16/01/2008
ARRÊT No15
No RG : 06/01955
BB/MB
Décision déférée du 22 Mars 2006 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE - 04/2176
J. TOURNE
Aïssa X...
C/
ASSOCIATION ADES EUROPE
CONFIRMATION PARTIELLE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale
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ARRÊT DU SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT
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APPELANT
Monsieur Aïssa X...
...
31100 TOULOUSE
représenté par la SCP SABATTE-BROOM-L'HOTE, avocats au barreau de TOULOUSE
INTIMÉE
ASSOCIATION ADES EUROPE
...
BP 114
09200 ST GIRONS
représentée par Me Alain MARGUERIT, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR
L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de:
B. Y..., président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : P. Z...
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile
- signé par B. Y..., président, et par P. Z..., greffier de chambre.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Le 12 janvier 1995, M. Aïssa X... a été engagé par l'association ADES Europe en qualité d'éducateur spécialisé.
Ses fonctions ont évolué par avenants en date du 9 novembre 1999, 15 janvier 2002, 14 février 2003.
Le 1o juin 2004, M. Aïssa X... a demandé un congé sans solde qui a été accepté ; par courrier en date du 14 décembre 2004, M. Aïssa X... a fait savoir à l'association ADES Europe qu'il ne reprendrait pas le travail et a invoqué le non respect par l'employeur de l'accord d'établissement du 15 mai 1997 relatif au paiement des astreintes.
Le 20 septembre 2004, M. Aïssa X... a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse aux fins de voir condamner l'association ADES Europe à lui payer l'équivalent de 13.100,5 heures au titre des astreintes assurées durant la période non prescrite.
Suivant jugement en date du 22 mars 2006, le conseil de prud'hommes de Toulouse a considéré :
- que le courrier du 21 septembre 2004 de l'association ADES Europe établit que l'employeur avait renoncé au préavis de trois mois ; que sa demande reconventionnelle sera rejetée ;
- que le protocole d'établissement concernant les heures d'astreinte conclu le 15 mai 1997 ne concerne que le foyer d'adolescent Pyrène et non le service éducatif d'hébergement individuel de Toulouse qui n'était pas encore crée à cette date ; que M. Aïssa X... n'a jamais demandé la mise en place d'un service de permanence téléphonique ;
- qu'en sa qualité de chef de service à mi-temps, M. Aïssa X... a perçu des indemnités d'astreinte ;
- que les demandes de M. Aïssa X... doivent être rejetées.
Le 13 avril 2006, M. Aïssa X... a déclaré relever appel de cette décision.
Dans ses explications reprenant et développant ses écritures M. Aïssa X... exposait :
- qu'il a été embauché le 12 janvier 1995 en qualité d'éducateur spécialisé, son contrat visant la convention collective de 1966 ; qu'il travaillait au service de l'établissement de l'association ADES Europe à Saint Girons ;
- qu'un avenant a été conclu en 1999 à la suite de la création d'un service d'hébergement individuel à Toulouse auquel il a été affecté ; qu'il a été chargé de l'accompagnement éducatif des jeunes majeurs et mineurs hébergés dans la région de Toulouse ; que son emploi exercé à partir de son domicile à Toulouse inclue des interventions de nuit et en soirée ; que cette clause inclue dans l'avenant de 1999 ne sera jamais respectée ; que pas un seul emploi du temps incluant des interventions de nuit ou en soirée n'a jamais été établi ;
- que par avenant en date du 14 février 2003, il assure pour un mi-temps les fonctions de chef de service éducatif ;
- que sa démission est intervenue à une période où la pérennité du service individuel mis en place à Toulouse était en discussion ; que c'est dans l'optique d'une recherche d'emploi qu'il a demandé un congé sans solde ;
- que sa lettre de rupture en date du 14 décembre 2004 est une prise d'acte de rupture ;
