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30/01/2006 | FRANCE | N°05/00042

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 30 janvier 2006, 05/00042


30/01/2006 ARRÊT No 06/16 No RG : 05/00042 Décision déférée du 14 Décembre 2004 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 03/234 GUILHEM SEM CONSTELLATION ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE SEM DE BLAGNAC CONSTELLATION C/ X...
Y...
Z...
Y... Jean Y... Josiane Y... Théodore A... SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE-GARONNE

RÉFORMATION

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

[***]

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

Chambre des Expropriations

[***]

ARRÊT DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE SIX

[***] APPELANT(S) SEM CONSTEL

LATION Anciennement dénommée SEM DE BLAGNAC CONSTELLATION , domicile élu en l'étude de Me BOUYSSOU 160 (E 11) Grande Rue S...

30/01/2006 ARRÊT No 06/16 No RG : 05/00042 Décision déférée du 14 Décembre 2004 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 03/234 GUILHEM SEM CONSTELLATION ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE SEM DE BLAGNAC CONSTELLATION C/ X...
Y...
Z...
Y... Jean Y... Josiane Y... Théodore A... SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE-GARONNE

RÉFORMATION

RÉPUBLIQUE FRANOEAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANOEAIS

[***]

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

Chambre des Expropriations

[***]

ARRÊT DU TRENTE JANVIER DEUX MILLE SIX

[***] APPELANT(S) SEM CONSTELLATION Anciennement dénommée SEM DE BLAGNAC CONSTELLATION , domicile élu en l'étude de Me BOUYSSOU 160 (E 11) Grande Rue Saint Michel 31400 TOULOUSE 5, Avenue Albert Durand Aéropole 5 BP 109 31703 BLAGNAC CEDEX Assistée de Me BOUYSSOU Avocat au barreau de TOULOUSE APPELANTS INCIDENT Monsieur X...
Y... 17, Rue Crabinet 31700 CORNEBARRIEU Assisté de Me SCOTTO D'APOLLONIA Avocat au barreau de PARIS Monsieur Z...
Y... 14, Chemin de Mandillet 31700 CORNEBARRIEU Assisté de Me SCOTTO D'APOLLONIA Avocat au barreau de PARIS

Monsieur Jean Y... 16, Rue Crabinet 31700 CORNEBARRIEU Assisté de Me SCOTTO D'APOLLONIA Avocat au barreau de PARIS Mademoiselle Josiane Y... 23, Rue Crabinet 31700 CORNEBARRIEU Assisté de Me SCOTTO D'APOLLONIA Avocat au barreau de PARIS

Monsieur Théodore A...
B... 18, Rue Crabinet 31700 CORNEBARRIEU

INTIME COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT SERVICES FISCAUX DE LA HAUTE-GARONNE Hôtel des Impôts de Rangueil 33, Rue Marvig 31404 TOULOUSE représentés par M. MONTARIOL COMPOSITION DE LA COUR C... a été débattue le 28 Novembre 2005, en audience publique, devant la Cour composée de: Président

: C. BABY, Assesseurs

: L. PARANT, juge de l'expropriation pour le département de l'Ariège, désigné par ordonnance du premier président du 3 décembre 2002

: I. MOLLEMEYER, juge de l'expropriation pour le département de Tarn et Garonne désigné par ordonnance du premier président du 18 septembre 2003 qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats : R. GARCIA ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties - signé par C. BABY, président, et par R. GARCIA, greffier de Chambre

Vu les mémoires déposés et régulièrement notifiés à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement. Vu les convocations adressées aux parties et au commissaire du gouvernement. A l'audience, le Commissaire du Gouvernement est entendu à sa demande en ses observations.FAITS ET PROCÉDURE

La création de la ZAC Monges-Croix du Sud, qui représente une emprise de 55 ha environ sur la commune de Cornebarrieu, est l'une des conséquences de l'installation à Blagnac des nouveaux ateliers destinés à la construction de l'Airbus A 380. Elle a été décidée par la communauté d'agglomération du Grand Toulouse par délibération du 7 septembre 2001, et elle a été déclarée d'utilité publique par arrêté préfectoral du 22 février 2002, l'enquête parcellaire s'est déroulée du 5 au 28 mai 2003, et les ordonnances d'expropriation sont intervenues les 10 février 2004.

