ARRET DU 31 OCTOBRE 2007
N 722
Dossier no2007 / 698
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
CHAMBRE DE L'INSTRUCTION
A l'audience du trente et un octobre deux mille sept,
La Cour d'Appel de TOULOUSE, Chambre de l'Instruction, siégeant en Chambre du Conseil, a rendu l'arrêt suivant :
Composition de la Cour lors des débats, du délibéré et du prononcé de l'arrêt :
PRESIDENT : Monsieur BELLEMER
ASSESSEURS : Monsieur GRAFMÜLLER, Conseiller et Madame FOURNIEL, Conseiller, désignée par ordonnance du Premier Président de la Cour d'Appel de Toulouse en date du 4 octobre 2007 en remplacement de Monsieur PALERMO-CHEVILLARD, empêché
tous trois désignés conformément à l'article 191 du Code de Procédure Pénale.
GREFFIER : Mademoiselle LERMIGNY
MINISTERE PUBLIC :
représenté aux débats par Monsieur BERNARD, Avocat Général et au prononcé de l'arrêt par Madame ESCLAPEZ, Substitut Général
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VU l'information suivie contre :
BERNARD Ludovic
Fils de Robert BERNARD et de Marie Hélène A...
né le 21 / 08 / 1971 à BARBEZIEUX ST HILAIRE
de nationalité française
...
Ayant pour avocat Me COHEN,3, Allées Jules B...-31000 TOULOUSE
C... Jean-Michel
Fils de Bernard C... et de Marie-France D...
né le 22 / 08 / 1967 à BEYROUTH (LIBAN)
de nationalité française
Interpellé le 7 octobre 2007 en Espagne, actuellement en détention à Madrid en exécution d'un mandat d'arrêt européen
E... Jean-Claude
Fils de Joseph E... et de Yvette F...
né le 24 / 01 / 1957 à MONTECH
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 25 juillet 2005
domicilié...-ESCALDES ENGORDANY-ANDORRE
Ayant pour avocats Me NGUYEN G...,...-Me H...,...
I... Serge
Fils de Adolphe I... et de Monique J...
né le 13 / 10 / 1959 à DOUAI
Détenu à la Maison d'Arrêt de VILLENEUVE LES MAGUELONE depuis le 15 décembre 2005
ayant pour avocat Me K...
16 bis place du Salin-31000 TOULOUSE
L... Jean-Michel
Fils de Michel L... et de Jacqueline M...
né le 25 / 01 / 1962 à TOULOUSE
Détenu à Maison d'Arrêt d'Albi depuis le 25 juillet 2005
domicile déclaré...
Ayant pour avocat Me N...,... TOULOUSE
HEMERYJoël
Fils de Roger HEMERYet de Denise P...
né le 08 / 08 / 1958 à HONFLEUR
Détenu à la Maison d'Arrêt d'Agen depuis le 25 juillet 2005
domicilié...
Ayant pour avocats Me Q...,... (Entrée-5 Terrasse Ste Catherine)-59800 LILLE
et Me SAINT GERMES LALLEMAND,... Saint Michel-...
R... Patrick
Fils de René R... et de Josette S...
né le 07 / 03 / 1952 à PERPIGNAN
Détenu à la Maison d'Arrêt de Cahors depuis le 25 juillet 2005
9 place Nationale-82000 MONTAUBAN
Ayant pour avocat Me T...,...
OO... Antoine
Fils de Josepha PLAZAné le 20 / 06 / 1967 à STRASBOURG
de nationalité espagnole
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 25 juillet 2005
Ayant pour avocats Me COHEN,3, Allées Jules B...-31000 TOULOUSE-
Me V..., Calle Velasquez 25,7-MADRID (ESPAGNE)
W... Ronan
Fils de Alain W... et de Madeleine XX...
né le 27 / 01 / 1965 à BRAZAVILLE (CONGO)
Détenu à la Maison d'Arrêt de Perpignan depuis le 10 novembre 2005
domicilié...
Ayant pour avocat Me YY...,... TOULOUSE
ZZ... Françisco
Fils de Françisco ZZ... et de Magina AA...
né le 05 / 12 / 1963 à SAINT-DENIS
Détenu à la Maison d'Arrêt de VILLENEUVE LES MAGUELONE depuis le 3 octobre 2005
Domicile déclaré Calle Agatia 36 1 C-MADRID-ESPAGNE
Ayant pour avocat Me BB...,...
