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24/08/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006951133

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 24 août 2006, JURITEXT000006951133


24/08/2006 ARRÊT No No RG : 04/03716 RM/MR Décision déférée du 09 Août 2004 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (04/958) COUSTEAUX COMITÉ D'ENTREPRISE DE LA CAISSE D'EPARGNE MIDI- PYRÉNÉES C/ CAISSE D'EPARGNE DE MIDI PYRÉNÉES

INFIRMATION

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS



COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale



ARRÊT DU VINGT QUATRE AO T DEUX MILLE SIX

APPELANT(S) COMITÉ D'ENTREPRISE DE LA CAISSE D'EPARGNE MIDI- PYRÉNÉES 3, rue de Carrieuroulette 81150 LAGRAVE

représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour, Me Nissa JAZOTTES, avocat au barreau de TOULOUSE substit...

24/08/2006 ARRÊT No No RG : 04/03716 RM/MR Décision déférée du 09 Août 2004 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE (04/958) COUSTEAUX COMITÉ D'ENTREPRISE DE LA CAISSE D'EPARGNE MIDI- PYRÉNÉES C/ CAISSE D'EPARGNE DE MIDI PYRÉNÉES

INFIRMATION

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale

ARRÊT DU VINGT QUATRE AO T DEUX MILLE SIX

APPELANT(S) COMITÉ D'ENTREPRISE DE LA CAISSE D'EPARGNE MIDI- PYRÉNÉES 3, rue de Carrieuroulette 81150 LAGRAVE représentée par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour, Me Nissa JAZOTTES, avocat au barreau de TOULOUSE substitué par Me Renaud FRECHIN, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(S) CAISSE D'EPARGNE DE MIDI PYRÉNÉES 42, rue du Languedoc 31000 TOULOUSE représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoués à la Cour, Me LEPLAIDEUR de la SELAFA BARTHELEMY et ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions de l'article 945.1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 janvier 2006, en audience publique, devant R. MULLER président, chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : R. MULLER, président M. TREILLES, conseiller M.P. PELLARIN, conseiller Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile - signé par R. MULLER, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE

Par assignation en date du 19 mai 2004 le Comité d'Entreprise de la Caisse d'Epargne Midi Pyrénées a saisi le Président du Tribunal de Grande Instance de Toulouse, statuant en référé, aux fins de faire constater qu'il n'avait pas été consulté par l'employeur sur l'utilisation du système de pilotage commercial pour l'évaluation individuelle des salariés, et de faire ordonner cette consultation, sur le fondement de l'article L. 432-2-1 du code du travail.

Par ordonnance du 9 août 2004 le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Toulouse a, au principal, renvoyé les parties à se pourvoir, en déboutant le Comité d'Entreprise de ses demandes et en le condamnant aux dépens d'instance.

Par déclaration enregistrée au Greffe le 12 août 2004 le Comité d'Entreprise de la Caisse d'Epargne Midi-Pyrénées a interjeté appel de cette ordonnance.

* * *

Le Comité d'Entreprise conclut à la réformation de l'ordonnance entreprise et demande à la Cour :

- d'ordonner, sous astreinte de 150 ç par jour de retard, la consultation du Comité d'Entreprise, sur l'utilisation du système de pilotage commercial pour l'évaluation individuelle et le contrôle de l'activité des salariés ;

- d'ordonner, dans l'attente de l'organisation de cette consultation, la suspension de l'utilisation des outils d'évaluation ;

- de condamner la Caisse d'Epargne Midi-Pyrénées à lui payer une indemnité de procédure de 1.000 ç ;

- subsidiairement, d'ordonner une expertise afin d'apprécier l'impact de l'outil de pilotage commercial dans le calcul de la part variable à titre individuel.

Le Comité d'Entreprise soutient tout d'abord que son appel est parfaitement recevable et que le juge des référés est parfaitement compétent pour statuer sur le respect de l'article L. 432-2-1 du code du travail.

Elle ajoute que cet article devait recevoir application dès lors que l'outil de pilotage commercial devait être utilisé pour évaluer individuellement les salaires, que la décision de l'utiliser pour une évaluation individuelle a été prise sans l'accord du comité d'entreprise, et sans même avoir recueilli son avis.

