09/05/2006 ARRÊT No204 NoRG: 04/02224 HM/EKM Décision déférée du 16 Juin 2003 - Cour d'Appel de PAU - Marie Hélène X... épouse Y... représentée par la SCP B. CHATEAU - O. PASSERA Georges Y... C/ Christiane Z... épouse A... représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE Marc A... représenté par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE Sandie Y... représentée par la SCP B. CHATEAU - O. PASSERA
Grosse délivrée le à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
1ère Chambre Section 1
ARRÊT DU NEUF MAI DEUX MILLE SIX
APPELANTS Madame Marie Hélène X... épouse Y... B... de Hillon 40700 ORSARRIEU représentée par la SCP B. CHATEAU - O. PASSERA, avoués à la Cour assistée de la SCP JUNQUA-LAMARQUE-MAYERAU-CASAMAYOU-, avocats au barreau de BAYONNE Monsieur Georges Y..., décédé INTIMES Madame Christiane Z... épouse A... Maison Dolamatcheria Rue C... 64210 BIDART représentée par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoués à la Cour assistée de Me Philippe MONROZIES, avocat au barreau de TOULOUSE Monsieur Marc A... MAISON DOLAMATCHERIA Rue C... 64310 BIDART représenté par la SCP BOYER-LESCAT-MERLE, avoués à la Cour assisté de Me Philippe MONROZIES, avocat au barreau de TOULOUSE INTERVENANTE VOLONTAIRE :
Mademoiselle Sandie Y..., en qualité d'héritière de son père M. Georges Y... 22 bis avenue de la Division Leclerc 92320
CHATILLON représentée par la SCP B. CHATEAU - O. PASSERA, avoués à la Cour assistée de Me Catherine JUNQUA LAMARQUE, avocat au barreau de BAYONNE COMPOSITION DE LA COUR Après audition du rapport, l'affaire a été débattue le 13 mars 2006 en audience publique, devant la Cour composée de : H. MAS, président C. FOURNIEL, conseiller O. COLENO, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : E. KAIM-MARTIN ARRET : - contradictoire - prononcé par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par H. MAS, président, et par E. KAIM-MARTIN, greffier de chambre.
FAITS ET PROCEDURE :
Le 1er janvier 1984 Louise D... veuve Z... a donné en location-gérance pour une durée de 3 ans un fonds de commerce de camping aux époux Y... E... contrat a été renouvelé en 1987 pour une durée de 9 années à compter du 1er janvier 1987.
Mme Z... a fait donation à sa fille Christiane épouse A... de la nue propriété de ce fonds de commerce par acte notarié du 1er août 1990. La nue propriété du terrain d'assiette était déjà dans le patrimoine de celle-ci depuis un acte de donation de 1983.
Christiane A... a contesté, en soutenant l'incapacité physique et mentale de sa mère née en1908 accueillie dans une maison de retraite et hospitalisée le 13 mars 1993, un acte sous seing privé dont les époux Y... détenaient un exemplaire portant la date du 19 février 1993 renouvelant la location gérance pour une durée de 10 ans à compter du 1er janvier 1993.
Christiane A..., soutenant que sa mère avait contesté ce document, qu'elle avait été place sous sauvegarde de justice le 29 mars 1993 au vu d'un certificat médical du 16 mars 1993 puis sous tutelle le 18 mai 1993 a, agissant à titre personnel et en qualité de tutrice de sa mère, assigné les époux Y... devant le tribunal de commerce de
Bayonne pour obtenir la nullité du contrat de location gérance renouvelé.
Le tribunal a fait droit à la demande.
Par arrêt du 30 janvier 1996, la cour d'appel de Pau a réformé cette décision et débouté les consorts A... de l'ensemble de leurs demandes. La cour de cassation, par arrêt du 13 janvier 1998, a rejeté le pourvoi formé par les époux A... après le décès de Mme D... veuve Z...
Après l'échec d'une plainte pénale pour faux, les époux A... ont saisi le tribunal de grande instance de Mont de Marsan, le 22 mai 2001, d'une nouvelle demande de nullité de l'acte du 19 février 1993 sur le fondement des articles 1315, 502 et 503 du code civil.
