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04/11/2005 | FRANCE | N°05/02146

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 4ème chambre section 2- chambre sociale, 04 novembre 2005, 05/02146


04/ 11/ 2005 ARRÊT No591 No RG : 05/ 02146 GD/ MR Décision déférée du 10 Mars 2005- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE 04/ 01622 GIRARD X...Dario C/ SOCIETE STAR SERVICE PARIS STAR AG
CONFIRMATION PARTIELLE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
***
ARRÊT DU QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE CINQ
*** DEMANDEUR AU CONTREDIT Monsieur X...Dario ... 31320 VIEILLE TOULOUSE Comparant en personne représenté par Me Catherine CARRIERE-GIVANOVITCH, avocat au barreau de TOULOUSE DEFENDERESSE

S AU CONTREDIT SOCIETE STAR SERVICE PARIS 21-23 rue de la Vanne 92120 MONTROUGE rep...

04/ 11/ 2005 ARRÊT No591 No RG : 05/ 02146 GD/ MR Décision déférée du 10 Mars 2005- Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE 04/ 01622 GIRARD X...Dario C/ SOCIETE STAR SERVICE PARIS STAR AG
CONFIRMATION PARTIELLE
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4ème Chambre Section 2- Chambre sociale
***
ARRÊT DU QUATRE NOVEMBRE DEUX MILLE CINQ
*** DEMANDEUR AU CONTREDIT Monsieur X...Dario ... 31320 VIEILLE TOULOUSE Comparant en personne représenté par Me Catherine CARRIERE-GIVANOVITCH, avocat au barreau de TOULOUSE DEFENDERESSES AU CONTREDIT SOCIETE STAR SERVICE PARIS 21-23 rue de la Vanne 92120 MONTROUGE représentée par Me Sandrine BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS STAR AG Wiesholz 35- Postfach CH-8262 RAMSEN SUISSE représentée par Me Sandrine BOURDAIS, avocat au barreau de PARIS COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions de l'article 945. 1 du nouveau Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Septembre 2005, en audience publique, devant, G. DARDÉ, président et C. PESSO, conseiller, chargés d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de : G. DARDÉ, président C. PESSO, conseiller C. CHASSAGNE, conseiller Greffier, lors des débats : D. FOLTYN-NIDECKER
ARRET :- CONTRADICTOIRE-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxieme alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile-signé par G. DARDÉ, président, et par D. FOLTYN-NIDECKER, greffier de chambre.
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur X...Dario né le 02 août 1955 conclu avec le groupe STAR AG le 28 août 2000'un contrat cadre en qualité de traducteur indépendant.
Le Groupe emploie plus de 11 salariés.
Par courrier recommandé en date du 18 juin 2004, la Société STAR lui a notifié la rupture de son contrat de traducteur indépendant au motif qu'il n'a pas respecté ses engagements.
Monsieur X...a saisi le Conseil de Prud'hommes de Toulouse le 24 juin 2004 en réclamant la requalification de son contrat en contrat de travail, des salaires, des indemnités de congés payés, de préavis, de licenciement et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par Jugement du 10 mars 2005, le Conseil de Prud'hommes estimant que le lien de subordination n'était pas établi, s'est déclaré incompétent au profit du Tribunal de Grande Instance de Paris.
Par déclaration au greffe du 15 mars 2005, Monsieur X...Dario a régulièrement formé un contredit à l'encontre de ce jugement qui lui a été notifié le 18 mars 2005.
PRÉTENTIONS ET MOYENS
Monsieur X...Dario conclut à la réformation du jugement entrepris et demande à la Cour de constater l'existence d'un lien de subordination et de déclarer le Conseil de Prud'hommes de TOULOUSE compétent pour connaître de ce litige qui s'inscrit selon lui dans l'exécution d'un véritable contrat de travail.
A l'appui de ses prétentions, il fait valoir :
- que le Conseil de Prud'Hommes s'est contenté d'indiquer à tort que " le lien de subordination n'était pas établi " sans motiver sa décision de sorte que cela équivaut à une absence de motif au sens de l'article 455 du Nouveau Code de Procédure Civile.
- que la société STAR devait lui fournir régulièrement du travail pendant les quatre années de leur collaboration de sorte qu'elle n'a pas agi comme un donneur d'ouvrage dans le cadre d'un contrat de sous-traitance mais comme un employeur exerçant son pouvoir de direction à l'égard de son salarié,
- qu'il ne disposait d'aucune autonomie dans la détermination de la rémunération de ses prestations d'autant moins qu'en vertu de la jurisprudence établie, la rémunération à la tâche n'est pas incompatible avec l'existence d'un contrat de travail.
- que la Société exerçait sur son travail un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction en lui adressant notamment des avertissements de sorte qu'il était indiscutablement soumis à un lien de subordination juridique permanente à son égard.
- qu'il était soumis à un rapport hiérarchique au sein du groupe ce qui limitait notamment sa responsabilité de sorte qu'il était intégré dans le cadre d'un service organisé au sein du Groupe STAR.
- qu'ayant été embauché par la Société mère, STAR AG, il était également soumis à un lien de subordination à l'égard d'une filiale, STAR SERVICES PARIS, de sorte qu'en vertu de la jurisprudence correspondante, il était le salarié de ces deux sociétés qui constituaient à son égard un seul et même employeur.

