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16/01/2008 | FRANCE | N°07/00789

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 16 janvier 2008, 07/00789


16/01/2008





ARRÊT No22





No RG : 07/00789

BB/MB



Décision déférée du 02 Juin 2005 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE - 03/02321

M.H. RAYNAUD























SYNDICAT CGT DU PERSONNEL DE NEXTIRAONE FRANCE

Patrice Y...




C/



Société NEXTIRAONE FRANCE





































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INFIRMATION







REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT

***



APPELANTS



SYNDICAT CGT DU PERSONNEL DE NEXTIRAONE FRANCE

représenté par son secrétaire monsieur Paul Z...


...

...

16/01/2008

ARRÊT No22

No RG : 07/00789

BB/MB

Décision déférée du 02 Juin 2005 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE - 03/02321

M.H. RAYNAUD

SYNDICAT CGT DU PERSONNEL DE NEXTIRAONE FRANCE

Patrice Y...

C/

Société NEXTIRAONE FRANCE

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale

***

ARRÊT DU SEIZE JANVIER DEUX MILLE HUIT

***

APPELANTS

SYNDICAT CGT DU PERSONNEL DE NEXTIRAONE FRANCE

représenté par son secrétaire monsieur Paul Z...

...

75012 PARIS

représentée par Me Pierre MASANOVIC, avocat au barreau de LYON

Monsieur Patrice Y...

...

31290 VILLEFRANCHE DE LAURAGAIS

comparant en personne, assisté de Me Pierre MASANOVIC, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE

Société NEXTIRAONE FRANCE

Établissement Sud Ouest

... des Moulinais

31505 TOULOUSE CEDEX

représentée par la SELAFA BARTHÉLÉMY et associés, avocats au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

B. BRUNET, président

F. BRIEX, conseiller

M.P. PELLARIN, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : P. MARENGO

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile

- signé par B. BRUNET, président, et par P. MARENGO, greffier de chambre.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :

M. Patrice Y... a été embauché le 29 octobre 1973 par la société FRANÇAISE DES TÉLÉPHONES ERICSSON aux droits de laquelle vient son employeur actuel la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest (anciennement THOMSON TÉLÉPHONE, ALCATEL) ; il occupe un emploi de technicien SAV Maintenance.

Depuis 1992, M. Patrice Y... a été élu membre au comité central d'entreprise et a occupé des mandats désignatifs et électifs de représentant du personnel. Il est délégué régional CGT de son établissement régional d'appartenance.

Le 17 septembre 2003, M. Patrice Y... a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse d'une demande tendant à se voir allouer la somme de 50.000€ de dommages et intérêts pour discrimination et à se voir repositionner sur la grille de rémunération. Le syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE est intervenu volontairement.

Par décision en date du 2 juin 2005, le conseil de prud'hommes de Toulouse a considéré :

- qu'en 1999, 2003, 2004 M. Patrice Y... a demandé trois formations qui lui ont été refusées ; qu'il est, toutefois, établi que durant la période considérée il a suivi 24 journées de formation ; que la discrimination en matière de formation n'est pas établie ;

- que la situation de M. Patrice Y... doit être évaluée tant en termes de niveau de rémunération, qu'en terme d'évolution au sein de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest ;

- qu'en l'espèce, les salariés de la société NEXTIRAONE FRANCE Sud-Ouest justifiant de la classification de niveau IV 3, c'est-à-dire Messieurs D..., E..., F..., G..., H... et Y... Patrice, disposent d'une rémunération annuelle théorique comprise entre 21 437 € et 23 465 € pour respectivement Monsieur D... et Monsieur H... ; que Monsieur Y... Patrice pour sa part dispose d'une rémunération annuelle théorique de 23 231 €, deuxième plus haut salaire de ce niveau de qualification ; qu'au regard de l'ensemble de la population des experts maintenance dans la Sté NEXTIRAONE, soit 37 salariés, et en tenant compte de l'ancienneté respective de chaque salarié appartenant à cette population, la rémunération annuelle théorique de Monsieur Y... Patrice soit 23 231 € est voisine de la rémunération annuelle théorique moyenne de cette population soit 23.697€ ;

