La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/09/2004 | FRANCE | N°2003/01703

France | France, Cour d'appel de Toulouse, 09 septembre 2004, 2003/01703


09/09/2004 ARRÊT N°371 N°RG: 03/01703 Décision déférée du 06 Mars 2003 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 200002579 PELLARIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Chambre Section 1

***

ARRÊT DU NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE

*** APPELANT(E/S) Monsieur X... Monsieur Y... Monsieur Z... Monsieur A... représentés par la SCP MALET, avoués à la Cour assistés de Me DE CAUNES, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(E/S) SCI E Madame B... Monsieur C... Monsieur D... SCI E...

représentés par la SCP NIDECKER PRIEU, avoués à la Cour assistés de Me AZAM, avocat au barreau de TOULOUSE M...

09/09/2004 ARRÊT N°371 N°RG: 03/01703 Décision déférée du 06 Mars 2003 - Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE - 200002579 PELLARIN

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D'APPEL DE TOULOUSE

2ème Chambre Section 1

***

ARRÊT DU NEUF SEPTEMBRE DEUX MILLE QUATRE

*** APPELANT(E/S) Monsieur X... Monsieur Y... Monsieur Z... Monsieur A... représentés par la SCP MALET, avoués à la Cour assistés de Me DE CAUNES, avocat au barreau de TOULOUSE INTIME(E/S) SCI E Madame B... Monsieur C... Monsieur D... SCI E... représentés par la SCP NIDECKER PRIEU, avoués à la Cour assistés de Me AZAM, avocat au barreau de TOULOUSE Monsieur F... représenté par la SCP SOREL DESSART SOREL, avoués à la Cour assisté de Me Jerôme MARFAING DIDIER, avocat au barreau de TOULOUSE SCP K représentée par la SCP NIDECKER PRIEU, avoués à la Cour assistée de la SCP SIMON,JOLLY, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR L'affaire a été débattue le 09 Juin 2004 en audience publique, devant la Cour composée de : J.P. SELMES, président V. VERGNE, conseiller Z... BABY, conseiller qui en ont délibéré. Greffier, lors des débats :

X... THOMAS ARRET : - contradictoire - prononcé publiquement par J.P. SELMES - signé par J.P. SELMES, président, et par X... THOMAS, greffier présent lors du prononcé.

Attendu que par jugement en date du 6 mars 2003, le Tribunal de Grande Instance de TOULOUSE, après avoir effectué un exposé des faits constants, et en particulier des circonstances dans lesquelles avait été élaborée et montée en 1989 une opération de promotion immobilière qui avait pour objet la réalisation et la revente d'un ensemble immobilier, ainsi que de la procédure suivie et des prétentions et moyens des parties, exposé auquel il est, en tant que de besoin, fait expressément référence, a

. déclaré recevable l'action des consorts X..., Y..., Z... et A...

. dit que la SCP K avait commis une faute déontologique et un manquement à son obligation de conseil et que les associés de la SCI E n'avaient pas respecté leurs engagements pris en assemblée générale . mais dit que les consorts X..., Y..., Z... et A... ne démontraient pas de lien de causalité entre les fautes invoquées et les préjudices allégués et les a donc déboutés de leurs demandes de dommages-intérêts ;

. dit qu'il n'y avait lieu ni à dommages-intérêts ni à application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que Messieurs X..., Y..., Z... et A..., appelants de ce jugement, en sollicitent la réformation en ce qu'il a considéré que le lien de causalité entre les fautes retenues et les préjudices allégués n'était pas établi et demandent en conséquence à la Cour à la Cour de condamner solidairement la SCI E, les associés de celle-ci et la SCP K à payer

. 89.563,80 euros à Monsieur X...

. 34.546,17 euros à Monsieur Y...,

. 33.843,68 euros à Monsieur A...

. 102.674,41 euros à Monsieur Z...

