02/02/2006ARRÊT NoNoRG: 04/02621Décision déférée du 22 Avril 2004 - Tribunal de Commerce de TOULOUSE - 2000/934MERIMEESA CREDIT LYONNAIS représentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOTC/Alain X... représenté par la SCP SOREL-DESSART-SORELréformationGrosse délivréeleà
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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COUR D'APPEL DE TOULOUSE
2ème Chambre Section 1
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ARRÊT DU DEUX FEVRIER DEUX MILLE SIX
***APPELANT(E/S)SA CREDIT LYONNAIS18, rue de la République69000 LYONreprésentée par la SCP NIDECKER PRIEU-PHILIPPOT, avoués à la Cour assistée de Me Olivier THEVENOT, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(E/S)Monsieur Alain X... Triasis - ... 31140 LAUNAGUET représenté par la SCP SOREL-DESSART-SOREL, avoués à la Cour assisté de Me Félix RIQUELME, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 08 Décembre 2005 en audience publique, devant la Cour composée de :J.P. SELMES, présidentV. VERGNE, conseiller D. GRIMAUD, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : A. THOMAS MINISTERE PUBLIC :
Auquel l'affaire a été régulièrement communiquée. ARRET : - contradictoire- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties- signé par J.P. SELMES, président, et par A. THOMAS, greffier de chambre .
A la suite d'un arrêt de la cour de céans du 24 mars 2005, auquel il convient de se référer pour l'exposé de la procédure antérieure, ayant ordonné la réouverture des débats pour recueillir les explications des parties sur l'éventuelle tardiveté de l'incident de péremption d'instance, le CREDIT LYONNAIS a déposé des conclusions récapitulatives le 13 juin 2005 et Alain X... le 21 juin 2005. Par arrêt du 27 octobre 2005, la cour de céans a ordonné la communication du dossier au ministère public et la réouverture des débats à l'audience du 8 décembre 2005. La procédure a été communiquée le 3 novembre 2005 à M. le Procureur Général qui l'a visée sans déposer de conclusions ; le CREDIT LYONNAIS et Alain X... n'ont pas conclu à nouveau.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 novembre 2005.SUR QUOI
Attendu
que par jugement du 18 novembre 1998, le tribunal de commerce de Toulouse a :- débouté Alain X... de sa demande de sursis à statuer et de sa demande concernant la responsabilité du CREDIT LYONNAIS,- condamné Alain X... à payer au CREDIT LYONNAIS, en sa qualité de caution de la société W2A dont il était le gérant, la somme de 7.246.738, 18 francs et celle de 5.000 francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
que suivant assignation du 11 février 2000, communiquée au Procureur de la République de Toulouse par lettre recommandée du 6 août 2001, Alain X... a formé un recours en révision contre ce jugement en invoquant la fraude du CREDIT LYONNAIS qui aurait géré en fait la société W2A, lui avait accordé son soutien abusif et avait fait prendre à son gérant des engagements disproportionnés ;
que par jugement du 12 novembre 2001, le tribunal de commerce de Toulouse a déclaré recevable ce recours en révision et a ordonné une expertise pour "évaluer la part de responsabilité du CREDIT LYONNAIS" tant dans la gestion de la société W2A que sur le caractère disproportionné de l'engagement d'Alain X... , ce jugement étant assorti de l'exécution provisoire ;
que le CREDIT LYONNAIS a relevé appel de ce jugement par déclaration du 18 janvier 2002, l'affaire étant radiée du rôle de la cour sur le fondement de l'article 915 du nouveau code de procédure civile par ordonnance du 4 juillet 2002 ;
Que par jugement du 22 avril 2004, rendu après expertise, le tribunal de commerce de Toulouse, déclarant recevable et bien fondé le recours en révision d'Alain X... , a débouté le CREDIT LYONNAIS de sa demande de condamnation à ce titre et a condamné le CREDIT LYONNAIS à payer à Alain X... 7.500 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
que suivant déclaration du 26 mai 2004 le CREDIT LYONNAIS a relevé appel du jugement rendu le 22 avril 2004 ;
