03/09/2007
ARRÊT No
NoRG: 07/01202
OC/EKM
Décision déférée du 08 Février 2007 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 07/3
M. CAVE
Bernard Y...
représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL
C/
Société CHAURAY CONTROLE
représentée par la SCP RIVES-PODESTA
CONFIRMATION
Grosse délivrée
le
à REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ère Chambre Section 1
***
ARRÊT DU TROIS SEPTEMBRE DEUX MILLE SEPT
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APPELANT
Monsieur Bernard Y...
...
31170 TOURNEFEUILLE
représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour
assisté de la SCP CLEMENT - VANDERSTICHEL - MORREEL - WEBER, avocats au barreau de DRAGUIGNAN
INTIMEE
Société CHAURAY CONTROLE
...
75008 PARIS
représentée par la SCP RIVES-PODESTA, avoués à la Cour
assistée de Me Jean Pierre SOMMELET, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 15 Mai 2007 en audience publique, devant la Cour composée de :
A. MILHET, président
O. COLENO, conseiller
C. FOURNIEL, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
- signé par A. MILHET, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE :
La SCI DES SAUGES, constituée par les consorts Y... en 1978 pour l'acquisition d'un terrain constructible à Toulouse-Pech David a, par acte notarié des 12 et 15 janvier1990, vendu ce terrain à la SCI RÉSIDENCE HERMÈS pour le prix de 4,5 millions de Francs dont le paiement a été converti en obligation de livraison d'immeubles bâtis. Pour le financement de la construction, la BANQUE LA HÉNIN a, par acte notarié des mêmes jours, ouvert à cette dernière trois crédits à court terme, 18 mois et deux ans, pour un montant total de 14 millions de Francs, tous engagements dont Bernard Y... s'est porté caution solidaire.
Impayée de ses créances à hauteur de 20.053.695 Francs, la BANQUE LA HÉNIN en a consenti la cession à une société WHITE SAS en 1996, laquelle les a à son tour cédées en 2002 à la société CHAURAY CONTRÔLE.
Par acte d'huissier du 2 mars 2004, la société CHAURAY CONTRÔLE a fait délivrer à Bernard Y... un commandement aux fins de saisie d'un immeuble lui appartenant à Tournefeuille sur laquelle la BANQUE LA HÉNIN avait inscrit une hypothèque, qui a été publié le 1er avril 2004 au deuxième bureau de la conservation des hypothèques de Toulouse, volume 2004 S. no22 sous les références 2004 D no7410.
Par un jugement du 7 octobre 2004, le tribunal de grande instance de Toulouse a ordonné la suspension des poursuites de saisie immobilière jusqu'à décision définitive de l'autorité compétente pour statuer sur le recours gracieux formé par Bernard Y... sur la décision d'inéligibilité au dispositif de désendettement prise le 26 avril 2004 par la commission nationale d'aide à l'installation des rapatriés -CNAIR.
Par un jugement rendu le 11 janvier 2007 frappé d'appel, le tribunal a autorisé la société CHAURAY CONTRÔLE à reprendre les poursuites.
Par acte d'huissier du 19 janvier 2007, la société CHAURAY CONTRÔLE a délivré assignation à Bernard Y... devant le tribunal de grande instance de Toulouse en vue d'obtenir la prorogation des effets du commandement.
Par un jugement du 8 février 2007, le tribunal a fait droit à la demande, considérant d'une part qu'elle était justifiée par un motif légitime, la publication d'une décision d'adjudication ne pouvant pas matériellement intervenir avant le 1er avril 2007, d'autre part que les prétentions de Bernard Y... à une suspension des poursuites étaient dépourvues de pertinence, s'agissant d'une mesure conservatoire.
Par acte d'huissier du 26 février 2007, Bernard Y... a interjeté appel de cette décision, soutenant que la mesure de suspension des poursuites dont bénéficie le débiteur principal, la SCI RÉSIDENCE HERMÈS, qui s'étend à lui en sa qualité de caution, s'applique tant aux mesures de poursuite qu'aux mesures conservatoires aux termes mêmes de l'article 100 de la loi du 30 décembre 1997 et fait donc obstacle à la demande.
