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16/10/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006952341

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0038, 16 octobre 2006, JURITEXT000006952341


16/10/2006 ARRÊT No No RG: 06/00390 OC/EKM Décision déférée du 10 Janvier 2006 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 04/3015 M. SERNY Anne Marie X... veuve Y... représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT C/ LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE Z... représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

CONFIRMATION Grosse délivrée le à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section 1



ARRÊT DU SEIZE OCTOBRE DEUX MILLE SIX

APPELANTE Madame Anne Marie X... veuv

e Y... 17 rue Gazagne Apt.34 - 1er étage 31300 TOULOUSE représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à l...

16/10/2006 ARRÊT No No RG: 06/00390 OC/EKM Décision déférée du 10 Janvier 2006 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 04/3015 M. SERNY Anne Marie X... veuve Y... représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT C/ LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE Z... représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL

CONFIRMATION Grosse délivrée le à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

1ère Chambre Section 1

ARRÊT DU SEIZE OCTOBRE DEUX MILLE SIX

APPELANTE Madame Anne Marie X... veuve Y... 17 rue Gazagne Apt.34 - 1er étage 31300 TOULOUSE représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour assistée de Me Nathalie LAURENT, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME Monsieur LE DIRECTEUR DES SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE Z... 34 rue des Lois BP 999 31066 TOULOUSE CEDEX représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions des articles 786 et 910 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Septembre 2006, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant O. COLENO, conseiller, C. FOURNIEL, conseiller, chargés du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : H. MAS, président O. COLENO, conseiller C. FOURNIEL, conseiller Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN ARRET : - contradictoire - prononcé

publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par H. MAS, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier présent lors du prononcé.

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 13 octobre 1997, Anne Marie X... veuve Y... a encaissé un chèque de 300.000 Francs établi à son ordre par Pierre Sasmayoux, qui est décédé le 14 juin 1998.

Anne Marie X... veuve Y..., que ce dernier avait instituée légataire universelle selon testament de 1998, a renoncé à ce legs par acte du 16 avril 1999.

Le contrôle de la déclaration de succession de Pierre Sasmayoux a conduit l'administration à notifier à Anne Marie X... veuve Y... un premier redressement fondé sur cette opération qualifiée don manuel et par application de l'article 757 du code général des impôts, mais la réclamation contentieuse de cette dernière a été admise le 10 juin 2003 au motif d'un vice de motivation.

Une nouvelle procédure de redressement a été engagée le 12 août 2003 sur le fondement de l'article 750ter du code général des impôts.

Par acte d'huissier du 23 septembre 2003, Anne-Marie X... veuve Y... a donné assignation au Directeur des services fiscaux de la Haute-Garonne devant le tribunal de grande instance de Toulouse aux fins d'annulation de la décision du 8 juillet 2004 emportant rejet de sa réclamation contentieuse, dégrèvement et remboursement

des supplément d'impôt et pénalités.

Par le jugement déféré du 10 janvier 2006 assorti de l'exécution provisoire, le tribunal a débouté Anne-Marie X... veuve Y... de ses contestations et validé l' avis de mise en recouvrement rendu exécutoire le 9 octobre 2003, considérant d'une part que les moyens de procédure invoqués n'étaient pas fondés, le contribuable n'ayant pu se méprendre sur le fondement de l'action de l'administration fiscale, d'autre part que cette dernière avait la possibilité de faire reconnaître judiciairement un don manuel à partir de tout transfert de valeur fait sans contrepartie, et de taxer comme mutation à titre gratuit les transferts de valeur dont la cause est ignorée dès lors qu'elle est en mesure de démontrer l'intention libérale par voie de présomptions concordantes, ce qui est le cas en l'espèce.

Anne-Marie X... veuve Y..., régulièrement appelante, conclut à la réformation de cette décision et demande à la Cour de juger que la procédure est entachée d'irrégularités du fait de l'insuffisance de motivation de la notification de redressement et de l'absence de mention de l'article 757 du code général des impôts en violation des dispositions de l'article L.57 du Livre des procédures fiscales, au fond de prononcer l'annulation de la décision de rejet du Directeur des services fiscaux et le dégrèvement et le remboursement des suppléments d'impôts et pénalités aux motifs que la remise d'un chèque n'est pas constitutive d'une donation indirecte, et qu'un don manuel ne peut faire l'objet d'une taxation aux droits de mutation à titre gratuit que dans le respect des articles 757 et 784 du code général des impôts et ne peut être taxé sur le seul fondement des articles 894 et 931 du code civil, 750 ter et 777.III du code général des impôts. Elle demande que la direction des services fiscaux soit condamnée au paiement d'intérêts moratoires à compter du 13 septembre

2004 sur la somme réglée au titre des redressements.