*
Les Sociétés STAR SERVICES FRANCE et STAR AG concluent à la confirmation du jugement entrepris dans toutes ses dispositions et demandent à la Cour de :
"- se déclarer incompétente au profit du Tribunal de Grande Instance de Paris en application des articles L 511-1 du Code du Travail et 75 du Nouveau Code de Procédure Civile,- et de débouter Monsieur X...de l'ensemble de ses demandes ".
Elles réclament également le paiement de 3. 500 ç au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
A l'appui de leurs prétentions, elles font valoir :
- qu'en vertu de l'article L 511-1 du Code du Travail, le Conseil de Prud'hommes n'est compétent pour connaître que des seuls litiges nés à l'occasion d'un contrat de travail de sorte qu'en l'espèce, Monsieur X...ne rapportant pas la preuve de l'existence d'un lien de subordination juridique permanente, c'est à bon droit que les premiers juges se sont déclarés incompétents au profit du Tribunal de Grande Instance de Paris.
- que l'inscription de Monsieur X...au répertoire des métiers établit une présomption de non salariat et qu'il ne rapporte pas la preuve contraire consistant en l'existence d'un lien de subordination.
- que la rémunération de Monsieur X...ne présente aucun caractère forfaitaire de sorte qu'elle correspond aux caractéristiques du contrat d'entreprise, de même que la possibilité d'avertissement et les pénalités dues en cas d'éventuel retard, ces sanctions financières étant incompatibles avec un contrat de travail.
- qu'il ne rapporte aucun élément de preuve du pouvoir qu'elles auraient eu de lui donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements hors les pouvoirs normaux attribués à un donneur d'ordre vis-à-vis de son prestataire de sorte que Monsieur X...procède à une requalification de sa relation de travail et du contrat d'entreprise afin de justifier ses allégations erronées.
SUR QUOI,
LA COUR,
Vu les articles 80, 82, 86, 88, 95 et 96 du nouveau Code de procédure civile, L. 120-3 et L. 511-1 du code du travail,
Attendu que le premier juge s'étant déclaré incompétent seul le contredit est ouvert contre cette décision même si, pour statuer ainsi sur l'exception qui lui était soumise, il a dû trancher préalablement partie de la question du fond ; que ce contredit, motivé et régularisé dans le délai imposé par la loi est donc recevable ;
Attendu cependant que le Conseil de Prud'hommes qui a estimé que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail devait en conséquence, non point se déclarer incompétent, mais rejeter purement et simplement la demande, par application de l'article L 511-1 du code du travail, puisque les prétentions émises par le demandeur étaient alors dans le raisonnement du juge purd'homal forcément mal fondées dès lors qu'elles sont incompatibles tant dans leur cause que dans leur objet avec les rapports de droit des parties ainsi appréciés ;
Attendu surtout qu'en se déclarant incompétent le juge doit nécessairement, par application de l'article 95 alinéa 2 du nouveau Code de procédure civile désigner le juge de renvoi s'il n'ya pas application de l'alinéa 1er de ce texte, ce qui était ici le cas ; que cependant si le juge prud'homal peut relever que les parties ne se trouvent pas dans un rapport de droit né d'un contrat de travail, il ne peut en revanche rechercher la nature véritable de ces relations qui commande la désignation du juge de renvoi par une décision qui s'impose à lui ;
Attendu que le juge de renvoi ne pouvant être saisi de la sorte, que de la demande initiale, par hypothèse fondée sur l'exécution d'un contrat de travail, il se trouverait donc dans le cas d'un renvoi par le juge prud'homal en présence de prétentions incompatibles avec la matière ayant motivé sa saisine ;
