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24/11/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946999

France | France, Cour d'appel de Toulouse, Ct0036, 24 novembre 2005, JURITEXT000006946999


24/11/2005 ARRÊT No760 No RG : 04/04001 RM/FS Décision déférée du 21 Juin 2004 - Conseil de Prud'hommes de MAZAMET () J. NAVARRO Sylvie X... C/ SA VALEO VISION

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale

ARRÊT DU VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE CINQ

APPELANT(S) Monsieur Sylvie X... 1, rue Malpas 81100 CASTRES représenté par M. Philippe Y... (Délégué syndical ouvrier) INTIME(S) SA VALEO VISION 34, rue Saint André 93012 BOBIGNY représentée par M

e Michel CAVALLIER, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions...

24/11/2005 ARRÊT No760 No RG : 04/04001 RM/FS Décision déférée du 21 Juin 2004 - Conseil de Prud'hommes de MAZAMET () J. NAVARRO Sylvie X... C/ SA VALEO VISION

INFIRMATION

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

4ème Chambre Section 1 - Chambre sociale

ARRÊT DU VINGT QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE CINQ

APPELANT(S) Monsieur Sylvie X... 1, rue Malpas 81100 CASTRES représenté par M. Philippe Y... (Délégué syndical ouvrier) INTIME(S) SA VALEO VISION 34, rue Saint André 93012 BOBIGNY représentée par Me Michel CAVALLIER, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions de l'article 945.1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 01 Mars 2005, en audience publique, devant R. MULLER, président, chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : R. MULLER, président C. PESSO, conseiller J.P. RIMOUR, conseiller Greffier, lors des débats : P. MARENGO ARRET : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile - signé par R. MULLER, président, et par P. MARENGO, greffier de chambre.

EXPOSE DU LITIGE Sylvie X... a été mise à la disposition de la société VALEO VISION par l'entreprise temporaire VEDIOR BIS pour différentes missions par 64 contrats à partir du 8 novembre 1999 et jusqu'au 21juin 2002. Sylvie X... a ensuite été embauchée par VALEO par contrat à durée déterminée du 1er juillet 2002 au 31 janvier 2003, renouvelé par avenant du 1er février au 18 juillet 2003. Par acte du 2 septembre 2003 Sylvie X... a saisi le conseil des prud'hommes de Mazamet aux fins de voir requalifier son contrat de travail a durée déterminé en contrat à durée indéterminée, d'obtenir paiement de l'indemnité prévue à l'article L 122-3-13 du code du travail , de voir dire et juger qu'elle a été licenciée sans cause réelle et sérieuse et d'obtenir paiement de diverses indemnités. VALEO VISION (ci-après VALEO) s'est opposée à ces prétentions et par jugement en date du 21 juin 2004 le conseil des prud'hommes de Mazamet à débouté Sylvie X... de toutes ses prétentions pour une motivation laconique ne répondant nullement aux moyens et arguments des parties. Sylvie X... a régulièrement interjeté appel de ce jugement dont elle sollicite la réformation et demande à la cour : 1o) de requalifier en contrat à durée indéterminée les contrats à durée déterminée dès lors qu'elle a été mise à disposition afin de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de VALEO et que la rédaction du contrat à durée déterminée du 1er juillet 2002 ne satisfait pas aux exigences de l'article L 122-3-1 du code du travail ; 2o) de

condamner VALEO, outre aux dépens, à lui payer les sommes de :

- 2 784,16ç au titre du préavis ;

- 506,24ç au titre de l'indemnité de licenciement ;

- 1 265,53ç au titre de la requalification du contrat de travail ;

- 12 655ç au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. VALEO conclut à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de l'appelante aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000ç en soutenant que la législation relative au travail temporaire a été parfaitement respectée, que très souvent Sylvie X... a été mise à la disposition non pas de VALEO, mais de fournisseurs de VALEO afin de trier sur son site certaines pièces pour le compte de ces fournisseurs, que contrairement à ce qu'elle affirme Sylvie X... n'a pas pourvu durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, enfin que le contrat à durée déterminée signé par Sylvie X... était parfaitement régulier et conforme à la réglementation, son poste de travail (agent de fabrication) étant désigné. MOTIFS DE L'ARRET : I- Sur la requalification des contrats

A- sur la requalification des contrats de mission Aux termes du premier alinéa de l'article L 124-2 du code du travail, le contrat de travail temporaire ne peut avoir ni pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement à un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice. Selon le second alinéa de ce texte il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, dénommée "mission" et seulement dans les trois cas limitativement énumérés à l'article L 124-2-1 du dit code (remplacement de salarié, accroissement d'activité, emploi saisonnier) par établissement d'un écrit comportant la définition précise de son motif et contenant diverses mentions obligatoires. Sylvie X... soutient qu'elle a pourvu durablement un emploi lié

à l'activité normale et permanente de VALEO, plus particulièrement de fin août 2001 jusqu'à la fin de son dernier CDD en exposant