Aux termes de conclusions déposées le 15 mai 2005, il conclut à titre principal à la réformation du jugement dont appel et demande à la Cour de juger que la société CHAURAY CONTRÔLE est irrecevable et sans qualité pour agir, que sa créance est prescrite par application de l'article L.110-4 du code de commerce, subsidiairement de dire n'y avoir lieu à ordonner la prorogation du commandement.
Il soutient que la demande de la société CHAURAY CONTRÔLE se heurte à l'autorité de la chose jugée le 7 octobre 2004, laquelle s'étend à l'épuisement des recours contentieux, que la société poursuivante qui a engagé son action par commandement de saisie du 2 mars 2004, ne démontre pas souffrir d'un retard particulièrement excessif équivalent à la priver de toute décision de justice qui seul est de nature à caractériser une atteinte à la substance même du droit d'accès à un tribunal consacré par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que si retard il y a ce n'est pas du fait de la législation sur le désendettement des rapatriés mais du fait des services chargés de l'appliquer, que les jurisprudences que cite l'intimée ne concernent que des actions en justice et non des mesures d'exécution pour lesquelles la jurisprudence continue à appliquer strictement les textes dont elle se prévaut pour sa part, que la société RÉSIDENCE HERMÈS, débiteur principal, bénéficie de la suspension des poursuites et qu'en sa qualité de caution il en bénéficie en vertu de l'article 76 de la loi du 2 juillet 1998, que c'est sans fondement que la société CHAURAY CONTRÔLE prétend imputer à ses demandes de suspension un caractère frauduleux, outre que seul le juge administratif est apte à en juger des qualités.
Il fait en outre valoir que les dispositions d'ordre public de l'article 6 de la loi no76-519 du 15 juin 1976 concernant les copies exécutoires qui excluent expressément l'application de l'article 1690 du code civil n'ont pas été respectées, que l'endossement de la copie exécutoire à ordre qui seul opère transfert de la créance et de ses accessoires n'a pas été constaté par acte notarié, que la société CHAURAY CONTRÔLE dont les droits résultent d'un acte sous seing privé et qui se prévaut en vain d'une distinction concernant les copies exécutoires nominatives que ne fait pas la loi ne peut donc poursuivre le paiement, qu'il en découle également qu'aucun acte interruptif n'a été valablement fait depuis la saisie engagée par la Banque LA HÉNIN en 1993, qu'elle peut soulever ce moyen d'ordre public à tout moment nonobstant de précédentes décisions dont l'autorité n'est donc pas utilement invoquée.
La société CHAURAY CONTRÔLE conclut à l'irrecevabilité de l'appel et à la confirmation du jugement dont appel, et demande à la Cour de condamner Bernard Y... au paiement d'une somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts en raison du caractère abusif de la demande, soutenant que seul un pourvoi en cassation pouvait être formé contre le jugement du 8 février, que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés organisent sans l'intervention d'un juge une suspension automatique des poursuites d'une durée indéterminée en violation des dispositions des articles 34 de la Constitution et 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que l'application que la Cour de Cassation fait de ce dernier texte ne distingue pas selon la nature de la mise en oeuvre du droit, action en justice ou mesure d'exécution, que l'usage dans un but exclusivement dilatoire que l'appelant prétend faire de ce dispositif auquel il ne peut à l'évidence pas prétendre constitue un véritable abus de droit, outre qu'il a dissimulé au juge en 2004 qu'il avait été expressément déclaré inéligible à ce dispositif, que l'autorité de chose jugée n'est pas utilement invoquée en l'absence d'identité de cause, celle résultant de l'article 6-1 de la CEDH. étant nouvelle, que Bernard Y... n'est pas recevable à se prévaloir de la prescription faute de l'avoir fait en première instance et qu'il n'y est pas fondé en l'état des poursuites interruptives engagées contre le débiteur principal.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu, sur la recevabilité des dernières écritures déposées par Bernard Y... le jour de l'audience 15 mai mais communiquées le 14, que celles-ci ne font que répondre à celles du 14 mai par lesquelles la société CHAURAY CONTRÔLE répondait aux moyens soulevés par l'intimée dans ses conclusions du 10 mai 2007 et tirés d'une part de la prescription, d'autre part de l'inobservation des règles concernant l'endossement des créances notariées, en les développant ainsi que leurs conséquences mais sans ajouter de moyen nouveau;