- que l'accord d'entreprise du 15 mai 1997 ne lui a jamais été appliqué dans la mesure où il a assuré des astreintes qui n'ont jamais été indemnisées ; que ce fait permettra d'imputer à l'association ADES Europe la rupture du contrat de travail ;
- qu'il justifie de ce qu'il a assuré des astreintes de nuit et en soirée au bénéfice de l'association ADES Europe ; que l'avenant de 1999 intègre bien l'idée selon laquelle le chef de service éducatif établira pour M. Aïssa X... un emploi du temps incluant des interventions de nuit et en soirée ; qu'aucun emploi du temps de ce type n'a été établi ; qu'il disposait d'un téléphone portable remis par l'association ADES Europe qu'il restituait lorsqu'il partait en congé ; qu'il a, donc, réalisé des astreintes qui ont permis de faire fonctionner le service d'hébergement individuel ;
- que l'accord d'établissement de 1997 prévoit la mise en place d'une permanence téléphonique avec une astreinte rémunérée sur la base forfaitaire de 1 heure pour deux heures ; qu'un accord collectif doit s'appliquer strictement ; que rien ne justifie qu'il soit exclu du bénéfice de cet accord ;
- que l'accord qui n'a pas été agrée a valeur d'engagement unilatéral de l'employeur générateur d'obligations pour l'association ADES Europe et de droits pour M. Aïssa X... ;
- qu'il y aura lieu de lui verser la somme de 338.317€ à titre de rappel de rémunération et celle de 33.831,70€ au titre des congés payés ;
- que subsidiairement, il y a lieu d'indemniser le préjudice qu'il a subi, dans les termes du droit commun, en raison du temps de travail non rémunéré et de sa vie de famille perturbée ; qu'il y a lieu à ce titre de lui allouer la somme de 100.000€ ;
- que la rupture du contrat de travail est imputable à l'association ADES Europe ;
- qu'il y a lieu de lui allouer au titre d'un licenciement sans fondement réel et sérieux la somme de 36.587,76€, outre celle de 13.720,41€ au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
- qu'il y a lieu à confirmation de la décision déférée en ce qu'elle a considéré que l'association ADES Europe avait renoncé à lui demander d'effectuer le préavis et a débouté l'employeur de sa demande d'indemnité sur ce point ;
- qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 2000€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Dans ses explications reprenant et développant ses écritures l'association ADES Europe exposait :
- que le 9 novembre 1999 a été signé avec M. Aïssa X... un avenant au contrat du 12 janvier 1995 contenant son affectation au service de l'hébergement individuel et chargé de l'accompagnement éducatif des jeunes majeurs et mineurs hébergés dans la région toulousaine ; que par avenant en date du 15 janvier 2002, il a été chargé pour une durée de un an de la fonction de coordinateur du service ; que par avenant en date du 14 février 2003 il a été chargé de la fonction de chef de service éducatif à mi-temps du service éducatif d'hébergement individuel du foyer Pyrène avec une indemnité de sujétion particulière de 80 points ;
- que la réclamation au titre de l'astreinte ne peut concerner que la fonction d'éducateur spécialisé coordinateur à mi-temps, puisque la fonction de chef de service à mi-temps prévoit des indemnités d'astreinte d'un montant variable entre 200€ et 500€ par mois ;
- que M. Aïssa X... fonde sa demande sur une lecture erronée d'un accord d'établissement du 15 mai 1997 ; que cet accord d'établissement n'a pas été agrée et n'est, donc, pas applicable comme accord collectif ; qu'à supposer que cet accord soit applicable, il ne concerne que l'hébergement collectif en période de congés scolaires ; que M. Aïssa X... n'a jamais demandé à bénéficier d'une permanence téléphonique aux lieu et place d'une présence physique au foyer en période de vacances scolaires et en l'absence de jeunes ; que ces astreintes ont été rares ;
