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11/01/2007 | FRANCE | N°12

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0035, 11 janvier 2007, 12


11/01/2007

ARRÊT No12

NoRG: 05/05511

Décision déférée du 20 Septembre 2005 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 05/1807

CAVE

Société GERSIM

représentée par la SCP MALET

C/

ALTA SAINT GEORGES

SA VINCI PARK FRANCE anciennement dénommée SOGEPARC FRANCE

représentées par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

confirmation

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JANVIER DEUX MILLE SEPT

***

APPELANT(E/S)

SARL GERSIM

...

31000 TOULOUSE

représentée par la SCP MALET, avoués à la Cour

assistée de Me Jean-Pierre Y..., avocat a...

11/01/2007

ARRÊT No12

NoRG: 05/05511

Décision déférée du 20 Septembre 2005 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 05/1807

CAVE

Société GERSIM

représentée par la SCP MALET

C/

ALTA SAINT GEORGES

SA VINCI PARK FRANCE anciennement dénommée SOGEPARC FRANCE

représentées par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

confirmation

Grosse délivrée

le

à REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Chambre Section 1

***

ARRÊT DU ONZE JANVIER DEUX MILLE SEPT

***

APPELANT(E/S)

SARL GERSIM

...

31000 TOULOUSE

représentée par la SCP MALET, avoués à la Cour

assistée de Me Jean-Pierre Y..., avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME(E/S)

SCI ALTA SAINT GEORGES

1O8, rue Richelieu

75002 PARIS

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de Me Z... -TRUMER, avocat au barreau de PARIS

SA VINCI PARK FRANCE, anciennement dénommée SOGEPARC FRANCE

...

92730 NANTERRE

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour

assistée de Me Jean Henry A..., avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 22 Novembre 2006 en audience publique, devant la Cour composée de :

J.P. SELMES, président

C. BELIERES, conseiller

P. VIDEAU, conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : A. THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

- signé par J.P. SELMES, président, et par A. THOMAS, greffier de chambre

EXPOSE DES FAITS ET PROCEDURE

La SARL GERSIM est locataire de la SA ALTA SAINT GEORGES pour deux locaux à usage commercial situés à Toulouse, de part et d'autre du passage qui donne accès à partir de la rue Saint JEROME à la place Occitane et au centre commercial SAINT GEORGES, dépendant d'une copropriété dénommée au "20 Place Occitane" dont ils constituent les lots no 3076 pour l'un et 3086 et 3090 pour l'autre, aux termes de deux baux distincts consentis

- par acte notarié du 12 octobre 1976 par M. B... aux droits de qui se trouve aujourd'hui la SA ALTA SAINT GEORGES à la société LEDI ENCO aux droits de qui se trouve aujourd'hui la SARL GERSIM pour une durée de 9 ans à compter du 1er novembre 1976 qui a fait l'objet de deux renouvellement les 1er novembre 1985 et 1994

- par acte sous seing privé du 1er avril 1977 par Mme C... aux droits de qui se trouve aujourd'hui la SA ALTA SAINT GEORGES à M. D... aux droits de qui se trouve aujourd'hui la SARL GERSIM pour une durée de 9 ans qui a fait l'objet de deux renouvellements à compter du 1er novembre 1987 puis 15 novembre 2002.

Ces deux contrats de location contenaient les clauses suivantes :

6) les preneurs supporteront toutes les réparations qui deviendraient nécessaires aux locaux loués et notamment...

7) de même les preneurs souffriront que la copropriété fasse faire à l'immeuble dont dépendent les locaux loués, pendant le cours du bail, ....tous travaux quelconques qu'ils jugeraient nécessaires, sans pouvoir prétendre à aucune indemnité ni diminution du loyer quelle que soit l'importance des travaux et alors même qu'ils dureraient plus de quarante jours

Ils devront, également, supporter de la même manière les travaux qui seraient exécutés sur la voie publique ou dans les immeubles voisins de celui dont font partie les locaux loués.