que suivant déclaration du 28 mai 2004, le CREDIT LYONNAIS a relevé appel des jugements rendus les 12 novembre 2001 et 22 avril 2004, les deux dossiers étant joints par ordonnance du 16 décembre 2004 ;
Attendu sur la péremption, qu'Alain X... a soulevé l'irrecevabilité de l'appel interjeté par le CREDIT LYONNAIS à l'encontre du jugement du 12 novembre 2001, appel interjeté d'abord par déclaration du 18 janvier 2002 puis par déclaration du 28 mai 2004, motif pris de la péremption d'instance d'appel ;
Que le CREDIT LYONNAIS pour contester cette péremption fait valoir d'une part que le jugement du 12 novembre 2001 ne lui a jamais été
notifié et que le délai de péremption n'a pas couru et d'autre part que le jugement du 12 novembre 2001 renfermant des dispositions définitives et des dispositions avant dire droit, l'instance n'est pas susceptible de péremption au moins quant aux dispositions définitives, ajoutant que l'exception de péremption a été tardivement soulevée ;
Attendu que si la péremption ne peut être relevée d'office par le juge, celui-ci doit relever d'office l'irrecevabilité de la péremption tardivement soulevée dès lors que l'article 388 du nouveau code de procédure civile édicte : "la péremption doit à peine d'irrecevabilité être demandée ou opposée avant tout autre moyen" ;
Qu'en l'espèce après avoir conclu le 2 décembre 2004 sans invoquer la péremption, Alain X... a déposé des conclusions le 20 janvier 2005 soulevant "in limine litis" la péremption de l'instance d'appel par la déclaration d'appel du 18 janvier 2002 ;
Que malgré cette chronologie procédurale, la péremption n'a pas été soulevée tardivement dès lors que les conclusions du 2 décembre 2004 avaient été déposées par Alain X... dans la procédure concernant l'appel interjeté le 26 mai 2004 par le CREDIT LYONNAIS à l'encontre du jugement du 22 avril 2004 dans laquelle aucune péremption n'était encourue, tandis que les conclusions du 20 janvier 2005 ont été déposées dans la procédure d'appel ayant fait suite à la déclaration d'appel formée le 28 mai 2004 par le CREDIT LYONNAIS à l'encontre des jugements du 12 novembre 2001 et du 22 avril 2004, procédure d'appel dans laquelle Alain X... n'avait pas constitué avoué et qui n'a été jointe à la précédente que par ordonnance du 16 décembre 2004 ;
Que ce n'est qu'à compter de cette dernière date qu'Alain X... pouvait invoquer la péremption affectant l'instance d'appel visant le jugement du 12 novembre 2001, ce qu'il a fait dans les premières conclusions déposées le 20 janvier 2005, sur l'appel du jugement du
12 novembre 2001;
Attendu sur la péremption que le CREDIT LYONNAIS a relevé appel du jugement du 12 novembre 2001 par déclaration du 18 janvier 2002, l'inscription au rôle ayant eu lieu le 1er mars 2002, mais n'a pas déposé de conclusions dans les quatre mois de son appel, ce qui a entraîné la radiation de l'affaire par ordonnance du 4 juillet 2002 ;
Qu'aucune des parties n'a accompli, dans cette procédure, de diligence pendant deux ans, le CREDIT LYONNAIS ayant formé une deuxième déclaration d'appel à l'encontre du même jugement du 12 novembre 2001, le 28 mai 2004, seulement soit plus de deux ans après la première déclaration d'appel du 18 janvier 2002 et plus de deux ans après l'inscription au rôle du 1er mars 2002 ;
Que cette instance d'appel a donc été atteinte par la péremption avant la deuxième déclaration d'appel, peu important le fait que le jugement n'ait pas été notifié dès lors que l'article 390 du nouveau code de procédure civile édicte "la péremption en cause d'appel ou d'opposition confère au jugement la force de la chose jugée même s'il n'a pas été notifié", et que le jugement non notifié a été déféré à la cour ;
Que pareillement la péremption ne sautait être écartée au motif que le jugement du 12 novembre 2001 contenait des dispositions définitives et des dispositions avant dire droit dans la mesure où ce jugement ayant été frappé d'appel, ce que rendaient possible les dispositions de l'article 544 du nouveau code de procédure civile, il appartenait à la société appelante de faire toute diligence utile au soutien de son appel dans le délai visé à l'article 386 su nouveau code de procédure civile ;