Ils demandaient à la juridiction : - de constater l'absence de date certaine de l'acte litigieux, - de dire nul cet acte et de condamner in solidum les époux Y... à leur payer la somme annuelle de 299.756,59 frs à titre de dommages intérêts depuis le 1er janvier 1993 ou subsidiairement depuis le 27 janvier 1996 la somme annuelle réclamée étant alors de 381.122,54 frs.
Ils soutenaient la recevabilité de leur demande distincte par son fondement de celle jugée par la cour d'appel de Pau.
Les époux Y... ont conclu à l'irrecevabilité au motif de l'autorité de la chose jugée par la cour d'appel de Pau sur la validité de l'acte litigieux et ont sollicité la condamnation des époux A... au paiement de dommages-intérêts.
Par jugement du 21 novembre 2002 le tribunal de grande instance de Mont de Marsan : - a déclaré recevables les demandes formées par les époux A... au motif qu'elles ne se heurtaient pas à l'autorité de la chose jugée par le cour d'appel de Pau, - a débouté les époux A... de leur demande fondée sur l'article 502 du code civil, - a annulé, en
application de l'article 503 du même code, le contrat de location gérance du 19 février 1993 et avant dire droit sur les dommages-intérêts a invité les parties à conclure sur les points soulevés et renvoyé l'examen de l'affaire à la mise en état.
Les époux Y... ont régulièrement fait appel de cette décision.
Par arrêt du 14 mars 2005, la cour d'appel de Toulouse, désignée pour connaître de l'affaire par décision du premier président de la cour de cassation a : - infirmé la décision déférée, - déclaré irrecevable comme prescrite et se heurtant à l'autorité de chose jugée la demande en nullité formée par les consorts A... sur le fondement de l'article 503 du code civil et comme prescrite la demande en nullité fondée sur l'existence d'un vice du consentement, - rejeté la demande en dommages-intérêts pour faute formée par les consorts A..., - rejeté les demandes reconventionnelles en dommages-intérêts formées par les consorts Y..., - condamné les consorts A... à restituer, sous réserve de compensation à faire, aux consorts Y... la somme de 78.342,63 ç en raison, d'une part, des sommes qu'ils ont perçues après cassation d'un arrêt de la cour d'appel de Pau les condamnant à payer 600.000 frs et, d'autre part, d'un arrêt de la cour d'appel de Toulouse les condamnant, sur renvoi après cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Pau à payer 60.000 ç.
Parallèlement, les consorts Y... avaient saisi le tribunal de commerce de Bayonne d'une demande tendant à la condamnation des époux A... à leur payer une somme de 182.938 ç à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi par suite de la non restitution du camping pendant les années 1999 à 2000 non concernées par la procédure qui se poursuit devant la cour d'appel de Bordeaux.
Par jugement du 22 juillet 2002 le tribunal de commerce de Bayonne s'est déclarée incompétent au profit du tribunal de grande instance.
Sur contredit formé par les consorts Y... la cour d'appel de PAU a, par arrêt du 16 juin 2003, déclaré le contredit recevable décidé d'évoquer le fond et invité les parties à constituer avoué.
L'examen de cette instance a été renvoyé à la cour d'appel de Toulouse par décision du premier président de la cour de cassation du 17 mars 2004.
Au terme de leurs dernières écritures du 6 septembre 2005, les consorts Y... demandent la condamnation des époux A... à leur verser une somme de 41.080 ç avec intérêts à compter de la demande du 20 février 2000 au titre du préjudice subi pour perte de jouissance du fonds de commerce de BIDART pour l'année 1999 jusqu'au 14 janvier 2000 et la somme de 3.000 ç par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Ils soutiennent qu'au titre des trois derniers exercices connus à la date de leurs conclusions ils ont réalisé un bénéfice moyen de 46.052 ç et que compte tenu de l'incidence fiscale leur préjudice peut être fixé pour la période considéré à la somme réclamée.
Ils ajoutent que les moyens soulevés dans la présente instance par les époux A... tirés d'une nullité de l'acte de location-gérance ne peuvent être admis en l'état de l'arrêt du 14 mars 2005 rejetant définitivement les demandes de nullité.