En 2004, la SA ALTA SAINT GEORGES qui exploite le centre commercial après avoir acquis nombre de lots correspondants de la copropriété SAINT GEORGES OUEST (macro lot 2) et SAINT GEORGES EST, a entrepris en qualité de maître de l'ouvrage une opération de restructuration dudit centre ; parallèlement la SA VINCI PARK qui exploite les parkings après avoir acquis les lots correspondants de la copropriété SAINT GEORGES OUEST (macro lot 1) et SAINT GEORGES EST a entrepris en qualité de maître de l'ouvrage la rénovation de ceux-ci.

Par acte d'huissier du 29 septembre 2004 la SA ALTA SAINT GEORGES a refusé le renouvellement du bail portant sur le lot 3076 exploité sous l'enseigne EDC sollicité par la SARL GERSIM le 29/09/2004 pour motif grave et légitime tiré du non respect de la destination contractuelle.

Par acte d'huissier du 12 mai 2004 le bailleur a notifié un droit de repentir au congé préalablement délivré à son locataire le 2 mai 2002 et offert le renouvellement du bail portant sur les lots 3086 et 3090 exploités sous l'enseigne GLAMOUR.

Par acte du 24 mai 2005 la SARL GERSIM a fait assigner à jour fixe la SA ALTA SAINT GEORGES et la SA SOGEPARC France venant aux droits de la SA VINCI PARK devant le tribunal de grande instance de Toulouse en déclaration de responsabilité pour troubles de voisinage consécutifs au travaux de restructuration et en réparation du préjudice subi.

Par jugement du 20 septembre 2005 cette juridiction a

- débouté la SARL GERSIM de ses demandes

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile

- laissé les dépens à la charge de la SARL GERSIM.

Par acte du 20 octobre 2005, la SARL GERSIM a interjeté appel général de cette décision.

MOYENS DES PARTIES

La SARL GERSIM reprend ses réclamations de première instance et demande de

- dire qu'en tant que maître de l'ouvrage de l'opération de restructuration du centre commercial SAINT GEORGES et du parking, la SA ALTA SAINT GEORGES et la SA VINCI PARK FRANCE sont responsables du trouble commercial subi

- les condamner in solidum à réparer le dommage causé

Subsidiairement,

- dire que la clause d'exonération invoquée par la SA ALTA SAINT GEORGES ne peut recevoir application

- dire que si son application devait être envisagée, elle ne peut faire obstacle à la responsabilité du bailleur en raison de la faute lourde de celui-ci

En toute hypothèse,

- condamner la SA ALTA SAINT GEORGES et la SA VINCI PARK FRANCE in solidum à verser une provision de 240.000 € et de 10.000 € par magasin et par mois à dater de la décision à intervenir jusqu'à détermination définitive du dommage

- ordonner une mesure d'instruction comportant un transport sur les lieux et une expertise afin de vérifier et chiffrer l'ensemble des préjudices subis, notamment, les pertes de chiffres d'affaires et leur incidence sur la valeur du fonds de commerce

- lui octroyer la somme de 1.500 € sur le fondement de l‘article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle recherche la responsabilité de la SA ALTA SAINT GEORGES et de la SA VINCI PARK FRANCE sur le fondement délictuel, pour troubles anormaux de voisinage, en leur qualité de maîtres de l'ouvrage de l'opération de restructuration et des travaux en cours.

Elle estime être parfaitement recevable à agir de ce chef à l'encontre de son bailleur, une telle responsabilité pouvant être invoquée même en présence de la violation d'une obligation contractuelle par le responsable, car l'obligation de ne pas causer à autrui de trouble anormal de voisinage est indépendante du contrat, ne naît pas de lui et existe sans lui.

Elle rappelle que la licéité de l'opération ou des travaux ne suffit pas à exclure la responsabilité pour trouble de voisinage.

Elle soutient que les clauses d'exonération ou d'atténuation de responsabilité sont nulles ou, en tout cas, inefficaces en cas de demandes fondées sur une responsabilité délictuelle qui a un caractère d'ordre public et dont l'application ne peut être paralysée par avance par une convention.