Elle soutient qu'au cours de la procédure contradictoire, l'administration fiscale n'a jamais fait référence à la qualification de donation indirecte sur laquelle elle se fonde maintenant, se contentant dans la notification de redressement de faire référence à l'existence d'une donation en termes généraux, qu'à envisager que la remise de chèque ait traduit une donation, ce qu'elle conteste au motif que le chèque était le résultat d'un apurement de comptes après une longue période de vie commune, seule la qualification de don manuel pouvait lui être appliquée, la rendant taxable par application du seul article 757, fondement que l'administration fiscale a été contrainte d'abandonner, et que le premier juge ne pouvait donc pas reprendre, parce qu'en l'absence de révélation par le donataire, les conditions posées par cet article n'étaient pas remplies.

La Direction des services fiscaux de la Haute-Garonne conclut à la confirmation du jugement dont appel, soutenant que le visa des articles 894 du code civil, 750ter et 777 III du code général des impôts ont informé clairement la contribuable de la nature du redressement tendant à la taxation d'une donation, tant en droit qu'en fait et dans des conditions qui lui permettaient de formuler ses observations, que les dispositions de l'article 757 du code général des impôts sont étrangères au litige, que toute donation est taxable qu'elle qu'en soit la forme et qu'elle rapporte la preuve par un faisceau de présomptions et d'indices de l'intention libérale qui a commandé la remise du chèque.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu que la réclamation contentieuse formée par Anne Marie X... veuve Y... sur le premier redressement fondé sur les dispositions de l'article 757 du code général des impôts a été admise par décision du 10 juin 2003 à raison d'un "vice entachant la

motivation", le directeur des services fiscaux précisant qu'une nouvelle procédure serait ultérieurement notifiée en conformité avec les règles applicables en l'espèce;

que le second redressement émis deux mois après est fondé au plan fiscal sur les dispositions de l'article 750 ter paragraphe 3 du code général des impôts qui concernent la définition du champ d'application des droits de mutation à titre gratuit et de leur territorialité;

Attendu que l'administration fiscale a agi régulièrement en abandonnant un redressement pour en établir un nouveau sur un fondement juridique différent, ce qu'elle a parfaitement la possibilité de faire dès lors qu'elle en informe clairement le contribuable et le met en position d'exercer ses droits, ce qu'elle a fait en l'espèce;

que c'est en vain que Anne Marie X... veuve Y... discute devant la Cour la qualité des informations qui lui ont été données au cours de la procédure contradictoire, qui sont conformes à la position soutenue par l'administration devant les juridictions du premier et du second degré et ne tendent qu'à voir valider la taxation d'une opération qui revêt selon elle les caractères d'une donation sur la base de textes de loi précisément visés;

que ce n'est que dans la décision de rejet de la réclamation contentieuse qui est déférée à la Cour que l'administration fiscale a qualifié "donation indirecte" la libéralité faite en la forme d'un chèque bancaire, ce qu'elle n'avait pas fait jusqu'alors et qu'elle ne reprend pas dans l'instance;

Attendu que constitue une donation indirecte tout acte qui revêt accessoirement et sans simulation les caractères d'une libéralité;

que si elle est animée par une intention libérale à l'égard de son bénéficiaire, la seule remise d'un chèque approvisionné ne constitue

pas en soi une donation indirecte ni n'en révèle une qui, par définition est inconnue en l'espèce;

qu'à ce titre, la décision déférée est à bon droit critiquée, mais qu'il n'en résulte aucune conséquence dès lors que cette qualification, qui ne s'appuie sur aucune circonstance particulière, n'ajoute rien aux notification de redressement et réponse aux observations du contribuable, ne modifient ni l'analyse des faits et les principes mis en oeuvre et n'altèrent donc pas la possibilité de la critiquer; au fond, ce que l'appelante fait depuis l'origine sur un tout autre terrain;

Attendu que la contestation de la régularité de l' avis de mise en recouvrement a été à juste titre rejetée par le premier juge;

que le visa inadapté de l'article 641 du code général des impôts à côté de celui approprié de l'article 777, ainsi que la référence aux "successions"dans la définition de la nature des droits d'enregistrement poursuivis procèdent d'une même erreur matérielle qui n'entache pas d'irrégularité l' avis de mise en recouvrement notifié dès lors que celui-ci contient la référence exacte à la notification de redressement du 12 août 2003 et à la lettre de motivation du même jour qui fondent le détail de la créance et de ses accessoires pour des montants inchangés depuis l'origine, dans des conditions qui ont permis l'identification exacte et certaine de la créance réclamée;