Les époux A... concluent au rejet et réclament reconventionnellement la condamnation des consorts Y... à leur payer une somme de 256.400,19 ç en soutenant qu'ils sont en droit d'opposer par voie d'exception aux consorts Y... la nullité de l'acte litigieux, leur action en nullité ayant été déclarée seulement irrecevable et non pas infondée sur le fondement du dol et de la violence et qu'ils ne peuvent se voir opposer le principe de l'autorité de chose jugée retenu par la cour dans son arrêt du 14 mars 2005 dans la mesure où le présent litige n'a pas le même objet que celui de l'instance ayant
abouti à l'arrêt susvisé.
Ils font valoir à cet égard que la décision de la cour d'appel de Pau, saisie sur le fondement de l'article 489 du code civil ne
Ils font valoir à cet égard que la décision de la cour d'appel de Pau, saisie sur le fondement de l'article 489 du code civil ne peut avoir d'incidence sur une action fondée sur l'existence à l'époque de la signature de l'acte des causes d'ouverture de la tutelle et que les éléments qu'ils fournissent suffisent à rapporter la preuve de cette existence dès avant l'été 1992 et de sa notoriété à l'époque de l'acte.
Ils exposent que les agissements des époux Y... pour obtenir la signature de la prolongation du contrat de location-gérance peuvent être qualifiés de dolosifs notamment en ce qui concerne l'affirmation fallacieuse de la nécessité de réaliser des travaux de mise en conformité et de l'allégement sans contrepartie des obligations du preneur, le loyer fixé étant manifestement sous évalué.
Ils ajoutent que même s'il était admis qu'à l'époque de l'acte Madame Z... était capable de comprendre le sens et la portée du contrat, il n'en reste pas moins que son était ne lui permettait pas de défendre utilement ses intérêts face à des manoeuvres.
Ils invoquent également la violence au motif que les affirmations péremptoires des consorts Y... quant à la situation du camping constituait une contrainte morale en raison des liens d'amitié unissant les parties, de l'état de santé déficient de Madame Z..., et de la présence à la négociation d'un avocat.
Les époux A... tirant les conséquences de la nullité qu'ils allèguent demandent le remboursement de toutes les indemnisations qu'ils ont dû verser au titre du refus de la délivrance de la chose louée ainsi que celui des astreintes payées, et des frais engagés, dès lors que selon eux la nullité admise justifie leur refus de délivrance qui perd tout
caractère fautif.
Ils réclament également le paiement d'une indemnité d'occupation du camping pour 2000 et 2001 de 76.224 ç.
A titre subsidiaire, pour le cas où la nullité ne serait pas admise, ils soutiennent que les consorts Y... ne justifient pas de l'impôt qu'ils ont dû acquitter en 2000, 2001 et qui doit être déduit de l'indemnité à laquelle ils pourraient prétendre et qu'en outre doivent être déduits de cette indemnité, objet de la demande principale, les investissements que les consorts Y... avaient dit devoir supporter pour obtenir la prolongation de la location-gérance et qu'ils n'ont jamais réalisés soit 45.734,71 ç.
Ils prétendent également être en droit de réclamer une indemnité d'occupation pour la période postérieure au 31 décembre 2001, date à laquelle la location-gérance a en toute hypothèse pris fin, indemnité qui doit être fixée à 46.052 ç compte tenu de la moyenne des bénéfices pour les années 2001/2002.
Ils réclament en toute hypothèse au moins cette somme.
