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26/11/2007 | FRANCE | N°06/05469

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0038, 26 novembre 2007, 06/05469


26/11/2007

ARRÊT No

NoRG: 06/05469

OC/CD

Décision déférée du 18 Octobre 2006 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE - 06/4308

M. ALQUIER

AIOI MOTOR et GENERAL INSURANCE COMPANY OF EUROPE L

représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART

C/

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE MIDI PYRENEES

représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section

1

***

ARRÊT DU VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

AIOI MOTOR et GENERAL INSURANCE COMPANY OF EUROPE L

...

92423 VAUCRESSON CEDEX

représentée pa...

26/11/2007

ARRÊT No

NoRG: 06/05469

OC/CD

Décision déférée du 18 Octobre 2006 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE - 06/4308

M. ALQUIER

AIOI MOTOR et GENERAL INSURANCE COMPANY OF EUROPE L

représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART

C/

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE MIDI PYRENEES

représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE SEPT

***

APPELANTE

AIOI MOTOR et GENERAL INSURANCE COMPANY OF EUROPE L

...

92423 VAUCRESSON CEDEX

représentée par la SCP DESSART-SOREL-DESSART, avoués à la Cour

assistée de Me Roland DESPONDS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

CAISSE D'EPARGNE ET DE PREVOYANCE DE MIDI PYRENEES

...

31000 TOULOUSE

représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoués à la Cour

assistée de Me Jean claude RIBAUTE, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 08 Octobre 2007 en audience publique, devant la Cour composée de :

A. MILHET, président

O. COLENO, conseiller

C. FOURNIEL, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par A. MILHET, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 8 février 2000, François A... et Christine B... ont signé avec la société Maison du Grand Sud un contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plans pour le prix de 850.000 Francs (129.656,16 €) financé au moyen d'un contrat de crédit souscrit auprès de la Caisse d'épargne de Midi-Pyrénées.

Le chantier, ouvert le 18 juillet 2000, n'a pas été mené à son terme par la société Maison du Grand Sud, mise en liquidation judiciaire le 27 mars 2001.

Le 31 août 2001, le garant de livraison, la société AIOI Motor et Général Insurance company of Europe Ltd -ci-après la société AIOI- a payé aux consorts A... et B... la somme de 38.112,25 € pour l'achèvement du chantier.

Par acte d'huissier du 15 mars 2006, la société AIOI a assigné la Caisse d'épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées devant le tribunal de commerce de Toulouse en responsabilité à raison d'un manquement à son obligation de contrôle, et réparation à hauteur de la somme déboursée.

Par le jugement déféré du 18 octobre 2006, le tribunal a rejeté la demande, considérant que les obligations du banquier instituées par l'article L.231-10 du code de la construction et de l'habitation n'avaient pour finalité que la protection du maître de l'ouvrage et ne bénéficiaient pas au garant de livraison, que le banquier n'avait pas failli à son devoir de vérification de conformité des formalités obligatoires du contrat de construction de maison individuelle dès lors que le contrat de construction stipulait que le maître de l'ouvrage mandatait le constructeur pour souscrire l'assurance dommages-ouvrage, que le garant ne démontrait pas l'existence d'un lien de causalité entre l'absence de souscription d'une police d'assurance dommages-ouvrage et le préjudice qu'elle invoque qui procédait de la seule défaillance du constructeur, que le garant avait d'ailleurs été à même de vérifier personnellement l'existence de cette police avant d'accorder lui-même sa garantie.

Aux termes de ses dernières conclusions du 26 mars 2007, la société AIOI, régulièrement appelante, conclut à l'infirmation de cette décision et demande à la Cour de juger qu'en émettant une offre de prêt et en accordant un prêt sans avoir vérifié que le contrat comportait bien celles des énonciations visées aux articles L.231-2 et L.231-10 du code de la construction et de l'habitation, et notamment la référence de la police dommages-ouvrage souscrite par le constructeur pour le compte du maître de l'ouvrage, la Caisse d'épargne avait commis une faute engendrant pour le garant un préjudice dont elle doit réparation, de même qu'en ne contrôlant pas l'évolution du dossier et notamment l'existence de la police dommages-ouvrage au jour de l'ouverture du chantier, de juger que le garant, subrogé dans les droits du maître de l'ouvrage, est fondé à exciper à l'encontre de la banque des protections que la loi a édictées tant dans l'intérêt du maître de l'ouvrage que du garant, qu'il existe un lien de causalité direct entre ces fautes et le préjudice subi, du montant de la somme versée de 38.112,25 €, à augmenter des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 23 mars 2005, avec capitalisation.