Elle affirme que l'opération de restructuration et les travaux lui causent un préjudice commercial qui se traduit par une chute du chjffre d'affaires proche d'environ 60 %, alors que dans le même temps elle doit assurer ses charges de fonctionnement et les salaires des employés, ce qui caractérise le caractère anormal et continu du trouble.

Elle indique que cette réhabilitation complète de la zone comportant démolitions et reconstructions avec suppression partielle ou totale, permanente ou momentanée des accès et du site lui-même a pour conséquence directe de faire perdre aux lieux leur destination normale en terme de passage et de fréquentation, de sorte que les boutiques louées dans le passage qui y mène en subissent directement l'inconvénient.

Elle souligne que la gravité du trouble qui aboutit à une modification complète de la situation et à une désertion par les clients, outre les nuisances attachées aux travaux eux-mêmes, est accentuée par leur importance et leur durée puisqu'ils ont commencé depuis plus de deux ans et se poursuivent sans précision réelle sur leur achèvement.

Elle indique que l'attestation établie par son expert comptable démontre la chute très importante du chiffre d'affaires des deux boutiques, alors que les magasins exploités, ailleurs, pour les mêmes produits n'ont subi aucune baisse ainsi que la difficulté d'assurer les charges fixes de la société.

Elle précise que le dommage est loin de s'atténuer puisque une nouvelle phase de travaux concerne essentiellement la partie de la place et du centre donnant sur le passage, de sorte que l'accès est quasiment supprimé, ainsi qu'il ressort de divers constats d'huissier des 27, 28 et 30 mars 2006, 30 mai 2006, 31 juillet 2006 et du rapport d'expertise de M. E... désigné en référé en raison de la fermeture totale et provisoire du passage en août 2006.

Subsidiairement, si seule une responsabilité contractuelle était encourue, elle fait valoir que la clause 6 du bail qui vise les travaux exécutés dans le local n'est pas en cause, que la clause 7 en son paragraphe 1 relatif à des travaux exécutés par la copropriété est inapplicable tout comme son paragraphe 2 ainsi libellé "les preneurs... devront également supporter de la même manière les travaux qui seraient exécutés sur la voie publique ou dans les immeubles voisins de celui dont font partie les locaux loués".

Elle rappelle que les clauses exonératoires de responsabilité sont d'interprétation restrictive, qu'elles ne concernent nullement une opération de restructuration complète du centre commercial et du parking et ne peuvent pas exonérer le bailleur de son fait personnel c'est-à-dire de travaux qu'il entreprend lui-même à l'extérieur des locaux loués.

Elle soutient que la violation par le bailleur de son obligation de procurer une jouissance paisible, qui porte atteinte à un élément essentiel du contrat, est caractérisée dès lors que les travaux ont pour conséquence de diminuer voire de supprimer la circulation de la clientèle potentielle, ce qui revêt un caractère fautif d'autant plus grave qu'ils durent depuis trois ans sans véritable planning ni information.

La SA ALTA SAINT GEORGES sollicite la confirmation du jugement déféré avec octroi de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle indique que les locaux litigieux ne se situent pas dans le centre commercial lui-même mais en retrait de celui-ci de sorte que la SARL GERSIM ne subit pas les nuisances des travaux et souligne que ce preneur a refusé toute négociation.

Elle précise que certains travaux concernant le centre commercial SAINT GEORGES ont été réalisés sur les parties communes spéciales et générales de la copropriété du 20 place occitane suivant procès-verbal d'assemblée générale du syndicat des copropriétaires du 11 juin 2003, que les deux baux contiennent en leur article 7 les mêmes clauses exonératoires de responsabilité qui doivent recevoir application dès lors qu'elles font interdiction à la SARL GERSIM de solliciter, sur quelque fondement juridique que ce soit, aucune indemnité ou diminution de loyer quelle que soit l'importance des travaux et même s'ils durent plus de quarante jours.