MOTIFS DE LA DECISION : - Sur l'exception de nullité :
Attendu que celui qui est forclos pour engager une action en nullité d'un acte peut invoquer, par voie d'exception, cette nullité pour s'opposer à l'exécution de cet acte ;
Attendu toutefois que la nullité ne peut être soulevé par voie d'exception que dans la mesure où une action en nullité par voie d'action principale sur le même fondement n'a pas été engagée et rejetée ;
Attendu que les époux A... prétendent pouvoir opposer par voie d'exception à la demande de dommages-intérêts formée par les consorts Y... pour non exécution de l'acte de location-gérance la nullité de cet acte sur le fondement de l'article 503 du code civil ;
Attendu qu'ils ont déjà engagé une action principale en nullité de
l'acte sur ce fondement et que cette action a été déclarée irrecevable comme se heurtant à l'autorité de chose jugée par l'arrêt définitif de cette cour du 14 mars 2005 ;
Attendu qu'ils ne sont donc pas recevables à prétendre faire encore juger par voie d'exception la nullité de l'acte sur le fondement de l'article 503 du code civil ;
Attendu qu'ils invoquent également la nullité de l'acte pour dol ou violence, qu'il n'a pas été jugé au fond sur ce point, la cour dans son arrêt du 14 mars 2005 ayant seulement déclaré irrecevable comme prescrite l'action principale en nullité formée sur ce fondement par les époux A... ;
Attendu que l'exception de nullité de ce chef est donc recevable;
Attendu que dans l'instance ayant abouti à l'arrêt précité du 14 mars 2005, les époux A... avaient également invoqué le dol et la violence pour solliciter l'octroi de dommages-intérêts ;
Attendu que la cour dans cet arrêt a écarté cette demande de dommages-intérêts, que les époux A... reprennent les arguments alors développés et n'invoquent pas d'éléments nouveaux ; qu'il convient cependant d'examiner ces éléments ;
Attendu qu'ils soutiennent que l'acte a été passé à des conditions économiques favorables pour les consorts Y... en profitant de la situation de faiblesse qu'ils connaissaient de Madame Z... ;
Attendu qu'il n'est pas contestable, au vu des documents produits, que Madame Z... souffrait à l'époque de l'acte et depuis un certain temps d'une surdité importante ayant nécessité un appareillage qui ne lui permettait de recouvrer qu'une faible capacité auditive ;
Attendu que cet état de fait était connu des époux Y..., qu'il n'interdisait cependant pas à Madame Z... de comprendre le sens et la portée d'un acte écrit, comme le souligne le rapport dressé par
le docteur F..., spécialement désigné par le juge des tutelles pour apprécier si l'intéressée était apte, le 19 février 1993, à comprendre le sens et la portée du contrat de location-gérance consenti aux époux Y..., rapport qui ne pouvait être ignoré de Madame A... tutrice ;
Attendu qu'il n'est pas par ailleurs contesté que Madame Z... connaissait de longue date les époux Y... et particulièrement Madame Y... avec laquelle elle entretenait des relations amicales depuis l'adolescence de celle-ci ;
Attendu qu'il n'est pas dans ces conditions anormal que les époux Y... qui n'ont enfreint aucun règlement existant à la maison de retraite à l'époque litigieuse puisque le règlement allégué par les époux A... est postérieur à cette date, soient allés chercher Madame Z... à sa résidence pour la conduire au camping à l'effet de procéder à la signature du contrat de prolongation de location-gérance ;
Attendu que ce contrat en lui-même ne démontre pas un déséquilibre manifeste dès lors qu'il prévoit pour la période correspondant à celle restant à courir sur le bail précédent une augmentation de loyer similaire à ce qui serait résulté de l'application de l'ancien contrat et pour la période ultérieure une augmentation sensible, le loyer de 34.997 frs étant porté à 60.000 frs ;
Attendu certes que les époux A... soutiennent que cette augmentation est manifestement insuffisante dans la mesure où, selon eux, la redevance normale pour une location-gérance d'un camping serait de 20 % du chiffre d'affaires ;
Mais attendu qu'ils produisent eux-mêmes des extraits d'une procédure fiscale de redressement au cours de laquelle la commission départementale des impôts directs a émis un avis défavorable aux prétentions de l'agent vérificateur qui souhaitait appliquer un tel
