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21/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950527

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 21 avril 2006, JURITEXT000006950527


21/04/2006 ARRÊT No No RG : 05/02742 MT/HH Décision déférée du 24 Mars 2005 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE - 04/400 Bernard VINCENT Jacques X... C/ SAS LDB DIFFUSION

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale



ARRÊT DU VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE SIX



APPELANT(S) Monsieur Jacques X... 11 allée du Périgord 31770 COLOMIERS comparant en personne assisté de Me Michel MARIEZ, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(S)

S

AS LDB DIFFUSION 53-55 boulevard Paul Langevin 38600 FONTAINE représentée par la SELARL PETREL ET ASSOCIES, avocat au barre...

21/04/2006 ARRÊT No No RG : 05/02742 MT/HH Décision déférée du 24 Mars 2005 - Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE - 04/400 Bernard VINCENT Jacques X... C/ SAS LDB DIFFUSION

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 2 - Chambre sociale

ARRÊT DU VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE SIX

APPELANT(S) Monsieur Jacques X... 11 allée du Périgord 31770 COLOMIERS comparant en personne assisté de Me Michel MARIEZ, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(S)

SAS LDB DIFFUSION 53-55 boulevard Paul Langevin 38600 FONTAINE représentée par la SELARL PETREL ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 09 Mars 2006, en audience publique, devant la Cour composée de G. DARDE, président

M. TREILLES, conseiller M.P. PELLARIN, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : Y... FOLTYN-NIDECKER ARRET : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile - signé par G. DARDE, président, et par Y... FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.

LES FAITS ET LA PROCÉDURE

Suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 13 décembre 1982, Jacques X... a été embauché en qualité de VRP exclusif par les Etablissements SYLVAIN et Compagnie. Le 1er janvier 1996, ce contrat a été transféré à la Société LDB DIFFUSION appartenant au groupe VF LINGERIE qui commercialise des sous-vêtements destinés aux femmes.

Par une lettre recommandée avec accusé de réception du 9 avril 2003, LDB DIFFUSION a adressé à M. X... une proposition visant à la modification de son contrat qu'il a refusée par courrier du 6 mai 2003.

Le 19 mai 2003, la société a proposé par courrier 7 postes de reclassement au salarié qui les a refusés par lettre du 21 mai 2003. Le 13 juin 2003, invoquant un motif d'ordre économique, l'employeur a notifié à M. X... son licenciement.

Le 25 février 2004, le salarié a saisi le conseil de prud'hommes de Toulouse afin de contester le motif de son congédiement et de

solliciter le versement de dommages-intérêts à titre de réparation.

Par un jugement du 24 mars 2005, la juridiction saisie a considéré le licenciement justifié par une cause économique réelle et sérieuse et a rejeté les demandes du salarié ainsi que la demande reconventionnelle présentée par l'employeur.

Suivant une lettre recommandée du 9 mai 2005, M. X... a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 22 avril 2005. LES MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. Jacques X... prétend, à titre principal, que l'employeur suite à sa proposition de modification du contrat de travail n'a pas respecté le délai légal de réflexion. Dès lors, il considère que cette inobservation prive son licenciement de cause réelle et sérieuse.

A titre subsidiaire, sur le fond il soutient que les difficultés économiques de la Société LDB DIFFUSION sont entièrement imputables à l'employeur qui aurait commis des erreurs en matière d'approvisionnement. Il fait valoir, par ailleurs, que la situation financière du secteur d'activité auquel appartient la Société LDB DIFFUSION n'était pas dégradée au moment de son licenciement tant au niveau national qu'international.

Il fait valoir que la volonté de l'employeur de privilégier le niveau de rentabilité de l'entreprise au détriment de la stabilité de l'emploi ne saurait justifier un licenciement économique. Il ajoute que les produits de lingerie relèvent du même secteur d'activité que l'ensemble des sociétés du groupe VF Corporation qui est le secteur d'activité de l'habillement.