XXX... Antoine
Fils de Diégo CC... et de Angélica DD...
né le 02 / 07 / 1974 à ALES
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 25 juillet 2005
Domicile déclaré...-5 ème étage-30100 ALES
Ayant pour avocats Me EE...,...
-Me FF..., Immeuble les marches du palais-...
XXX... Diégo
Fils de Antoine CC... et de Rose GG...
né le 06 / 11 / 1953 à ALES
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 25 juillet 2005
...
Ayant pour avocats Me HH...,...
-Me FF..., Immeuble les marches du palais-...
...
XXX... Jessy
Fils de Diégo CC... et de Angélica DD...
né le 20 / 10 / 1980 à ALES
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 23 juillet 2005
domicile :...
Ayant pour avocats Me EE...,...-
Me FF..., Immeuble les marches du palais-... BP 112-
84007 AVIGNON
II...
JJ... Félix Maria
Fils de Félix II...
JJ... et de Ypmma da JJ...
né le 21 / 01 / 1959 à ASOMPTION (PARAGUAY)
de nationalité Paraguayenne
Détenu à la Maison d'Arrêt de Seysses depuis le 15 mars 2006
domicile : Canada del Carmen 2780-00000 ASOMPTION (PARAGUAY)
Ayant pour avocat Me PONS FOURNIER,3 allées Paul KK...-31000 TOULOUSE
des chefs d'importation de produits stupéfiants en bande organisée-acquisition, détention, transport, offre ou cession de produits stupéfiants-association de malfaiteurs en vue de la commission des crimes ou délit susvisés exportation de produits stupéfiants en bande organisée-acquisition, détention d'armes de la 1ère et de la 4ème catégories
VU la requête en nullité présentée le 6 juillet 2007 par le conseil de Francisco ZZ... ;
VU la décision du Président de la chambre de l'instruction en date du 30 juillet 2007 décidant de saisir la chambre de l'instruction ;
VU les réquisitions de Monsieur le Procureur Général en date du 02 Août 2007 ;
VU la notification de la date de l'audience faite conformément aux dispositions de l'article 197 du Code de Procédure Pénale le 27 août 2007 ;
VU le mémoire régulièrement déposé au greffe de la chambre de l'instruction le 8 octobre 2007 à 15 heures 10 par Maître Dominique BERTRAND, du barreau de Carpentras, Avocat de Francisco ZZ... ;
Pendant le délai prévu par la loi, le dossier de la procédure a été déposé au greffe de la chambre de l'Instruction et tenu à la disposition des avocats des parties ;
La cause a été appelée à l'audience du 11 Octobre 2007 à laquelle les débats ont lieu en Chambre du Conseil ;
Monsieur GRAFMÜLLER, Conseiller, a fait le rapport,
Maître BERTRAND, Avocat de Francisco ZZ..., a été entendu en sa plaidoirie ;
Monsieur BERNARD, Avocat Général, a été entendu en ses réquisitions ;
Maître BOUTEILLER, Avocat de Jean-Claude E..., Maître SADEK substituant Maître DEBUISSON, Avocat de Jean-Michel L..., Maître DE BEHR substituant Maître COHEN, Avocat d'Antoine OO... et de Ludovic BERNARD, Maître BREL, Avocat de Patrick R..., Maître PONS FOURNIER, Avocat de Félix Maria II...
JJ..., présents à l'audience, n'ont pas émis d'observations particulières ;
Maître BERTRAND, Avocat de Francisco ZZ..., a eu la parole en dernier ;
Puis l'affaire a été mise en délibéré ;
Et, ce jour, trente et un octobre deux mille sept, la Chambre de l'Instruction, a rendu en Chambre du Conseil, son arrêt comme suit après avoir délibéré conformément à la Loi, hors la présence du Ministère Public et du Greffier.
Vu les articles 170. 171. 173. 174. 194. 197. 198. 199. 200. 216 et 217 du Code de Procédure Pénale ;
EXPOSE DES FAITS
Dans le cadre d'une information ouverte contre X..., le 22 avril 2004, notamment du chef d'importation de produits stupéfiants (cocaïne) en bande organisée, les policiers du S.R.P.J. de Toulouse et de l'O.C.T.R.I.S. ont procédé, le 19 juillet 2005, à la saisie de 249 pains de cocaïne pour un poids total de 303 kg dissimulés dans un container de charbon de bois en provenance du Paraguay, via l'Argentine, parvenu au port du Havre et transporté au siège de la société HEMERYFRERE au Bosnormand (27).