- que Monsieur Y... Patrice devance 20 salariés dont l'ancienneté varie entre 9 et 31 ans au sein de la société, sur les 37 salariés constituant cette population; que les tableaux nominatifs concernant l'évolution de rémunération de Messieurs J0URET, LEBAS, LUI, RIGONI et TELLIA semblent montrer que Monsieur Y... Patrice présente un déroulement de carrière plus lent que celui de ces salariés auxquels il se compare ; que cependant chacun de ces salariés se différencie à un moment de sa carrière du cursus de Monsieur Y... Patrice ; qu'en conséquence, l'évolution de carrière et la rémunération de Monsieur Y... Patrice ne permettent pas de mettre en évidence l'existence d'une discrimination dont il aurait pu être l'objet.

Le 27 juin 2005 M. Patrice Y... et le syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE ont relevé appel de cette décision. Les deux instances ont été jointes.

Dans leurs explications orales communes à l'audience reprenant et développant leurs écritures écrites auxquelles il y a lieu de se référer, M. Patrice Y... et le syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE exposent au soutien de leur appel :

- que M. Patrice Y... a fait l'objet de décisions prenant en compte son appartenance et son activité syndicale ; que le coefficient de M. Patrice Y... est demeuré bloqué de mai 1990 à juillet 2001, date à laquelle il a accédé à la classification IV, coefficient 285, avec augmentation de 420F dans le cadre de décisions prises par la direction de l'entreprise à l'égard des élus CGT, ensuite des réclamations et procédures initiées par l'organisation syndicale; qu'il est, toujours au même coefficient ;

- que sa situation discriminatoire remonte à la prise de son mandat ; qu'il n'a depuis 2001 bénéficié d'aucune augmentation individuelle ;

- qu'il appartient au salarié de présenter aux débats les éléments objectifs susceptibles de caractériser une situation révélatrice d'un traitement différent et désavantageux ; qu'il revient à l'employeur de rapporter la preuve que cette inégalité de traitement est justifiée par des éléments objectifs ; qu'à défaut, l'employeur ne peut qu'être condamné à indemniser le préjudice subi par le salarié ;

- que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest a été condamnée à trois reprises pour des faits de discrimination syndicale ;

- que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest a essayé de licencier M. Patrice Y... dans le cadre d'un licenciement économique; que l'autorité administrative a retenu des comportements discriminatoires à l'effet de refuser d'autoriser son licenciement ; que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest s'est désistée de son recours; que cet élément établit la discrimination ;

- que les entretien annuels d'appréciation font apparaître en 1997, 2001, 2004 des appréciations laissant apparaître son activité syndicale par des allusions relatives à son manque de présence ;

- qu'une demande de délégation lui a été refusée en septembre 2000 par son responsable direct ;

- qu'en mai 2000 une augmentation générale individualisée de 1,4% a été accordée à 123 personnes a été accordée ; qu'en compagnie de 4 personnes il a perçu une augmentation de 0,7%, une seule personne n'ayant aucune augmentation;

- qu'il a été écarté des formations sur les nouveaux produits ;

- qu'il n'a jamais pu bénéficier de formation sur des supports performants et innovants ;

- qu'à l'occasion des discussions relatives à la rupture négociée de son contrat de travail, fin 2001, la DRH lui soumettait un document comparatif avec des techniciens du SAV choisis par la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest dont il résultait qu'il disposait en 2001, après augmentation, de la 2o ancienneté et avait le salaire le moins élevé, alors qu'en octobre 1993 un seul salarié avait un coefficient supérieur au sien ;

- que l'inégalité de traitement est établie ;

- que les panels de comparaison produits par la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest ne sont pas fiables; qu'il est le seul technicien provenant d'OPUS Alcatel dont le niveau de rémunération est aussi bas ;

- qu'il est fondé à demander indemnisation de son préjudice matériel et moral; qu'il sollicite la somme de 50.000€ ;

- qu'il y a lieu d'ordonner son repositionnement au coefficient V.1 305 avec une rémunération mensuelle brute de base de 2556€ (13o mois inclus) ;

- qu'il y a lieu d'allouer au syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE est intervenu volontairement la somme de 5000€ à titre de dommages et intérêts.

En conséquence, M. Patrice Y... et le syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE est intervenu volontairement sollicitent voir notre Cour :

" Vu les articles L 412-2 et L 122-45 du Code du travail,

Réformer le jugement entrepris.