Que la péremption étant acquise, le jugement du 12 novembre 2001 a acquis force de chose jugée, ce qui interdit de remettre en cause
devant la cour les points tranchés par cette décision ;
Attendu que dans le dispositif du jugement du 12 novembre 2001 le tribunal de commerce a :- "déclaré recevable l'action en révision du jugement du 18 novembre 1998 sur la base de l'article 596 du nouveau code de procédure civile"- "dit que les conditions d'ouverture de cette révision sont remplies en application des dispositions de l'article 595 alinéa 1er du nouveau code de procédure civile" ;- ordonné une expertise pour évaluer la part de responsabilité du CREDIT LYONNAIS et le patrimoine d'Alain X... ;
Qu'il est donc acquis que le recours en révision a été introduit dans les deux mois du jour où Alain X... a eu connaissance de la cause de révision invoquée et que le jugement du 18 novembre 1998 a été surpris par la fraude du CREDIT LYONNAIS - déjà relevée, indiquent les premiers juges, dans un jugement rendu le 13 décembre 1999 sur un dossier où le CREDIT LYONNAIS n'était pas partie ... - ;
Que cependant les premiers juges ont tout à la fois retenu, dans un dispositif ayant l'autorité de la chose jugée, que les conditions d'ouverture du recours en révision étaient remplies en application de l'article 595 1o du nouveau code de procédure civile qui vise la fraude - laquelle est réputée avoir été déterminante dans la décision prise par le jugement du 18 novembre 1998 -, mais ont ordonné une expertise pour "évaluer la part de responsabilité du CREDIT LYONNAIS", ce qui démontre qu'en l'état des pièces alors versées aux débats la fraude du CREDIT LYONNAIS n'était pas considérée comme totalement déterminante ;
Qu'enfin le libellé du dispositif du jugement du 22 avril 2004 qui de manière surabondante a déclaré recevable le recours en révision ne porte pas atteinte à l'autorité de la chose jugée du jugement du 12 novembre 2001 qui dans son dispositif a déclaré recevable l'action en révision et dit que les conditions d'ouverture de cette révision
étaient remplies ;
Attendu au fond que la SARL W2A, dont le gérant était depuis 1988 Alain X... architecte, a été chargée à compter de 1991 des études de réalisation d'un vaste lotissement à Launaguet (31) et a reçu, en dation en paiement de ses honoraires un terrain sur lequel elle a entrepris la construction d'un immeuble à usage professionnel et commercial qu'elle devait revendre par lots ;
Que les travaux qui avaient débuté en juillet 1992 grâce au financement de 2.000.000 frs consenti par le CREDIT LYONNAIS ont été arrêtés peu après, à la suite de l'annulation en septembre 1992 du plan d'occupation des sols de la commune et de l'arrêté de lotir ;
Qu'un nouvel arrêté de lotir ayant été délivré en janvier 1993, les travaux ont repris sans arriver à leur terme eu égard aux problèmes de trésorerie rencontrés par la SARL W2A qui avait dû notamment rembourser des réservations effectuées dans le cadre de ventes en l'état futur d'achèvement ;
Que le surplus du lotissement n'ayant pas été réalisé et plusieurs lots de l'immeuble de la société W2A n'ayant pas été vendus, le CREDIT LYONNAIS et Alain X... ont chargé M. Y... , ancien promoteur immobilier à Toulouse, de trouver une solution ;
Qu'ainsi M. Y... , après consultation des artisans créanciers, a proposé la mise en place d'un prêt de restructuration de 6.200.000 frs sur dix-huit ans, avec un différé d'amortissement d'un an, permettant de régler les fournisseurs impayés, de solder le crédit à court terme et de rembourser le CREDIT LYONNAIS par le produit de la location des lots invendus, le différé d'un an étant destiné à trouver des locataires ;
Que ce plan ayant été accepté par les parties, suivant protocole du 3
août 1993, le CREDIT LYONNAIS a consenti un prêt de 6.200.000 frs sur dix-huit ans outre différé d'un an à la SARL W2A par acte authentique du 2 août 1993 garanti par une hypothèque sur les biens immobiliers de la société emprunteuse, une délégation de loyers et par la caution solidaire d'Alain X... à hauteur de 6.200.000 frs, M. Y... étant chargé de contrôler l'affectation de ce crédit et de procéder aux règlements des créanciers par chèques de banque ;