Une dizaine de personnes ont été interpellées au moment de la saisie.
Les organisateurs de cette importation ont été identifiés comme étant Antonio OO... MORENO et Francisco ZZ...
AA... : ce dernier est apparu comme l'interface entre les fournisseurs sud-américains et les clients européens.
Au regard des éléments recueillis à son encontre, notamment dans le cadre d'écoutes téléphoniques, le juge d'instruction a délivré, le 19 juillet 2005, un mandat d'arrêt, au vu duquel, le procureur de la République de Toulouse a délivré le 20 juillet 2005 un mandat d'arrêt européen.
Suite à la diffusion dans le Système d'Information Schengen de ce mandat d'arrêt européen, Francisco ZZ...
AA... a été découvert et interpellé en Espagne le 24 août 2005.
Par arrêt rendu le 21 septembre 2005, la Cour Nationale de Madrid a ordonné sa remise aux autorités judiciaires françaises.
Elle a eu lieu le lundi 3 octobre 2005. Francisco ZZ...
AA... a comparu ce même jour devant le procureur de la République de Bobigny, qui lui a notifié le mandat d'arrêt du juge d'instruction.
Le 5 octobre 2005, il comparaissait devant le juge d'instruction de Toulouse qui procédait à son interrogatoire de première comparution et le mettait en examen. Le même jour, il était placé en détention provisoire.
Le 26 juillet 2007, Francisco ZZ... a fait l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises de la Haute-Garonne. Cette ordonnance est frappée d'appel par l'ensemble des mis en examen et par le ministère public.
Le 13 juillet 2007, Francisco ZZ...
AA... a présenté une requête en annulation de certains actes de l'information en application de l'article 173-1 du Code de Procédure Pénale.
Il a expliqué que sa remise par le gouvernement espagnol aux autorités judiciaires françaises ne s'était pas faite dans le délai de 10 jours, suivant la décision judiciaire de la Cour Nationale de Madrid qui avait fait droit à la demande de la France.
Il a indiqué que la Cour Nationale de Madrid s'est prononcée le 21 septembre 2005, et qu'il a été remis à la police française le lundi 3 octobre 2005, alors que le jugement aurait dû être exécuté au plus tard le samedi 1 er octobre 2005.
Il a rappelé qu'en application de l'article 20 de la L.O E.D.E (texte espagnol) et des articles 695-37 et 695-40 et suivants du Code de Procédure Pénale (circulaire du 11 mars 2004-1. 3. 7), la conséquence du manquement à la remise effective de la personne interpellée dans le délai sus-mentionné est la remise en liberté.
Il a, par suite, demandé à la cour d'" annuler tous les actes le concernant effectués dans le cadre de cette procédure à compter du 3 octobre 2005 et d'ordonner consécutivement sa remise en liberté.
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Le Procureur Général a requis le rejet de la requête au motif, qu'elle est, d'une part, irrecevable en application de l'article 173-1 du code de procédure pénale, et, d'autre part, mal fondée en application de l'article 801 du code de procédure pénale.
Il a objecté que Francisco ZZ..., de nationalité franco-espagnole, était présent et assisté d'un avocat lors de l'audience de la Cour Nationale de Madrid, que la décision lui a été notifiée (no4 du dispositif page 5) et qu'il a bien eu connaissance de la date de sa remise aux autorités françaises.
Il a indiqué, également, que si le délai de 10 jours prévu par les lois espagnoles et françaises expirait le samedi 1er octobre à minuit, tout délai prévu par une disposition de procédure pénale pour l'accomplissement d'un acte ou d'une formalité qui expirerait un samedi ou un dimanche ou un jour férié ou chômé, est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, soit, en l'espèce, au lundi 3 octobre 2005.
Il a, enfin, rappelé que le fait qu'il ait été conduit devant un juge d'instruction à l'issue d'une procédure préalable (mesure de garde à vue, exécution d'un mandat d'arrêt européen)-fut elle irrégulière-ne peut être de nature à affecter la régularité de sa mise en examen.
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Francisco LL... a réfuté l'argumentation du ministère public dans des conclusions déposées ultérieurement.
Il a évoqué le fait que, lors de son arrivée en France, les autorités judiciaires françaises ne disposaient pas de l'arrêt du 21 septembre 2005 et que sa traduction n'est arrivée dans la procédure qu'au mois de juin 2007 sur la demande expresse de son avocat, ce qui fait qu'il n'a pas pu discuter de la régularité de l'exécution de la procédure avant cette dernière date.