Condamner la société NEXTIRAONE FRANCE à payer à Monsieur Y... la somme de 50 000 € à titre de dommages intérêts.

Dire et juger qu'à effet du 1er janvier 2006, Monsieur Y... bénéficiera du coefficient V I 305 avec rémunération mensuelle de base de 2 556 € (13è mois inclus) en regard du salaire moyen des salariés non cadres du service client de la Région SUD OUEST au 31 décembre 2005.

Condamner la société NEXTIRAONE FRANCE au paiement du rappel de salaire correspondant depuis le 1o janvier 2006.

Condamner également la société NEXTIRAONE FRANCE à payer à Monsieur Y... la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner la société NEXTIRAONE FRANCE à payer au syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts, outre celle de 1 000 € au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Condamner la société NEXTIRAONE FRANCE en tous les dépens.".

Dans ses explications orales à l'audience reprenant et développant ses écritures écrites auxquelles il y a lieu de se référer, la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest , partie intimée expose:

- que les décisions de l'autorité administrative ne constituent que des avis ;

- que le refus d'accepter des délégations constitue une erreur isolée ;

- que l'augmentation de mai 2000 n'est pas significative et doit être replacée sur des périodes plus longues ;

- qu'elle a contesté le tableau qui a été remis à M. Patrice Y... dans la mesure où il est incomplet ;

- qu'il y a lieu d' examiner les situations des personnes se trouvant dans la même situation que M. Patrice Y..., c'est à dire des experts maintenance voix ; que si M. Patrice Y... n'est pas en tête, il n'est pas, non plus, en queue ;

- qu'aucun élément ne traduit un refus systématique de l'employeur d'accéder aux demandes du salarié en matière de formation ;

- que le reproche dans les entretiens d'évaluation concerne, non son volume global d'activité, mais sa productivité ;

En conséquence, la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest sollicite voir notre Cour :

" DIRE ET JUGER que Monsieur Y... n'a pas subi de discrimination en terme d'évolution, de rémunération ou de salaire,

En conséquence,

-DÉBOUTER Monsieur Y... de l'intégralité de ses demandes,

-DÉBOUTER le syndicat CGT de ses demandes,

-CONDAMNER Monsieur Y... et le syndicat CGT solidairement à payer à la société NEXTIRAONE la somme de 4000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du NCPC et les entiers dépens.".

MOTIVATION DE LA DÉCISION :

Il y a lieu de constater que :

- la déclaration d'appel a été signée par un mandataire avocat,

- la déclaration d'appel est intervenue dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision déférée, conformément aux dispositions de l'article R 517-7 du Code du travail, la date de l'appel formé par lettre recommandée étant celle du bureau d'émission,

- le jugement déféré est susceptible d'appel dans les conditions des article R 517-3 et R 517- 4 du code du travail, la valeur totale des prétentions de l'une des parties, à l'exclusion de la seule demande reconventionnelle en dommages et intérêts fondée exclusivement sur la demande initiale, dépassant le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes, soit 4000€.

En conséquence, l'appel est recevable.

Aux termes des articles L122-45 et L 412-1 du Code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné ou subir un traitement différent des autres salariés en raison de ses activités syndicales. Il appartient au salarié concerné de présenter des éléments de faits laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et à l'employeur au vu de ces éléments de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toutes discriminations.

M. Patrice Y..., embauché en 1973 technicien à la classification III-1 au coefficient 215 et qui avait accédé à la classification IV-1 coefficient 255 en 1990, période à laquelle il a commencé à avoir des mandats électifs et syndicaux dans la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest , établit :

- que si jusqu'en 1990, soit en 6 ans, il a bénéficié de 3 augmentations promotionnelles individuelles et de 4 augmentations individuelles de salaire, il a de 1991 à 2006 bénéficié d'une augmentation promotionnelle commune aux IRP de la CGT et de 4 augmentations individuelles de salaire,

- que de mai 1990 à juillet 2001, date de la mesure de rattrapage commune aux IRP CGT, il n'a bénéficié d'aucune augmentation de coefficient ;