Elle fait valoir que la souscription de la garantie de livraison et de l'assurance dommages-ouvrage étaient des conditions suspensives du contrat de construction, que la banque a bien failli à son devoir de contrôle, que la faute est particulièrement grave en ce qu'elle prive le maître de l'ouvrage d'une garantie essentielle, que son intérêt à agir se trouve tant dans la subrogation dont elle bénéficie dans tous les droits du maître de l'ouvrage qu'elle a payé, que dans son rôle de garant, partie prenante à l'opération de contrat de construction de maison individuelle et donc personnellement bénéficiaire des garanties dont la loi a imposé au banquier le contrôle de l'existence, que le lien de causalité se trouve dans le fait que, la police dommages-ouvrage étant une condition suspensive du contrat, la dénonciation par le banquier de son absence à l'ouverture du chantier aurait rendu le contrat caduc, de sorte que la garantie de livraison qui n'en est que l'accessoire aurait disparu dès lors que le contrat n'aurait pas pris effet et n'aurait jamais été mise en jeu.

Aux termes de ses dernières conclusions du 11 juin 2007, la Caisse d'épargne Midi-Pyrénées conclut à la confirmation du jugement dont appel, soutenant que la procédure d'émission de l'offre a été respectée puisque la garantie de livraison et l'assurance dommages-ouvrage étaient prévues au contrat de construction au titre des conditions suspensives, que le défaut de souscription d'une assurance dommages-ouvrage ne saurait empêcher la conclusion du contrat de construction de maison individuelle puisqu'elle peut n'être concrétisée qu'à l'ouverture du chantier, que ce n'est qu'au moment du déblocage des fonds que le banquier est tenu de vérifier l'existence de la garantie de livraison et elle seule, laquelle a été délivrée le 26 septembre 2000 alors que les déblocages de fonds ne sont intervenus qu'à partir du 7 février 2002, que l'absence de souscription de l'assurance dommages-ouvrage est sans incidence, qu'elle est dépourvue de sanction et qu'il n'est pas démontré que les conditions de mise en oeuvre de cette assurance auraient été réunies, qu'en concluant une transaction avec les maîtres de l'ouvrage la société AIOI a renoncé à s'en prévaloir puisque ce manquement qui incombait à ceux-ci était connu, que ce faisant elle n'a fait qu'exécuter son obligation personnelle et ne dispose d'aucun recours contre le prêteur qui en est un tiers.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que les dispositions qui fondent l'action de la société AIOI sont celles du premier alinéa de l'article L.231-10 du code de la construction et de l'habitation aux termes duquel aucun prêteur ne peut émettre une offre de prêt sans avoir vérifié que le contrat comporte celles des énonciations mentionnées à l'article L.231-2 qui doivent y figurer au moment où l'acte lui est transmis et ne peut débloquer les fonds s'il n'a pas communication de l'attestation de garantie de livraison, et des paragraphes j) et k) de l'article L.231-2 selon lesquels le contrat doit comporter l'énonciation de la référence de l'assurance dommages-ouvrage souscrite par le maître de l'ouvrage ainsi que les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur, les attestations de ces garanties étant établies par le garant et annexées au contrat ;

Attendu que l'intérêt à agir du garant ès-qualité n'est pas sérieusement discuté dès lors qu'il peut être personnellement intéressé à la régularité de l'ensemble de l'opération à laquelle il est associé ;

que, caution personnelle et solidaire, il prétend en outre exercer en vertu d'une subrogation aux droits du maître de l'ouvrage qu'il a payé un recours attaché à la dette, en l'occurrence contre un tiers sur lequel devrait peser la charge définitive de la dette, ce qui ne lui est pas discuté ;

Attendu, sur la faute du banquier au regard de ses obligations lors de l'émission de l'offre de prêt, que selon ce que révèlent les pièces versées aux débats, l'offre de prêt destiné au financement de la construction de maison individuelle a été émise par la Caisse d'épargne le 23 août 2000 ;

qu'il est constant qu'aucune police d'assurance dommages-ouvrage n'a jamais été souscrite ;

que l'attestation de garantie a été délivrée le 26 septembre 2000 ;

qu'il en résulte qu'à la date de l'émission de l'offre de prêt, le contrat ne comportait pas l'énonciation de la référence de l'assurance dommages-ouvrage souscrite par le maître de l'ouvrage ni les justifications des garanties de remboursement et de livraison apportées par le constructeur dans les termes des paragraphes j) et k) de l'article L.231-2 ;

mais attendu que selon l'appelante, la garantie de livraison et l'assurance dommages-ouvrage étaient érigées en conditions suspensives du contrat de construction de maison individuelle du 8 février 2000 ;

que l'article L.231-4 du code de la construction et de l'habitation prévoit en effet que le contrat de construction de maison individuelle peut être conclu sous ces conditions suspensives, de même d'ailleurs que celle de l'obtention des prêts demandés pour le financement de la construction ;

qu'il en résulte que la réalisation des autres conditions suspensives, et spécialement la souscription de la garantie de livraison et de l'assurance dommages-ouvrage, peuvent légalement ne pas être acquises au moment où l'offre de prêt est émise, de sorte qu'elles ne peuvent pas être précisées ;

