquer l'obsolescence de ce document, alors qu'elles n'ont jamais diffusé de note pour en interrompre l'utilisation, et qu'elles continuent au contraire à y faire référence dans nombre de domaines relatifs à la gestion du personnel cités par M. Patrice X..., ce qu'elles ne contestent pas.

En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont reconnu que M. Patrice X... pouvait se prévaloir de la disposition constitutive d'un engagement unilatéral de son employeur et non valablement dénoncé par lui.

Ils ont également tiré les exactes conséquences de la mise en inactivité d'office imposée par l'employeur le 1er novembre 2005 qui s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et ont fait une juste appréciation du préjudice subi, au regard de la perte de chance d'obtenir pendant cinq années supplémentaires un revenu plus important, sans pour autant tenir compte des accessoires de salaires correspondant à des sujétions non supportées.

La demande présentée au titre de l'indemnité pour non-respect de la procédure doit être rejetée, puisque ne pouvant se cumuler avec les dommages-intérêts précédemment alloués.

Pour critiquer le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, M. Patrice X... fait valoir que durant la période correspondant à ce préavis, soit du 1er septembre au 1er décembre 2005, il a soldé ses congés payés.

Or la prise de congés par le salarié à une période où il aurait dû effectuer son préavis et ce, en accord avec l'employeur, n'est pas contraire à l'ordre public, et M. Patrice X... ne démontre pas que cette situation lui ait été imposée par son employeur. En effet, dans sa lettre du 5 avril 2005 lui notifiant la mise en inactivité au 1er décembre 2005 avec préavis à compter du 1er septembre, l'employeur l'a seulement appelé à solder ses congés, ce qui pouvait être réalisé avant le début du préavis.

Le jugement est en conséquence confirmé en toutes ses dispositions.

En application de l'article 700 du Code de procédure civile, il est alloué à M. Patrice X... seul l'indemnité fixée au dispositif de cette décision.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement déféré.

Y ajoutant,

Condamne solidairement la S.A EDF et la S.A GDF à payer à M. Patrice X... une indemnité de 1.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne la S.A EDF et la S.A GDF au paiement des dépens.

Le présent arrêt a été signé par monsieur BRUNET, président et madame MARENGO, greffier.

Le greffier Le président

P. MARENGO B. BRUNET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 07/01405
Date de la décision : 20/02/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-02-20;07.01405 ?
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