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28/03/2007 | FRANCE | N°210

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 1- chambre sociale, 28 mars 2007, 210


*** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 1- Chambre sociale *** ARRÊT DU VINGT HUIT MARS DEUX MILLE SEPT ***

APPELANT
Monsieur X...... 31840 AUSSONNE

représenté par la SCP SABATTE-BROOM-L'HOTE, avocats au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

SOCIÉTÉ CARREFOUR PURPAN36-54, Route de Bayonne31076 TOULOUSE CEDEX

représentée par Me Laurence DUPUY-JAUVERT, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945. 1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 F

évrier 2007, en audience publique, devant A. MILHET, président et C. CHASSAGNE, conseiller, chargés d'ins...

*** COUR D'APPEL DE TOULOUSE 4ème Chambre Section 1- Chambre sociale *** ARRÊT DU VINGT HUIT MARS DEUX MILLE SEPT ***

APPELANT
Monsieur X...... 31840 AUSSONNE

représenté par la SCP SABATTE-BROOM-L'HOTE, avocats au barreau de TOULOUSE

INTIMÉE

SOCIÉTÉ CARREFOUR PURPAN36-54, Route de Bayonne31076 TOULOUSE CEDEX

représentée par Me Laurence DUPUY-JAUVERT, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions de l'article 945. 1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Février 2007, en audience publique, devant A. MILHET, président et C. CHASSAGNE, conseiller, chargés d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
A. MILHET, président C. PESSO, conseiller C. CHASSAGNE, conseiller

Greffier, lors des débats : P. MARENGO
ARRÊT :- contradictoire-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile-signé par A. MILHET, président, et par P. MARENGO, greffier de chambre.

FAITS ET PROCEDURE :

Embauché par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 29 avril 1996 en qualité de responsable de rayon par la SAS SOGARA, CARREFOUR PURPAN, X... accédait au poste de manager métier avant d'être licencié pour faute grave le 24 octobre 2003 pour avoir exercé des violences avec menaces de mort sur l'une de ses collègues.
Le 6 novembre 2003, il saisissait le conseil de prud'hommes de TOULOUSE pour contester le fond et la forme de cette procédure et réclamer diverses indemnités.
Par jugement en date du 23 décembre 2005, le conseil, estimant que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, condamnait la société CARREFOUR PURPAN à payer à X... les sommes suivantes :-9. 315 euros au titre de l'indemnité de préavis ainsi que 931, 50 euros de congés payés afférents-19. 872 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement-1000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Le conseil déboutait les parties du surplus de leurs demandes et condamnait la société CARREFOUR PURPAN aux dépens.
Par déclaration faite au greffe le 6 janvier 2006, X... interjetait appel de cette décision qui lui avait été notifiée le 30 décembre 2005.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :
X... demande à la COUR de confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que son licenciement ne reposait pas sur une faute grave et condamné l'employeur à lui payer des sommes au titre du préavis et de l'indemnité de licenciement, mais de le réformer pour le surplus et de condamner la société CARREFOUR PURPAN à lui payer :-37. 960 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse-18. 630 euros au titre du caractère vexatoire de la rupture-7. 200 euros au titre de la prime de résultat-79. 556, 40 euros au titre des heures supplémentaires effectuées sur la période 1998-2000-80. 102, 48 euros au titre des heures supplémentaires effectuées sur la période 2000-2003-20. 280 euros au titre de la majoration des heures de nuit-18. 630 euros de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé-2000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Il rappelle que la charge de la preuve de la faute grave incombe à l'employeur et que le doute doit profiter au salarié.

Il relève que les accusations portées contre lui ne reposent que sur des témoignages et reproche au conseil de prud'hommes de ne pas être allé au bout de ses constatations.

Il reconnaît que certains problèmes ont émaillé la relation contractuelle mais indique produire de nombreux témoignages de moralité en sa faveur.