Attendu sur le fond que, hors l'indication d'un aveu du don manuel qui aurait été fait par le contribuable au cours d'un entretien avec le vérificateur lors de la procédure contradictoire issue du premier redressement, aveu qui a été immédiatement et véhémentement contesté par Anne Marie X... veuve Y... et n'est pas repris dans le second redressement, les deux redressements se fondent sur les mêmes faits, en l'occurrence l'émission et l'encaissement du chèque

bancaire de 300.000 Francs et l'articulation des mêmes présomptions dont la réunion est présentée comme de nature à justifier l'existence persistante et réitérée chez le tireur d'une intention libérale à l'égard du bénéficiaire;

que toutes ces présomptions sont extérieures au chèque et prennent place dans le contexte qui est celui d'un refus, par la contribuable, de fournir toute justification propre à établir la nature de paiement que cet effet aurait revêtu selon elle;

Attendu que les dispositions spéciales de l'article 757 du code général des impôts rendent passibles du droit de donation les actes renfermant soit la déclaration par le donataire ou ses représentants, soit la reconnaissance judiciaire d'un don manuel, ainsi que la révélation par le donataire d'un don manuel à l'administration;

Attendu que s'il est certain que la règle spéciale déroge à la règle générale, et celle réservée aux modes de taxation du don manuel à celle des donations en général, Anne Marie X... veuve Y... n'est pas pour autant fondée à opposer à l'administration, qui prétend appliquer les secondes, les règles spéciales du don manuel dès lors d'une part que l'opération mise en évidence n'en revêt pas nécessairement par elle-même tous les caractères, et d'autre part que par hypothèse elle en conteste l'existence;

qu'en effet, si la simple tradition que réalise la remise, avant son décès par le tireur dont l'intention libérale constante et réitérée à l'égard du bénéficiaire est avérée, d'un chèque approvisionné qui a été encaissé par ledit bénéficiaire est bien de nature à caractériser un don manuel, aucun élément ne permet de retenir que l'opération que traduit cet effet s'est effectivement limitée à son établissement et en revêt donc bien les caractères dans le contexte qui est celui d'une dénégation et d'un refus de toute justification que la contribuable a fait le choix d'opposer aux demandes de

l'administration concernant la cause de ce mouvement de établissement et en revêt donc bien les caractères dans le contexte qui est celui d'une dénégation et d'un refus de toute justification que la contribuable a fait le choix d'opposer aux demandes de l'administration concernant la cause de ce mouvement de fonds;

Attendu que les donations sont en principe taxables, quelle qu'en soit la forme;

Attendu que le don manuel n'est qu'une forme de la donation, et que l'administration est recevable à prétendre démontrer l'existence d'une libéralité taxable à partir d'une simple tradition de valeurs entre le donateur et le donataire sans être tenue de rapporter la preuve de la forme que les parties ont pu donner à cette libéralité, dont le chèque qui n'est qu'un moyen de paiement a traduit l'exécution, qui a pu par exemple revêtir la forme d'un acte sous seing privé ou toute autre forme qui est ignorée en l'occurrence en présence d'une contestation de son existence même, mais qui est en principe indifférente; que seule la déclaration ou la révélation par le donataire, qui font ici défaut, auraient pu établir le caractère de don manuel du transfert de fonds litigieux;

et attendu que la pertinence admise par le premier juge du faisceau des présomptions mises en évidence pour établir l'intention libérale de Pierre Sasmayoux en la circonstance ne fait l'objet d'aucune discussion devant la Cour;

Attendu en conséquence que la décision déférée n'est pas utilement critiquée et doit être confirmée;

PAR CES MOTIFS : La Cour, Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions; Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, Rejette la demande formée par Anne Marie X... veuve Y...; Condamne Anne Marie X... veuve Y... aux entiers dépens de l'instance en appel, et reconnaît à la SCP SOREL DESSART SOREL, avoué

qui en a fait la demande, le droit de recouvrement direct prévu à l'article 699 du nouveau code de procédure civile. Le présent arrêt a été signé par H. MAS, président et E. KAIM-MARTIN, greffier. LE GREFFIER :

LE PRESIDENT : E. KAIM-MARTIN

H. MAS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0038
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006952341
Date de la décision : 16/10/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2006-10-16;juritext000006952341 ?
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