L'opération concerne entre autres 3 parcelles cadastrées AS 118 et 119, lieudit "Crabinet" et AV 58, lieudit "Bel Soleil", d'une superficie globale de 6 715 m , entièrement sous emprise, et appartenant à l'indivision composée de Mlle Josiane Y... et de MM. X..., Z... et Jean Y..., M. Théodore A..., également membre de l'indivision, étant décédé en cours d'instance. Elles ne sont pas exploitées, les parcelles de la section AS sont entretenues, la troisième étant encombrée d'arbustes.

Les propriétaires n'ayant pas accepté l'offre qui leur a été faite à 10 ç/m , l'autorité expropriante a saisi le juge de l'expropriation de Toulouse, qui, par jugement du 11 janvier 2005, a retenu une valeur de 15 ç/m pour les parcelles de la section AS et 10 ç/m pour la parcelle de la section AV, soit une indemnité principale de 92 900 ç ; l'indemnité de remploi, au taux de 15 % à concurrence de 77 000 ç, et 10 % au-delà, ressortait à 13 140 ç, soit une indemnité globale de 106 040 ç, et il a été alloué 2 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'expropriante a relevé appel de cette décision par déclaration du 8 février 2005

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

L'expropriante précise que les parcelles sont, à la date de référence, soit le 21 décembre 2001, date à laquelle a été approuvée la modification du plan local d'urbanisme, classées en zone 2 AU-c, où sont interdites les constructions destinées aux activités agricoles commerciales et industrielles. Seules des habitations et équipements publics peuvent y être construites, et toute opération nécessite une superficie minimale de 2 ha. Le COS y est fixé à 0,20, et toute construction doit être raccordée au réseau public de distribution d'eau potable et au réseau collectif d'assainissement.

Elle rappelle que l'article L 13-15 du Code de l'expropriation exige qu'un terrain remplisse, pour être qualifié de terrain à bâtir, deux conditions cumulatives : une desserte suffisante par la voirie et les réseaux électrique, d'eau potable, et, le cas échéant, le réseau d'assainissement, et une situation dans un secteur désigné comme constructible par le document d'urbanisme applicable ou la décision du conseil municipal et du représentant de l'Etat dans le département en l'absence d'un tel document. A défaut de remplir ces deux conditions, le terrain doit être évalué en fonction de son usage effectif, agricole en l'espèce.

Elle considère que la condition réglementaire est présentement remplie, mais pas la condition de desserte et/ou de raccordement aux réseaux, qui doit être appréciée au regard de l'ensemble de la zone. Il est établi que la capacité de la station d'épuration doit être adaptée avant le développement de la ZAC. Il y a donc lieu de s'en tenir à l'usage effectif.

Elle reproche au premier juge d'avoir retenu pour point de départ de son raisonnement le prix de 75 ç/m , qui correspond à celui d'un petit terrain classé en zone UB-a, et d'en avoir déduit le coût d'aménagement, pour aboutir au prix de 30 ç pour les parcelles situées dans une zone à forte densité de constructions, les autres

parcelles étant évaluées, comme en l'espèce, 15, 14 ou 10 ç. Cette méthode, de même que l'évaluation par zones, propre aux terrains à bâtir, se réfère à une utilisation future, contrairement aux exigences des textes, et ne tient pas compte des contraintes résultant de la ZAC. Elle manque en outre de précision et de rigueur. Son offre de 10 ç tient compte de la plus-value imputable à la situation privilégiée, non contestée, de la parcelle en cause, la valeur d'un terrain agricole étant très inférieure. Elle cite de nombreuses cessions amiables à ce prix sur la commune.