- que la note d'information du 27 avril 2001 prévoit qu'en journée, lorsque la permanence dure l'unité de Toulouse n'est pas assurée, les appels urgents des jeunes seront reçus par l'hébergement collectif personnalisé ou par le siège administratif et qu'en soirée et la nuit les appels d'urgence sont reçus par les surveillants de nuit de l'Estelas qui renverront si nécessité les appels vers le cadre de permanence ; qu'aucune astreinte n'est prévue pour les éducateurs ; que les astreintes n'ont concerné que les cadres et que M. Aïssa X... a perçu des indemnités afférentes en sa qualité de chef de service à mi-temps ; que les astreintes n'ont pu concerner M. Aïssa X... qu'exceptionnellement en sa qualité d'éducateur spécialisé ; qu'être en possession d'un téléphone portable n'implique pas une astreinte téléphonique 24H sur 24H ; que les attestations produites ne sont pas probantes de la réalité des astreintes ;
- que le prétendu non paiement des heures supplémentaires n'est qu'un prétexte et ne saurait justifier une prise d'acte ; que M. Aïssa X... qui était en congé sans solde a trouvé un autre emploi ; qu'il sera débouté de ses demandes ;
- que M. Aïssa X... qui n'a pas respecté le préavis de trois mois devra lui verser l'équivalent de deux mois de préavis non effectué au titre de chef de service à mi-temps, soit la somme de 2792€ ; que sa lettre du 21 septembre 2004 ne peut s'analyser comme un accord de réduction du préavis ;
- que la procédure a un caractère abusif qui sera indemnisé par l'allocation de la somme de 5000€ ;
- qu'il y a lieu de lui allouer la somme de 3000€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Suivant arrêt avant dire droit du 13 septembre 2007, notre Cour a invité les parties à s'expliquer sur un certain nombre de points de fait.
L'affaire a été renvoyée au 21 novembre 2007, date à laquelle elle a été retenue.
Dans ses explications orales reprenant ses conclusions écrites M. Aïssa X... expose :
- que l'accord d'entreprise du 15 mai 1997 ne vise pas exclusivement l'hébergement collectif de Saint Girons, mais certains services ; que rien ne permet d'en exclure le service d'hébergement individuel ;
- que le service de Toulouse accueillait 20 jeunes en 2000 ; qu'il s'agissait d'une population fragile (ordonnance de 1945, mineurs placés en CHEF...) ; qu'une astreinte de nuit était évidente ;
- que l'avenant l'affectant à Toulouse prévoit cette disponibilité (mise à disposition d'un véhicule de service à son domicile, téléphone professionnel) ;
- que le service de Toulouse , lorsqu'il fermait, basculait ses appels téléphoniques sur son portable ;
- que les jeunes appelaient, à partir de leur téléphone fixe à ligne restreinte, le service toulousain et que leurs appels étaient basculés sur son portable professionnel ;
- qu'il était la seule personne joignable ; qu'il n'a pas partagé cette tâche avec d'autres cadres de l'association ADES Europe ;
- que lorsqu'il est devenu chef de service, il a dû exercer à ce titre 5 astreintes par mois pour lesquelles il a été indemnisé ; qu'il était mobilisé 1h30 à 2heures par jour au téléphone et devait intervenir une à deux fois par semaine auprès des jeunes.
Dans ses explications orales reprenant ses conclusions écrites l'association ADES Europe expose :
- que l'accord de 1997 ne visait pas la situation du service de Toulouse et qu'il n'a jamais demandé à M. Aïssa X... d'être d'astreinte dans les conditions de cet accord ;
- que les astreintes, hors temps de travail des cadres, sont effectuées par les cadres ; que la majorité des jeunes étaient adultes, c'est à dire autonomes ; que les plannings produits établissent qu'il n'y a pas d'astreinte prévue ;
- qu'à compter du 14 février 2003, M. Aïssa X... a perçu une indemnité de sujétion (indemnité de fonction) de 80 points qui ne rémunère pas les astreintes.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
Le 12 janvier 1995, M. Aïssa X... a été embauché par l'association ADES Europe, Foyer d'adolescents Pyrene, en qualité d'éducateur spécialisé au coefficient 632.