Que seulement cinq lots sur neuf ayant été loués, la société W2A a connu de nouveaux problèmes de trésorerie, ne pouvant pas faire face à la charge du remboursement de l'emprunt, surtout à compter de 1995, le CREDIT LYONNAIS lui ayant consenti par acte des 16 et 20 mars 1995 un prêt de 1.200.000 frs sur cinq ans garanti par une hypothèque et non par la caution d'Alain X... ;
Que Mme Z... désignée comme mandataire ad'hoc de la société W2A par le président du tribunal de commerce le 25 mars 1996 a estimé que la pérennité de la société ne pouvait être assurée que grâce à deux facteurs : le remplissage du programme en moins d'un an, et un deuxième réaménagement des concours bancaires ;
Que la société W2A a été placée en redressement judiciaire le 21 juin 1996 puis en liquidation judiciaire le 24 mars 1997 ;
Qu'assigné en paiement en qualité de caution, Alain X... a été condamné par le jugement du 18 novembre 1998, dont la révision est demandée, à payer au CREDIT LYONNAIS la somme de 7.246.738, 18 frs arrêtée au 21 juin 1996 outre les intérêts au taux contractuel sous déduction des sommes provenant de la vente des biens hypothéqués, Alain X... étant débouté de ses demandes tendant à voir prononcer la nullité de son engagement de caution et à voir retenir la responsabilité du CREDIT LYONNAIS ;
Attendu qu'en exécution du jugement du 12 novembre 2001 ayant ordonné une expertise pour "évaluer la part de responsabilité du CREDIT LYONNAIS" l'expert commis a indiqué que :- M. Y... disposait des compétences techniques et relationnelles permettant de mener à bien sa mission- M. Y... semblait ne pas avoir eu de relations privilégiées avec le CREDIT LYONNAIS, M. Y... déclarant avoir l'habitude de travailler avec tous les établissements financiers en raison de sa notoriété sur la place toulousaine- la nomination de M. Y... s'était faite conjointement par M. X... et le CREDIT LYONNAIS, M. X... indiquant que M. Y... lui avait été recommandé par le CREDIT LYONNAIS- M. X... avait fait l'objet d'une interdiction bancaire à compter du 6 avril 1995 - à la suite du rejet d'un chèque émis le 23 décembre 1994 -, les incidents signalés par M. X... à compter de 1987 ayant été systématiquement régularisés ;- les bons de commande et protocoles conclus avec les fournisseurs étaient signés par M. X... , le nom de M. Y... n'apparaissant pas- le recouvrement était assuré par M. X... et non par M. Y... - pour la mise en paiement des factures fournisseurs, M. X... transmettait ces factures à M. Y... qui après vérification de la conformité du document demandait à la banque d'émettre le chèque correspondant, la signature étant apposée par la banque elle-même et l'expert précisant que cette procédure n'avait été suivie que pendant l'intervention de M. Y... relative à l'achèvement des travaux soit d'août à décembre 1993- le crédit de 6.200.000 frs avait été affecté au remboursement des crédits consentis en 1991 et 1992 (2.000.000 frs) et du compte-courant de la SARL W2A (1.313.439 frs),le surplus (2.886.561 frs) étant destiné, avec une somme supérieure à 700.000 frs au titre d'un remboursement de TVA, au règlement des créanciers dont la créance globale avait été estimée à 3.584.824 frs- la réalisation aux enchères publiques du patrimoine immobilier de la société W2A avait
été effectuée pour 1.545.976 frs, un paiement provisionnel de 1.000.000 frs ayant été adressé par le liquidateur au CREDIT LYONNAIS- lors de la signature de l'engagement de caution M. X... était propriétaire d'un appartement T2 acquis en décembre 1985 POUR 220.000 frs et vendu aux enchères pour 215.000 frs le 18 décembre 1995, d'un bateau à moteur vendu à sa compagne en février 1995 pour 350.000 frs, et d'un cabinet d'architecte ayant généré en 1992 et 1993 un résultat positif de 259.000 frs et 464.000 frs bien que le compte de l'exploitant soit débiteur de plus de 4.500.000 frs, ce cabinet d'architecte étant le seul bien encore détenu par M. X... ; - en novembre 