L'appelant indique, par ailleurs, que les propositions de reclassement qui lui ont été faites n'étaient pas loyales dans la mesure où elles entraînaient des rémunérations dérisoires et signifiaient un éloignement géographique important ainsi qu'un changement de fonction sans aucune formation préalable. Il souligne

aussi l'absence de proposition de reclassement au niveau du groupe auquel appartient la société.

M. X... demande donc à la cour la réformation du jugement déféré, de considérer que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et de condamner la Société LDB DIFFUSION à lui verser les sommes suivantes :

- 90.000 ç à titre de dommages-intérêts

- 2.500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

La SAS LDB DIFFUSION réfute l'argument du salarié selon lequel les difficultés économiques de l'entreprise seraient imputables aux fautes intentionnelles commises par la direction. Elle fait valoir les contraintes et impératifs extérieurs qui expliquent les retards de transport, de fabrication et de livraisons visés par l'appelant.

Elle soutient, par ailleurs, que les difficultés économiques et la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise doivent être appréciées dans le seul secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise et non dans l'ensemble du groupe. Elle précise que le secteur de la lingerie féminine ne peut être confondu avec le secteur de l'habillement. Le secteur de la lingerie connaissant de graves difficultés économiques, sa réorganisation aux yeux de l'intimée était justifiée pour sauvegarder sa compétitivité. La société intimée prétend, par ailleurs, avoir satisfait de manière loyale à son obligation de tentative de reclassement en proposant à M. X... sept postes dans le même secteur d'activité que celui au sein duquel il intervenait. Elle souligne qu'aucune disposition légale n'interdit de proposer des postes impliquant une modification du contrat de travail du salarié.

En conséquence, la Société LDB DIFFUSION sollicite le rejet des

prétentions du salarié, la confirmation du jugement déféré et la condamnation de l'appelant à lui verser la somme de 2.500 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile. LES MOTIFS

Sur le non respect du délai légal de réflexion

Le délai d'un mois prévu par l'article L 321-1-2 du code du travail constitue une période de réflexion destinée à permettre au salarié de prendre partie sur la proposition de modification en mesurant les conséquences de son choix.

Par une lettre recommandée avec accusé de réception du 9 avril 2003, la Société LDB DIFFUSION adressait à M. X... une proposition de modification de son contrat de travail ainsi que deux exemplaires signés de l'avenant à ce contrat reprenant les dites modifications.

Par un courrier du 6 mai 2003, M. X... refusait cette proposition. Dans une lettre du 13 mai 2003, l'employeur précisait au salarié qu'en cas d'acceptation la baisse subséquente de rémunération serait compensée par le versement d'une indemnité.

Le salarié n'ayant pas rétracté son refus, le 19 mai 2003, la société lui proposait sept postes de reclassement afin d'éviter son licenciement.

Il résulte de la chronologie qui précède que si le salarié a répondu peu avant l'expiration du délai légal de un mois, l'employeur lui a permis un temps de réflexion supplémentaire avant de tirer les conséquences de son refus puisqu'il a maintenu sa proposition par lettre du 13 mai, soit plus d'un mois après la première offre.

En conséquence, la procédure doit être considéré comme régulière.

Sur le licenciement

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 juin 2003, la Société LDB DIFFUSION a notifié à M. X... son licenciement pour cause économique en invoquant les motifs suivants :

"Comme nous l'avons indiqué par courrier du 09 avril 2003, "l'environnement économique et concurrentiel dans lequel évolue l'activité "commerciale de la société LDB DIFFUSION, et la fragilité de la société et "du groupe auquel elle appartient, ne permettent pas de maintenir l"'organisation commerciale "terrain" actuelle.

"En effet, le chiffre d'affaires de la société, que cela soit au niveau "national ou export, connaît une nouvelle dégradation due à la diminution du "nombre des clients traditionnels sur le marché en raison notamment de la "concurrence des chaînes de lingerie. Cette baisse du chiffre d'affaires "affecte l'ensemble des marques de la société et ce depuis trois années.