Elle soutient que les parties ayant prévu de régler contractuellement la question des travaux réalisés dans le centre, le principe du non cumul des responsabilité contractuelle et délictuelle interdit à la SARL GERSIM de fonder ses demandes sur le trouble de voisinage de l'article 544 du code civil.

Elle affirme que la société preneuse n'a jamais été mise dans l'impossibilité de jouir et de disposer de son fonds de commerce, les locaux continuant à être exploités pendant la durée des travaux et estime que le caractère anormal du trouble n'est en rien démontré dès lors que le centre commercial était en situation sinistrée depuis de très nombreuses années avant sa restructuration qui avait pour but de faire disparaître les difficultés, que les travaux entrepris sont particulièrement importants, qu'ils n'ont pas été menés contrairement aux règles de l'art ou dans des conditions anormales

Elle soutient qu'aucune réclamation n'est, en toute hypothèse, justifiée pour le local no 3076 dès lors qu'un refus de renouvellement a été notifié de sorte que le preneur est libre de libérer les lieux à tout moment et de ne pas exercer son droit au maintien étant précisé que tout droit à une indemnité d'éviction lui est dénié.

Elle ajoute que la SARL GERSIM ne verse aux débats que ses chiffres d'affaires pour les deux magasins pour les périodes du 1er mars 2003 au 28 février 2004 et du 1er mars 2004 au 28 février 2005, qu'elle ne rapporte pas la preuve qu'avant le début des travaux en juin 2004 son chiffre d'affaires augmentait, que la totalité de la baisse ne peut lui être imputée, alors notamment que, pour l'une des boutiques, les salaires sont passés de 24.152 € en 2002 à 32.852 € en 2004, que les sommes réclamées sont exorbitantes et qu'aucune mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Elle fait remarquer que les travaux récemment réalisés à l'été 2006 sont sans aucun rapport avec le présent litige introduit dès le mois de mai 2005.

La SA VINCI PARK FRANCE anciennement dénommée SOGEPARC FRANCE conclut à la confirmation du jugement déféré avec octroi de la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle soutient que la demande de la SARL GERSIM se heurte aux dispositions de la clause 7 du bail, qu'en toute hypothèse ce preneur ayant bénéficié d'une exploitation maintenue, il ne peut se prévaloir de nuisances excédant les troubles inhérents aux travaux de restructuration litigieux.

Elle ajoute qu'elle ne peut avoir elle-même occasionné de trouble à la SARL GERSIM dès lors que les seuls travaux entrepris lors de la délivrance de l'assignation introductive d'instance étaient relatifs au parking EST situé à l'opposé de l'endroit où sont implantés les locaux loués, d'autant qu'ils ont été conçus de manière à préserver l'accès au parking durant toute leur durée, ceux-ci ayant été réalisés par tranche, que ce parking rénové est aujourd'hui normalement ouvert et fonctionne et que les travaux du parking OUEST situés à l'opposé des magasins litigieux sont aujourd'hui en voie d'achèvement et n'interdisent nullement le stationnement des clients du commerce de la SARL GERSIM.

Elle souligne que les faits rappelés par l'expert E... dans son rapport (présence d'engins, palissades....) se sont déroulés dans le centre commercial ou à l'occasion de la réfection de la dalle piétonne de la Place Occitane dont la mairie de Toulouse est le maître de l'ouvrage, et qu'il n'est jamais fait état d'une gêne quelconque qui aurait été amenée par les travaux en sous sol dans les parkings.

Elle estime que la SARL GERSIM ne rapporte ni la preuve du trouble anormal de voisinage allégué ni du préjudice prétendument subi.

MOTIFS DE LA DECISION

Les travaux de restructuration de l'ensemble immobilier SAINT GEORGES, objets du présent litige, sont achevés depuis la fin novembre 2006, date d'inauguration.

Sur la responsabilité de la SA ALTA SAINT GEORGES

L'action en réparation du trouble anormal de voisinage subi par le locataire, la SA GERSIM, du fait de la réalisation par son bailleur, la SA ALTA SAINT GEORGES, d'une opération de restructuration immobilière sur le fonds voisin dont ce dernier est, également, propriétaire ne peut être engagée que sur le fondement du bail.