. 2.000 euros à chacun d'eux en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la SCI E, Madame B..., venant aux droits de son mari André B... aujourd'hui décédé, Monsieur C..., Monsieur D... et la SCI E..., tous quatre associés de la SCI E demandent à la Cour

. à titre principal, de déclarer irrecevable l'action des appelants, . à titre subsidiaire, de confirmer sur le fond le jugement déféré en ce qu'il a débouté les appelants de leurs demandes, sauf à préciser que la SCI E et les associés de cette SCI n'ont commis aucune faute susceptible d'engager leur responsabilité, que le préjudice des appelants n'est pas établi et qu'il n'existe aucune lien de causalité entre leur éventuel préjudice et le comportement des intimés

Qu'il sollicitent en outre la condamnation des appelants à leur verser une indemnité de 5.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que Monsieur F..., autre associé de la SCI E, conclut également, à titre principal, à l'irrecevabilité de l'action des appelants et à

leur condamnation à lui verser la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

Attendu que la SCP K demande à la cour de dire et juger que les appelants ne rapportent la preuve ni d'une faute commise par elle ni d'un préjudice en relation de causalité avec cette prétendue faute et, en conséquence, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les appelants des demandes dirigées contre elle ;

Qu'elle sollicite en outre l'allocation d'une indemnité de 3.000 euros en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

SUR QUOI

Vu les conclusions signifiées et déposées par les appelants, par la SCI E et quatre des ses associés, par Monsieur F..., et par la SCP K, respectivement le 24 mars 2004, le 5 mai 2004, le 5 mai 2004 et le 16 décembre 2003,

Attendu que s'agissant d'abord des demandes dirigées contre la SCI E et les personnes associées au sein de celle-ci, l'action ainsi engagée par les appelants doit s'analyser, au résultat de leurs écritures susvisées, et ainsi qu'ils l'expliquent, comme une action en responsabilité exercée, sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code Civil, par quatre associés de la SCI L à l'encontre d'autres associés de la même SCI ;

Attendu qu'au soutien de ces demandes, les appelants font valoir (notamment aux pages 20 et 21 de leurs conclusions susvisées) qu'en

ne procédant pas, contrairement à leurs engagements résultant, notamment, de l'acte constitutif de la SCI, à l'apport en compte courant qui avait été stipulé, la SCI E et les personnes associées au sein de cette SCI ont ainsi manqué à leurs obligations et ont ainsi placé la SCI L dans des difficultés de trésorerie très importantes qui sont en définitive à l'origine de l'échec de l'opération immobilière dont il s'agissait et de la mise en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire de la SCI L ;

Qu'ils formulent en outre (pages 11 à 15 de leurs écritures) un certain nombre de griefs à l'encontre des notaires associés au sein de la SCI E ;

Qu'ils expliquent que cette défaillance et ces fautes leur ont occasionné un préjudice direct important et qu'il sont ainsi en droit de venir réclamer à leur associé une indemnisation au titre de la perte des investissements qu'ils avaient, chacun, originairement effectué dans l'opération ainsi qu'une indemnisation au titre du manque à gagner subi en conséquence de l'échec de l'opération immobilière et de leur préjudice moral ;

Que le montant des dommages-intérêts réclamés par chacun des appelants et ci-dessus rappelés est d'ailleurs le résultat, pour l'essentiel, du calcul des bénéfices que chacun d'eux espérait pouvoir retirer de l'opération compte tenu de son apport initial et dont il estime avoir été privé du fait de la défaillance de la SCI E ;

Mais attendu que le préjudice ainsi décrit par les demandeurs eux-mêmes, qui consiste donc en la perte des apports que chaque associé demandeur avait effectué à la SCI L et en la perte des gains escomptés de l'opération immobilière que cette société avait pour objet de réaliser, ne constitue en réalité rien d'autre que le préjudice que la SCI L a elle-même subi en conséquence de l'échec de

l'opération immobilière dont il s'agissait et de sa déconfiture, et que le préjudice invoqué par les appelants à titre personnel, simples associés de la SCI L, ne peut s'en distinguer ou ne peut, tout au plus, qu'en constituer un simple corollaire qui ne peut leur ouvrir un droit propre à agir en réparation directement à l'encontre de leur co-associé, étant ajouté qu'ils invoquent, outre un préjudice économique, un préjudice moral mais sans même expliquer ce en quoi pourrait consister ce préjudice ;