1994 M. Y... avait demandé au CREDIT LYONNAIS le règlement des honoraires d'un avocat à qui il avait été demandé au dernier moment de s'occuper de M. X... assigné par l'URSSAF devant le tribunal de commerce, ce qui avait permis d'éviter sa mise en liquidation judiciaire - dans un rapport du 10 octobre 1995 M. A... , expert-comptable de M. X... , évoque la situation compromise de la société W2A en ajoutant "le dépôt de bilan ne doit pas tarder"- le rapport de Mme Z... révèle "une certaine importance des honoraires (de M. X... en qualité d'architecte) par rapport à la construction qui ne représentait pas de difficultés techniques particulières. La valeur commerciale potentielle est inférieure à la valeur comptable de l'immeuble" - par une lettre recommandée du 27 août 1993, M. Y... a prévenu M. X... de ce que le crédit long terme accordé par les CREDIT LYONNAIS ne saurait financer des charges non directement liées à l'opération elle-même ;
Attendu qu'en l'état des investigations de l'expert, qui ne faisaient pas ressortir d'élément fautif supplémentaire imputable au CREDIT LYONNAIS, les premiers juges ont retenu les nombreuses fautes du CREDIT LYONNAIS au titre d'un soutien abusif et du manquement de la banque à son devoir de prudence et de conseil et en ont déduit que
l'engagement de caution d'Alain X... , disproportionné, devait être annulé tout en déboutant celui-ci de ses demandes d'indemnisation au motif qu'Alain X... ne pouvait être dédouané de toutes ses responsabilités de chef d'entreprise ;
Que dès lors qu'il a été définitivement jugé que le recours en révision était recevable et que le jugement du 18 novembre 1998 avait été surpris par la fraude du créancier - cette fraude n'ayant d'ailleurs été considérée que partiellement déterminante -, il appartient à la cour de statuer en fait et en droit sur les demandes de paiement formées par le CREDIT LYONNAIS contre Alain X... et par Alain X... contre le CREDIT LYONNAIS ;
Attendu que la fraude retenue par le jugement du 12 novembre 2001 consistait pour le CREDIT LYONNAIS à s'être "pour le moins immiscé très largement dans la gestion de W2A" et à engager M. X... dans des opérations particulièrement onéreuses et à lui faire signer un cautionnement bancaire de 6.200.000 frs tout en le faisant déclarer interdit bancaire - alors qu'Alain X... n'a fait l'objet d'une interdiction bancaire que plus d'un après avoir signé l'engagement des caution - ;
Que dans le jugement du 22 avril 2004 les premiers juges ont retenu que : - le responsable du service immobilier du CREDIT LYONNAIS poursuivait au travers de son établissement bancaire un profit personnel puisqu'ils attribuait à chaque opération financière une commission subséquente alors que ce responsable n'a bénéficié que de deux versements effectués en 1991, le 11 avril et le 31 juillet 1991, avant même le début des travaux de construction, en rétribution d'actions de commercialisation effectuées pendant un arrêt de travail d'Alain X... consécutif à un accident,- le rapport d'expertise concluait clairement à la responsabilité du CREDIT LYONNAIS dans la déconfiture de la société W2A alors que le rapport d'expertise ne
contient pas de conclusion en ce sens, - le rapport de Mme Z... soulignait l'importance des honoraires de M. X... et l'infériorité de la valeur commerciale des constructions par rapport à la valeur comptable, ce qui ne peut être retenu à faute contre le CREDIT LYONNAIS, pas plus que le fait que cette banque ait accepté de financer depuis le début l'opération immobilière car elle était le banquier des consorts B... propriétaire des terrains destinés à être lotis,- il ressortait du rapport d'enquête préliminaire du SRPJ que le CREDIT LYONNAIS avait bel et bien dirigé les sociétés W2A dans son intérêt personnel alors que Me C..., liquidateur de la société W2A, estimait dans son rapport du 16 juillet 1996 qu'il n'était absolument pas démontré que le CREDIT LYONNAIS se soit comporté en dirigeant de fait ;
Attendu que dans les conclusions déposées devant la cour, Alain X... invoque tour à tour la responsabilité du CREDIT LYONNAIS qui a soutenu abusivement la société W2A et la nullité de son engagement de caution ;