La Caisse d'Epargne Midi Pyrénées conclut tout d'abord à l'irrecevabilité de l'appel en soutenant que si par délibération du 23 mars 2004 le Comité d'Entreprise avait autorisé l'introduction d'une action en référé auprès du Tribunal de Grande Instance et si le 27 mai 2004 le Comité avait mandaté M. X..., secrétaire du Comité d'Entreprise et Mme Y... pour agir en justice aucune délibération du Comité d'Entreprise n'a autorisé quiconque à relever appel de l'ordonnance de référé litigieuse.

Elle conclut ensuite à l'incompétence du juge des référés dès lors qu'il n'existe pas de trouble manifestement illicite ou de dommage imminent qu'il faudrait faire cesser et que l'appelant n'entend pas limiter son action à des mesures conservatoires et provisoires ;

Elle ajoute que le Comité d'Entreprise n'apporte pas le moindre élément de nature à justifier que l'évaluation de la contribution individuelle s'effectue de façon différente de celle qui a été présentée au Comité et fait l'objet de consultations en novembre et décembre 2003, ou que les salariés seraient astreints à des objectifs individuels, quantifiés sur la base des outils de pilotage et sur lesquels ils seraient notés, rémunérés et éventuellement sanctionnés. Elle réclame enfin la condamnation du Comité d'Entreprise à lui verser une indemnité de procédure de 3.000 ç.

*

*

*

MOTIFS DE L'ARRÊT

I./Sur la recevabilité de l'appel.

Pour écarter l'argumentation de la Caisse d'Epargne et déclarer l'appel recevable il suffira de relever :

- que le mandat spécial donné par le Comité d'Entreprise le 23 mars 2004 à M. X... et Mme Y... pour le représenter en justice dans le cadre de la procédure de référé engagée contre la Caisse d'Epargne stipulait "M. X... et/ ou Mme Y... représenteront le Comité d'Entreprise lors de l'instance et lors de toutes les instances qui suivront éventuellement" ;

- que non seulement un mandat accordé pour agir en justice permet à son titulaire d'intenter les voies de recours afférentes à l'instance visée par la délégation, mais qu'en l'espèce le mandat du 23 mars 2004 mentionnait expressément que la délégation était donnée non seulement pour l'instance devant le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Toulouse, mais également pour les instances qui suivraient (instance d'appel, voire instance de cassation) ;

- que dès lors l'argumentation de la Caisse d'Epargne manque en fait. II. Sur la compétence du juge des référés.

L'article 809 du nouveau Code de procédure civile dispose que le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires qui s'imposent pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dès lors que le Comité d'Entreprise soutient que l'utilisation par l'employeur, sans consultation préalable du comité d'entreprise, de l'outil de pilotage commercial pour l'évaluation individuelle et le contrôle de l'activité des salariés constitue un trouble illicite, et sollicite la suspension de l'utilisation de cet outil jusqu'à

organisation de la procédure de consultation, c'est à dire une mesure conservatoire, le juge des référés apparaît compétent pour statuer sur cette requête.

III./ Sur l'existence d'un trouble manifestement illicite.

L'article L. 432-2-1 du code du travail dispose en son alinéa 3 que le comité d'entreprise est informé et consulté, préalablement à la décision de mise en cause dans l'entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés.

L'outil de gestion et de pilotage commercial, sur lequel porte le litige, a fait l'objet en 1999 et 2.000 d'une consultation du comité d'entreprise par l'employeur, en application des articles L. 431-4 et L. 431-5 du code du travail. Dans le cadre de cette consultation la direction de la Caisse d'Epargne a indiqué que cet outil ne serait pas utilisé pour contrôler l'activité des salariés et que dès lors il n'y avait pas lieu de consulter le Comité d'Entreprise sur le fondement de l'article L. 432-2 du code du travail. Par lettre du 13 juillet 2000, M. DROUIN, Président du Directoire de la Caisse d'Epargne a confirmé que l'outil "n'est en aucun cas...destiné à mesurer l'activité des collaborateurs."

Le 21 novembre 2003 le Comité d'Entreprise a été consulté, toujours sur le fondement de l'article L. 431-5, sur la mise en place d'un dispositif visant à l'instauration d'une part variable dans les traitements de 2003 à la suite d'un accord collectif national.