- que l'inspecteur du travail en charge de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest a, par courrier en date du 24 octobre 2003 considéré que la stratégie nationale de NEXTIRAONE " était de réduire la représentation du premier collège dans le fonctionnement des institutions de dialogue social" et que cela caractérisait "des éléments de discrimination envers les syndicats ouvriers";

- que la note de synthèse du directeur régional du travail établie le 11 mai 2000 mettait en évidence, à l'occasion de la demande d ‘autorisation de licenciement de M. Patrice Y..., que "le licenciement serait une conséquence de l'exercice par l'intéressé de mandats représentatifs";

- que ses évaluations font état de problèmes de présence et manque d'activité qui nécessairement tendent à tenir compte des mandats syndicaux ;

- que le 25 septembre 2000 il lui a été refusé un bon de délégation par son supérieur hiérarchique ;

- qu'en mai 2000, alors qu'une augmentation générale individualisée avait été accordée, 123 personnes ont reçu une augmentation de 1,4%, 4, dont lui-même, ont reçu une augmentation de 0,7%, une seule personne n'ayant perçu aucune augmentation ;

- que fin juin 2001, un tableau réalisé par la DRH de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest mettait en évidence qu'alors qu'il disposait de la 2o ancienneté du personnel, il avait le salaire de base le moins élevé en juillet 2001, alors même qu'il avait bénéficié d'une augmentation tendant à compenser partiellement la discrimination dont faisaient l'objet les représentants CGT ; qu'en comparaison avec les salariés se trouvant dans la situation la plus proche de la sienne l'écart de rémunération était de l'ordre de 100 à 200€ en sa défaveur ;

- qu'il a présenté des demandes de formation sur des nouveaux produits, gamme 4200 , demandes qui n'ont pas abouti.

La Cour observe, tout d'abord, que la décision de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest en juillet 2001 d'augmenter les salaires et coefficients des seuls élus CGT en plus des augmentations générales ne peut s'analyser que comme la reconnaissance de l'existence d'une situation de discrimination ; toutefois, la compensation accordée, en ce qu'elle était uniforme et s'adressait à plusieurs représentants syndicaux ne peut être considérée comme ayant mis fin à la situation de discrimination qui l'a motivée.

Il convient, ensuite, d'observer que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest qui conteste toute stratégie de discrimination à l'égard de la CGT, ne peut soutenir que les tableaux que ses services ont établis en vue d'effectuer des comparaisons, sont dénués de pertinence. Ces tableaux mettent en évidence qu'à ancienneté et situation égale, M. Patrice Y... est le plus mal payé et le plus mal classé.

Les tableaux produits par la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest concernant le niveau IV ne sont pas significatifs en ce qui concerne le salaire de M. Patrice, sauf à noter que M. Patrice Y... qui a la plus forte ancienneté bénéficie seulement du deuxième salaire le plus élevé. Est, cependant, intéressant le deuxième tableau produit par la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest qui met en évidence que M. Patrice Y... justifie dans son groupe des experts maintenance d'une ancienneté supérieure à la moyenne (31 ans au lieu de 23 ans). Par ailleurs, un troisième tableau met en évidence que sur les 18 salariés embauchés entre 1970 et 1979 M. Patrice Y... est classé au coefficient 285, alors que la moyenne est 297.

Sur tous ces points mettant en évidence une disparité évidente de traitement, la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest ne donne aucun élément objectif d'explication, se contentant de dire que M. Patrice Y... n'est "pas le plus mal loti"; moyen de défense qui n'établit pas que la disparité de traitement constatée se justifie par des éléments objectifs. Ainsi, au vu des documents produits, la preuve est rapportée d'une différence de traitement dans le déroulement de carrière de M. Patrice Y... .

Il convient également de considérer qu'à différentes occasions, les évaluations de M. Patrice Y... faisant état de manque d'activité ont, en omettant de neutraliser les temps de délégation syndicale, nécessairement pris en compte l'exercice de ses mandats de représentation et de ses fonctions syndicales ; la Cour trouve la preuve de cette prise en compte dans le fait que, dans le cas contraire, les résultats obtenus par M. Patrice Y... (2,2 atteints par jour en 2003-2004 au lieu des 4 ciblés) n'auraient pas manqué d'entraîner une réaction de son employeur et des évaluations très négatives, ce qui n'est pas le cas.