taux en retenant que l'application d'un taux similaire à celui résultant de l'acte litigieux pouvait être justifié dans la mesure où des travaux de mise en conformité étaient à la charge du locataire-gérant ;
Attendu qu'en l'espèce il est prévu au bail renouvelé que les consorts Y... feront les travaux nécessaires que la bailleresse ne désire pas entreprendre ;
Attendu que les consorts A... prétendent à cet égard que les travaux à entreprendre étaient de peu d'importance et sans rapport avec l'avantage consenti du fait de la modération du loyer, et qu'ils n'ont pas été réalisés par les époux Y... ;
Attendu toutefois que si les consorts A... établissent que la mise en conformité des locaux handicapés pouvait être réalisée à la date du 7 septembre 1993 pour un coût inférieur à 40.000 frs, il convient d'observer que le devis produit ne concerne que l'achèvement d'un local précédemment réalisé par les époux Y..., comme le montre également un constat d'huissier du 1er septembre 1993, que certains des autres aménagements nécessaires au maintien du camping en catégorie deux étoiles ont été engagés par les époux Y... (réfection des allées) et qu'il n'est pas donné d'indication sur le coût pour le camping Dolamatcheria des autres travaux dont la nécessité ne peut être discutée ;
Attendu par ailleurs que compte tenu des procédures de nullité initiées par les consorts A..., il est certain que les époux Y... ne pouvaient se lancer dans la réalisation d'améliorations envisagées dans le cadre d'une location-gérance de longue durée ;
Attendu que les époux A... ne rapportent pas la preuve qui leur incombe de l'existence de manoeuvres dolosives ou de faits de contrainte morale ayant conduit Madame Z... à signer l'acte litigieux de prolongation de la location-gérance ;
Attendu que l'exception de nullité dudit acte qu'ils soulèvent pour s'opposer à la demande de dommages-intérêts formée par les consorts Y... en raison de leur refus de les mettre en possession du camping ne peut donc être admise ; - Sur les dommages-intérêts :
Attendu qu'il est admis que les époux A... n'ont remis définitivement les clefs du camping aux consorts Y... à la suite des différentes décisions judiciaires ayant reconnu les droits de ceux-ci que le 11 janvier 2000, commettant ainsi une faute incontestable ;
Attendu que la présente instance porte seulement sur la période 1999/2000 étant observé qu'il résulte des documents produits que le camping ne fonctionnait que durant la période estivale et que le dommage invoqué est donc circonscrit à la perte des bénéfices qui auraient pu être réalisés durant l'été 1999 et à l'impossibilité de réaliser durant les périodes de fermeture des travaux d'entretien ou d'amélioration qui auraient été nécessaires ou utiles et qui n'auraient pas été faits par les occupants ;
Attendu que les consorts Y... sollicitent au titre de leur préjudice une somme de 41.080 ç en se basant sur les résultats d'exploitation constatés sur l'exercice 2000/2001 et sur ceux avancés par les époux A... qui réclament au titre des années 2000 et 2001 une somme de 76.224 ç soit 38.112 ç par année, en tenant compte de l'incidence fiscale ;
Attendu que les époux A... réclament à titre reconventionnel pour l'occupation qu'ils disent irrégulière des consorts Y... pour l'année 2002 une indemnité de 46.052 ç ;
Attendu qu'il faut cependant considérer que les époux Y... n'ont pas durant cette période assumé la gestion du camping et qu'ils n'ont donc pas engagé leur activité personnelle ;
Attendu qu'ils ne fournissent pas d'éléments sur l'activité qu'ils ont déployée durant cette période et sur les revenus qu'ils ont pu en
retirer ; qu'il est cependant certain que compte tenu de la période limitée d'ouverture du camping, la gestion peut être assurée au moins en partie pendant une période de congés annuels ;
Attendu par ailleurs que les époux Y... ne produisent pas les avis d'imposition sur le revenu qui auraient permis d'évaluer plus précisément l'incidence fiscale que selon l'avis de l'expert comptable BONNASSERRE mandaté par les époux A... la contrepartie fiscale d'après les éléments fournis par l'expert comptable des consorts Y... est de 18,78 % ce qui correspond au barème produit par ces derniers ;
Attendu qu'en prenant pour base le revenu moyen déclaré sur les années 2000 et 2001 (47.829 + 44.274) = 46.051,50 ç et en tenant