Attendu que dans tous les cas le jugement contredit doit donc être réformé en ce qu'il a renvoyé les parties devant un juge désigné, alors que la demande telle que formulée à l'origine ne peut plus être maintenue dans l'instance qui se poursuit et doit être nécessairement réintroduite sur un autre fondement, la décision du juge prud'homal ayant autorité de chose jugée au fond en application de l'article 95 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour prétendre soumettre ses prétentions au Conseil de Prud'hommes le demandeur doit démontrer qu'il est lié par un contrat de travail à l'une ou l'autre des sociétés qu'il poursuit.
Attendu qu'il n'est pas discuté
Attendu qu'il n'est pas discuté que Dario X...réalisait dans ses rapports contractuels avec ces sociétés une prestation de travail sur ordre en contrepartie d'une rémunération ; que cependant si ces deux éléments sont des conditions nécessaires pour caractériser un contrat de travail, ils ne sont pas suffisants puisqu'il faut en outre que ces rapports s'organisent dans un lieu de subordination de celui qui travaille à celui qui le commande et le contrôle dans une relation d'autorité ;
Attendu que la qualification donnée au contrat par les parties n'est pas en elle-même déterminante, le juge devant en cas de litige, rechercher la nature véritable de leurs rapports juridiques eu égard aux circonstances de fait dans lesquelles le contrat s'exécute ; qu'ainsi en l'espèce, si en se qualifiant dans l'acte de " traducteur indépendant, Dario X...qui est immatriculé au répertoire des métiers en cette qualité, tombe dès lors sous le coup de la présomption posée par l'article L. 120-3 du code du travail écartant le contrat de travail, la preuve contraire par l'existence d'un lien de subordination en l'espèce expressément exclu peut toujours être rapportée et admise ; que dans tous les cas cependant la volonté des parties exprimée dans l'acte au delà des termes employés doit rester déterminante pour se garder de toute dénaturation du contrat ;
Attendu qu'il n'est pas sans intérêt de relever que le traducteur, selon la volonté des parties exprimée dans l'acte, doit accepter les commandes qui lui sont proposées par le donneur d'ordre et sa rémunération est effectuée au moyen de notes d'honoraires sur factures ce qui, contrairement au salarié laisse aux parties la liberté de s'affranchir des règles d'ordre public imposées par le code du travail ; qu'en outre il est expréssement stipulé qu'après exécution de son travail le traducteur doit en garantir la qualité et en cas d'erreur lors du contrôle par le donneur d'ordre s'engage à effectuer les corrections gratuitement, ce qui implique une prestation de travail complémentaire sans aucune rémunération, alors qu'en matière de contrat de travail, tout travail appelle forcément salaire quelle qu'en soit la qualité ;
Attendu qu'au delà des termes employés il apparait d'ores et déjà à l'analyse de l'acte que les parties n'ont pas eu la volonté de se placer dans un rapport de subordination, incompatible avec la position de celui qui se ferait rémunérer par son employeur au moyen de factures impliquant nécessairement la perception d'un impôt et la tenue d'une comptabilité par le salarié ;
Attendu que cette volonté n'a pas été remise en cause par les circonstances dans lesquelles les parties ont exécuté l'acte dans la réalité et qui excluent à l'évidence tout lien de subordination ;
Attendu en effet que Dario X...qui n'était pas rémunéré selon le temps de travail mais seulement en fonction d'un résultat dont la valeur est appréciée par le donneur d'ordre assume seul ainsi le risque économique de ce qui ne peut être que son entreprise, qui lui permet à défaut d'éléments personnels de recourir en cas de besoin à un sous-traitant, situation incompatible avec un rapport de subordination dont l'exclusion résulte encore de la manière dont le traducteur s'organise pour notamment interrompre momentanément son activité pour congés au moment le plus compatible avec sa charge de travail et en ayant seulement l'obligation d'en informer l'autre partie sans avoir à obtenir préalablement son autorisation ;