En effet, ces parties sont liées par un contrat ; le dommage invoqué est causé par l'un des contractants à l'autre et se rattache à l'exécution d'une obligation contractuelle puisqu'en vertu de l'article 1719 alinéa 3 du code civil "le bailleur est tenu de faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail" ; et le bailleur ne peut être assimilé à un tiers dès lors que l'article 1725 du code civil le définit comme celui qui ne peut prétendre à aucun droit sur la chose louée.

Tous les troubles de jouissance prétendument causés par la SA ALTA SAINT GEORGES en faisant exécuter comme maître de l'ouvrage des travaux sur le centre commercial dépendant de la copropriété voisine engagent, ainsi, sa responsabilité contractuelle envers la SA GERSIM.

*

La clause 7 insérée dans chacun des deux contrats de location stipule que " les preneurs souffriront que la copropriété fasse faire à l'immeuble dont dépendent les locaux loués, pendant le cours du bail, tous travaux de réparations, reconstruction, surélévation, agrandissement et autres travaux quelconques qu'ils jugeraient nécessaires, sans pouvoir prétendre à aucune indemnité ni diminution du loyer quelle que soit l'importance des travaux et alors même qu'ils dureraient plus de quarante jours.

Ils devront, également, supporter de la même manière les travaux qui seraient exécutés sur la voie publique ou dans les immeubles voisins de celui dont font partie les locaux loués."

Cette clause restrictive de garantie est parfaitement licite.

Si les parties ne peuvent écarter de façon générale l'obligation du bailleur d'assurer la jouissance paisible des lieux, elles restent libres d'y apporter des limitations, notamment en matière de bail commercial, hors le cas de dol ou de faute lourde.

Au vu des éléments versés aux débats, rien ne permet de mettre en échec le jeu des dispositions conventionnelles.

Le procès-verbal de constat d'huissier du 18 mai 2004 a été dressé dans le cadre du contentieux opposant les parties sur le renouvellement des baux ; il relate le mauvais état d'entretien du passage où se trouvent les deux locaux entre la rue Saint Jérôme, l'entrée du centre commercial et la Place Occitane ainsi que la présence de locaux commerciaux vides à proximité.

Mais il est antérieur au début des travaux de restructuration litigieux destinés, notamment, selon le protocole d'accord tripartite entre la Ville de Toulouse, la SCI ALTA SAINT GEORGES et la SA VINCI PARK à revitaliser " l'appareil commercial déjà vieillissant et de plus en plus inadapté aux exigences de la clientèle qui a perdu de son attractivité".

Ces travaux de réhabilitation du centre commercial n'ont commencé qu'en juin 2004 ; le constat d'huissier du 25 août 2004 note à cette date la quasi fermeture de la Place Occitane, la fermeture de l'entrée côté EST du centre commercial.

Mais cette situation, inhérente à la vaste opération de restructuration engagée, n'atteignait pas directement les locaux litigieux situés sur le côté OUEST de tout cet ensemble immobilier, en dehors du centre commercial qui occupe le sous-sol, puisque les deux boutiques sont placées en rez de chaussée, tout près de la rue Saint Jérôme qui le longe et donc en bordure de la zone.

La conduite de l'opération immobilière par le maître de l'ouvrage ne fait, en elle-même, l'objet d'aucune critique particulière ; aucune imprudence ou négligence n'est stigmatisée.

La jouissance des lieux a été maintenue à la SARL GERSIM ; les deux boutiques sont restées ouvertes et exploitées même si elles ont enregistré une baisse de chiffre d'affaires entre 2004 et 2005 ; la situation créée par les travaux alentours n'y est probablement pas étrangère mais elle s'inscrit tout aussi vraisemblablement dans le cadre d'un déclin amorcé depuis plusieurs années sur l'ensemble de la zone commerciale et, notamment, depuis le départ de l'enseigne FNAC quinze ans plus tôt.