2 compte de l'incidence de l'impôt et de l'absence d'engagement personnel des consorts Y... pendant la période considérée, le préjudice subi du fait de l'impossibilité d'exploiter le camping durant la période 1999 janvier 2000 doit être fixé à 33.403 ç avec intérêts à compter de la demande du 20 février 2002 ;
Attendu que les époux A... ne peuvent prétendre déduire de cette somme les investissements que les consorts Y... auraient dû, selon eux, réaliser en vertu de l'acte litigieux dès lors qu'ils n'ont pas été mis en possession paisible de l'objet du contrat ; - Sur la demande reconventionnelle des époux A... :
Attendu que l'exception de nullité tant rejetée, la demande reconventionnelle en paiement d'une somme de 256.400,19 ç au titre de remboursements des sommes versées est infondée ; que seule mérite d'être examinée la demande relative au paiement d'une somme de 46.052
ç outre intérêts relative au refus des époux Y... de restituer le camping au début de l'année 2002 ;
Attendu que les époux A... soutiennent sur ce point qu'en application de l'article 595 du code civil le bail conclu par l'usufruitier est nécessairement limité à 9 années suivant l'établissement de l'acte en cas de décès de l'usufruitier et qu'en conséquence le camping aurait dû être restitué le 31 décembre 2001 dans la mesure où la prolongation consentie par Madame Z... prenait effet au mois de janvier 1993 ;
Attendu que les consorts Y... ne concluent pas sur ce point ;
Attendu que c'est à juste titre que les époux A... invoquent l'article 595 du code civil qui permet à l'héritier devenu propriétaire à la suite du décès de l'usufruitier de donner congé pour le terme de la période de 9 ans lorsque le bail consenti par l'usufruitier seul l'a été pour une période supérieure à 9 années ;
Attendu que la location-gérance d'un fonds de commerce entre dans les prévisions de l'article précité, qu'en l'espèce la location-gérance a été renouvelée pour une période de 10 années courant à compter du 1er janvier 1993 ; que les époux A... pouvaient donc demander la restitution du camping au 31 décembre 2001 ;
Attendu que s'ils n'ont pas délivré congé antérieurement à cette date, il convient d'observer que l'acte de location ne prévoyait aucune modalité précise à cet effet ; que les époux A... ont clairement manifesté leur intention de se prévaloir de l'article 595 du code civil en sollicitant la restitution du fonds par sommation délivrée à Monsieur Y... le 14 janvier 2002, que les époux Y... n'ont remis le fonds qu'à la fin de l'année 2002 ; que les époux A... sont donc bien fondés en leur demande de dommages-intérêts résultant de la privation de jouissance du camping pour la saison estivale 2002 ;
Attendu que le préjudice subi à ce titre est équivalent à celui subi par les consorts Y... au titre de l'année 1999, légèrement augmenté pour tenir compte de l'évolution des prix ; que la somme de 34.600 ç sera allouée à ce titre aux époux A... avec intérêts à compter du 1er octobre 2002 date à laquelle ils auraient pu disposer des revenus de la saison estivale ;
Attendu qu'en l'état de la succombance respective des parties, il n'apparaît pas équitable de faire application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première instance et d'appel ;
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
Vu l'arrêt de la cour d'appel de Pau du 16 juin 2003 ordonnant l'évocation ;
Rejette les exceptions de nullité formées par les époux A... ;
Condamne les époux A... à payer aux consorts Y... en réparation de la dépossession du fonds de commerce pour la période du 1er janvier 1999 au 11 janvier 2000, la somme de 33.403 ç (trente trois mille quatre cents trois euros) avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2002 à titre de dommages-intérêts ;
Condamne les consorts Y... à payer aux époux A... à titre de dommages-intérêts la somme de 34.600 ç (trente quatre mille six cents euros) avec les intérêts au taux légal depuis le 1er octobre 2002 en réparation du préjudice subi du fait de l'absence de remise du fonds après sommation du 14 janvier 2002 ;
Ordonne la compensation entre ces condamnations ;
Rejette les autres demandes reconventionnelles des époux A...;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Dit que chaque partie conservera la charge de ses dépens de première
instance et d'appel. Le présent arrêt a été signé par H. MAS, président et E. KAIM-MARTIN, greffier. LE GREFFIER :
LE PRESIDENT : E. KAIM-MARTIN
H. MAS