que la société CHAURAY CONTRÔLE n'est pas fondée à en demander le rejet des débats;
Attendu, sur la recevabilité de l'appel, que le jugement qui tranche des moyens touchant au fond du droit tirés de la qualité à agir du créancier et des effets de la législation sur le désendettement des rapatriés, est susceptible d'appel en vertu des dispositions de l'article 731 alinéa 2 du code de procédure civile (ancien) applicable à la présente procédure;
Attendu, sur la qualité pour agir de la société CHAURAY CONTRÔLE, que celle-ci n'avait pas jusqu'alors été discutée de sorte que le précédent jugement du 7 octobre 2004 n'a pas tranché de contestation sur ce point et n'est donc pas revêtu de l'autorité de la chose jugée à cet égard;
Attendu que la qualité pour agir du créancier est exclusivement contestée par l'appelant en référence aux dispositions de la loi no76-519 du 15 juin 1976 relatives aux copies exécutoires d'actes notariés;
Attendu qu'aux termes de l'article 4 de la loi no76-519 du 15 juin 1976, la copie exécutoire à ordre ne peut être établie que si sa création a été prévue dans l'acte notarié constatant la créance ou dans un acte rédigé à la suite de celui-ci;
qu'aucune des stipulations de l'acte notarié qui fonde les poursuites contre la SCI RÉSIDENCE HERMÈS qui se trouve à l'origine de la sommation à tiers détenteur délivrée à la SCI DES SAUGES n'a prévu la création de copies exécutoires à ordre, ni dans l'acte lui-même ni dans un acte rédigé à la suite;
qu'il ne pouvait donc être créé de copies exécutoires à ordre, et qu'aucun document de cette nature n'est d'ailleurs versé aux débats;
que c'est donc en vain qu'il est soutenu que les formalités de l'endossement, qui ne s'appliquent qu'aux copies exécutoires à ordre, n'ont pas été respectées;
Attendu que la qualité de la société CHAURAY CONTRÔLE à poursuivre l'exécution de l'acte notarié source de sa créance contre Bernard Y..., qui n'est pas autrement discutée, n'est pas utilement contestée et que c'est à bon droit que la banque se prévaut de l'accomplissement des formalités de l'article 1690 du code civil à l'occasion de la délivrance du commandement aux fins de saisie immobilière;
Attendu que la prescription de la créance par application de l'article L.110-4 du code de commerce est une fin de non-recevoir qui peut être proposée en tout état de cause en vertu de l'article 123 du nouveau code de procédure civile et ne constitue donc pas un moyen dont la recevabilité pourrait être discutée en cause d'appel à raison de sa nouveauté;
Attendu qu'il suit des motifs qui précèdent concernant le rejet du moyen tiré du non-respect des dispositions de la loi no76-519 du 15 juin 1976 que c'est en vain qu'il est objecté par l'appelant de l'absence d'effet interruptif des actes de poursuite engagés précédemment par commandements aux fins de saisie immobilière délivrés en 1993 par la Banque LA HÉNIN puis le 2 juin 2000 par la société WHITE SAS contre le débiteur principal la SCI RÉSIDENCE HERMÈS dont Bernard Y... s'est porté caution solidaire et sans limitation de durée de tous les engagements;
que c'est à bon droit et efficacement que la société CHAURAY CONTRÔLE se prévaut de l'interruption de la prescription décennale qui résulte de ces actes de poursuite;
Attendu que la validité et l'efficacité du commandement aux fins de saisie immobilière délivré le 2 mars 2004 ne sont pas affectées par le prononcé, postérieurement, de la suspension des poursuites, laquelle ne fait par conséquent pas obstacle à la possibilité pour le créancier d'en demander la prorogation dès lors qu'il se trouve provisoirement empêché de poursuivre plus avant;
Attendu que le caractère abusif de l'appel n'est pas démontré;
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions;
Déboute la société CHAURAY CONTRÔLE de sa demande de dommages et intérêts;
Y ajoutant,
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Rejette la demande formée par Bernard Y...;
Condamne Bernard Y... à payer à la société CHAURAY CONTRÔLE la somme de 1.800 €;
Condamne Bernard Y... aux entiers dépens de l'instance en appel, et reconnaît à la SCP RIVES-PODESTA, avoué qui en a fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par A. MILHET, président et E. KAIM-MARTIN greffier.
LE GREFFIER : LE PRESIDENT :