Il réclame le paiement de nombreuses heures supplémentaires sur la base du régime de droit commun, au motif qu'avant 2000, son contrat de travail qui stipulait un forfait tous horaires était illicite et qu'après 2000, date de l'entrée en vigueur de l'accord d'entreprise qui le classait dans la catégorie des cadres autonomes, la société CARREFOUR PURPAN n'a pas mis en œ uvre les éléments de suivi des horaires de travail des cadres prévus par cet accord et ne peut donc se prévaloir du forfait jour.

Il présente des calculs selon lesquels, il aurait effectué 1232 heures supplémentaires sur la période non prescrite de 1998 à 2000 et 7521, 76 heures supplémentaires de l'année 2000 au jour de son licenciement.

Il indique qu'il effectuait en outre de nombreuses heures de nuit pour les inventaires, l'implantation des produits des catalogues, les soldes et les braderies, qu'il travaillait également les dimanches pour des opérations ponctuelles et estime à 800 heures les heures qui lui sont dues à ce titre.

La SAS SOGARA, CARREFOUR PURPAN demande à la COUR de réformer le jugement pour dire et juger que le licenciement de X... repose sur une faute grave, de condamner ce dernier à lui rembourser la somme de 30. 118, 50 euros versée en exécution du jugement, de confirmer le jugement pour le surplus et de condamner X... à lui payer 2000 euros en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Elle confirme que X... a été licencié pour avoir agressé sa collègue, Laura A....
Elle estime rapporter la preuve dont elle a la charge par les témoignages des témoins directs de la scène, et maintient que ces faits justifiaient le licenciement pour faute grave de l'intéressé.
Elle rappelle que la relation contractuelle avait déjà été émaillée de différents incidents liés au comportement du salarié et se défend vigoureusement des accusations de racisme avancées par X....
Elle reconnaît que X... était un bon professionnel, considère avoir réagit avec proportion à ses écarts qui jusque là n'était que verbaux mais soutient que l'adoption d'un comportement violent à l'égard de l'une de ses collègues justifiait une sanction à mesure de la faute sans que l'on puisse lui reprocher d'avoir agi avec une légèreté blâmable.
Elle rappelle qu'un employeur a le devoir de protéger la santé de ses salariés et qu'il n'était pas envisageable de maintenir X... dans l'entreprise pendant la durée de son préavis alors que Laura A... qui était en arrêt de travail pour accident du travail suite à cette agression se trouvait dans l'impossibilité physique d'assumer ses fonctions.
Elle relève que X... a réduit ses demandes au titre des heures supplémentaires en cause d'appel, ce qui témoignent de leur manque de sérieux.
Elle stigmatise les réclamations globales du salarié qui englobent les périodes de congés payés et d'absences.
Elle indique que le décompte de X... est nécessairement inexact car l'accord de réduction du temps de travail est entré en vigueur le 1er juin 1999.
Elle indique qu'avant cette date, le demandeur se trouvait soumis à une convention de forfait parfaitement valable, dans le cadre de laquelle le salarié organisait lui même son temps de travail sans démontrer que son employeur lui demandait d'accomplir des heures supplémentaires.
Elle ajoute que comme tous les cadres de l'entreprise, X... percevait une rémunération bien supérieure aux minima conventionnels et qu'il a bénéficié de jours de récupération.
Elle expose qu'après le 1er juin 1999, X... a bénéficié de l'accord CARREFOUR ; que cet accord stipule que l'unité de décompte du temps de travail des cadres est la journée, quelque soit le nombre d'heures travaillées, et fixe une base de 214 jours travaillés ce qui est plus favorable que le maximum de 217 jours fixé par la loi AUBRY I ; que le demandeur a bénéficié de l'ensemble de ces dispositions qui résultent de la négociation conventionnelle et ne peut aujourd'hui les contester.
Elle ajoute respecter scrupuleusement les termes de cet accord et produire tous les relevés de présence des cadres pour l'année 2003.
Elle rappelle qu'en application de l'article L 611-9 du code du travail, l'employeur n'est pas tenu de conserver les documents comptabilisant les heures de travail au delà d'un an.
Elle précise que les dispositions de l'accord d'entreprise sur la majoration des heures de nuit et de dimanche ne s'appliquent pas aux cadres et souligne que le demandeur ne rapporte pas la preuve d'avoir travaillé la nuit ou le week-end.
Elle relève que X... présente pour la première fois en cause d'appel une demande au titre de la prime de résultat qu'il lui appartient d'expliciter sous peine d'en être débouté.
SUR QUOI :
Sur le licenciement :
Attendu que la lettre de licenciement notifiée à X..., qui fixe les limites du litige, est rédigée dans les termes suivants : " … nous avons décidé de vous licencier pour les motifs qui vous ont été exposés lors de cet entretien et qui sont les suivants : violences avec menaces de mort envers une collègue de travail. Le samedi 18 octobre 2003, avant l'ouverture du magasin, alors que Mademoiselle Laura A..., votre homologue du rayon femme, se dirigeait vers vous afin de vous demander si vous pouviez lui rendre son téléphone portable, vous avez proféré des propos grossiers envers elle puis, alors que vous commenciez à lui jeter au visage tout ce qui se présentait à vous : chaussures, bottes, et diverses marchandises entreposées dans un panier client, vous lui avez dit : " je vais te tuer ! … ". Intervenu à la demande de Madame Incarnation B..., témoin de cette agression verbale et physique, Monsieur Michel C..., responsable alimentaire, vous a demandé de le suivre afin d'avoir un entretien avec le Directeur. Au cours de cet entretien il vous a été notifié votre mise à pied conservatoire à effet immédiat eu égard à vos agissements. Nous considérons que ces faits, risquant de mettre en danger la santé physique et morale de votre collègue, constituent une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire dans l'entreprise. Votre présence au sein de notre établissement créerait un trouble anormal auprès des salariés … " ;

