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21/12/2007 | FRANCE | N°06/02736

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 21 décembre 2007, 06/02736


21 / 12 / 2007

ARRÊT No

No RG : 06 / 02736
CP / HH

Décision déférée du 29 Mai 2006- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE- 05 / 01748
Philippe DAVID

SAS CENPAC

C /

Paul A...

CONFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
***
ARRÊT DU VINGT ET UN DECEMBRE DEUX MILLE SEPT
***

APPELANT (S)

SAS CENPAC
89 Rue des Cités
40100 DAX

représentée par Me Etienne DENARIE, avocat

au barreau de PARIS

INTIME (S)

Monsieur Paul A...
...
31500 TOULOUSE

comparant en personne

assisté de Me Jean ABBO, avocat au barreau de TOULOUSE ...

21 / 12 / 2007

ARRÊT No

No RG : 06 / 02736
CP / HH

Décision déférée du 29 Mai 2006- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE- 05 / 01748
Philippe DAVID

SAS CENPAC

C /

Paul A...

CONFIRMATION PARTIELLE

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
***
ARRÊT DU VINGT ET UN DECEMBRE DEUX MILLE SEPT
***

APPELANT (S)

SAS CENPAC
89 Rue des Cités
40100 DAX

représentée par Me Etienne DENARIE, avocat au barreau de PARIS

INTIME (S)

Monsieur Paul A...
...
31500 TOULOUSE

comparant en personne

assisté de Me Jean ABBO, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 08 Novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

P. de CHARETTE, président
C. PESSO, conseiller
C. CHASSAGNE, conseiller
qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : D. FOLTYN- NIDECKER

ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile
- signé par P. de CHARETTE, président, et par D. FOLTYN- NIDECKER, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Engagé le 1er septembre 1980 par la société DIPACSO qui est devenue, après diverses transformations, la société CENPAC, M. A... a occupé plusieurs postes avant d'être nommé le 1er septembre 2002 directeur commercial du marché industrie.

Il a été licencié pour raison économique le 23 mai 2005 dans le cadre d'une restructuration de l'entreprise ayant donné lieu à un plan de sauvegarde de l'emploi concernant 55 postes de travail.

Contestant son licenciement, M. A... a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse, lequel, par jugement en date du 29 mai 2006, retenant que " malgré une situation économique pour le moins délicate, des efforts de reclassement et de réembauchage, le manque manifeste d'effort de formation et d'adaptation " rend le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, a condamné la société CENPAC à payer au salarié 100. 000 € à titre de dommages- intérêts et 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La société CENPAC a régulièrement relevé appel de ce jugement par lettre recommandée du 6 juin 2006 et M. A... par déclaration au greffe en date du 19 juin 2006.

Les deux procédures ont été jointes par ordonnance du 21 juin 2006.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

La société CENPAC, par conclusions déposées et développées à l'audience du 8 novembre 2007, sollicite le débouté de M. A... de l'intégralité de ses demandes et sa condamnation aux entiers dépens, en faisant valoir que :

- le licenciement est justifié dès lors qu'en raison de la baisse du chiffre d'affaires de 2002 à 2004, de la diminution de la marge brute, de l'érosion du portefeuille de clients et de l'accroissement de l'endettement, l'entreprise a choisi, pour tenter de rester compétitive, en vue d'optimiser ses coûts de fonctionnement, de réduire ses charges d'exploitation en rapprochant les différentes structures et en supprimant plusieurs agences, ce qui a entraîné la suppression du poste de M. A... ;

- le licenciement n'est pas abusif dans la mesure où le retrait de l'intéressé du comité de direction, relevant du pouvoir du chef d'entreprise, était cohérent et où ses responsabilités lui ont été maintenues jusqu'à son départ ;

- l'obligation de reclassement a été respectée puisque des offres de postes disponibles lui ont été faites personnellement, qu'il a refusées, et qu'il n'était pas compétent pour celui, nouvellement créé de " directeur achats et logistique " pour lequel il n'a d'ailleurs pas postulé ;

- la priorité de réembauchage a été respectée car il résulte des échanges de courriers que M. A... n'a pas accepté le poste de " directeur commercial du marché commerce et GMS " aux conditions proposées par la société ;

- le conseil de prud'hommes a statué ultra petita en ce qui concerne le manque d'efforts de formation et d'adaptation, d'autant que les obligations légales en la matière ont été remplies.