L'indemnité principale sur cette base ressort à 67 150 ç, l'indemnité de remploi étant de 10 072,50 ç, le tout aboutissant à une valeur arrondie de 77 225 ç.

En réplique au mémoire adverse, elle maintient son analyse des accès et réseaux, partiellement insuffisants. Cette insuffisance résulte d'une étude d'un bureau spécialisé, en ce qui concerne l'assainissement, à laquelle ne peut valablement être opposée une déclaration faite en conseil municipal. Le raccordement de la ZAC au réseau de Blagnac est un pis-aller provisoire. En outre, les parcelles en cause n'atteignent pas le minimum exigé (2 ha en zone 2 AU-c) pour réaliser une opération de construction.

Elle conteste les termes de comparaison cités par l'exproprié, qui sont de petits terrains (806 à 1 035 m ) classés en zone UB-a, ou en tout état de cause des terrains à bâtir.

L'indivision expropriée forme appel incident, demandant à la cour de lui allouer le bénéfice de ses demandes de première instance, précisant cependant qu'elle retire sa demande d'indemnité de dépréciation de la parcelle AV 62, sur laquelle l'expropriante a renoncé à son emprise partielle.

Elle précise que les parcelles sont bordées par des zones bâties, qu'elles sont accessibles par des voies asphaltées, et bénéficient par voie de conséquence de la proximité des réseaux, qui sont suffisants ; le village lui-même est proche de Toulouse (16 km), mais situé hors zone de bruit de l'aéroport de Blagnac. Leur classement en zone 2 AU-c à la date de référence du 21 décembre 2001 en fait des terrains immédiatement constructibles, pour des habitations et des équipements publics. Il s'agit donc de terrains à bâtir, contrairement à ce qu'a retenu le premier juge au terme d'une analyse erronée de leur situation juridique et physique. Les réseaux sont suffisants et adaptés pour les parcelles du lieudit "Crabinet", contrairement à ce que soutient l'expropriante.

Elle critique les accords amiables cités comme termes de comparaison par l'expropriante, comme non pertinents, de qualité moindre, non localisés, ou relatifs à des ventes faites par l'épouse du maire ou le premier adjoint, ce qui en fait des prix de convenance. Les promesses de vente doivent être écartées, comme non définitives.on localisés, ou relatifs à des ventes faites par l'épouse du maire ou le premier adjoint, ce qui en fait des prix de convenance. Les promesses de vente doivent être écartées, comme non définitives.

Elle cite six termes de comparaison en zone UB-a ou non précisée, faisant ressortir un prix moyen de 75,80 ç/m .

Les termes de comparaison qu'elle cite ayant un prix moyen de 75,80 ç/m , elle propose de retenir une base de 75 ç/m pour la première zone à partir du chemin d'accès situé sur les parcelles AS 118 et 119, puis d'appliquer un abattement de 30 %, soit un prix de 52,50 ç/m pour une deuxième zone à l'arrière, et, après un nouvel abattement de 30 %, un prix de 36,75 ç/m pour le reliquat.

Le prix moyen est ainsi de 45,14 ç/m , et l'indemnité principale de dépossession s'établit à 232 462,50 ç.

Pour la parcelle AV 58, elle demande une indemnité de 20 ç/m , compte tenu de la situation privilégiée (proximité de l'agglomération, façade sur voie, situation en zone 2 AU-c), soit une indemnité de 31 300 ç.

L'indemnité de remploi aux taux retenus par le premier juge est de 30 226,25 ç.