- que les différentes missions relevaient d'un même emploi, même si elle a occupé des postes différents ;

- qu'en particulier elle a occupé de fin août 2001 jusqu'en mars 2002 le poste 2448 "feux stop sur les Renault Scénic" et à partir de cette date jusqu'au18 juillet 2003 le poste 4204 "plaques éclairantes de Ford Mondéo"

- qu'elle a donc pourvu durablement un emploi dans l'entreprise ;

- que cet emploi était lié d'une part à l'activité normale de l'entreprise puisque durant toute la période considérée 6 activités lui ont été exclusivement proposées, d'autre part, à l'activité permanente de l'entreprise. L'examen détaillé des contrats de mission produits révèle que jusqu'au 3 mars 2000 l'entreprise utilisatrice désignée dans les contrats de mission n'était pas exclusivement VALEO, mais le plus souvent des sociétés de sous-traitances qui exerçaient leurs prestations sur le même site, de manière autonome ; que ces sociétés n'étant pas partie à l'instance la requalification des dix contrats de mission concernés n'est pas sérieusement envisageable. Pour les contrats de mission dans lesquels VALEO était l'entreprise utilisatrice force est de constater qu'ils répondent aux exigences légales et notamment aux cas de recours limités à l'exécution de tâche non durable et aux exigences de forme. Ceux relatifs au remplacement d'un salarié absent portent toujours le motif du recours, le nom et la qualification du salarié absent, les caractéristiques particulières du poste à pourvoir et un terme précis. Les postes de travail mentionnés dans le contrat étaient parfois identiques, même si le salarié remplacé n'était pas le même, parfois différents. Ceux relatifs à un accroissement temporaire d'activité (5 entre le 22 novembre 1999 et 23 décembre 1999, 2 du 3

septembre 2001 au 5 octobre 2001) mentionnent toujours le motif du recours et sa justification : constitution d'un stock de sécurité, incident qualité nécessitant des opérations de tri en 1999, retard de fabrication suite à des congés payés de salariés en 2001. Les contrats ne sont pas critiqués dans leur forme par l'appelante, qui soutient seulement qu'elle a occupé durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise dans la mesure où les différentes missions relevaient d'un même emploi et qu'elle a occupé un même poste de travail de fin août 2001 à mars 2002, puis un autre poste de mars 2002 à juillet 2003 ; Pour écarter cette argumentation il suffira de relever :

* que Sylvie X... ne soutient pas - et à fortiori n'établit pas - que le salarié qu'elle remplaçait aux termes du contrat de mission n'était pas réellement absent ;

* que Sylvie X... fait un amalgame non pertinent entre l'emploi d'agent de fabrication et la tâche exécutée ;

* que certes Sylvie X... a parfois exécuté pendant une certaine durée la même tâche, ne correspondant pas toujours à celle du salarié qu'elle remplaçait, mais que l'entreprise utilisatrice n'est pas tenue d'affecter le salarié intérimaire à la tâche même réalisée par la personne absente, l'employeur ne faisant qu'user de son pouvoir de direction en affectant par glissement le remplaçant à d'autres tâches suivant l'organisation de l'entreprise et la compétence particulière des salariés permanents présents ;

* que des périodes d'interruption ont séparé les contrats de mission, non seulement de courtes durées (très nombreuses interruptions de 2 à 3 jours), mais également de très longues durées (par exemple du 23 décembre 1999 au 4 mars 2000, du 9 juin 2000 au 30 juillet 2001) ;

* qu'il n'apparaît donc pas que Sylvie X... - dont la situation doit seule être analysée - ait bénéficié d'un renouvellement

systématique de son engagement pour effectuer une tâche toujours identique et pourvoir ainsi un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise.

B - Sur la requalification des contrats à durée déterminée Sylvie X... a été embauchée par VALEO par contrat à durée déterminée du 1er juillet 2002 au 31 janvier 2003, renouvelé par avenant du 1er février 2003 au 18 juillet 2003. Sylvie X... soutient tout d'abord que ce contrat ne satisfait pas aux dispositions de l'article L 122-3-1 du code du travail qui exige que le contrat mentionne le poste de travail occupé, qu'en effet il stipule en son article 4 qu'elle pourra être affectée à divers postes correspondant à la nature de son emploi, défini à l'article 3 comme étant celui d'agent de fabrication. VALEO réplique que Sylvie X... est de parfaite mauvaise foi dès lors que le poste occupé par celle-ci est un poste d'agent de fabrication affecté à la fabrication de pièces commercialisées par VALEO pour la sortie de véhicule Scénic et Clio C3 et 206 break, ce qui implique une polyvalence en fonction des différentes phases du processus de fabrication.