M. A..., par conclusions déposées au greffe le 15 octobre 2007 et présentées à l'audience de plaidoiries, demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a admis le principe du licenciement sans cause,

- y ajouter et le réformer pour le surplus,

- condamner la société CENPAC à lui payer :
* 200. 000 € à titre de dommages- intérêts pour licenciement dénué de toute cause économique réelle et sérieuse,
* 20. 000 € en réparation de son préjudice moral résultant des circonstances vexatoires et abusives ayant précédé son licenciement,
* 17. 016 € au titre de la violation de la priorité de réembauchage,
* 19. 500 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis résultant de la rupture du contrat formé pour le poste de directeur commercial du marché commerce et GMS, outre 1. 950 € au titre des congés payés afférents et 3. 250 € pour violation de la procédure de licenciement ;
* 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il développe les moyens suivants :

- le licenciement n'est justifié ni par les difficultés économiques de la société CENPAC, alors que le chiffre d'affaires et les marges ont été restaurés, la situation rétablie en 2004 et consolidée en 2005 après l'acquisition en 2002 de la société STOROPACK, ni par la nécessaire sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, dont la société CENPAC ne rapporte pas la preuve alors que le seul but affiché était d'optimiser les coûts de fonctionnement ; en outre, l'employeur ne démontre pas la nécessité de supprimer son poste ;

- le licenciement n'a pas été précédé d'une recherche de reclassement, l'entreprise ayant créé le poste de directeur logistique et achats dont elle ne lui a pas indiqué l'existence, et ne prouvant pas qu'il n'était pas compétent pour l'occuper, d'autant qu'elle n'avait pas mis en oeuvre la gestion prévisionnelle des emplois et compétences ;

- il a été évincé du comité de direction sans motif légitime et de façon vexatoire ;

- la priorité de réembauchage n'a pas été respectée à son égard ; en outre, le contrat de travail concernant le poste de directeur commercial du marché commerce et GMS qu'il avait accepté sans condition a été abusivement rompu par la société CENPAC qui a délibérément entravé son retour dans l'entreprise en modifiant à plusieurs reprises les conditions contractuelles.

MOTIFS DE LA DÉCISION

La lettre de licenciement est ainsi libellée :

" Notre Société est confrontée depuis plusieurs années à de sérieuses difficultés économiques découlant de l'érosion de son volume d'activité.

En effet, sur les trois derniers exercices (2002 à 2004), en prenant compte de l'acquisition de la société Storopack réalisée en 2002, le chiffre d'affaires a globalement baissé de 9, 5 M €, soit- 5, 9 %, et la marge brute de 3, 5 M €, soit- 7, 17 %. A l'issue de l'année 2004, la situation commerciale de l'entreprise s'avère fragile : le chiffre d'affaires et la marge n'évoluent pas et ce, en sus, dans un contexte de fortes hausses de prix sur certaines familles de produits (plastiques notamment). La difficulté voire l'impossibilité de répercuter des hausses vont de nouveau fragiliser l'équilibre encore précaire de la Société.
Notre Société se trouve ainsi dans la nécessité de revoir son organisation, à la fois pour optimiser son fonctionnement, mais également pour continuer à optimiser ses coûts de fonctionnement, ces deux éléments constituant aujourd'hui une étape supplémentaire indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise, et à la pérennité de l'entité économique.
La réorganisation décidée se traduit notamment par la suppression de la Direction Commerciale du Marché Industrie. Ceci se justifie dans le contexte économique difficile dans lequel se situe aujourd'hui l'entreprise.
Ces motifs nous conduisent par conséquent à supprimer votre poste de travail.
Ces derniers ont été présentés en réunion extraordinaire du Comité d'Entreprise, au travers du livre IV.