L'indemnité globale ressort ainsi à 293 988,75 ç, et il est demandé en outre 6 000 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Mme le commissaire du gouvernement soutient que le prix de 10 ç est adapté, s'agissant de terrains de réserve : ils sont certes juridiquement constructibles, mais ne pourront être construits qu'après exécution des travaux d'aménagement nécessaires. Ils ne peuvent donc être indemnisés au prix du terrain à bâtir, et leur proximité avec des zones bâties importe peu à cet égard. Ils ne peuvent davantage l'être au prix du terrain agricole, compte tenu de leur situation privilégiée.

La valeur retenue se trouve confortée par la vente intervenue le 5 février 2003 d'un terrain de 111 855 m à Cornebarrieu au prix de 13,99 ç. Ce terrain est affecté à la construction d'immeubles collectifs réservés pour les 3/4 à l'usage d'habitation et à leurs dessertes, parkings, cours et jardins, la SHON étant de 17 243 m .

Elle demande donc à la cour de retenir l'offre, et d'allouer à l'indivision Boselli une indemnité globale de dépossession de 77 225 ç.

SUR QUOI

La recevabilité des mémoires de l'expropriée et du commissaire du gouvernement n'est pas discutée.

Aux termes de l'article L 13-13 du Code de l'expropriation , les indemnités allouées à l'exproprié doivent couvrir l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain, causé par l'expropriation.

Ni l'usage effectif agricole à la date de référence, ni la fixation de celle-ci au 21 décembre 2001, date de la modification du plan local d'urbanisme aboutissant au classement des parcelles expropriées en zone 2-AU-c ne sont discutés par les parties, non plus que les taux de calcul de l'indemnité de remploi. Celles-ci s'opposent en revanche sur la qualification de terrain à bâtir des parcelles en cause, et la valeur en découlant.

Sur la qualification de terrain à bâtir

Il convient de rappeler que l'article L 13-15-II du Code de l'expropriation, d'ordre public aux termes de l'article L 13-19 du même Code, et qui contient la définition du terrain à bâtir, la réserve aux terrains qui, à la date de référence,

"sont, quelle que soit leur utilisation, tout à la fois :

a) effectivement desservis par une voie d'accès, un réseau électrique, un réseau d'eau potable et, dans la mesure où les règles relatives à l'urbanisme et à la santé publique l'exigent ... un réseau d'assainissement, à condition que ces divers réseaux soient situés à proximité immédiate des terrains en cause et soient de dimensions adaptées à la capacité de construction de ces terrains. Lorsqu'il s'agit de terrains situés dans une zone désignée par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé comme devant faire l'objet d'une opération d'aménagement d'ensemble, la dimension de ces réseaux est appréciée à l'égard de l'ensemble de la zone ;

b) situés dans un secteur désigné comme constructible par un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé ou par un document d'urbanisme en tenant lieu ..."

Il n'est pas discuté en l'espèce que les parcelles sont juridiquement

constructibles, comme incluses dans une zone 2 AU du PLU, seule la nature des constructions autorisées étant limitée aux immeubles d'habitation et équipements publics. Il importe peu qu'elles ne totalisent pas à elles seules la superficie minimale de 2 hectares requise pour la réalisation d'une opération d'ensemble dans une telle zone : elles sont incluses dans des zones 2 AU-c dont il n'est pas prétendu qu'elles couvriraient, chacune, moins de 2 ha, et cette condition de superficie minimale ne concerne que l'aménageur, et donc l'utilisation future des parcelles, question indépendante de celle de leur qualification.

La discussion porte en revanche sur la possibilité de les raccorder à des réseaux existants et suffisants, étant précisé qu'il s'agit d'une unité foncière disposant d'une étroite façade sur la route de Pibrac, la troisième parcelle étant en façade sur le chemin de Talabot, même si son accès est rendu malaisé par un talus franchissable par un "sentier" selon l'expropriante. L'absence de desserte de cette dernière parcelle par les réseaux est admise par l'indivision expropriée.

Le texte prévoyant expressément le caractère cumulatif de la condition de desserte par une voirie suffisante et des réseaux adaptés d'une part, de la condition de constructibilité juridique d'autre part, un terrain ne peut en effet être qualifié de terrain à bâtir si l'une quelconque de ces deux conditions n'est pas remplie.