Le 9 novembre 1999, sur sa demande, habitant Toulouse, il sera affecté au nouveau service de studios individuels à Toulouse. Son contrat de travail porte les mentions suivantes: " Dans le cadre de sa fonction d'éducateur spécialisé affecté au Service de l'Hébergement Individuel, Monsieur X... Aïssa, sous l'autorité du Chef de Service Educatif est chargé de l'accompagnement éducatif de jeunes majeurs et mineurs hébergés dans la région toulousaine.... Afin d'assurer cette fonction, Monsieur X... Aïssa devra résider dans la région Toulousaine, ce qui est actuellement le cas, son domicile étant situe ... à TOULOUSE, 31100. La liste des adolescents et jeunes majeurs sera arrêtée par le Chef de Service Educatif et ne saurait être supérieure à 10. Monsieur X... sera associé à deux autres éducateurs du service (double responsabilité de projet). Monsieur X... veillera à la transmission des informations nécessaires à ces collègues. Concernant la mise en place et le suivi de l'organisation matérielle de l'hébergement, au niveau pratique, administratif et financier Monsieur X... travaillera en collaboration avec l'Adjoint d'Economat. L'emploi du temps sera défini par le Chef de Service Educatif et inclura des interventions de nuit et en soirée. Monsieur X... disposera d'un véhicule de service dont le lieu de garage pourra être son domicile personnel. Ce véhicule sera utilisé pour des déplacements professionnels exclusivement." .
Il en résulte que M. Aïssa X... avait la responsabilité concrète du fonctionnement du service, que des interventions de jour et de nuit étaient prévues et qu'il disposait à cet effet d ‘un véhicule de service ; par ailleurs, il n'est pas contesté qu'il a été doté d'un téléphone portable de service.
Le 15 janvier 2002, M. Aïssa X... a été promu coordonnateur avec une prime de 25 points.
Le 14 février 2003, M. Aïssa X... a été promu à mi-temps chef de service éducatif; dans le cadre de son mi-temps de chef de service, M. Aïssa X... était classé cadre au coefficient 720 et percevait une indemnité de sujétion particulière de 80 points "en raison de son activité dans un service avec fonctionnement continu avec hébergement". Le mi-temps de chef de service a été pérennisé le 14 août 2003.
M. Aïssa X... sollicite le paiement des astreintes de nuit qu'il a effectuées depuis son affectation à Toulouse et expose que la nature du public pris en charge impliquait nécessairement une présence téléphonique quotidienne et des déplacements ponctuels ; il soutient qu'il a, ainsi, été amené à avoir quotidiennement 1 à 2 heures de discussions téléphoniques avec les jeunes en question et à se déplacer sur le lieu où existait un problème en question 1 fois par semaine.
La période d'astreinte, telle qu'elle est définie par l'article L21 2-4 bis du Code du travail, s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité, afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif. En l'absence de dispositions conventionnelles, contractuelles et de décisions prises par l'employeur relatives à l'organisation des astreintes et à leur compensation financière, laquelle, en l'absence de repos compensateur, est obligatoire aux termes de l'article 212-4 bis alinéa 2, il appartient au juge de fixer cette compensation.
La charge de la preuve ne pesant ps spécialement sur l'une des parties, il y a lieu de rechercher si la preuve est rapportée de ce que M. Aïssa X... , sans être à la disposition permanente et immédiate de son employeur, avait obligation de demeurer à son domicile ou à proximité, afin d' être en mesure, par le biais d'un téléphone portable et physiquement, si nécessaire, d'intervenir auprès des jeunes dont la structure dont il assumait la responsabilité avait la charge.
Il ressort des différents contrats de travail signé entre M. Aïssa X... et l'association ADES Europe la preuve de ce que celui-ci a eu, depuis le début, la responsabilité du fonctionnement de la structure d'hébergement individuel sur Toulouse. Il est incontestable que le suivi d'une population de jeunes fragiles en appartements nécessite un dispositif de permanence téléphonique afin de prendre en charge les difficultés de tous ordres susceptibles de se poser.
Au regard de cette nécessité de mise en place d'une organisation, l'association ADES Europe se contente de dire qu'un système de permanence téléphonique avait été mis en place à Saint Girons et était assumé par les différents cadres.