Nous avons recherché les postes susceptibles de vous être proposés à titre de reclassement, et d'éviter votre licenciement économique.
Par courrier du 17 Mars 2005, nous vous avons ainsi soumis des propositions de reclassement, que vous n'avez cependant pas acceptées.

Dans ces conditions, aucune autre solution de reclassement n'ayant pu être trouvée, nous sommes contraints de prononcer votre licenciement pour motif économique. "

Le licenciement pour motif économique de M. A... ne peut être validé que si la réorganisation de la société CENPAC qui exploite la totalité du secteur d'activité " distribution " du groupe GASCOGNE auquel elle appartient entraînant la suppression de son poste de travail, était justifiée par les difficultés économiques de l'entreprise ou par la nécessité de sauvegarder sa compétitivité.

Il résulte des pièces produites par les parties que :

- la situation de la société CENPAC présentait au 31 décembre 2004 un chiffre d'affaires de 153, 7 millions d'euros (M €), une marge brute de 45, 3 M €, un excédent brut d'exploitation de 3, 8 M € et un résultat net de 2, 3 € ;

- contrairement à ce qu'elle soutient, ces résultats n'étaient pas en constante diminution depuis 2002 : le chiffre d'affaires 2004 était, certes, inférieur à celui de 2002 qui avait connu une hausse significative (160, 2M €) lors du rachat de la société STOROPACK, mais supérieur à celui de 2003 (151, 8 M €) ; la marge brut était, certes, inférieure à celle des années précédentes mais l'excédent brut d'exploitation et le résultat net étaient supérieurs à ceux des deux années précédentes.

Ainsi, même si la situation de la société CENPAC présentait des fragilités importantes, comme l'a indiqué l'expert désigné par le comité d'entreprise, ses résultats étaient positifs et en progression par rapport aux années antérieures, et ce malgré l'endettement généré par l'acquisition de la société STOROPACK, de sorte que la preuve de difficultés économiques de l'entreprise n'est pas rapportée.

Par ailleurs, la société CENPAC ne justifie pas de circonstances pouvant faire craindre des difficultés susceptibles de dégrader cette situation économique et de menacer la compétitivité de l'entreprise.

Elle invoque à cet égard la forte hausse des prix de certains produits et l'impossibilité de la répercuter, sans s'expliquer davantage ni fournir d'éléments de preuve alors que M. A... verse aux débats des documents commerciaux faisant état, à la fin de l'année 2004, d'une amélioration significative des résultats dans un marché stable.

D'ailleurs la société CENPAC exprime clairement que l'objectif essentiel de la réorganisation était la réduction des coûts de fonctionnement afin de consolider une situation fragile.

En conséquence, à défaut de motif économique valable, le licenciement de M. A... est dénué de cause réelle et sérieuse.

Au demeurant, force est de constater que la société CENPAC n'a pas rempli de manière effective et loyale envers M. A... l'obligation de tenter de le reclasser au sein du groupe GASCOGNE.

En effet, elle lui a proposé en mars 2005 un emploi de " formateur ligne de produits " moyennant un salaire brut mensuel de 3. 000 € ainsi que divers postes techniques de niveau encore inférieur, tous étant sans commune mesure avec les fonctions de direction qu'il occupait, sous l'autorité immédiate du président de la société, moyennant un salaire brut mensuel de 8. 500 € plus divers avantages.

Or, la société CENPAC disposait du poste de " directeur logistique et achats ", créé du fait de la réorganisation de l'entreprise, qu'elle n'a pas offert à l'intéressé alors qu'il pouvait y prétendre, eu égard à son ancienneté et son expérience, aux responsabilités qu'il avait assumées sans difficultés et le cas échéant, grâce à une période de formation et d'adaptation de 3 mois, telle qu'elle était prévue par le plan de sauvegarde de l'emploi.