La clause du bail exonérant le propriétaire de toute responsabilité pour les inconvénients liés aux travaux qu'il a pu entreprendre dans la copropriété voisine voire dans la copropriété elle-même, doit, dès lors recevoir application.

Certes, à partir de juin 2006, date largement postérieure au jugement déféré, la situation a changé et l'exercice dans les lieux loués d'une exploitation commerciale est alors progressivement devenue impossible en raison de l'exécution de travaux dans le passage lui-même qui parait dépendre de la même copropriété.

Un premier constat d'huissier du 30 mai 2006 mentionne diverses nuisances et dangers encourus par la clientèle du fait de travaux de démolition effectués (présence de poussière importante s'échappant du chantier où des marteaux piqueurs découpent la dalle de béton, présence de camions d'entreprise garés dans le passage lui-même, occultant les deux magasins) et un second du 31 juillet 2006 (présence de deux tracto-pelle devant la boutique, sol défoncé, accès interdit par des barrières de chantier métalliques).

La note no 3 de l'expert judiciaire M. E... en date du 3 août 2006 missionné dès le 22 juin 2006 confirme le danger qui en résulte pour la sécurité des personnes, qu'il s'agisse des employés ou des clients des deux boutiques, et qui impose la fermeture du passage et des magasins (cf pages 15 et 16).

Mais cette situation, de nature à écarter le jeu de la clause exonératoire contractuelle puisque la jouissance même des lieux n'est plus possible, échappe à l'effet dévolutif de l'appel dès lors qu'elle a fait l'objet d'une instance distincte devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulouse et d'une transaction entre parties sur le principe et le montant de l'indemnisation due au preneur.

Le jugement déféré sera donc confirmé sur ce point.

Sur la responsabilité de la SA VINCI Park France

En l'absence de tout lien contractuel entre la SA GERSIM et la SA VINCI PARK FRANCE, la responsabilité de ce maître de l'ouvrage au titre des travaux exécutés dans les parkings dépendant d'une copropriété voisine ne peut être directement recherchée que sur le fondement délictuel et, plus particulièrement, sur la théorie des troubles anormaux de voisinage.

Celle-ci n'est engagée que si le seuil constitué par l'obligation de tolérer l'activité des voisins est franchi.

Aucun trouble excessif ne peut être imputé à la SA VINCI PARK FRANCE dès lors que l'accès du premier parking rénové était à l'EST de l'ensemble immobilier, alors que le passage où se trouvent les deux boutiques est à l'OUEST, que l'entrée du parking OUEST est lui-même éloigné de l'endroit où sont situés les magasins, que tout au long des travaux de réhabilitation effectués par tranches, le stationnement est resté effectif.

Aucun constat d'une nuisance quelconque de ce chef n'a jamais été dressé.

La demande de la SA GERSIM ne peut, dès lors, prospérer.

Le jugement déféré, qui a omis de se prononcer spécifiquement sur cette réclamation envers la SA VINCI PARK FRANCE, sera complété en ce sens.

Sur les demandes annexes

La SA GERSIM qui succombe supportera donc la charge des dépens ; elle ne peut, de ce fait, bénéficier des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile.

Eu égard aux circonstances de la cause et à la position des parties, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA ALTA SAINT GEORGES et de la SA VINCI PARK FRANCE la totalité des frais exposés pour se défendre et assurer leur représentation en justice et non compris dans les dépens, ce qui commande le rejet de leur demande respective à ce même titre.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Confirme le jugement déféré.

Le complétant,

- Déboute la SA GERSIM de son action en responsabilité à l'encontre de la SA VINCI PARK FRANCE.

Y ajoutant,

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties.

- Condamne la SA GERSIM aux entiers dépens.

- Dit qu'ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile au profit de la SCP SOREL, DESSART, SOREL, avoués.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0035
Numéro d'arrêt : 12
Date de la décision : 11/01/2007

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Toulouse, 20 septembre 2005


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2007-01-11;12 ?
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