Qu'étant rappelé que le responsable du service immobilier du CREDIT LYONNAIS n'a perçu de versements de X... qu'en 1991, il n'est pas démontré que le CREDIT LYONNAIS ait poursuivi en 1993 un intérêt personnel en prêtant 6.200.000 frs à une société en difficulté pour récupérer 3.300.000 frs, une telle opération l'ayant conduit à une perte bien supérieure en l'absence de garanties sérieuses ;
Que les difficultés personnelles du gérant étaient indifférentes à la participation du CREDIT LYONNAIS au financement de l'exploitation de la société ;
Que toutefois il peut être retenu que le banquier a fait preuve d'imprudence en accordant un crédit de 6.200.00 frs sans avoir des raisons suffisantes de penser que ce crédit pourrait être remboursé par le montant des loyers escomptés ;
Attendu que si la perspective d'affecter les lots invendus à la location et non plus à la vente en souscrivant un prêt important sur le long terme n'était pas déraisonnable dans la mesure où l'immeuble était presque terminé, bon nombre d'artisans et de fournisseurs n'étant payés, la décision du CREDIT LYONNAIS d'accorder un prêt de 6.200.000 frs était imprudente en ce que à l'époque la possibilité de louer l'ensemble des lots invendus n'était pas avérée, alors que seule la location de la totalité ou de la quasi-totalité des lots permettait de dégager un revenu locatif suffisant pour honorer les mensualités de l'emprunt, un différé d'un an ayant été accordé pour louer les lots ;
Qu'en réalité la tâche de trouver des locataires était des plus ardues dans la mesure où le bâtiment construit n'était pas attractif dans la mesure où il était isolé dans une zone où le vaste lotissement projeté n'avait pas été réalisé ;
Que le CREDIT LYONNAIS avait pris sa décision au vu de l'étude réalisée à sa demande par M. Y... , certes désigné conjointement par M. X... - qui affirme sans être contredit que M. Y... lui avait été recommandé par la banque -, ces circonstances ayant conduit les premiers juges à retenir dans le jugement définitif du 12 novembre 2001 que le CREDIT LYONNAIS s'était immiscé très largement dans la gestion de W2A et que le jugement du 18 novembre 1998 avait été obtenu par les fraudes du CREDIT LYONNAIS ;
Que le prêt de 1.200.000 frs accordé en mars 1995 sur cinq ans à la demande de la société W2A a été octroyé de manière inconsidérée dès lors qu'il alourdissait considérablement la charge des remboursements auxquels la société W2A ne pouvait plus faire face depuis quelques mois et a eu pour seul effet de retarder le dépôt de bilan de quelques mois alors que la situation de la société était irrémédiablement compromise ;
Que cependant il ne peut être retenu comme ayant été préjudiciable à Alain X... dans la mesure où d'une part celui-ci n'était pas caution de ce prêt et où celui-ci ne démontre pas que le passif de la société au titre du prêt de 6.200.000 frs pour lequel il était caution se soit aggravé entre mars 1995 et juin 1996 ;
Attendu que si le CREDIT LYONNAIS a imprudemment consenti le prêt de 6.200.000 frs à la société et a en exigeant la caution d'Alain X... , causé préjudice à celui-ci, la faute d'imprudence du banquier n'exonère que très partiellement Alain X... de ses responsabilités de chef d'entreprise ;
Qu'en effet celui-ci, architecte et gérant d'une société de construction et promotion immobilière, était un professionnel de l'immobilier et avait considéré que l'option de louer les lots invendus avec l'octroi d'un prêt de restructuration à long terme était une solution viable ;
Qu'il convient dès lors de dire que la faute d'imprudence de la banque n'exonère que pour un tiers Alain X... de ses obligations ;