Attendu, dès lors, que même à supposer que soit établi un lien de causalité direct et certain entre d'une part la défaillance de la SCI E et les fautes reprochées par les appelants aux notaires associés au sein de cette SCI E et d'autre part la déconfiture de la SCI L et ses conséquences, les demandes des appelants, en tant qu'associés au sein de la SCI L, ne peuvent, ainsi que le soutiennent à juste titre la SCI E et les personnes associées au sein de celle-ci, qu'être déclarées irrecevables et qu'il est en conséquence sans utilité d'examiner plus avant les autres moyens et arguments développés par les parties, et en particulier par les appelants, relativement à ces réclamations, notamment quant à la nature et la consistance exactes des fautes reprochées à la SCI E et aux membres associés de celle-ci ;

Attendu que s'agissant ensuite des demandes des appelants en ce qu'elles sont dirigées à l'encontre de la SCP de notaires K, demandes dont l'objet est d'obtenir la condamnation solidaire de cette SCP avec les autres intimés à réparer le même préjudice que celui- ci-dessus exposé et analysé, il y a lieu tout d'abord de noter que la SCP K ne conteste pas leur recevabilité ;

Attendu que les appelants, dans leurs écritures susvisées (pages 15 et 16), reprochent à cette SCP

. d'une part d'avoir rédigé un certain nombre d'actes relatifs à l'opération dont il s'agissait et notamment l'acte constitutif de la SCI L alors que certains de ses membres associés, par l'intermédiaire de la SCI E, étaient parties prenantes, à titre personnel, de cette opération, attitude qui, outre qu'elle a constitué un manquement à une obligation déontologique fondamentale pour une société professionnelle de notaires, a entraîné dans l'esprit des autres associés de la SCI L une confusion quant à la nature, professionnelle ou privée, de l'intervention, des notaires associés au sein de la SCI E ;

. d'autre part d'avoir manqué à son devoir de conseil en n'informant pas les autres associés de la SCI L des risques de l'opération et surtout des conséquences de la défaillance de la SCI E dans son obligation d'apport et des actions à intenter sur ce point ;

Mais attendu qu'à supposer que ces fautes ainsi reprochées à la SCP soient démontrées, force est de constater que les appelants ne rapportent pas la preuve de l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre d'une part lesdites fautes et d'autre part l'échec de l'opération immobilière dont il s'agissait et la déconfiture de la SCI L dont ils demandent réparation des conséquences préjudiciables ; Attendu, en effet, qu'en admettant même que la participation à titre personnel de certains membres de la SCP de notaires dont il s'agit à l'opération du ... ait pu entraîner une certaine confusion dans l'esprit des autres associés quant à la nature, privée ou professionnelle, de l'intervention des associés de la SCI E, on ne peut que relever que les appelants (qui, dans leurs explications intitulées "sur le lien de causalité" aux pages 16 à 20 de leurs

écritures, s'attachent principalement et exclusivement à tenter de démontrer l'existence d'un lien de causalité entre la défaillance de la SCI E sans son obligation d'apport en compte courant et la déconfiture de la SCI L) n'expliquent ni ne démontrent ce en quoi cette circonstance a pu jouer un rôle direct dans l'échec de l'opération et le dépôt de bilan de la SCI L, pas plus qu'ils n'expliquent et ne démontrent ce en quoi les manquements au devoir de conseil ci-dessus formulés, à les supposer avérés, ont eu à cet égard une incidence ;

Attendu que sur ce dernier point, il convient de relever que les premiers juges ont très justement et très opportunément souligné

. que l'opération dont il s'agissait avait un caractère fortement spéculatif qui résultait de sa nature même et qui était au demeurant rappelé dans les actes