Attendu que sur les faits invoqués à l'appui du licenciement, la société CARREFOUR PURPAN produit les attestations établies par Laura A..., victime, et des deux témoins directs de l'incident, mesdames B... et D... épouse Y..., desquelles il s'évince que Laura A... avait mis à charger son téléphone interne sur le chargeur de X... car son propre chargeur était en panne, mais lorsqu'elle était allé cherché son téléphone, il avait disparu ; que lorsqu'elle avait demandé à X... où se trouvait son appareil, ce dernier lui avait répondu très agressivement " dégage ou je te tue " avant de lancer dans sa direction mais sans l'atteindre divers objets qui se trouvaient dans un panier client et notamment des chaussures et des perroquets (matériel utilisé pour suspendre des articles) ;

Que non seulement ces trois témoignages sont parfaitement concordants quant au déroulement chronologiques des faits, mais encore, les deux témoins et la victime ont réitérées, sous serment, leurs déclarations devant les conseillers rapporteurs désignés à cet effet par le conseil de prud'hommes ; que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ces faits susceptibles d'être poursuivis pénalement et au cours desquels Laura A... aurait pu être blessée, ne peuvent être seulement qualifiés de " vive réaction d'énervement " et la circonstance que la victime soit une salariée du même niveau hiérarchique que le demandeur n'ôte rien à leur gravité et justifiaient le licenciement de celui-ci ;

Attendu que X... se contente de nier les faits et tente de déplacer le débat sur le terrain, confus, d'une manipulation colorée de racisme orchestrée par son supérieur hiérarchique ; qu'il convient d'abord de relever que les dires du salarié sur ce point ne sont étayés par aucun élément objectifs et contredits par le déroulement jusque là très favorable de sa carrière au sein de la société CARREFOUR PURPAN, qui s'était encore traduit au mois d'avril 2003 par une augmentation de salaire et l'octroi d'une prime exceptionnelle ainsi que par sa désignation très récente par le supérieur hiérarchique critiqué pour le remplacer pendant ses congés ; qu'ensuite, la COUR constate que X... avait au contraire été traité avec une certaine mansuétude par son employeur à l'occasion d'incidents antérieurs au cours desquels le salarié avait fait preuve d'excès de langage à l'égard tant du même supérieur que du directeur de l'entreprise ;