Attendu sur la validité de l'engagement de caution que si une disproportion pouvait exister entre le montant de la somme garantie, 6.200.000 frs, et les revenus ou le patrimoine d'Alain X... , celui-ci, gérant de la société emprunteuse, doit, pour faire prononcer la nullité de son engagement de caution, démontrer que la banque aurait eu sur ses revenus, son patrimoine, et ses facultés de remboursement raisonnablement prévisibles en l'état du succès escompté de l'opération immobilière entreprise par la société des informations que lui-même aurait ignorées, démonstration à laquelle il ne parvient pas dans la mesure où l'imprudence retenue à la charge du CREDIT LYONNAIS ne prouve pas la connaissance par la banque des informations ci-dessus visées qu'Alain X... aurait ignorées ;
Que l'acte de cautionnement doit être déclaré valable sauf à tenir
compte des dispositions de l'article 48 de la loi du 1er mars 1984 devenu l'article L 313-22 du code monétaire et financier, ce qui est possible dans le cadre du recours en révision ;
Que le CREDIT LYONNAIS ne contestant pas ce défaut d'information de la caution, il convient de déclarer la banque, dans ses rapports avec la caution, déchue des intérêts échus depuis l'octroi du prêt - dès lors qu'aucune information n'a été donnée - jusqu'à la mise en demeure adressée à la caution d'avoir à exécuter son engagement, c'est-à-dire en l'état des pièces produites jusqu'à l'assignation en paiement déclarée par le CREDIT LYONNAIS le 7 octobre 1996, date à compter de laquelle seront dus les intérêts au taux légal ;
Que l'article L 313-22 du code monétaire et financier édicte également :"les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette" ;
Qu'en application de cette disposition de paiement adressé au CREDIT LYONNAIS par le liquidateur le 4 décembre 2001 pour 1.000.000 frs sera imputé sur le principal de la dette ;
Attendu en définitive alors que le montant de la créance du CREDIT LYONNAIS admise à titre privilégié pour 7.246.738, 18 frs (1.104.758, 10 ç), arrêté au 21 juin 1996 au titre du prêt du 2 août 1993, n'est pas discuté, qu'il convient de condamner Alain X... à payer au CREDIT LYONNAIS les deux tiers de ce montant après déduction des intérêts échus avant le 7 octobre 1996 et de la somme de 1.000.000 frs (152.449, 01 ç) à imputer sur le capital à compter du 4 décembre 2001 avec pour le surplus les intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 1996 ;
Attendu qu'Alain X... n'ayant été exonéré qu'à concurrence d'un tiers de ses engagements, ses demandes de dommages et intérêts seront rejetées, dès lors qu'il est pour la plus grande part à l'origine du
dommage invoqué, étant observé au surplus que les préjudices allégués quant à la perte de ses biens immobiliers et de son navire ne sont pas en relation avec le présent cautionnement mais avec d'autres dettes, le bien immobilier principal ayant été vendu en 1992 avant même l'octroi du prêt de 6.200.000 frs, les autres biens avant l'ouverture de la procédure collective et les autres chefs de préjudice ne représentant que la contre-partie des risques pris par un chef d'entreprise ;
Qu'il n'existe pas en la cause de considération permettant d'allouer à une partie une somme sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Qu'il convient de faire masse des dépens qui seront supportés à concurrence d'un tiers par le CREDIT LYONNAIS et à concurrence des deux tiers par Alain X... ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR :
Déclare atteinte de péremption l'instance d'appel introduite contre le jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 12 Novembre 2001 suivant déclaration d'appel du 18 janvier 2002, et dit que ce jugement est passé en force de chose jugée ;
En conséquence, rétractant le jugement du 18 novembre 1998 mais réformant le jugement du tribunal de commerce de Toulouse du 22 avril 2004,
Condamne Alain X... à payer au CREDIT LYONNAIS les deux tiers de la somme de 1.104.758, 10 ç après déduction des intérêts échus avant le 7 octobre 1996 et de la somme de 152.449, 01 ç à imputer sur le capital à compter du 4 décembre 2001, avec pour le surplus les intérêts au taux légal à compter du 7 octobre 1996,
Rejette les autres demandes des parties,
Fait masse des dépens et condamne le CREDIT LYONNAIS à en supporter
un tiers et Alain X... les deux tiers avec pour ceux d'appel distraction au profit des SCP NIDECKER-PRIEU PHILIPPOT et SOREL-DESSART-SOREL, avoués. Le Greffier Le Président