. que la plupart des associés et notamment les appelants (contrairement à ce que ceux ci soutenaient et persistent à soutenir en cause d'appel) avaient déjà l'expérience d'opérations immobilières comparables à celles du 27, rue L et que les risques inhérents à des opérations de cette nature étaient nécessairement connus de tous les associés et que, d'ailleurs, si la SCP est effectivement rédactrice des actes dont il s'agit, il n'est pas pour autant établi, contrairement à ce que soutenaient et persistent à soutenir les appelants en cause d'appel (pages 12 et suivantes de leurs écritures), qu'elle soit elle-même à l'origine du montage juridique qui avait été réalisé

Qu'il n'est en outre nullement expliqué ce en quoi le fait que la SCP n'ait pas attiré l'attention des associés de la SCI sur les conséquences de la défaillance de la SCI E dans son obligation

d'effectuer son apport en compte courant et sur les actions à intenter sur ce point a pu avoir une incidence sur les difficultés de la SCI L qui ont conduit cette dernière au dépôt de bilan ;

Attendu, par ailleurs, que les premiers juges ont clairement montré, par des motifs qui ne peuvent qu'être approuvés (page 10 du jugement déféré) que les difficultés de la SCI L étaient liées à divers éléments, très précisément analysés par un rapport d'audit KPMG, tout à fait étrangers à la fois aux défaillances de la SCI E dans son obligation d'effectuer un apport en compte courant et aux manquements reprochés à la SCP de notaires ;

Que sur ce point, il y a lieu, en réponse aux conclusions des appelants, de souligner simplement que si le courrier de Monsieur G... (expert comptable) en date du 28 juillet 2003 et le rapport de maître N (rapport au demeurant assez bref), largement invoqué par les appelants, font certes état de l'importance de l'impayé que représentait l'apport en compte courant non réalisé par la SCI E, ces documents, et notamment le rapport de Maître N, évoquent eux aussi d'autres causes de difficultés (retards d'achèvement du programme, travaux complémentaires non prévus, contentieux avec diverses entreprises... ) et qu'ils ne permettent certainement pas, en tout cas, d'établir un véritable lien de causalité direct certain et décisif entre la défaillance de la SCI E et l'échec de l'opération immobilière dont il s'agissait ;

Attendu qu'au total les réclamations formées par les appelants en ce qu'elles sont formées à l'encontre de la SCP K apparaissent en toute hypothèse non fondées et doivent être écartées, de sorte que le jugement déféré, en ce qui concerne ces demandes, doit être confirmé ;

Attendu qu'il apparaît équitable, en cause d'appel, d'allouer à la SCI E, à Monsieur F... et à la SCP K une indemnité de 1.200 euros pour

chacun d'eux en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Réformant partiellement le jugement déféré,

Déclare irrecevables les réclamations formées par les appelants à l'encontre de la SCI E et des associés au sein de cette SCI,

Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions non contraires y ajoutant,

Condamne in solidum les quatre appelants, en application de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, à verser à la SCI E, à Monsieur F... et à la SCP K une indemnité de 1.000 euros pour chacun d'eux,

Condamne les appelants aux entiers dépens et accorde à la SCP NIDECKER etamp; PRIEU-PHILIPPOT et à la SCP SOREL-DESSART, qui le demandent, le bénéfice de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par G... SELMES, président et par Mme THOMAS, greffier présent lors du prononcé.

Le Greffier

Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 2003/01703
Date de la décision : 09/09/2004

Analyses

SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE

Le préjudice qui est invoqué par des associés d'une SCI à l'appui d'une action en responsabilité exercée à l'encontre de leurs co-associés et qui consiste en la perte des apports qu'ils avaient effectués à la SCI L et en la perte des gains escomptés de l'opération immobilière que cette société avait pour objet de réaliser, ne constitue rien d'autre que le préjudice subi par la SCI L elle-même subi en conséquence de l'échec de cette opération immobilière, dont il ne peut se distinguer ou dont il ne peut tout au plus constituer qu'un corollaire qui ne peut leur ouvrir un droit propre à agir en réparation directement à l'encontre de leurs co-associés


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.toulouse;arret;2004-09-09;2003.01703 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award