Attendu qu'à ce stade de l'analyse et en l'état des constatations ainsi faites Dario X...ne parvient pas à combattre la présomption relevée plus haut par des éléments de fait caractérisant l'autorité et le contrôle du donneur d'ordre autrement que sur la qualité de la prestation, contrôle qui se conçoit évidemment au delà du seul contrat de travail de la part de celui qui a payé un service ; qu'ainsi sont inopérants pour faire triompher la thèse du demandeur les éléments qu'il présente pour relever la réalité du contrôle auquel il était soumis y compris les avertissements qui ne pouvaient dans ce contexte avoir le caractère d'une sanction disciplinaire mais seulement valoir comme mise en garde sur la poursuite des relations contractuelles eu égard à la qualité contestée de la prestation ; que les préoccupations du donneur d'ordre insatisfait, qui réclame des explications et donne des avertissements ou même inflige des pénalités ne sont pas spécifiques au rapport de subordination, de multiples contrats pouvant assortir de pénalités l'inexécution des obligations à la charge des parties, le caractère disciplinaire de cette pratique n'apparaissant que comme la conséquence du rapport de subordination et non point la cause.
Attendu que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail, mais réformé, comme analysé plus haut, en ce qu'il n'a pas procéduralement tiré les conséquences exactes de cette décision.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Déclare le contredit recevable mais non fondé,
Confirme le jugement prononcé par le Conseil de Prud'hommes de Toulouse le 10 mars 2005 mais seulement en ce qu'il a relevé que les parties n'étaient pas liées par un contrat de travail.
Réformant pour le surplus
Rejette la demande en ce qu'elle est fondée sur un contrat de travail inexistant,
Condamne le demandeur au paiement des dépens de première instance et de contredit.
Condamne Dario X...à payer indivisément aux sociétés défenderesses la somme de 1. 000 ç en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par M. DARDÉ, président et par Mme FOLTYN-NIDECKER, greffier.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT Dominique FOLTYN-NIDECKER
Gilbert DARDÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Formation : 4ème chambre section 2- chambre sociale
Numéro d'arrêt : 05/02146
Date de la décision : 04/11/2005
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, FORMATION - Définition - Qualification donnée au contrat - Portée - /

Lorsqu'il estime que les parties ne sont pas liées par un contrat de travail, le juge prud'homal ne doit pas se déclarer incompétent bien que saisi d'une exception à cette fin, mais rejeter la demande. En effet, d'une part les prétentions émises par le demandeur sont nécessairement mal fondées puisque motivées par une relation contractuelle erronée et, d'autre part, s'il se déclare incompétent, le juge prud'homal doit désigner le juge de renvoi par application de l'article 96 al. 2 du NCPC, ce qui l'oblige à rechercher le véritable contrat liant les parties alors que cette recherche est exclue par l'article L 511-1 du Code du travail Enfin, la décision d'incompétence s'imposant au juge de renvoi, celui-ci peut se trouver en situation délicate face à une demande d'origine qui n'est plus en cohérence avec la décision prud'homale.


Références :

L 511-1

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2005-11-04;05.02146 ?
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