En l'espèce, c'est le raccordement au réseau d'évacuation des eaux usées qui fait surtout débat : ce raccordement est exigé, et il n'apparaît possible que pour les parcelles de la section AS. Mais la capacité de la station d'épuration elle-même est en discussion. Le courrier de la communauté d'agglomération du Grand Toulouse en date du 19 septembre 2001 ne peut manifestement pas être interprété comme le fait l'indivision : il précise que les effluents de la ZAC des

Monges sont à orienter "à terme" sur le "futur émissaire intercepteur de l'Aussonnelle" et que, dans le cas où cet "équipement ne serait pas assuré avant la mise en service des parties de la ZAC devant s'y rattacher, des refoulements provisoires vers la station de Blagnac seront assurés en utilisant la réserve de capacité de cet équipement évaluée aujourd'hui à 9 000 équivalent/habitant". Il est donc bien question d'un branchement provisoire en direction de la station d'épuration de Blagnac, dont il n'est pas précisé si elle disposait encore à la date de l'ordonnance d'expropriation à laquelle doit être appréciée la consistance des parcelles, soit trois ans après ce courrier, d'une réserve de capacité suffisante, compte tenu de l'augmentation constante de la population de l'agglomération que chacun se plait à souligner.

Le rapport établi en août 2001 par le cabinet spécialisé BCEOM indique qu'à cette date, la station d'épuration de Cornebarrieu, prévue pour 2 500 équivalent/habitant, est en surcharge, et qu'une nouvelle station doit être construite pour permettre le raccordement de la ZAC des Monges. L'expropriée précise que la population de la commune est de 5 000 habitants.

L'affirmation de la commune selon laquelle "les équipements publics sont suffisants", en réponse aux observations formulées par la DDE à l'analyse de son projet, observations suivies de modifications des documents préparés, ne constitue pas une preuve de ce caractère suffisant : le document présenté est relatif à la phase d'instruction du dossier, il a été suivi de modifications du projet initialement soumis aux services de l'Etat, et les "équipements publics" visés ne sont pas identifiés.

L'insuffisance du réseau d'assainissement, compte tenu des besoins de la zone, est donc établie.

Tous ces éléments conduisent à considérer que la qualification de

terrain à bâtir ne peut être retenue au sens des textes applicables dans le cadre de la présente instance, force est donc d'évaluer les terrains en considération de leur usage effectif, qui est agricole.

Dans ce contexte, l'évaluation par zones est inadaptée : elle postule un intérêt plus grand des parties de parcelles en bordure de voies et ayant directement accès aux réseaux, notions sans pertinence dans le cadre de zones AU où s'imposent, au moins pour les catégories AU-b et AU-c, des minima de superficie conséquents pour une opération donnée, et alors qu'il vient d'être dit que la desserte routière et les réseaux vont devoir être renforcés, voire créés, pour être adaptés aux besoins de la zone. Il ne peut être retenu un prix qui serait celui du terrain aménagé déduction faite du coût de l'aménagement :

la cour doit évaluer le terrain selon sa consistance à une date donnée, date qui se situe pour elle dans le passé, et non se livrer à l'analyse financière du projet d'aménagement ayant justifié la définition de la ZAC, et qui, sous réserve des aléas auxquels sont soumises les opérations de ce type, doit être exécuté sur les parcelles présentement expropriées.

L'expropriante admet que, eu égard à l'emplacement des parcelles dans la périphérie toulousaine et à la pression foncière dont fait l'objet toute l'agglomération, dans un contexte de hausse générale du marché immobilier, il ne peut être retenu une valeur de terrain agricole au sens strict de ce terme. Elle admet donc que l'indemnisation doit tenir compte d'une situation privilégiée, caractérisée par la proximité des zones urbanisées de Cornebarrieu en particulier et de la périphérie toulousaine en général.