"La baisse globale du chiffre d'affaires France accentue les difficultés "financières et économiques de la société en ne lui permettant pas de "dégager un résultat net positif, ce qui pourrait mettre en cause de manière "plus grave sa compétitivité en terme de marques.ues.

"Dans ces conditions, outre la mise en place d'actions internes, une "réorganisation du réseau commercial "terrain" a été décidée, consistant "notamment à fusionner les deux réseaux de prospection."

L'employeur a donc visé à la fois les difficultés économiques de la Société LDB DIFFUSION et la fragilité du groupe auquel elle appartient.

Il résulte des pièces produites par l'employeur que la Société LDB DIFFUSION, intervenant dans le domaine des activité de vente de lingerie féminine du groupe VF Corporation, connaissait à la fin de l'année 2002 des difficultés économiques et financières ; c'est ainsi que la Société LDB DIFFUSION présentait un déficit de 1.092.924 ç et la Société VF lingerie France enregistrait une perte de 4.301.684 ç. De surcroît, les chiffres d'affaires afférents aux ventes des marques

dont la Société LDB DIFFUSION assurait la commercialisation étaient tous en baisse à la fin de l'année 2002.

Si les difficultés économiques de cette dernière société sont avérées, l'intimée ne produit aucun élément permettant de connaître la situation économique du groupe VF Corporation auquel elle appartient dont l'ensemble des activités relèvent du secteur de l'habillement.

Or lorsqu'une entreprise appartient à un groupe, les licenciements économiques ne peuvent être justifiés par une mesure de réorganisation qu'à la condition que celle-ci soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité du groupe dont relève l'entreprise. En tout état de cause, la société intimée est défaillante dans l'administration de la preuve qui lui incombe. En conséquence, le licenciement de M. X... doit être considéré comme dénué de cause économique réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera donc infirmé.

De manière surabondante, il convient de relever que la Société LDB DIFFUSION n'a pas étendu ses recherches visant au reclassement du salarié à l'ensemble des entreprises du groupe VF Corporation, notamment auprès des sociétés implantées à l'étranger.

M. X..., âgé de 55 ans au jour de son licenciement, avait une ancienneté légèrement inférieure à 18 ans au sein de la société où il percevait un salaire moyen mensuel brut de l'ordre de 3.750 ç. Compte tenu du préjudice résultant pour lui de la perte injustifiée de son travail, il convient de condamner l'employeur à lui verser la somme de 80.000 ç à titre de dommages-intérêts.

En application des dispositions de l'article L 122-14-4 2ème alinéa du code du travail, l'employeur devra rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées au salarié licencié dans la limite de six mois de versement.

La Société LDB DIFFUSION qui succombe doit payer les dépens ; elle ne peut de ce fait bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Aucune considération liée à l'équité ne permet d'exclure M. X... du bénéfice des dispositions susvisées, dès lors la société intimée devra lui verser la somme de 2.500 ç de ce chef. PAR CES MOTIFS

La cour

Déclare régulier et recevable en la forme l'appel interjeté par M. Jacques X... à l'encontre du jugement du conseil de prud'hommes de Toulouse du 24 mars 2005.

Au fond,

Infirme le jugement déféré.

Et statuant à nouveau,

Dit sans cause économique réelle et sérieuse le licenciement de M. Jacques X....

En conséquence,

Condamne la Société LDB DIFFUSION à verser à M. Jacques X... les sommes suivantes :

- 80.000 ç à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant du licenciement injustifié,

- 2.500 ç en application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Dit que la Société LDB DIFFUSION remboursera à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées au salarié licencié dans la limite de 6 mois de versement.

Dit que la Société LDB DIFFUSION paiera les dépens de première instance et d'appel.

Le présent arrêt a été signé par M. G. DARDE, président et par Mme Y...

FOLTYN-NIDECKER, greffier.

Le greffier

Le président

Dominique FOLTYN-NIDECKER

Gilbert DARDE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950527
Date de la décision : 21/04/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2006-04-21;juritext000006950527 ?
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