Attendu que comme tout employeur, la société CARREFOUR PURPAN doit assumer à l'égard de chacun de ses salariés une obligation de sécurité de résultat et se devait de prendre toute mesure pour éviter une nouvelle agression ; que la disproportion entre la réaction de X... à la demande anodine de sa collègue et sa négation des faits rendant illusoire toute introspection de sa part, représentait un risque pour les autres salariés qui rendait impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée de son préavis surtout que la victime se trouvait en arrêt de travail pour accident du travail et que les témoins étaient encore choqués par le degré d'agressivité dont X... avait fait preuve ; que le licenciement pour faute grave était donc parfaitement justifié, ce qui prive l'appelant d'indemnité de préavis et d'indemnité conventionnelle de licenciement ; que le jugement sera réformé en ce sens et que le demandeur devra rembourser les sommes perçues par lui en exécution du jugement ;
Attendu qu'au regard des éléments de la cause, les circonstances du licenciement ne présentent aucun caractère vexatoire ; que X... qui ne précise d'ailleurs pas le préjudice qu'il aurait subi, sera débouté de sa demande indemnitaire à ce titre
Sur les rappels de salaire :
Attendu qu'il appartient au salarié qui réclame le paiement d'heures supplémentaires de produire des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en l'espèce, X... se contente de produire des tableaux établis par lui sur la base d'un nombre d'heures de travail supplémentaires, de nuit et de dimanche fixé forfaitairement par ses soins y compris pendant les périodes de congés ; que le caractère unilatéral et linéaire de ces récapitulatifs, qui ne sont confirmés par aucune preuve concrète sur les horaires réellement effectués par le salarié, leur ôte toute force probante ;

Attendu qu'au surplus, X... qui bénéficiait du statut de cadre était libre d'organiser ses horaires de travail et bénéficiait d'une rémunération forfaitaire largement supérieure au minimum conventionnel ; qu'à compter de la mise an place de l'accord d'entreprise signé le 31 mars 1999, il bénéficiait en outre de 14 jours de repos supplémentaires avec la possibilité d'ouvrir un compte épargne temps ; que les bulletins de salaire produits par le demandeur font bien apparaître le décompte des jours de travail que la société CARREFOUR PURPAN s'était engagé à tenir au terme du dit accord ; que X... ne rapporte donc pas la preuve qui lui incombe sur la réalité des heures supplémentaires, de nuit ou de dimanche qu'il dit avoir effectuées sans être rémunéré, ni, à fortiori, qu'il les aurait effectuées à la demande expresse de la société CARREFOUR PURPAN ; qu'il n'appartient pas à la COUR d'ordonner une expertise pour suppléer la carence du salarié sur ce point ; que le jugement qui l'a débouté de ces chefs de demandes sera donc confirmé et qu'il sera également débouté de sa réclamations au titre du travail dissimulé, qui en était le corollaire, présentée pour la première fois en cause d'appel ;

Attendu que X... ne développe aucun moyen à l'appui de sa demande tendant au paiement d'une prime de résultat alors qu'aucune disposition contractuelle ne stipule une telle prime ; qu'il y a lieu de le débouter de cette demande présentée en cause d'appel ;
Attendu que X... assumera les dépens de première instance et d'appel ; qu'en revanche l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile en faveur de l'intimée ;
PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Confirme le jugement rendu le 23 décembre 2005 par le conseil de prud'hommes de TOULOUSE sauf en ce qu'il a considéré que le licenciement de X... ne reposait pas sur une faute grave et condamné la société CARREFOUR PURPAN à payer des sommes au titre du préavis, de l'indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et en ce qu'il a statué sur les dépens,

Statuant à nouveau sur les chefs réformés et y ajoutant :
Dit que le licenciement notifié le 24 octobre 2003 par la société CARREFOUR PURPAN à X... repose sur une faute grave,
Déboute X... de l'ensemble de ses demandes,
Condamne X... aux dépens de première instance et d'appel,
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par monsieur MILHET, président et madame MARENGO, greffier.

Le greffier, Le président,

P. MARENGOA. MILHET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 1- chambre sociale
Numéro d'arrêt : 210
Date de la décision : 28/03/2007
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Toulouse, 23 décembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-03-28;210 ?
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