Pour offrir dans ce contexte 10 ç/m , l'expropriante se fonde sur les accords amiables qu'elle a obtenus, dans certains cas à une date très proche de celle du jugement à laquelle la cour statue, dans le cadre de la même opération, et qui, s'ils n'atteignent pas les seuils fixés

par l'article L 13-16 du Code de l'expropriation, n'en constituent pas moins un terme de comparaison pertinent, d'autant que la rareté de ventes de terrains comparables, notamment par leur superficie, ne permet pas de disposer d'une grande quantité de termes de comparaison. Il n'est pas sérieux de prétendre que les termes de comparaison relatifs aux terrains vendus par l'épouse du maire et son premier adjoint devraient être écartés comme valeurs de convenance :

on ne comprendrait pas que ces personnes, dont on suggère qu'elles bénéficient d'une position personnelle privilégiée, acceptent de céder leurs biens à un prix notoirement inférieur à leur valeur, sauf à imaginer des contreparties occultes, ce que l'indivision se garde heureusement de faire.

Cette valeur apparaît cohérente avec celle de 11 ç retenue pour la ZAC Andromède, donnant lieu à des acquisitions de terrains contemporaines : la différence de 10 % est justifiée par la plus grande proximité de Blagnac par rapport à Toulouse.

Le caractère uniforme de la valorisation est enfin justifié par le fait que les particularités de nature à entraîner des différences de prix lors d'achats au coup par coup par des particuliers (qualité de l'accès, de l'emplacement, de l'orientation, intérêt des dimensions, etc ...) n'ont pas un intérêt déterminant pour les opérateurs du marché susceptibles d'intervenir dans le cadre d'une opération globale d'aménagement, seule possible ici.

La situation des termes de comparaison cités par l'expropriante n'est donc pas un obstacle à leur prise en compte, certains étant à proximité immédiate des parcelles en cause.

A l'inverse, les termes de comparaison cités par l'expropriée ne peuvent être considérés comme pertinents : il s'agit toujours de parcelles de dimension adaptée à la construction d'une maison individuelle, en lotissement ou au moins toujours en zone UB, sans

rapport avec des terrains insuffisamment, voire non équipés, et soumis aux contraintes d'une ZAC.

En l'absence d'informations pertinentes permettant de considérer qu'elle n'est pas de nature à réparer l'entier préjudice matériel de l'exproprié, la valeur de 10 ç sera donc retenue pour l'ensemble des parcelles concernées, soit une indemnité principale de 67 150 ç.

Sur l'indemnité de remploi

Elle n'est pas contestée en son principe, ni en ce qui concerne les taux applicables, soit 15 % à concurrence de 77 000 ç et 10 % au-delà. L'indemnité est donc en l'espèce de 10 072,50 ç.

Sur ces bases, l'indemnité globale ressort donc à 77 222,50 ç, arrondis à 77 225 ç.

En l'état d'une réformation dans un sens favorable à l'expropriante, l'équité n'impose pas d'indemniser l'expropriée des frais irrépétibles exposés par elle devant la cour, les dispositions correspondantes du jugement étant cependant confirmées.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant à la date du jugement déféré,

Le réforme sur l'indemnité de dépossession allouée,

Fixe l'indemnité globale de dépossession revenant à l'indivision composée de Mme Josiane Y..., de MM. Z..., Jean et X...
Y..., ainsi que des ayants-droit de M. Théodore A..., à la somme de 77 225 ç (soixante dix sept mille deux cent vingt cinq euros),

Rejette toutes autres demandes des parties,

Dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en cause d'appel,

Condamne l'indivision Bos-Lachambre aux dépens d'appel en application

de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER

LE PRÉSIDENT

R. GARCIA

C. BABY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 05/00042
Date de la décision : 30/01/2006
Sens de l'arrêt : Autre

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2006-01-30;05.00042 ?
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