M. A... justifie d'un préjudice résultant de la perte de l'emploi qu'il occupait depuis 25 ans dans la même entreprise lequel, eu égard à la situation ultérieure de l'intéressé qui a été inscrit à l'ASSEDIC après avoir formé le projet de créer une entreprise, sera justement réparé par la somme de 200. 000 € qu'il sollicite.

La société CENPAC devra lui payer cette somme et rembourser à l'ASSEDIC les allocations chômage qu'elle a pu verser au salarié à la suite du licenciement, dans la limite de 6 mois d'allocations.

Le jugement du conseil de prud'hommes sera donc confirmé, avec substitution de motifs, en ce qui concerne le caractère dénué de cause réelle et sérieuse du licenciement de M. A... mais réformé sur le montant des dommages- intérêts.

M. A... n'établit pas que son licenciement a été précédé de circonstances vexatoires et humiliantes qui ne peuvent être constituées par la décision, dont il a été informé par courrier et qui relève du pouvoir de l'employeur, de ne plus le faire participer au comité de direction à partir de janvier 2005 et qui n'a pas été accompagnée de la suppression de ses responsabilités professionnelles.

En outre, il ne démontre pas que la société CENPAC n'a pas respecté la priorité de réembauchage en ne lui proposant pas des postes devenus disponibles après son licenciement alors qu'au contraire il est constant que celui de " directeur commercial commerce et GMS " lui a été proposé le 10 octobre 2005.

M. A... ayant donné une réponse favorable à la proposition de ce poste et sollicité la fiche de fonction, des pourparlers se sont engagés avec la société CENPAC qui a fixé des conditions du travail (lieu, date de prise de fonctions....) assez restrictives puis adressé pour signature un contrat mentionnant un salaire et un indice inférieurs à ceux initialement offerts, mais a ensuite accepté d'élargir les modalités d'emploi, a reconnu avoir commis des erreurs sur la rémunération et envoyé le 28 novembre 2005 un contrat rectifié.

Cependant, par courrier du 3 décembre suivant, M. A... a refusé le poste aux conditions ainsi définitivement proposées, de sorte qu'il n'y a pas eu d'accord des parties sur une nouvelle relation contractuelle.

La demande de dommages- intérêts de M. A... fondée sur la rupture d'un second contrat de travail conclu dans le cadre de la priorité de réembauchage n'est donc pas fondée.

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté M. A... de ses demande de dommages- intérêts supplémentaires pour licenciement abusif, non respect de la priorité de réembauchage, rupture d'un nouveau contrat de travail.

Il le sera également en ce qu'il a condamné la société CENPAC aux dépens et au paiement de 1. 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. Elle devra également supporter les dépens d'appel ainsi qu'une somme de 1. 000 € pour les frais non compris dans les dépens engagés devant la cour.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse en date du 29 mai 2006 sauf en ce qu'il a condamné la société CENPAC à payer à M. A... la somme de 100. 000 € à titre de dommages- intérêts,

Statuant à nouveau sur le chef réformé,

Condamne la société CENPAC à payer à M. A... la somme de 200. 000 € à titre de dommages- intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

Ajoutant au jugement,

Condamne la société CENPAC à rembourser à l'ASSEDIC le montant des allocations éventuellement versées à M. A... à la suite de son licenciement, dans la limite de 6 mois d'allocations,

Condamne la société CENPAC aux dépens d'appel,

La condamne à payer à M. A... 1. 000 € supplémentaires sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par M. P. de CHARETTE, président et par Mme D. FOLTYN- NIDECKER, greffier.

Le greffierLe président

Dominique FOLTYN- NIDECKERPatrice de CHARETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : 06/02736
Date de la décision : 21/12/2007

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 29 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-12-21;06.02736 ?
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