Attendu que le banquier étant tenu, aux termes mêmes de l'article L.231-10 du code de la construction et de l'habitation, de procéder à la vérification de celles des énonciations qui doivent figurer au contrat de construction de maison individuelle "au moment où l'acte lui est transmis", le manquement du banquier à ses obligations de vérification n'est pas nécessairement caractérisé au stade de l'émission de l'offre du seul fait du caractère incomplet des mentions du contrat au regard de la lettre de l'article L.231-2 qui peuvent se justifier par les dispositions de l'article L.231-4 et le caractère encore inachevé de l'opération, suspendue à la réalisation de ces deux conditions ;

Attendu qu'en l'espèce le contrat mentionnait expressément que l'attestation de garantie délivrée par l'organisme garant, dont le nom était précisé, serait adressée au maître de l'ouvrage dans le délai prévu pour la réalisation des conditions suspensives, et en ce qui concerne l'assurance dommages-ouvrage, stipulait qu'elle n'était pas comprise dans le prix convenu, mais contenait mandat du maître de l'ouvrage au constructeur de l'obtenir ;

mais qu'à la date de l'émission de l'offre de prêt, le chantier était déjà ouvert et l'assurance dommages-ouvrage aurait donc dû être souscrite ;

Attendu par conséquent que la société AIOI pourrait être en situation de faire grief au banquier d'un défaut de vérification au stade auquel était alors parvenue l'opération lors de l'émission de l'offre ;

Attendu en revanche que pour prétendre à réparation, la société AIOI doit démontrer, outre la faute, l'existence d'un préjudice en relation de causalité directe et certaine avec la faute, préjudice qui peut être constitué tant sur le garant lui-même personnellement que sur la tête du maître de l'ouvrage en vertu de la subrogation invoquée ;

Attendu que la somme de 250.000 Francs a été payée le 22 août 2001 pour solde de tout compte en vertu d'une transaction entre la société AIOI et les consorts C... moyennant renonciation de ces derniers, qui avaient choisi de faire leur affaire eux-mêmes de la reprise de leur chantier, à toute autre réclamation contre le garant ;

que les composantes de cette somme ne font l'objet d'aucune explication ;

Attendu que le paiement de cette somme de 38.112,25 € ne revêt pas en soi les caractères d'un préjudice en relation de causalité avec la faute imputée au banquier lors de la formation du contrat de prêt puisqu'il procède de l'exécution d'une convention, la garantie de livraison qui revêt les caractères d'une garantie autonome ;

Attendu que cette exécution de la convention de garantie procède elle-même d'un fait, la défaillance du constructeur, qui est étranger dans sa substance à l'objet de la vérification mise en cause du banquier et dépourvu de toute relation de causalité avec lui ;

Attendu que la société AIOI n'invoque pas non plus la perte d'une possibilité de recours contre l'assureur dommages-ouvrage, ni des maîtres de l'ouvrage, ni à titre personnel ;

Attendu que ce dont la société AIOI prétend se faire un grief, c'est le parachèvement du contrat de construction lui-même, en soutenant que si le banquier avait vérifié l'existence de la garantie d'assurance dommages-ouvrage au moment de l'émission de l'offre de prêt, le contrat de construction de maison individuelle aurait été caduc, il n'y aurait donc pas eu défaillance du constructeur, et donc pas de paiement de sa part ;

mais attendu que ce faisant, elle invoque, entre la faute et le préjudice allégués, un enchaînement de causalités qui est tout aussi indirect que dépourvu de certitude ;

que contrairement à la garantie de livraison, l'existence de l'assurance dommages-ouvrage, et indépendamment de la condition suspensive dont elle faisait l'objet, n'est pas une condition de validité de la convention ;

qu'au-delà de l'émission de l'offre, le banquier n'est tenu selon la loi de s'assurer que de la délivrance de l'attestation de garantie de livraison, à défaut de laquelle les fonds ne peuvent pas être débloqués, non de la souscription effective de l'assurance dommages-ouvrage ;

Attendu par conséquent que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a exclu l'existence d'un lien de causalité entre la faute et le dommage ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Rejette la demande formée par la société AIOI Motor et Général Insurance company of Europe Ltd,

Condamne la société AIOI Motor et Général Insurance company of Europe Ltd à payer à la Caisse d'épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées la somme supplémentaire de 2.200 €,

Condamne la société AIOI Motor et Général Insurance company of Europe Ltd aux entiers dépens de l'instance en appel, et reconnaît à la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoué qui en a fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : 06/05469
Date de la décision : 26/11/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Toulouse, 18 octobre 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-11-26;06.05469 ?
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