Parmi les documents remis aux membres du comité d'entreprise dans le cadre de cette consultation figurait une annexe intitulé "rapport d'évaluation de la performance" dans lequel il était expressément fait référence aux outils de pilotage.

Les indicateurs extraits de l'outil de pilotage, tels que mentionnés entre parenthèses sur le support d'évaluation de la performance individuelle (nombre de ventes, évolution du portefeuille, nombre et

montant des produits et services vendus) permettent une analyse et une évaluation de l'activité individuelle des commerciaux.

La part variable de rémunération visant à reconnaître et récompenser les contributions individuelles à la performance collective et les dites contributions individuelles prenant notamment en considération l'analyse et l'évaluation de l'activité et des résultats du collaborateur (selon le document interne à la Caisse d'Epargne intitulé Rémunération de la performance-exercice 2003-filière commerciale, questions réponses), il apparaît indiscutablement que l'outil de pilotage commercial est utilisé par la Caisse d'Epargne pour évaluer l'activité individuelle des salariés.

Le distinguo instauré par la Caisse d'Epargne entre la contribution individuelle du salarié et le contrôle de l'activité de celui-ci n'apparaît pas sérieux et tout au plus de nature à traduire la fermeté de sa volonté d'échapper à la consultation légale obligatoire dès lors, d'une part, que l'évaluation de l'activité individuelle est une facette du contrôle exercée par l'employeur-contrôle au demeurant autorisé dans son principe sous réserve que la consultation du comité d'entreprise ait été organisée - , d'autre part, que l'employeur s'était engagé en 2000 à ne pas utiliser l'outil de pilotage commercial pour évaluer l'activité individuelle des commerciaux et que les pièces produites démontrent la réalité du contraire.

Dès lors l'utilisation de l'outil pour un objet différent de celui pour lequel le Comité d'Entreprise avait été consulté en 2000, devait être précédée d'une consultation du Comité d'Entreprise dans les conditions fixées à l'article L. 432-2-1 du code du travail, étant observé que l'employeur ne peut échapper à son obligation en invoquant l'inutilité de la consultation, ni en alléguant que le Comité d'Entreprise était informé dans le cadre d'une consultation

sur un autre objet.

L'utilisation de l'outil de pilotage commercial sans consultation préalable du Comité d'Entreprise constituant un trouble

L'utilisation de l'outil de pilotage commercial sans consultation préalable du Comité d'Entreprise constituant un trouble manifestement illicite qu'il appartient au juge des référés de faire cesser, il convient d'infirmer l'ordonnance entreprise et d'ordonner la suspension de l'utilisation de l'outil de pilotage commercial pour apprécier l'activité individuelle des salariés ;

III Sur les dépens et les frais non répétibles.

La Caisse d'Epargne, qui succombe, doit être condamnée aux dépens d'instance et d'appel, et au payement au Comité d'Entreprise d'une indemnité de procédure de 1.000 ç.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Déclare l'appel recevable en la forme,

Infirme l'ordonnance entreprise, statuant à nouveau et y ajoutant ;

Dit et juge que l'utilisation de l'outil de pilotage commercial pour procéder à l'analyse et à l'évaluation et donc au contrôle de l'activité individuelle des salariés de la Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées constitue un trouble manifestement illicite, dès lors qu'elle n'a pas été précédée de la consultation du Comité d'Entreprise dans les conditions prévues à l'article L. 432-2-1 du code du travail ;

Ordonne, jusqu'à organisation de cette consultation, la suspension de l'utilisation de l'outil de pilotage commercial pour procéder à

l'analyse et, à l'évaluation et donc au contrôle de l'activité individuelle des salariés de la Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées ;

Condamne la Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées à payer au Comité d'Entreprise de la Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées la somme de 1.000ç par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la Caisse d'Epargne de Midi-Pyrénées aux dépens d'instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par M. MULLER, président et par Mme D. FOLTYN-NIDECKER, greffier.

LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

Dominique FOLTYN-NIDECKER

Raymond MULLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006951133
Date de la décision : 24/08/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2006-08-24;juritext000006951133 ?
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