Le refus de délégation de M. Patrice Y... ne peut être présenté par la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest comme une simple erreur ; en effet, la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest ne peut raisonnablement invoquer une erreur de la hiérarchie intermédiaire, alors qu'il n'a pas été contesté que le 21 septembre 2000, jour de la délégation refusée, les délégués syndicaux devaient se rendre au tribunal d'instance de Toulouse où les organisations syndicales étaient convoquées pour un désaccord entre elle et la direction sur les élections du personnel et que la décision de refus ne pouvait qu'intéresser au plus au point la direction.

L'argument de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest selon lequel il a été fait droit normalement aux demandes de formation sur la gamme 4200 ne peut être accepté dans la mesure où M. Patrice Y... a déposé sa demande en 1997, dans la mesure où il n'a été fait droit à sa demande qu'en 2004, dans la mesure où il n'est nullement expliqué pourquoi certains salariés ont pu bénéficier de cette formation antérieurement et pourquoi M. Patrice Y... n'a pas pu profiter de cette formation qui ouvrait des perspectives de carrière.

Il convient, donc, de constater que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest n'apporte pas la preuve de ce que les traitements différents constatés ont été justifiés par des éléments objectifs étrangers à toutes discrimination et pourquoi, sur tous les points, chaque fois qu'existait un choix il s'est avéré être fait au détriment de M. Patrice Y....

Il y a, donc, lieu de réformer la décision entreprise.

Le traitement discriminatoire dont a été l'objet M. Patrice Y... depuis 1990 lui a causé un préjudice financier, matériel, moral qui n'a nullement été entièrement compensé par l'attribution en juillet 2001 d'une augmentation collective aux délégués CGT. Il convient de réparer le préjudice subi par M. Patrice Y... au 31 décembre 2005, au regard des éléments ci-dessus mis en évidence, par la somme de 40.000€.

Par ailleurs, à partir du 1o janvier 2006, il convient de replacer M. Patrice Y... dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable et contraire à l'article L 412-2 du Code du travail n'avait pas eu lieu. Les éléments ci-dessus, ainsi que le salaire moyen des salariés non cadres du service client de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest au 31 décembre 2005, mettent en évidence que M. Patrice Y... aurait dû, à l'évidence, connaître une évolution de carrière lui permettant d'accéder au coefficient V.1 305, avec une rémunération brute de 2556€, 13o mois inclus, au regard du salaire moyen des salariés non cadres du service client de la région Sud-Ouest.

L'intervention volontaire du syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE est fondée; ce syndicat justifie que son action et ses intérêts ont été entravés et lésés du fait du comportement de la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest ; il y a lieu de lui allouer la somme de 1500€ à titre de dommages et intérêts.

L'article 696 du nouveau Code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en remette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. En l'espèce, la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest succombant sur la majorité des points supportera les dépens d'appel.

L'article 700 du nouveau Code de procédure civile dispose que dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, que le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et qu'il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

En l'espèce, les éléments de la cause justifient que la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest, partie qui succombe, soit condamnée à verser à M. Patrice Y... la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et au syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE la somme de 500€ sur le même fondement.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant comme il est dit ci dessus,

Déclare recevable l'appel de M. Patrice Y...,

Dit que la procédure est régulière,

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau, vu les articles L 412-2 et L 122-45 du Code du travail,

Condamne la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest à verser à M. Patrice Y... la somme de 40.000€ à titre de dommages et intérêts,

Dit qu'à effet du 1o janvier 2006, Monsieur Y... bénéficiera du coefficient V.1 305 avec rémunération mensuelle de base de 2 556 € (13o mois inclus),

Condamne la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest à verser au syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE la somme de 1500€ à titre de dommages et intérêts,

Condamne la SA NEXTIRAONE FRANCE établissement sud ouest aux entiers dépens et à verser à M. Patrice Y... la somme de 1000€ sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile et au syndicat CGT du personnel de NEXTIRAONE FRANCE la somme de 500€ sur le même fondement.

Le présent arrêt a été signé par monsieur BRUNET, président et madame MARENGO, greffier.

Le greffier,Le président,

P. MARENGOB. BRUNET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 07/00789
Date de la décision : 16/01/2008
Sens de l'arrêt : Autre

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse


Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2008-01-16;07.00789 ?
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