Il a également critiqué l'application au cas d'espèce de l'article 801 du code de procédure pénale au motif, que la législation concernant le mandat d'arrêt européen (article 695-46 du code de procédure pénale) prévoit le cas où l'exécution ne peut pas se faire dans le délai initialement prévu.
Il a enfin soutenu que la remise d'une personne, en exécution d'un mandat d'arrêt, constitue à l'évidence le préalable ou le rapport nécessaire à la réalisation des actes d'instructions ultérieurs. Il estime, par suite, que sa mise en examen et son placement en détention provisoire sont impossibles s'il est physiquement absent.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu qu'il résulte des dispositions de l'article 173-1 du code de procédure pénale que la personne mise en examen doit, sous peine d'irrecevabilité, faire état de moyens pris de la nullité des actes accomplis avant son interrogatoire de première comparution ou de cet interrogatoire lui-même dans un délai de six mois à compter de la notification de sa mise en examen, sauf dans le cas où elle n'aurait pu les connaître ;
Attendu que Francisco MM... a été mis en examen le 5 octobre 2005 et a présenté sa demande d'annulation de pièces le 13 juillet 2007 ;
Attendu qu'il convient de rappeler que les juridictions françaises n'ont pas compétence pour apprécier la régularité d'une décision judiciaire étrangère, ainsi que les modalités de signification et d'exécution de celle-ci ; que le versement à la procédure de l'arrêt de la Cour Nationale de Madrid daté du 21 septembre 2005 n'était pas une obligation pour le juge d'instruction qui ne l'a fait que pour satisfaire la demande formulée par le conseil de Francisco LL... ;
Attendu que la lecture de cette dernière pièce démontre, par contre, que l'intéressé-qui possède la double nationalité franco-espagnole et parle donc cette dernière langue (puisqu'il n'est pas mentionné la présence d'un interprète)-a bien été entendu par les autorités judiciaires espagnoles, en présence de son avocat, qui l'a assisté pendant toute la procédure ; qu'il a ainsi reçu confirmation de la délivrance le 20 juillet 2005 par le parquet du Tribunal de Grande Instance de Toulouse d'un mandat d'arrêt européen ; qu'il a été informé des conditions de sa remise aux autorités judiciaires françaises ; que le dispositif de l'arrêt mentionne les modalités de la notification de la décision à l'intéressé (page 4) ; que Francisco LL..., qui, parle espagnol, ne peut, par suite, soutenir avoir ignoré les motifs de son interpellation en Espagne, le jour de son jugement par la Cour Nationale de Madrid, les modalités de sa remise aux autorité judiciaires françaises, ainsi que la date de cette dernière, fût-elle intervenue le lundi 3 octobre 2005 ; qu'il était encore assisté d'un avocat lors de sa mise en examen le 5 octobre 2005, qui ne pouvait également ignorer que son client avait fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen et quelle était la législation applicable en la matière, celle-ci étant identique en France comme en Espagne ; que le versement à la procédure de l'arrêt de la Cour Nationale de Madrid, traduit en français, n'aurait rien apporté de plus, la date de l'arrêt et celle de son arrivée en France étant connues de celui-ci au jour de sa mise en examen ; qu'un simple calcul primaire suffisait pour comptabiliser le nombre de jours écoulés entre la date de l'arrêt et sa remise aux autorités judiciaires françaises ; qu'il appartenait à Francisco LL... de faire valoir ses droits dans les six mois de sa mise en examen ;
Qu'il convient, dès lors, sans qu'il soit besoin d'analyser les autres moyens de droit évoqués par le ministère public, de rejeter la requête de Francisco NN..., comme étant irrecevable en application de l'article 173-1 du code de procédure pénale ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
-Rejette la requête de Francisco LL..., comme étant mal fondée.
Ainsi jugé et prononcé par la Cour d'Appel de TOULOUSE, Chambre de l'Instruction, en son audience en Chambre du Conseil, tenue au Palais de Justice de ladite ville les jour, mois et an sus-dits.
Le présent arrêt est signé par le Président et le Greffier
LE GREFFIERLE PRESIDENT
Le Greffier certifie que le présent arrêt a été porté à la connaissance des parties et de leurs avocats conformément aux dispositions de l'article 217 du Code de Procédure Pénale (récépissés joints au dossier).
LE GREFFIER :