Or, si l'association ADES Europe produit différents documents par lesquels elle entend rapporter la preuve de ce qu'un système d'astreinte de nuit à Toulouse n'a jamais été accepté (notes du 27 mars 2001, du 27 avril 2001, emploi du temps du service d'hébergement individuel de mai 2001, note d'information du 10 avril 2001, emploi du temps fin 2002 du service de l'hébergement individuel), elle n'apporte aucun élément permettant de comprendre comment, concrètement, les jeunes en difficultés pouvaient contacter un personnel éducatif.
Il n'a pas été contesté, en effet, que les jeunes étaient dotés d'un poste téléphonique fixe à accès limité à la région toulousaine et qu'ils appelaient le service de Toulouse; il n'a pas été soutenu que les jeunes pris en charge savaient que, durant la nuit, ils ne devaient pas appeler le service de Toulouse mais la base administrative à Saint Girons.
Il est, tout au contraire établi par trois attestations, dont deux dressées par des éducatrices (Mme A..., Mme B...) et une par une jeune adulte que lors de la fermeture du service toulousain, la ligne de ce service était "systématiquement" transférée sur celle du portable professionnel de M. Aïssa X... .
Il est, donc, certain que M. Aïssa X... a été , concrètement, nécessairement contacté par les jeunes qui souhaitaient parler à un adulte responsable du service de Toulouse. Au demeurant, le détail des appels du portable professionnel de M. Aïssa X... pour le mois de juin 2003, certes, moins intéressant que n'aurait été le détail des transferts d'appel du fixe du service toulousain en direction du portable professionnel de M. Aïssa X... , met en évidence une importante proportion d'appels en dehors des heures d'ouverture de bureau.
L'attestation de Mme A... établit que de juillet 2002 au 31 octobre 2004, période de sa présence dans le service toulousain, M. Aïssa X... a pu, ainsi, toutes les soirées, être joint, pour les besoins du service dès lors que l'antenne toulousaine était appelée.
Il apparaît ainsi que les notes de service de 2001 et le système d'astreinte mis en place entre les cadres au niveau de l'association n'ont eu aucune conséquence sur les conditions de travail de M. Aïssa X... dans son service toulousain; il ne peut être utilement soutenu par l'association ADES Europe que cette pratique initiée par M. Aïssa X... a contrevenu aux directives de l'association ADES Europe et lui interdit toute rémunération, alors que celle-ci ne pouvait pas ne pas savoir que les cadres d'astreinte au niveau de l'association n'avaient aucun appel de la structure toulousaine. Bien plus, la lecture du compte rendu de la réunion des délégués du personnel du 4 avril 2001 démontre que l'association ADES Europe ne pouvait ignorer qu'existait un différent quant à l'organisation des permanences, donc, des astreintes et qu'existait un vrai besoin d'organisation d'une astreinte pour les jeunes suivis à Toulouse.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'association ADES Europe ne pouvait ignorer que l'organisation mise en place, par ses caractéristiques mêmes, ne pouvait que faire reposer sur M. Aïssa X... les situations d'urgence ou de mal être qui se produisaient la nuit et qui lui imposaient, de fait, une position d'astreinte. Il ne peut qu'être constaté que l'association ADES Europe , d'ailleurs, ne soutient pas que le système d'astreinte par les cadres a permis de faire face aux appels des jeunes pris en charge par la structure toulousaine. L'association ADES Europe ne peut, donc, reprocher à M. Aïssa X... d'avoir méconnu ses instructions qui laissaient un pan de l'activité du service non pris en charge.
Il apparaît également que l'accord d'établissement du 17 mai 1997 prévoyant que toute heure d'astreinte doit être rémunérée sur la base forfaitaire de 1 heure pour 2 heures, concernait la situation de l'établissement principal privé d'enfants durant les périodes scolaires et ne pouvait concerner le service de Toulouse aux dimensions plus réduites et au cycle d'activité complètement différent.
Il y a lieu, enfin, de constater que l'indemnité de sujétion perçue depuis 2003 par M. Aïssa X... en sa qualité de chef de service ne concerne en rien l'astreinte litigieuse, comme cela résulte des propres écritures de l'association ADES Europe (p 3 des dernières écritures) ; les contreparties de cette indemnité de sujétion ne sont pas en litige et n'ont aucune incidence avec le présent débat. L'association ADES Europe précise, au demeurant, que cette indemnité de fonction "ne rémunère pas les astreintes, lesquelles sont payées en plus du salaire et apparaissent sur les bulletins de salaire".