*

*

* Il convient de rappeler, en droit, que le contrat de travail à durée déterminée ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, qu'il ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas énumérés à l'article L 122-1-1 du code du travail. (remplacement d'un salarié absent, accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise,

emploi à caractère saisonnier) qu'il doit être établi par écrit, comporter la définition précise de son motif, la désignation de l'emploi et du poste de travail occupé. En l'espèce il apparaît que le contrat de travail à durée déterminée signé le 1er juillet 2002 par les parties ne satisfait pas aux exigences de l'article L 122-3-1 du code du travail. En effet s'il mentionne qu'il est conclu "en raison du surcroît d'activité sur le Scénic et Clio sport et la mise en fabrication de produits nouveaux tels queEn effet s'il mentionne qu'il est conclu "en raison du surcroît d'activité sur le Scénic et Clio sport et la mise en fabrication de produits nouveaux tels que le C3 et 206 break au sien de l'UAP d'assemblage" et s'il précise que Sylvie X... sera employée en qualité d'agent de fabrication de niveau II- échelon 1 - coefficient 170, force est de constater qu'il ne mentionne pas le poste de travail pour lequel Sylvie X... était recrutée et devait être affectée, alors que cette indication est non seulement légale, mais encore nécessaire pour savoir si une formation particulière doit en matière de sécurité être donnée au salarié recruté. L'omission de cette mention obligatoire justifie, en application de l'article L 122-3-13 du code du travail, la requalification du contrat conclu le 1er juillet 2002 en contrat à durée indéterminée, requalification qui s'impose d'autant plus en l'espèce qu'il résulte des propres explications fournies par VALEO que Sylvie X... devait être affectée à divers postes de travail correspondant à la nature de son emploi en fonction des exigences de production et donc qu'elle devait dans les faits pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, le surcroît d'activité allégué n'étant absolument pas justifié par un quelconque élément de preuve qu'aurait fourni VALEO. II- sur les demandes en paiement

A - Sur l'indemnité de requalification Aux termes de l'article L

122-3-13 alinéa 2, Sylvie X... est en droit d'obtenir, à la suite de la requalification de son contrat de travail une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire. Dès lors que sa demande porte sur un mois de salaire, soit 1 265,53ç, il y a lieu d'y faire droit.

B - Sur les indemnité consécutives à la rupture des relations contractuelles Du fait de la requalification du contrat du 1er juillet 2002 à durée indéterminée et de l'absence de lettre de licenciement énonçant un quelconque motif justifiant la rupture du contrat, celle-ci apparaît dépourvue de cause réelle et sérieuse et ouvre droit au bénéfice de Sylvie X... à - une indemnité compensatrice de préavis, dont le montant (2 784,16ç) n'est pas discuté par VALEO ; -une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse dont le montant, s'agissant d'un employé ayant moins de 2 ans d'ancienneté (les contrats de mission non requalifiés ne constituant pas de période de travail entrant en compte dans l'évaluation de l'ancienneté dès lors que durant cette période Sylvie X... était salariée non de VALEO mais de l'entreprise de travail temporaire), peut être fixée en fonction du préjudice subi et compte tenu de la difficulté pour Sylvie X... de retrouver un emploi dans un bassin d'emploi déprimé à 4 800ç. Par contre Sylvie X... ne peut prétendre à une indemnité légale de licenciement dès lors qu'elle n'avait pas au jour de la rupture 2 ans d'ancienneté et qu'aucune disposition conventionnelle plus favorable à Sylvie X... que l'article L 122-9 du code du travail ne trouve à s'appliquer. PAR CES MOTIFS La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, Déclare l'appel régulier en la forme et recevable, Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau : Rejette la demande de Sylvie X... tendant à la requalification des contrats de mission en contrat de travail à durée

indéterminée ; Requalifie le contrat de travail conclu entre le parties le 1er juillet 2002, et son avenant, en contrat de travail à durée indéterminée. Condamne le société VALEO VISION à payer à Sylvie X... une indemnité de 1 265,53ç par application de l'article L 122-3-13 alinéa 2 du code du travail ; Dit et juge que la rupture du contrat est imputable à l'employeur et qu'elle est dépourvue de cause réelle et sérieuse ; Condamne en conséquence la société VALEO VISION à payer à Sylvie X... les sommes de 2 784,16ç à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 4 800ç à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Déboute les parties de leurs prétentions plus amples ; Condamne la société VALEO-VISION aux dépens d'instance et d'appel. Le présent arrêt a été signé par monsieur MULLER président et madame MARENGO greffier, Le greffier,

Le Président P. MARENGO

R. MULLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : Ct0036
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946999
Date de la décision : 24/11/2005

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Formalités légales - Mentions obligatoires - Motif du recours - Précision - Portée - /

Le contrat de travail à durée déterminée doit être établi par écrit, comporter la définition précise de son motif, la désignation de l'emploi et du poste de travail occupé. L'indication de cette dernière mention est non seulement légale mais encore nécessaire pour savoir si une formation particulière en matière de sécurité doit être donnée au salarié recruté. L'omission de cette mention obligatoire justifie la requalification de ce contrat en contrat à durée indéterminée d'autant qu'il s'agissait dans les faits de pourvoir un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2005-11-24;juritext000006946999 ?
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