Il y a, donc, lieu de constater l'absence de dispositions conventionnelles, contractuelles et de décisions prises par l'employeur relatives à l'organisation des astreintes et à leur compensation financière ; il convient, donc, de fixer cette compensation eu égard aux caractéristiques concrètes de l'astreinte et aux sujétions qui en sont résultées pour M. Aïssa X... dans sa vie personnelle.
Au regard des éléments ci-dessus, il y a lieu de retenir un préjudice certain qu'il y a lieu de réparer par une indemnité mensuelle de 300€ par mois travaillé et hors période de congé sans solde, aucune prescription n'étant invoquée.
Cette somme s'appliquera aux périodes durant lesquelles M. Aïssa X... percevra pour son mi-temps de cadre un indemnité de sujétion, cette indemnité n'ayant pas eu pour objet d'indemniser l'astreinte du service toulousain mais de participer à une permanence au niveau de l'association.
Eu égard aux éléments ci-dessus, il y a lieu d'allouer la somme de 10.800€ pour l'ensemble de la période litigieuse.
Lorsqu'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués le justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission.
Le non paiement des heures d'astreinte par l'association ADES Europe sur une période de cinq ans qui a fait peser sur M. Aïssa X... une contrainte non rémunérée en méconnaissance des obligations pesant sur l'employeur, justifie qu'il soit considéré que la prise d'acte du 14 décembre 2004 qui était fondée produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il est dû à M. Aïssa X... l'indemnité conventionnelle de licenciement à hauteur de la somme non contestée de 13.720,41€.
Par ailleurs, au regard de l'ancienneté de M. Aïssa X... , des caractéristiques de son poste, du fait qu'il a retrouvé un emploi, il y a lieu de lui allouer la somme de 36.576€ au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.
En ce qui concerne la demande reconventionnelle de l'association ADES Europe relative au préavis dû par M. Aïssa X..., préavis de un mois pour les fonctions d'éducateur et de trois mois pour les fonctions de cadre, notre Cour observe que le courrier en date du 21 septembre 2004 de l'association ADES Europe qui accorde la poursuite du congé sans solde précise: "je vous demande, conformément à notre accord, de me faire savoir avant le 15 décembre 2004, si vous souhaitez réintégrer votre poste ou pas". Il apparaît que clairement l'association ADES Europe envisage la possibilité pour M. Aïssa X... de ne pas effectuer son délai congé ; cette proposition qui fait référence à un accord, est conforme à l'article 16 de la convention collective nationale et a été acceptée par courrier en date du 14 décembre 2004 par M. Aïssa X... . La demande reconventionnelle sera, donc, rejetée.
L'article 696 du nouveau Code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en remette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. En l'espèce, l'association ADES Europe succombant sur la majorité des points supportera les dépens.
L'article 700 du nouveau Code de procédure civile dispose que dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, que le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et qu'il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.
En l'espèce, les éléments de la cause justifient que , l'association ADES Europe partie qui succombe, soit condamnée à verser à M. Aïssa X... la somme de 1500€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant comme il est dit ci dessus,
Confirme la décision déférée seulement en ce qu'elle a débouté l'association ADES Europe de ses demandes reconventionnelles ;
L'infirme pour le surplus et statuant à nouveau :
Condamne l'association ADES Europe à verser à M. Aïssa X... la somme de 10.800€ à titre d'indemnité pour les astreintes non rémunérées ;
Dit que la prise d'acte était justifiée et produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
En conséquence, condamne l'association ADES Europe à verser à M. Aïssa X... :
- la somme de 13.720,41€ à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
- la somme de 36.576€ à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- la somme de 1500e sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Condamne l'association ADES Europe aux entiers dépens.
Le présent arrêt a été signé par monsieur BRUNET, président et madame MARENGO, greffier.
Le greffier, Le président,
P. Z... B. Y...